The Project Gutenberg eBook of Dictionnaire d'argot fin-de-siècle This ebook is for the use of anyone anywhere in the United States and most other parts of the world at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this ebook or online at www.gutenberg.org. If you are not located in the United States, you will have to check the laws of the country where you are located before using this eBook. Title: Dictionnaire d'argot fin-de-siècle Author: Charles Virmaître Release date: August 7, 2018 [eBook #57656] Language: French Credits: Produced by Hilary Caws-Elwitt, Christian Boissonnas, Hugo Voisard, The Internet Archive/Canadian Libraries and the Online Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr) *** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK DICTIONNAIRE D'ARGOT FIN-DE-SIÈCLE *** Produced by Hilary Caws-Elwitt, Christian Boissonnas, Hugo Voisard, The Internet Archive/Canadian Libraries and the Online Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr) DICTIONNAIRE D’ARGOT FIN-DE-SIÈCLE _À Francisque SARCEY_ HOMMAGE RESPECTUEUX CH. VIRMAITRE. DICTIONNAIRE d’Argot FIN-DE-SIÈCLE PAR CHARLES VIRMAITRE [Illustration] PARIS A. CHARLES, LIBRAIRE 8, RUE MONSIEUR-LE-PRINCE, 8 1894 À MON CHER ET HONORÉ CONFRÈRE FRANCISQUE SARCEY _Permettez-moi de vous prier d’accepter l’hommage de ce volume. Je suis persuadé que le nom du maître critique lui portera bonheur._ _J’ai essayé de faire juste, sans, comme mes devanciers, écarter volontairement des termes risqués._ _Je les ai écrits comme ils sont employés dans les milieux auxquels je les emprunte._ _Pour écrire mes précédents ouvrages, j’ai dû vivre dans ces milieux, depuis l’atelier jusqu’aux bouges les plus infects, inconnus des chercheurs, et où, d’ailleurs, nul n’oserait s’aventurer sans danger._ _C’est donc un Dictionnaire vécu, étudié sur le vif. S’il n’est pas aussi savant que ceux de MM. Jean Rigaud, Alfred Delvau et Lorédan Larchey, il a au moins le mérite de n’être pas fantaisiste; il n’est pas l’écho atténué par une pudibonderie par trop Bérengeriste des expressions en usage depuis des siècles._ _Des dames à un certain bal célèbre, mirant leur chemise au vestiaire, j’ai fait comme elles, ce sera moins beau sûrement, mais c’est aussi nature._ _TO BE OR NOT TO BE_ _Veuillez agréer, mon cher Maître, mes remerciements et l’expression de mes sentiments de confraternité._ _CH. VIRMAITRE._ _Mon cher Confrère,_ _Vous m’avez fait grand plaisir en vous souvenant du goût que j’ai toujours montré pour les études de linguistique. J’aime les locutions d’argot, dont beaucoup sont très pittoresques; au lieu de les proscrire toutes, comme font les dégoûtés, nous devrions avoir à cœur de choisir les plus expressives et de les introduire dans la conversation de la bonne compagnie, d’où elles passeraient dans le Dictionnaire de l’Académie, qui leur donnerait ainsi leurs lettres de naturalisation._ _Je vous remercie et vous serre la main._ _FRANCISQUE SARCEY._ PRÉFACE Avant que les bonnes feuilles de ce Dictionnaire ne me tombassent sous les yeux, je ne connaissais guère, je dois le dire à ma honte, que l’argot de Méténier et celui de Bruant. Je dois confesser que mon éducation était incomplète. Et comme je crois que beaucoup sont dans mon cas, il est de toute évidence que ce Dictionnaire est destiné à rendre les plus grands services aux femmes du monde qui vont, au cabaret du Mirliton, quérir des émotions un peu faisandées, et qui en reviennent mélancolieuses, oh! combien! et le cœur tout en pantenne, les pauvres chères! de ce qu’elles n’ont pas goûté, n’ayant pas compris, toute la boue dont, à leur passage dans son bouge, les éclaboussa l’habile cabot-limonadier. ⁂ Quel beau livre, quel livre puissant, de quel haut intérêt, et de quelle portée morale, philosophique et sociale, il y aurait à écrire sur l’argot! Quels coins de voile il soulève sur ce monde mystérieux, inconnu, inquiétant, si loin de notre société bourgeoise, sur ce monde du crime, où le vol et l’assassinat portent cyniquement le même nom que la retape de la fillasse: le turbin! Le turbin c’est-à-dire le TRAVAIL!!! Ah! nos lois! nos règlements! nos conventions! Ah! nos morales! nos vertus! nos devoirs! Ah! nos Codes, nos gendarmes! A quels antipodes! ⁂ Il y a dans l’argot l’histoire de tout un monde, il y a la psychique de tout un peuple qui pense, croit et agit tout contradictoirement à nous, de même qu’il parle une autre langue que nous, une langue difficile à saisir, en dépit de tous les dictionnaires, parce que sa mobilité est en raison directe des efforts faits par les profanes pour la pénétrer. Je n’ai ni le temps, ni l’autorité qu’il siérait pour essayer d’écrire, en tête de ce livre, le Commentaire qu’il faudrait. Je ne veux, je ne puis que tenter quelques considérations sur ce qu’est l’argot, au point de vue philologique, et sur la manière dont se forme et se déforme, encore aujourd’hui, ou plutôt se transforme en se déformant ce vocabulaire d’une richesse si colorée et si sapidement et intensément pittoresque. ⁂ Les dictionnaires d’argot, publiés jusqu’à présent, n’ont pas assez, me semble-t-il, insisté sur les modes de recrutement et de transformation des vocables argotiques. Or, précisément, ce côté philologique m’a tout de suite paru, à moi, profane, comporter un intérêt de premier ordre. Je sais bien qu’il faudrait tout un livre pour écrire, expliquer et commenter la longue et si accidentée histoire philologique de l’argot, dont les compétents font remonter les origines jusqu’au XII^e siècle. Toutefois, à défaut de cette étude savante il y a tout au moins à donner la formule de la mobilité de cette langue, qui, à dix ans de distance, devient presque méconnaissable et quasi incompréhensible pour qui n’en suit pas les évolutions et n’en connaît pas le mécanisme. ⁂ L’argot est un langage artificiel, un vocabulaire de convention. Riche d’un fond de vieux mots français, latins, ou d’importation étrangère (par le fait, par exemple, des guerres), l’argot, je le répète, est une langue essentiellement bougeante et fugace. Cette mobilité est obtenue par divers principaux procédés, tels que: déformation de mots existants, substitution de mots, apport de suffixes divers. Le procédé de déformation le plus curieux est celui qui consiste à remplacer la première lettre d’un mot par la lettre _l_, à la rejeter à la fin du mot, et à terminer le mot par un suffixe, comme _oque_, _ique_, _ème_, _onche_, _uche_. C’est ainsi que le mot «fou» a produit _loufoque_. L’_f_ de _fou_, remplacée par un _l_ et passant à la fin du mot, a formé _louf_, radical auquel est venu s’ajouter le suffixe _oque_, soit _loufoque_. C’est pareillement que _linvé_ vient de _vingt_, le _v_, remplacé par l’_l_, est passé à la fin du mot, et le _t_ est disparu euphoniquement. Quelquefois le suffixe s’intercale dans le mot. Caler, mourir, devient _calancher_, par l’addition du suffixe _anche_, qui est un suffixe courant en argot, comme _ique_ et _oque_. Exemple: boutique, qui fait _bouloque_ et _boutanche_. Un autre suffixe, qu’on retrouve un peu partout, est la syllable _quin_. Roux = _rouquin_. _Lance_, eau, fait _lancequine_ et _lancequiner_ pleuvoir. Le suffixe _go_ entre dans la composition de beaucoup de mots: _icigo_ pour ici, remplaçant _icicaille_ qui est très vieux; _sergot_, _mendigot_, etc. ⁂ L’argot s’enrichit de mots nouveaux par la méthode des synonymes et par métaphores. C’est à dire, à plus exactement parler, que les choses et les gens sont désignés par une de leurs propriétés, une de leurs fonctions, la plus saillante: une montre devient une _toquante_, parce qu’elle fait toc, toc; un juge s’appelle un _endormi_, un avocat un _bavard_; l’avocat général l’_avocat bêcheur_, une corde _ligottante_. Les dérivations par synonymes, donnent parfois des résultats qui déconcertent de prime abord. Comment expliquer que _taupe_, femme, vient de _marmite_, qui désigne également la femme. C’est que _marmite_, par substitution de finale est devenue _marmotte_, et que _marmotte_, ayant éveillé l’idée d’animal qui dort sous terre, est un terme cousin germain de _taupe_. Une des conséquences à laquelle, par ce procédé, on arrive vite, est le calembourg. L’argot y a aussi recours pour se modifier. C’est ainsi que Saint-_Esprit_ devient Sainte-_Essence_, le portier _cloporte_, les latrines le _numéro 100_. Suivant cet ordre d’idée, l’expression _passer à tabac_, doit venir logiquement de _chiquer_ qui en argot signifie _battre_; _chiquer_ éveillant tout naturellement l’idée de tabac. ⁂ N’y aurait-il pas tout un chapitre à écrire sur la poésie de certaines expressions, telle que _blanchette_ qui veut dire hiver, telle que _brouillotte_ qui signifie la nuit? Et sur l’esprit de certaines locutions imagées? _Coucher sur la plume de Beauce_, n’est-ce pas joli pour dire «coucher sur de la paille»! Quand la fille qui fait la retape _rechasse_ les passants (les reluque si vous voulez) pour les allumer, on dit qu’elle _distribue son prospectus_. Et combien d’autres? ⁂ Ce Dictionnaire vient à son heure, il est l’expression exacte de la langue actuelle qu’on parle couramment dans les bouges. Il émane de la plume d’un qui a beaucoup retenu, après avoir beaucoup vu. Virmaitre est plus qu’un écrivain documentaire, c’est le Document lui même. Il est le seul homme de Paris qui a été partout, là même, là surtout, où la police, éventée à distance, n’entre pas. Il a rapporté de cette ballade de touriste dans le tréfond de Paris, tout une œuvre d’un arôme spécial. Que si ces clichés photographiques effarouchent quelques pudeurs, au moins ont-ils pour eux d’être d’une exactitude absolue, puisqu’ils ont été pris sur le vif. Ce _Dictionnaire d’Argot fin-de-siècle_, en dépit, et peut-être à cause, du cynisme de certains vocables, et du pittoresque violent de certaines locutions, n’est pas le moins curieux morceau de sa collection. LÉO TRÉZENIK. EXPLICATIONS Il est inutile de chercher les origines de l’argot, car tous les auteurs qui ont essayé de les découvrir sont en parfait désaccord. D’ailleurs, où commence l’argot, où finit-il? Chaque jour ce langage se forme, se déforme et se transforme. Ce qu’il faut reconnaître et simplement constater, c’est qu’il est des plus anciens. Il existe depuis la création des associations de filous, de voleurs et de mendiants; ils avaient en effet besoin d’un langage conventionnel pour se comprendre entre eux, sans que le vulgaire non initié pût saisir le véritable sens de leurs conversations. ⁂ Le mot _Argot_ dérive-t-il du grec _Argos_, d’_Argus_ emblème de la vigilance; de la vieille expression _Narquot_ (mendiant), de _Ragot_, truand du XVI^e siècle, du mot _Argu_, finesse, etc., etc? Cela importe peu. Ce qu’il faut considérer c’est que l’usage de l’argot est passé dans nos mœurs, dans toutes les classes de la société; on en retrouve des expressions dans la langue courante. Nous avons l’argot des _voleurs_, des _souteneurs_, des _filles de la rue_ et du _demi-monde_, des _ateliers_, des _bouchers_, des _coulisses_, du _peuple_, des _troupiers_, des _bohêmes_, des _gens de lettres_, des _saltimbanques_, des _joueurs_, des _boursiers_, des _typographes_, des _bourgeois_, des _musiciens_, des _mendiants_, _etc._, _etc._ ⁂ Si les expressions employées dans ces divers milieux diffèrent sensiblement comme étymologie et comme sens, tout en signifiant la même chose, c’est que cette langue est très riche; elle est si riche que pour exprimer le mot _tête_, par exemple, il existe plus de vingt vocables: _Trogne_, _caboche_, _bobine_, _fiole_, _caillou_, _bouillotte_, _cafetière_, _couache_, _poire_, _hure_, _sorbonne_, _olive_, _nord_, _baptême_, _trompette_, _globe_, _binette_, _cabéche_, _etc._, _etc._ ⁂ L’étude de l’argot a tenté de grands écrivains, mais ils n’ont pu réussir à pénétrer dans les profondeurs de ce mystérieux langage. Vidocq, le célèbre voleur, fut, dans notre siècle, le premier initiateur populaire de l’argot; il était placé pour cela, il avait vécu dans le monde des prisons, au bagne, à la Force, et pendant qu’il fut chef de la sûreté, il vit défiler devant lui tous les chefs de bandes célèbres. Après lui sont venus MM. Alfred Delvau, Jean Rigaud et Loredan Larchey. Je ne parle pas des auteurs qui n’ont fait qu’emprunter les expressions de nos devanciers, en commettant de grossières erreurs sur le sens et la valeur des mots, erreurs qui prouvent qu’ils n’ont rien pris sur le vif, et qu’ils se sont contentés d’employer les mots tels qu’ils les avaient entendus. Ainsi, l’un d’eux dit _cadelle_ pour _cadenne_ (chaîne); _brouter_ (manger), pour _prouter_ (colère). C’est à l’infini. ⁂ Au XVI^e siècle, l’argot avait pris une telle extension que l’on songea à modifier ce langage et à l’unifier. Ce travail fut confié aux _archi-suppôts_, titre que prenaient les _cagoux_, principaux officiers du roi des Truands. Voici ce que dit à ce sujet Ollivier Chéreau: «... En un mot, ce sont les plus scavants, les plus habiles _marpauts de toutime l’argot_, qui sont des escoliers desbauchez et quelques _ratichons_ de ces coureurs qui enseignent le _jargon à rouscailler bigorne_ qui ostent, retranchent, réforment l’argot, ainsi qu’ils veulent, et ont ainsi une puissance de _trucher sur le toutime_ sans _ficher floutière_.» ⁂ La méthode suivie par mes devanciers a ceci de particulier: c’est qu’ils se sont évertués à attribuer à telles ou telles personnalités la paternité des expressions nouvelles. Cela n’est pas juste, car l’argot ne s’étudie pas dans les livres, il s’étudie dans les rues, dans les ateliers, dans les bouges, en un mot dans tous les mondes où il est la langue usuelle. ⁂ C’est le peuple qui est le véritable créateur de la _langue verte_, c’est lui qui trouve chaque jour des mots nouveaux pour exprimer sa pensée; ce qu’il recherche avant tout, c’est la figure qui frappe, l’image qui détermine l’objet ou la chose qu’il veut désigner, voilà la raison pour laquelle l’argot est si pittoresque, ne repose sur aucune règle fixe et n’appartient à personne parce qu’il appartient à tous, à la masse. ⁂ Dans un atelier, deux ouvriers causent, l’un dit à l’autre: —Tu ne finiras pas ton travail? L’autre lui répond: —Non, c’est que je _tousse_. L’apprenti qui a entendu dans les faubourgs dire d’un homme qui _pète_: «Il est _enrhumé_» transforme l’expression; au lieu de dire: _c’est que je tousse_, il dit: _c’est que je pète_. Les deux expressions restent, la dernière complète la première, et toutes deux sont dans la circulation pour exprimer la même pensée. À qui appartiennent-elles? à tout le monde. Qu’importe au peuple que les étymologistes se torturent la cervelle pour prouver que _gogo_ vient de _gaudium_ et _baragouiner_ du Bas-Breton? Pour lui _gogo_ est un imbécile, voilà tout. ⁂ Dans ce _Dictionnaire d’Argot_ j’ai procédé d’une toute autre manière que mes prédécesseurs; je ne cite personne, parce que, je le répète, c’est le peuple qui est l’auteur de tous les mots d’argot en usage. Depuis dix ans que je travaille à ce Dictionnaire, j’en ai étudié les expressions sur le vif, dans les prisons, dans les ateliers, dans les bas-fonds, dans le monde des filles de la rue et des filles de la haute, et ailleurs; j’ai acquis la certitude qu’attribuer à quelqu’un telles ou telles expressions c’est contraire à la vérité. Je me contente d’indiquer à la suite de chaque mot à quel argot il est emprunté et dans quel milieu il est en usage. ⁂ Certainement, j’ai employé des expressions brutales, grossières, mais je n’en suis pas cause; pour être un photographe fidèle; je ne devais pas tourner autour du pot, je ne devais pas hésiter à soulever le couvercle. C’est ce que j’ai fait. Le parfum du fricot ne sera peut-être pas du goût de tout le monde, je le regrette; il y en a qui aiment l’odeur de la peau d’Espagne et d’autres qui lui préfèrent celle du vidangeur. Toutes deux sont aussi bonnes l’une que l’autre, la peau d’Espagne a fait la fortune du parfumeur, et la merde celle du vidangeur. D’ailleurs, une expression n’est grossière que lorsqu’elle est voulue; quand elle employée pour déterminer un objet, un fait, un individu elle perd sa grossièreté pour passer à l’état d’image, et dans cinquante ans ce qui paraît brutal aujourd’hui paraîtra sûrement anodin. ⁂ Si, à l’époque où l’on poursuivait _Madame Bovary_ on nous avait dit qu’en 1894, l’Académie française accorderait quatorze voix à l’auteur de _Germinal_, de _Nana_ et de l’_Assommoir_, on aurait conspué l’audacieux prophète. A tout il faut s’attendre pour ne s’étonner de rien. Je remercie mes collaborateurs du concours qu’ils ont bien voulu me prêter pour accomplir ce travail; pour être conséquent avec mon système, je n’en nomme aucun, car il en est qui ne voudraient pas voir figurer leurs noms à côté de ceux de Gamahut, d’Abadie et d’autres célèbres voleurs et assassins qui ont été pour moi des lexicographes. CH. VIRMAITRE. NOUVEAU Dictionnaire d’Argot SIGNES ABRÉVIATIFS Les noms suivis des initiales _L L_ donnent les explications de M. Lorédan Larchey; _A D_ celles de M. Alfred Delvau. Les erreurs des autres auteurs cités par ces messieurs ne valant pas la peine d’être relevées, je les passe sous silence. Toutes les expressions nouvelles, ou celles à qui j’ai restitué leur véritable sens sont suivies de la lettre _N_. A =ABATTRE=: Faire des dettes, _L. L._ _Abattre_ veut dire faire beaucoup d’ouvrage.—C’est un ouvrier habile, il en _abat_ en un jour plus que ses compagnons en une semaine (Argot du peuple). =ABATTAGE=: (En recevoir un) être grondé à en être _abattu_. Équivalent à recevoir un _gras_, un _suif_, en un mot, à être _enlevé_ (Argot du peuple). _N._ =ABATTAGE=: (en avoir) être grand, fort, d’une taille à dominer.—Il a de l’_abattage_, il peut frapper fort (Argot du peuple). _N._ =ABADIS= ou =ABADIE=: =V.= _Trépe_. =ABAT-RELUIT=: Cette expression désigne la visière placée sur la casquette des vieillards ou des gens faibles de la vue pour adoucir l’intensité de la lumière (Argot des voleurs). =ABATIS=: Les pieds ou les mains. Dans le peuple, on dit d’un individu mal conformé: Il a des _abatis_ canailles, ou encore il a des _abatis_ à la manque. Quand deux hommes se battent, la foule dit du plus faible: il peut numéroter ses _abatis_ (Argot du peuple). =ABATTOIR=: Lieu où l’on _abat_ les animaux; les prisonniers ont donné ce nom au cachot des condamnés à mort (Argot des voleurs). =ABBAYE DE S’OFFRE-A-TOUS=: =V.= _Bocard_. =ABBAYE DE MONTE-À-REGRET=: La guillotine. L’expression peut se passer d’explications: ceux qui y montent le font sûrement à regret (Argot des voleurs). =ABBAYE DE CINQ PIERRES=: Les cinq dalles de granit placées devant la Roquette, sur lesquelles on monte l’échafaud. Lacenaire dédia ces strophes à ces cinq dalles: Oh! je vous connais bien, dalles qui faites place Aux quatre pieds de l’échafaud. Dalles de pierres blanches ou ne reste plus trace Du sang versé par le bourreau. =ABBAYE RUFFIANTE=: Four chaud, dans lequel les vêtements des prisonniers sont passés au soufre pour détruire la vermine (Argot des voleurs). =ABÉQUEUSE=: Maîtresse d’hôtel ou nourrice: elles donnent la becquée. Cette expression s’applique depuis peu aux voleuses qui dévalisent les magasins de nouveautés en se servant d’un enfant. Ce vol nécessite trois personnages: la mère, la nourrice et le _momignard_. Tous trois entrent dans un magasin. La mère se fait montrer les étoffes. Elle détourne l’attention du commis par un manège quelconque. Profitant de ce moment, elle fait tomber à terre une pièce d’étoffe. La nourrice se baisse, comme pour y déposer l’enfant un instant, et cache prestement l’objet sous la pelisse du petit. Aussitôt elle le pince fortement. L’enfant crie comme un possédé. Elle fait semblant d’essayer de le calmer, mais elle le pince encore plus fort. Ses cris redoublent. Alors la mère témoigne une impatience très vive. —Te tairas-tu, lui dit-elle; allez-vous en, nourrice. Nous reviendrons une autre fois. Leur manière d’opérer se nomme le _vol à la nourrice_ (Argot des voleurs). _N._ =ABBESSE=: Maîtresse d’une maison de tolérance. Allusion aux filles qui sont cloîtrées connue dans un couvent (Argot du peuple). =ABÉTI=: Lourd, pâteux, nonchalant. Mot à mot: _abruti_ par des pratiques personnelles ou de naissance (Argot du peuple). _N._ =ABLOQUER=: Acheter en tas, en _bloc_. Les brocanteurs _bloquent_ un tas de marchandises des plus disparates (Argot des camelots). =V.= _revidage_. =ABONNÉ AU GUIGNON=: Déveine persistante, qu’aucun effort ne peut conjurer. On dit aussi: «Il a si peu de chance qu’il se _noierait dans un crachat»_ (Argot du peuple). =ABOULER=: Se dit dans le peuple d’un récalcitrant qui ne veut pas payer; _abouler_ la monnaie. —_Aboulez_ donc, mon vieux, faut y passer. On dit aussi à quelqu’un qui attend: Un peu de patience, il va _abouler_ (Argot du peuple). =ABOYEUR=: Nom donné dans les prisons à l’auxiliaire chargé d’appeler les détenus à voix haute pour le greffe ou pour l’instruction. Ce nom est également donné aux crieurs qui, dans les ventes publiques, _aboient_ la mise à prix des objets à adjuger (Argot des voleurs). =ABREUVOIR=: La boutique du marchand de vins où les ouvriers ont l’habitude chaque matin de boire la goutte. Quand la station a été trop prolongée, que l’homme rentre au logis _éméché_ dans les grandes largeurs, la ménagère lui dit d’un ton rogue: As-tu assez _abreuvé_ ton cochon? (Argot du peuple). =ACCAGNARDIR= (s’): Être indolent qui s’amuse à des bagatelles, qui piétine sur place et dormirait, comme dit le proverbe, le cul dans la rivière par dix degrés au-dessous de zéro (Argot du peuple). =ACCIDENTIER=: Voleur qui profite des _accidents_, et sait au besoin les faire naître pour dévaliser ceux qui en sont les victimes. Le voleur s’empresse autour du blessé, et pendant que lui et un de ses complices le portent chez le pharmacien, ils dévalisent le pauvre diable en route. Ce genre de vol est nouveau (Argot des voleurs). _N._ =ACCORDAILLES=: Synonyme de _fiançailles_; il y a toutefois une légère nuance: elles se font généralement sans le secours du maire; les conjoints ne sont pas liés par l’écharpe municipale (Argot du peuple). _N._ =ACCORDEUR DE FLUTES=: Juge de paix (Argot du peuple). =V.= _Bâton_. =ACCOUCHER=: Avouer, parler. Quand un prévenu garde un mutisme obstiné, les agents chargés de le «cuisiner» lui disent: _Accouche_ donc, puisque c’est le même prix (Argot des voleurs). =ACCOUPLÉES=: Expression qui désigne dans un monde spécial les habituées du _Rat Mort_, de la _Souris_ ou du _Hanneton_, deux femmes qui s’aiment avec une ardente passion et en conséquence détestent les hommes (Argot des filles). =V.= _Gougnottes_. _N._ =ACCROCHER SON PALETOT=: Voleur qui, chez le juge d’instruction, _farde_ la vérité. Mot à mot: Mentir (Argot des voleurs). _N._ =ACCUREUSE=: Commode (Argot des voleurs). _N._ =ACHETER QUELQU’UN=: Se moquer, lui faire croire des choses insensées, se _payer sa tête_. Mot à mot: prendre un individu pour un imbécile. _Acheter à la course_, voler en passant un objet quelconque à un étalage (Argot du peuple). =ACRÉE=, ou =ACRIER= ou =ACRÉ=: Méfie-toi, prends garde, il y a du _pet_ (danger), voilà la _rousse_ (Argot des voleurs). =ACTEUR=: La tournure que portent les femmes pour faire bouffer leur robe. Cette tournure est ainsi nommée parce qu’elle est au-dessus du _trou du souffleur_ (Argot du peuple). _N._ =ACTIF=: Ne se prend pas, dans le monde où ce mot est employé, dans le sens d’_activité_. Il veut dire que l’_actif_ est l’amant du _passif_ (Argot des pédérastes). =V.= _Passif_. =AFFALER SON GRELOT=: Se taire. Dans le peuple, on dit d’une femme bavarde, qu’elle, est un _moulin à paroles_. Quand elle bavarde trop bruyamment, on lui conseille de mettre du papier dans sa _sonnette_. L’image est fort juste, la sonnette ne _tinte_ plus (Argot du peuple). _N._ =AFFAMÉE= (l’): La bouche. Allusion à la faim ou à la femme hystérique _affamée_ de baisers (Argot des voleurs). _N._ =AFFE= (l’): L’âme. Son _affe_ se débine. Mot à mot: il rend l’âme (Argot des voleurs). _N._ =AFFOURCHÉE SUR SES ANCRES=: Fille publique qui _renâcle_ sur le _turbin_ pour faire _tortorer_ son souteneur. Cette expression ancienne est fréquemment employée, car l’image est frappante. _Affourchée_, immobile comme le vaisseau amarré dans le port. _Sur ses ancres_, sur ses _jambes_. La fille ne _trimarde_ pas (Argot des souteneurs). =AFFRANCHI= (être): Ne rien craindre. On dit dans le peuple d’une fille qui a perdu son _capital_: elle est _affranchie_ (Argot du peuple). =AFFRANCHIR=: Exciter un individu mâle ou femelle au vice ou au vol. _S’affranchir_ d’une tutelle gênante (Argot des voleurs). =AFFRANCHIR=: Châtrer, faire ablation des parties génitales à un animal quelconque. Le tondeur de chiens est l’_affranchisseur_ des chats, comme le chanoine Fulbert le fut pour Abélard (Argot du peuple). =AFFRANCHISSEUR=: Voleur qui pousse un honnête homme pressé par le besoin à voler (Argot des voleurs). =AFFUR= ou =AFFURE=: Profit, bénéfice. —J’ai mon _fade d’affure_ (part de vol ou d’une opération quelconque) (Argot des voleurs). =AFFURER=: Tromper, faire un profit illicite. _A. D._ Cette expression signifie: _gagner_. L’argent que les croupiers _étouffent_ sur la cagnotte, les sous que l’enfant détourne d’une commission; le conducteur d’omnibus qui _oublie_ de sonner un voyageur, c’est de l’_affure_ (Argot des voleurs). =AFFÛTER=: Tromper. _A. D._ J’ignore où il a pu entendre que ce mot avait cette signification, il est pourtant depuis longtemps en usage dans le monde des ouvriers. _Affûter_ un outil, le passer sur la meule pour le rendre tranchant. Quand, dans les ateliers, on embauche un ouvrier, il attend sa paye du samedi ou de la fin du mois pour être _affuté_, savoir ce qu’il _gagnera_ (Argot du peuple). _N._ =AFFÛTER DES PINCETTES= (s’): Courir, se sauver à grande vitesse (Argot des voleurs). =AGENOUILLÉE=: Fille du demi-monde et même du demi-quart qui a des aptitudes spéciales. L’expression est suffisamment expliquée par la position d’être _agenouillée_... pas sur les dalles d’une église pour prier le bon Dieu (Argot des filles). _N._ =AGOBILLES=: Outils employés par les malfaiteurs pour voler. Ce mot est très ancien (Argot des voleurs). =AGUA= ou =AGOUA=: Eau. Corruption du mot latin _aqua_ (Argot des voleurs). =AGUALURO=: Jeter, bannir. On emploie cette expression pour envoyer promener quelqu’un loin de soi (Argot des voleurs). =AIDE-MARI=: L’amant. Il _aide_ à la besogne conjugale, sans en avoir les désagréments. On dit aussi l’_autre_. Pour les omnibus traînés par trois chevaux, on dit: _ménage à trois_. Allusion à ce qu’ils _tirent_ les uns après les autres (Argot du peuple). _N._ =AIGLE BLANC=: Chef de bande du voleurs. Sans doute parce que l’aigle vole haut (Argot des voleurs). =V.= _Méquard_. _N._ =AIGLON=: Apprenti voleur (Argot des voleurs). _N._ =AIGUILLE=: Fausse clé (Argot des voleurs). =AIGUILLEUR=: Vol au moyen de fausses clés (Argot des voleurs). =AILERONS= ou =AILE=: Bras. —Mademoiselle, voulez-vous accepter mon _aile_. Couvrir une femme d’une _aile_ protectrice. —Prends mon _aile_, s’y te touche, je le crève (Argot du peuple). =V.= _Abatis_. =AIMER À CRÉDIT=: Être l’amant de cœur d’une femme. Ne la payer qu’en nature. De la famille des maquereaux (Argot des filles). =AIMER POUR PEAU DE BALLE=: Aimer pour rien. Perdre son temps et sa jeunesse, amour qui ne rapporte pas (Argot des filles). _N._ =AIMER AU CHASSE=: Aimer à l’œil, faire une queue à son souteneur avec un passant _galbeux_ (Argot des filles). _N._ =ALARMISTES=: Chien de garde. L’animal donne l’_alarme_ à ses maîtres. En 1848, les _alarmistes_ étaient des bourgeois qui répandaient chaque jour des mauvaises nouvelles (Argot des voleurs). =ALBACHE=: Faux nom, en donner un. On nomme ainsi le voleur qui donne un faux nom pour dissimuler son identité (Argot des voleurs). _N._ =ALBOCHE=: Allemand. Autrefois les ouvriers disaient _boche_, pour qualifier un lourdeau, _al_ a été ajouté pour désigner les _Allemands_ en général (Argot du peuple). _N._ =ALENTOIR=: Aux environs, aux alentours. —_Nib de Tronche_ fait le _pet_ aux _alentoirs_ pendant que les _aminches_, _ratiboisent la cambrousse du garnaffier_ (Argot des voleurs). =ALIGNER= (s’): Les duellistes _s’alignent_ pour se battre. Quand un travail est très soigné l’ouvrier dit avec fierté: Hein! comme c’est _aligné_. Quand il s’agit d’argent. _aligner_ est synonyme _d’allonger_ (Argot des voleurs). =ALFA=: Cheveux blonds. On sait que l’_alfa_ plante textile qui sert à fabriquer la pâte du papier, a absolument l’aspect d’un paquet de filasse. Allusion de fait et de couleur (Argot des voleurs). _N._ =ALLEZ VOUS ASSEOIR=: Terme employé pour envoyer promener un individu ennuyeux. Cette expression ancienne a servi à un chansonnier de 1848 pour composer une chanson dont le refrain: _Allez vous asseoir_ est resté célèbre (Argot du peuple). =ALLEZ À DACHE=: Mot à mot allez vous faire voir. Vous m’ennuyez (Argot du peuple). =ALLER À DAME=: Être assommé à coups de poings et tomber comme une masse sur le pavé (Argot du peuple). =V.= _Fluxion de pavé_. =ALLER À NIORT=: Nier. Recommandation qu’ont soin de faire les voleurs à leurs complices quand ils vont à l’instruction. Ils se souviennent du mot du boucher Avinain qui, la tête sous le couteau, cria: N’avouez jamais (Argot des voleurs). =ALLER AU RAPPORT SANS ARME=: Moucharder ses camarades. Expression employée dans les ateliers pour indiquer que l’un des leurs va chaque jour au _rapport_, chez le patron pour lui raconter ce qui se passe et même ce qui ne se passe pas (Argot du peuple). =ALLER AU REFIL=: Dénoncer un complice (Argot des voleurs). =V.= _Mouton_. _N._ =ALLER OÙ LE ROI VA À PIED=: Satisfaire un besoin dans le silence d’un cabinet qui n’a rien de ministériel. L’allusion est juste; malgré sa grandeur, le roi ne pourrait y aller en voiture (Argot du peuple). =ALLER VOIR DÉFILER LES DRAGONS=: Ne pas manger. _Être de la revue_ signifie la même chose (Argot du peuple). =ALLEZ VOIR LÀ-BAS SI J’Y SUIS=: Ce qui veut dire nettement à une personne: Foutez-moi le camp (Argot du peuple). =ALLIANCES=: Poucettes. Les gendarmes mettent les _poucettes_ aux prisonniers pour les conduire de brigade en brigade (Argot des voleurs) =V.= _Cabriolet_. =ALLUMAGE= (professeur d’): Grec qui apprend à ses élèves le moyen à employer pour _allumer_ les joueurs naïfs. Il y avait anciennement au boulevard du Temple, un café où se rencontraient les grecs; il était connu sous le nom de _café d’allumage_ (Argot des grecs). =V.= _Suiffart_. =ALLUMER=: Faire de l’œil à un passant. Chauffer une salle de théâtre ou une réunion publique pour faire éclater l’enthousiasme et assurer le succès. Frapper ses animaux à coups de fouet pour les exciter. Compères chargés dans les salles de ventes _d’allumer_ les acheteurs (Argot du peuple). =ALLUMER LA QUITOURNE=: Fille qui fait la fenêtre, qui raccroche en chambre. À la tombée de la nuit elle _allume_ sa lampe. Comme elle la _tourne_ de façons différentes pour signaler aux passants qu’elle est _libre_ ou _occupée_, de là, _la quitourne_ (Argot des filles.) =ALLUMER SON PÉTROLE=: Rendre quelqu’un amoureux. Mot à mot l’_enflammer_. —Le grand t’a donc plaquée? —Comme un pet. —T’a pas su y _enflammer le pétrole_ (Argot des filles). =ALLUMEUR=: Agent provocateur chargé d’organiser un complot politique quand le gouvernement a besoin d’effrayer la population pour faire voter une loi réactionnaire. On en trouve un curieux exemple dans les _Mémoires de Claude_, à propos de l’_Internationale_ et des _allumeurs_ de la rue des Gravilliers (Argot du peuple). =ALPAGUE=: Abréviation d’_alpaga_. —Je vais me _balader_, Nini passe-moi mon _alpague_ (Argot du peuple). =ALPHONSE=: Souteneur. On a attribué cette expression à M. Alexandre Dumas qui en a fait le titre d’une pièce; elle était connue depuis plus de vingt ans par la chanson si populaire de Lacombe: _Alphonse du Gros-Caillou_ (Argot du peuple). =ALTÈQUE=: beau, plus que beau (Argot des voleurs). =ALZINGUE=: Même signification qu’_Alpague_. =AMANDES DE PAINS D’ÉPICE.= =V.= _Dominos_. =AMARRÉ=: Allusion aux _amarres_ qui fixent les bateaux sur la jetée, dans les ports. _Amarrer_ quelqu’un, se l’attacher. —J’ai _amarré_ un chouette gonce qui casque tout le temps (Argot du peuple). =AMBULANTE=: Fille qui va de cafés en cafés, tantôt à Montmartre tantôt à Grenelle. C’est généralement une fille rangée qui n’a pas de souteneur. Elle passe dans son quartier pour une laborieuse ouvrière qui va travailler au loin. Elle ne _ramène_ jamais chez elle (Argot du peuple). _N._ =AMÈRE= (la trouver mauvaise). Les voleurs principalement trouvent toujours leurs condamnations _amères_. Synonyme de _il faut avaler la pilule_ (Argot du peuple). =AMÉRICAINE= (Vol à l’): Ce vol fut inventé par Hurand, qui en 1844, était détenu à la prison de la Force. On sait en quoi consiste ce vol qui est fréquemment pratiqué. Il a donné naissance au _vol au charriage_ qui se divise en plusieurs catégories (Argot des voleurs). =V.= _Charriage_. =AMINCHE=: Ami. Quand deux voleurs sont, associés ils sont _aminches d’aff_ (Argot des voleurs). =AMINCHES D’AFF=: Amis d’affaires. Un vol pour un voleur est une _affaire_, comme voler c’est _travailler_ (Argot des voleurs). =AMOCHER=: Recevoir des coups. Quant ils laissent de fortes traces on dit que l’ami a été rudement _amoché_ (Argot du peuple). =V.= _Trinquer_. =ANDOUILLE MAL FICELÉE=: Individu déguingandé, à la démarche traînante. Se dit surtout de quelqu’un mal habillé, ayant des allures ridicules. On dit aussi: Mal _fagoté_ (Argot du peuple). =ANGLAIS=: Créancier. Cette expression se trouve dans Marot, elle était tombée en désuétude lorsqu’elle revit le jour vers 1804. Napoléon 1^er avait plusieurs commis attachés à un cabinet spécial. Il remarqua à différentes reprises que l’un d’eux arrivait depuis quelques matins deux heures au moins avant ses collègues. L’empereur intrigué lui en demanda les motifs. —Sire, répondit le commis, c’est à cause des _anglais_. —Je ne vous comprends pas. —Sire, les _anglais_ sont vos ennemis, mes _créanciers_ sont les miens. —Bien, fit l’Empereur, donnez m’en la liste, je vous en débarrasserai, comme moi des autres. Le mot est resté et est employé fréquemment (Argot du peuple). =ANGLAIS= (ils débarquent). Il est aussi brave, Que sensible amant, Des _anglais_ il brave, Le _débarquement_. (Argot du peuple). =V.= _Bande sur l’affiche_. =ANGLUCE=: Oie (Argot des voleurs). =V.= _Ornichon_. =ANGOULÈME=: La bouche (Argot des voleurs). =V.= _Affamée_. =ANGUILLE=: Ceinture. Allusion à sa souplesse (Argot des voleurs). =ANITERGE=: Mouchoir (Argot des voleurs). =V.= _Blavin_. =ANTIF= ou =ANTIFFLE=: Marcher. —Que fait la môme? —Elle bat l’_antif_ pour _dégoter_ un _miché_ (Argot des souteneurs). =ANTIFFE=: Église (Argot des voleurs). =V.= _Antonne_. =ANTIQUITÉ=: Vieille femme. Au temps de sa jeunesse Théophile Gautier, en compagnie d’un de ses amis, se promenait dans le jardin des Tuileries. Il avisa une vieille femme vêtue d’une robe à ramages qui datait au moins du Directoire. Il s’approcha d’elle, le chapeau à la main. —Madame, lui dit-il, je raffole des _antiquités_, voulez-vous me permettre de baiser le bas de votre robe? Elle répondit fièrement: —Si monsieur veut embrasser mon cul, il a vingt cinq ans de plus que ma robe (Argot du peuple). _N._ =ANTONNE=: Église. Du vieux mot: _Antie_ (Argot des voleurs). =ANTONNEUR=: Voleur qui a la spécialité de dévaliser les églises. Il vole l’argent contenu dans les troncs à l’aide d’une baleine enduite de glu (Argot des voleurs). =APASCLINER= (s’): S’acclimater. L’_aminche_ _s’apascline_ doucettement à _tunobé_ (Argot des voleurs). _N._ =APPACHONNER=: Attirer à soi. —J’ai _appachonné_ un _morlingue_ dans la _valade_ d’un _goncier_ pendant qui baillait devant les _sigues_ de la _Boutanche_ d’un _balanceur de braise_ (Argot des voleurs). _N._ =APOTRES=: Les doigts (Argot des voleurs). =V.= _Ministre de l’Intérieur_. =AQUARIUM=: Lieu où se réunissent les souteneurs. Allusion aux poissons. _Aquarium_: la Chambre des députés. Cette expression n’est pas très polie pour ces messieurs, qui assurément ne sont pas tous des poissons, mais comme elle est d’origine anarchiste, elle ne surprendra personne (Argot du peuple). _N._ =AQUIGER=: Battre, blesser. On dit par corruption de celui qui est battu: il est _attigé_ (Argot du peuple). =AQUIGER=: Prendre. _Aquiger_ n’est pas le vrai mot, c’est _quiger_ (Argot des voleurs). =AQUIGEUR=: Voleur qui cherche querelle à un passant. Pendant qu’il le bat, un complice le dévalise proprement et lestement (Argot des voleurs). =ARAIGNÉE DANS LE PLAFOND= (avoir une): Synonyme de _loufoque_. Avoir la cervelle détraquée (Argot du peuple). =ARCASINEUR=: Voleur au trésor caché. Le voleur se nomme _arcasien_ parce qu’il procède au moyen d’une lettre (_arcat_) écrite d’une prison quelconque à l’individu qu’il s’agit d’escroquer. L’_arcat_ indique généralement un trésor caché à l’étranger. Des naïfs mordent toujours dans l’espoir d’un gros gain (Argot des voleurs). =ARCO=: Avare (Argot des voleurs). =V.= _Grippe-sous_. =ARÇONNIER=: Celui qui donne le signal de l’alarme convenu entre les voleurs. Au temps de Vidocq, le _C_ figuré à l’aide du pouce sur la joue droite signifiait: prenez-garde voilà la rousse (Argot des voleurs). =ARDENTS=: Les yeux (Argot des voleurs). =ARDOISE= (boire à l’): Il existait autrefois un marchand de vin à la barrière Montparnasse; le patron ne sachant ni lire ni écrire, les clients marquaient eux-mêmes leurs dépenses sur une _ardoise_ à l’aide d’un morceau de craie. Un jour le brave homme s’aperçut que les consommateurs s’entendaient, et que le dernier qui marquait effaçait avec sa manche, comme par mégarde, les comptes précédents. Il coupa le crédit, mais l’expression de _boire à l’ardoise_ est restée (Argot du peuple). =V.= _Marquer à la fourchette_. _N._ =ARLEQUINS=: Détritus de toutes sortes de mets que les cuisiniers des restaurants vendent à des marchandes des Halles. Ces débris sont triés avec soin, et elles en font des assiettes assorties que les malheureux achètent un ou deux sous. Cette expression vient de l’habit d’_Arlequin_, qui est composé d’étoffes de différentes couleurs (Argot du peuple). =ARMOIRE À GLACE=: Sac du troupier (Argot du troupier). =V.= _As de carreau_. =ARMOIRE À RICHER=: Le ventre. Allusion aux matières fécales que contiennent les intestins (Argot du peuple). =ARNACHE=: Agent de police. _A. D._ _Arnache_: trompeur. _L. L._ Les voleurs disent: _Arnaque_. Cette expression vient du vieux mot français: _harnacher_; il est employé, sans doute, par les voleurs, parce que les agents les _harnachent_ en les ligottant, soit avec les _alliances_, soit avec le _cabriolet_ (Argot des voleurs). =ARNAQUE=: Nom d’un jeu qui se joue sur la voie publique et sur les boulevards extérieurs; il est connu également sous le nom de _tourne-vire_. Ce jeu consiste en une roue posée à plat sur un pivot, la table est composée de trois _planches mobiles_, supportées par deux tréteaux; ces planches sont recouvertes d’une toile cirée; cette toile est divisée en carrés qui forment cases, ces cases se distinguent par des emblèmes différents, les quatre rois: trèfle, cœur, pique et carreau, une ancre, un cœur, un dé et un soleil. Les joueurs misent sur une case, la roue tourne et celui qui gagne reçoit dix fois sa mise. En évidence, sur la table, il y a des paquets de tabac, des cigares, des pipes et autres objets, mais c’est pour la _frime_, le tenancier du jeu paie le gagnant en monnaie. Ce jeu est un vol. Autour de la table, il y a toujours deux ou trois _engayeurs_, ils sont de préférence à chaque bout (la table est un carré long); au moment où la plume va s’arrêter sur une case, par un mouvement imperceptible, un des _engayeurs_ s’appuie sur la planche mobile du milieu, la plume dévie et le tour est joué; si c’est un _engayeur_ qui gagne, il partage avec ses complices (Argot des camelots). _N._ =ARPETTE=: Apprenti de n’importe quel métier. Ce mot se prend aussi dans le sens de _petit_, _moufflet_, diminutif de moutard (Argot du peuple). =ARPIONS=: Vieille expression qui veut dire: pieds. Jean Hiroux disait au président des assises: —Je demande qu’on fasse sortir le gendarme, il plombe des _arpions_. —Gendarme, répondit le président, remuez vos _pieds_ dans vos bottes d’ordonnance. Prévenu, la punition commence (Argot des voleurs). =ARRACHER UN PAVÉ=: =V.= _Rouscailler_. =ARRACHEUR DE CHIENDENT=: Voleur qui cherche une occasion de voler (Argot des voleurs). =ARRANGEMANN=: Arranger. _Arranger_ quelqu’un en lui faisant faire une opération ruineuse. Les grues _arrangent_ les pantes. Une femme _arrange_ un homme en lui communiquant un mal vénérien. On _arrange_ un homme en le battant à plate couture. —Il est _arrangemann_ le _gonce_, il ne _rebiffera_ pas, il est foutu d’en _crapser_ (Argot des souteneurs). _N._ =ARRONDIE=: Montre. Allusion à sa forme ronde (Argot des voleurs). =ARROSER=: Donner un accompte sur une dette. Un huissier cesse les poursuites commencées quand le débiteur _arrose_. Donner de l’argent à un fonctionnaire pour obtenir un privilège, c’est l’_arroser_. Nos députés le furent largement par Arton pour l’affaire du Panama. Martingaler son enjeu c’est _arroser_ le tapis (Argot du peuple). _N._ =ARROSEUR DE VERDOUZE=: Jardinier (Argot des voleurs). =ARTIE DE MEULAN=: Pain blanc. Allusion à la blancheur des farines produites par les moulins de cette ville (Argot des voleurs). =ARTIE DU GROS GUILLAUME=: Pain abominablement noir qui rappelle celui du siège de Paris, en 1870, qui contenait de tout, excepté de la farine (Argot des voleurs). =ARTIE=: =V.= _Bricheton_. =ARTICHE= (l’): Le derrière. —Je vais t’enlever l’_artiche_. On nomme _artiches_, par abréviation d’_artichauts_, les barres de fer pointues et hérissées qui couronnent les murs et les grilles des prisons (Argot des voleurs). _N._ =AS DE CARREAU=: Sac du fantassin (Argot du troupier). =V.= _Armoire à glace._ =AS DE PIQUE=: Se dit d’une femme qui possède abondamment ce que d’autres n’ont que très peu (Argot du peuple). =V.= _Fournitures_. =ASPHALTEUSE=: Fille qui raccroche sur le trottoir. Elle foule l’_asphalte_ en tous sens (Argot des filles). =ASPERGE MONTÉE=: Grande femme toute en jambes, maigre et sèche comme un copeau. On dit aussi: longue comme un jour sans pain (Argot du peuple). =ASPIC=: Avare. _Aspic_ signifie aussi mauvaise langue, langue de vipère. Cette expression est empruntée au proverbe: Mieux vaut un coup d’épée qu’un coup de langue (Argot du peuple). _N._ =ASSOMMOIR=: Boutique où l’on vend des liqueurs vitriolées qui _assomment_ les buveurs. Le premier _assommoir_, bien avant celui du fameux Paul Niquet, fut créé vers 1810, rue de la Corderie, près du Temple, par un nommé _Montier_. Cet empoisonneur charitable avait fait établir dans son arrière-boutique une chambre spéciale pour les _assommés_; la paille servait de litière, des pavés servaient d’oreillers. Cette chambre s’appelait _la Morgue_ (Argot du peuple). =ASTÈQUE=: Bien avant que les _Aztèques_ ne vinssent du fond du Brésil, cette expression servait à désigner les êtres chétifs et malingres (Argot du peuple). =V.= _Avorton_. =ATTACHER LE BIDON=: Dénoncer un camarade. Synonyme de _remuer la casserole_ (Argot des voleurs). =ASTICOT=: Vermicelle (Argot des voleurs). _N._ =ASTICOT=: Fille publique. _Asticot_: personne mince comme un fil (Argot du peuple). =ASTICOT DANS LA NOISETTE=: Personne qui a des absences de mémoire. On sait que l’_asticot_ dévore l’amande de ce fruit, par analogie il dévore la cervelle (Argot du peuple). _N._ =ATOUT=: Avoir du courage. Avoir des _atouts_ dans son jeu. Un zouave rencontre son capitaine accompagné de sa femme, il leur lance au nez un pet à tout casser en criant: _Atout_. Le capitaine, se retournant, lui envoie un magistral coup de pied dans le cul en disant: _Je coupe_. Le soldat répond: Ah! je ne savais pas que vous aviez la dame seconde! Recevoir un _atout_: être sérieusement blessé. C’est sans doute d’_atout_ que, par corruption, on a fait _attiger_ (Argot du peuple). _N._ =ATTIGNOLES=: Rognures de viandes hachées et vendues sous forme de _boulettes_. L’expression est normande, mais elle est devenue parisienne en s’éloignant du sens primitif. Dans le peuple, pour exprimer qu’un individu a été fortement endommagé dans une rixe, on dit: Il a reçu de rudes _attignoles_ (Argot du peuple). _N._ =ATTOUCHEMENTS=: Être assez indiscret pour vouloir s’assurer si une jolie femme porte un pantalon et met ses jarretières au-dessus du genou. Synonyme de _peloter_ (Argot du peuple) =V.= _Baiseuses_. =ATTOUCHEUSE:= Fille publique. Le mot est suffisamment expressif. Allusion aux ménagères qui tâtent la viande chez le boucher pour s’assurer de son degré de fraîcheur (Argot des filles). =ATTRIQUER=: Acheter des effets volés, sans pour cela être un recéleur habituel: _Fourgat_ ou _Meunier_ (Argot des voleurs). =ATTRIQUEUSE=: Vendre des objets volés (Argot des voleurs). =ATTRISTÉ=: Voleur qui ne travaille que la nuit, sans se soucier des _pendus glacés_ (Becs de gaz) (Argot des voleurs). =AUBERT=: Argent (Argot des voleurs). =AUMÔNIER=: Vol à l’_aumône_. Autrefois, cette expression désignait les dévaliseurs de bijoutiers. Le voleur marchandait des bijoux, un mendiant survenait et sollicitait une _aumône_. L’attention du bijoutier était détournée pendant qu’on lui dévalisait ses vitrines; quand il s’apercevait du vol, les voleurs étaient loin (Argot des voleurs). =AUSEIGNOT=: Auxiliaire. Détenu qui par faveur et moyennant une modique rétribution, remplit dans la prison les fonctions les plus grossières (Argot des voleurs). =AUTEL DE BESOIN=: Femme ou fille. Allusion à l’hôtel qui s’ouvre pour ceux qui paient. _Autel_ sur lequel l’homme sacrifie par nécessité. Se dit souvent dans le peuple d’une femme légitime (Argot des souteneurs). =AUTOR ET D’ACHARD= (d’): Abréviation d’_autorité_ et d’_acharnement_. Lorsque deux joueurs font une partie d’écarté et que l’un demande des cartes à son adversaires, l’autre lui répond: Non, j’y vais d’_autor et d’achard_ (Argot du peuple). =AUVERPIN=: Auvergnat. On dit aussi: _Auverplum_ et _Bougnat_ (Argot du peuple). =AVALE-TOUT-CRU=: Synonyme de _Va de la gueule_, _Gueulard_, _Bouffe-tout_ et _Ventre à tous grains_. Ces expressions, dans le peuple, signifient: Gros mangeur. Une certaine catégorie de voleurs se sont emparés de l’expression: _Avale-tout-cru_, pour désigner un genre de vol assez original. Le voleur se fait montrer par le bijoutier des diamants non montés, sur carte; il paraît avoir la vue basse, il les regarde de près, et d’un coup de langue habile il en _avale_ quelques-uns (Argot des voleurs). =AVALER LE LURON=: Communier. On dit aussi: _avaler l’Auvergnat_, parce que sans doute, comme lui, Dieu n’est ni homme ni femme (Argot des voleurs). =AVALER SA CUILLER=: Mourir. Être moins heureux que le commis des Magasins du Printemps: il est vrai qu’il n’avait avalé qu’une fourchette (Argot du peuple). =AVALER LE PÉPIN=: Être enceinte. —Elle en a une de bedaine ta _frangine_. Qu’a-t-elle donc mangé? —Elle a _avalé le pépin_ (Argot du peuple). =AVALER SA CHIQUE=: Mourir. Allusion au chiqueur qui s’étoufferait en _avalant_ son pruneau (Argot du peuple). =AVALOIR=: La gorge. Elle avale tout en effet (Argot du peuple). =V.= _Dalle_. =AVANT-COURRIER=: Mèche en acier dont se servent les voleurs pour percer les devantures des boutiques de bijoutiers (Argot des voleurs). =V.= _Vrilleurs_. =AVANT-SCÈNE=: Les seins. Ils _avancent_, en effet, quand... il y en a (Argot du peuple). =V.= _Capitonnée_. =AVANTAGE=: Les seins. _Avantage_, oui, quand il fait froid, mais pendant les grandes chaleurs? (Argot du peuple). =V.= _Capitonnée_. =AVOIR PERDU SA CLÉ=: Être atteint d’une foire à tout inonder et ne pouvoir se retenir. On comprend qu’il s’agit d’une _clé_ que le serrurier ne peut remplacer (Argot du peuple). =AVOIR UN PÉPIN=: Aimer. En _tenir_ momentanément pour quelqu’un (Argot du peuple). =AVOIR LE VENTRE EN ACCORDÉON=: Femme déformée qui a eu des masses d’enfants. Allusion au plissage du ventre (Argot du peuple). _N._ =AVOIR LE VENTRE EN PERSIENNE=: Voir ci-dessus. =AVOIR SA PISTACHE=: Être complètement gris (Argot du peuple). _N._ =AVOIR DU PAIN SUR LA PLANCHE=: Être riche et ne pas avoir à s’occuper du lendemain. Être condamné à un certain nombre d’années de prison (Argot du peuple). =AVOIR LE NEZ SALE=: Avoir trop bu. Quand au lendemain du lundi un ouvrier dort sur son travail, les amis lui disent: Tu t’es _sali le nez_ hein! (Argot du peuple). =AVOIR LA GUEULE DE BOIS=: S’être pochardé la veille. L’ivrogne boit de l’eau le lendemain pour éteindre le feu qui lui dessèche la gorge. Mot à mot: Il a la _gueule sèche_ (Argot du peuple). =AVOIR MANGÉ LA SOUPE À LA QUÉ-QUÊTE=: =V.= _Avaler le pépin_. =AVOIR MANGÉ DES POIS PAS CUITS=: =V.= _Avaler le pépin_. =AVOIR QUELQU’UN À LA BONNE=: Être très camarade, ne jamais se quitter, vivre comme deux frères (Argot du peuple). =AVOIR DEUX ŒUFS SUR LE PLAT=: On emploie cette expression pour une femme qui a des seins à l’état de soupçon. Ce à quoi elle répond: J’en ai assez pour un honnête homme (Argot du peuple). _N._ =AVOIR UN PET DE TRAVERS=: Se dit d’un personnage grincheux que l’on ne sait jamais par quel bout prendre et qui gémit sans cesse, du matin au soir et du soir au matin (Argot du peuple). _N._ =AVOIR UN BÉGUIN=: Être coiffé de quelqu’un ou de quelqu’une. S’aimer à l’œil, ce qui ne fait pas bouillir la marmite. C’est pas l’_béguin_ qui fait bouillir la soupe. J’te vas coller un pain. (Argot des souteneurs). =AVOIR SON PAIN CUIT=: Mourir (Argot des boulangers). =AVOIR QUELQU’UN DANS LE SANG=: Aimer violemment (Argot dos filles). =AVOIR UN POLICHINELLE DANS LE TIROIR=: =V.= _Avaler le pépin_. =AVOIR UN POT DE CHAMBRE CASSÉ DANS L’ESTOMAC=: =V.= _Trouilloter de la hurlette_. =AVOIR UNE CAROTTE DANS LE PLOMB=: =V.= ci-dessus. =AVOIR SON COMPTE=: Être pochard. Avoir reçu une formidable volée dans une bataille (Argot du peuple). =AVOIR UN PALETOT SANS MANCHES=: Être cloué dans un cercueil (Argot du peuple). =AVOIR VU PÉTER LE LOUP SUR UNE PIERRE DE BOIS=: Les Lyonnais emploient cette expression pour dire qu’une fille a perdu tout droit à la fleur d’oranger (Argot du peuple). _N._ =AVORTON=: Être difforme, petit adversaire (Argot du peuple). =AZOR=: =V.= _As de carreau_. B =BABANQUER=: Vivre. Synonyme de _bien banqueter_ (Argot des voleurs). _N._ =BABILLARD=: Aumônier de prison. Allusion à ce qu’il _babillarde_ sans cesse sans que son interlocuteur lui réponde (Argot des voleurs). _N._ =BABILLARD=: Livre imprimé. On dit aussi: _bavard_ (Argot des voleurs). =BABILLARDE=: Montre. Allusion à son tic-tac qui malgré sa monotonie _babille_ et égaie la solitude (Argot des voleurs). =BABILLARDE=: Lettre. —T’en fais du _chi-chi_ dans ta menteuse de _babillarde_ (Argot des voleurs). =BABILLARDER=: Écrire (Argot des voleurs). =BABILLEUSE= (la): Bibliothèque. Allusion aux livres _babillards_ qu’elle contient (Argot des voleurs). =BÂCHE=: Casquette. Elle abrite la tête comme la _bâche_ les voitures (Argot des voleurs). =BÂCHER=: Se coucher (Argot des voleurs). =BACCANTE=: Barbe, favoris. Il en est qui écrivent: _bocchantes_, c’est l’orthographe que je donne qui est la bonne. Pour favoris, on dit aussi: _côtelettes_ (Argot des voleurs). _N._ =BACCON=: Cochon (Argot des voleurs). =BACLER=: Faire vite, à la hâte une chose qui demanderait à être soignée. Un maire pressé _bacle_ un mariage, un médecin _bacle_ un pansement, un auteur dramatique _bacle_ une pièce. Mot à mot _bâcler_: se dépêcher (Argot du peuple). =BADIGEONNER LA FEMME AU PUITS=: Farder la vérité. On sait que la vérité sort nue d’un puits; la _badigeonner_ c’est mentir (Argot des voleurs). =BAFOUILLER=: S’embarquer dans un discours et mélanger les phrases de façon à les rendre incompréhensibles. Vouloir faire le beau parleur et s’exprimer difficilement. Dans le peuple on appelle celui qui _bafouille_ un _bafouilleur_ et on lui offre un démêloir (Argot du peuple). =BAFFRE=: Un coup de poing sur la figure. Dans le peuple, cette expression est remplacée par celle-ci: —Je vais te _coller_ un _pain_ sur la gueule. —Je vais te fourrer une _bègne_ que tu n’en verras que du feu (Argot du peuple). _N._ =BAFFRER=: Manger avec une grande avidité (Argot du peuple). =BAGATELLE= (faire la): Faire l’amour. Quand la _maquilleuse de brèmes_ tire les cartes à une jeune fille et que l’as de pique sort, elle lui annonce qu’elle fera la _bagatelle_ (Argot des filles). =BAGNOLE=: Bouge, masure. Se dit également d’une vieille voiture qui gémit sur ses ressorts rouillés et cahote le voyageur (Argot du peuple). _N._ =BAGUENAUDER=: Flâner, errer par les chemins sans avoir un but déterminé. Être longtemps sans ouvrage (Argot du peuple). =BAGNENAUDES=: Poches. Expression usitée chez les marbriers, surtout les samedis avant la paye. —J’ai dix _ronds_ qui se _baladent_ dans mes _baguenaudes_, les mettons-nous dans le commerce? (chez le _mastroquet_ voisin) (Argot du peuple). =BAIGNE DANS LE BEURRE=: On sait que le maquereau maître d’hôtel est appelé par les ménagères: la mort au beurre. Rothschild aussi _baigne dans le beurre_, mais par la richesse (Argot du peuple). =BAIGNOIRE À BON DIEU=: Le calice. Cette figure peint bien l’hostie consacrée _baignant_ dans le saint-ciboire (Argot des voleurs). =BAISER LE CUL DE LA VIEILLE=: Joueur _déveinard_ qui perd la partie sans marquer un point. Dans le peuple on dit aussi: _passer sous la table_ (Argot du peuple). =BAJOUES=: La face. Les voleurs emploient cette expression pour _grimaces_ (Argot des voleurs). =BALANCÉ=: Être renvoyé de sa place. —J’ai _balancé_ ma femme, elle était par trop _rasante_ (Argot du peuple). _N._ =BALANCER SON RONDIN=: Aller au cabinet. Allusion à la forme ronde des excréments (Argot du peuple). _N._ =BALANCER SES ALÈNES=: Quitter le métier de voleur. Deux escarpes sont embusquées au coin d’une rue; de loin, ils voient passer un garçon de recettes, une lourde sacoche sur l’épaule. —Quel dommage, dit l’un, que l’on ne puisse _effaroucher_ son _pognon_. Je _balancerai mes alènes_ et j’irai vivre honnête dans mon _patelin_ (Argot des voleurs). =BALANÇON=: Marteau. Pour frapper vigoureusement il faut _balancer_ son marteau par le manche (Argot des voleurs). _N._ =BALANCEUR DE BRAISE=: Changeur. Allusion à l’argent qui ne fait que passer par ses mains, il le _balance_ aussi facilement qu’il le reçoit (Argot des voleurs). _N._ =BALANCEUR DE LAZAGNE=: Écrire une lettre d’une prison et l’adresser à quelqu’un (Argot des voleurs). =V.= _Arcasineur_. =BALANCEUR DE TINETTES=: Auxiliaîres des prisons qui vident les tinettes. Quand elles sont pleines de _mouscaille_, elles sont lourdes; ils impriment un _balancement_ pour les vider: Une, deux et trois. C’est fait. Les troupiers disent: _Passer la jambe à Jules_. Quand la tinette déborde un loustic s’écrie: —Prenez-la par les oreilles. Dans le peuple on dit: _Passer la jambe à Thomas_ (Argot du peuple). =BALANSTIQUER=: Jeter. C’est une amplification de _balancer_: se débarrasser de quelque chose qui gène, ou d’une personne dont on a assez (Argot des voleurs). _N._ =BALCON= (Avoir du monde au): Femme qui possède des seins volumineux (Argot du peuple). =V.= _Capitonnée_. =BALLE=: Cette femme me botte, elle fait ma _balle_ (Argot du peuple). =V.= _Blot_. =BALLON=: Prison. Allusion à la forme sphérique de Mazas (Argot des voleurs). _N._ =BALLON=: Postérieur copieux. Je vais t’enlever le _ballon_, pour coup de pied dans le derrière (Argot du peuple). =BALUCHON=: Petit paquet que les compagnons portaient jadis au bout d’un bâton sur l’épaule, en faisant leur tour de France. Ce _baluchon_ contenait leurs vêtements. La coutume s’est perpétuée dans le peuple: des outils et la blouse de travail en paquet composent un _baluchon_ (Argot du peuple). =BANC DE TERRE NEUVE=: De la Bastille à la Madeleine, et de Belleville à Montparnasse, on y pêche la _morue_ sans hameçons (Argot du peuple). =BANDE À L’AISE=: N’en prendre qu’à son temps et n’en faire qu’à sa volonté. Dans le peuple on emploie cette expression par ironie vis à vis d’un vieillard qui au lieu de _remiser son fiacre_ court après les filles (Argot du peuple). _N._ =BANDE À PART= (Faire): Fuir ses camarades d’atelier, aller boire et manger seul. Synonyme d’_ours_ (Argot du peuple). =BANDE SUR L’AFFICHE=: Bande de papier que les directeurs font coller sur l’affiche, annonçant le spectacle du jour, afin d’indiquer au public un changement par suite de l’_indisposition_ subite d’un artiste ou parfois _relâche_. Se dit par analogie dans le peuple pour indiquer qu’une femme a son échéance de fin de mois. Il y a _une bande sur l’affiche_ pour _relâche_ (Argot du peuple). _N._ =BANQUE= (la grande): Baraque des grands forains dans le monde des saltimbanques qui a, comme partout, ses matadors et ses miséreux (Argot des saltimbanques). =BANQUE= (la faire): Le samedi, les ouvriers typographes se partagent le prix du travail de la semaine (Argot d’imprimerie). =BANQUE=: Les voleurs qui se partagent le produit d’un vol emploient cette expression (Argot des voleurs). =BANQUE= (en tailler une): Tenir les cartes au jeu de baccara. Mot à mot: Être le _banquier_ (Argot des joueurs). =BANQUETTE=: Le menton. Allusion à ce qu’il avance sur le visage (Argot du peuple). _N._ =BANQUISTE=: Charlatan. Tous ceux qui _fardent_ la vérité sont des _banquistes_, à quelque classe de la société qu’ils appartiennent. Tous les _banquistes_ ne sont pas sur des tréteaux (Argot du peuple). =BANNIÈRE=: Sac. On dit de celui qui se promène en chemise: il se _trimballe_ en _bannière_. Allusion aux pans de la chemise qui flottent au vent. On dit aussi: Se promener en _panais_ (Argot du peuple). =BAPTÊME=: La tête. Le _mastroquet baptise_ son vin. Le peuple, qui a horreur de l’eau, dit des vins _baptisés_: Ils sont chrétiens. Le buveur fait sa tête (Argot du peuple). _N._ =BAPTISÉ D’EAU DE MORUE=: Ne pas avoir de chance. Homme ou femme à qui rien ne peut réussir. Ce qui équivaut à _déveine salée_, par allusion à l’eau dans laquelle la _morue_ a été _dessalée_ (Argot du peuple). _N._ =BAPTISÉ AU SÉCATEUR=: Juif. Allusion à l’opération de la circoncision que subissent les nouveaux-nés suivant le rite juif (Argot du peuple). _N._ =BAQUET=: Blanchisseuse. On dit aussi: _Baquet insolent_. On sait que ces dames ne mâchent pas leurs paroles. Quand une ménagère, par économie, va laver son linge au lavoir, les professionnelles l’appellent: _graillonneuse_ ou _noyeuse d’étrons_. Ce sont les plus mignonnes de leurs déjections (Argot du peuple). =BARAQUE=: Maison construite en plâtre, en torchis, provisoirement. Maison où la patronne va par défiance au marché avec sa bonne. Maison où l’on enferme le vin et les liqueurs. Maison où l’on _chipote_ sur tout, où l’on rogne même la nourriture. —Tenez, voilà mon tablier, je n’en veux plus de votre _baraque_, j’en ai plein le dos (Argot du peuple). =BARRAQUE=: Jeu de hasard. Ce jeu se joue sur un billard ordinaire avec un appareil spécial. Un joueur tient la queue, les parieurs sont divisés an deux camps; il s’agit de mettre une bille désignée dans une des cavités de l’appareil. La _barraque_ est un jeu prohibé parce que l’on peut avec habileté voler facilement (Argot des joueurs). _N._ =BARBAQUE=: Viande (Argot des voleurs). =V.= _Bidoche_. =BARBAUTIERS=: Gardiens de prison. Cette expression vient-elle de ce qu’ils sont chargés de garder les _barbotteurs_? Vient-elle de ce qu’ils _barbottent_ les prisonniers confiés à leur garde? (Argot des voleurs). _N._ =BARBE=: Beau mâle, gars solide. —Mon homme est un rude _barbe_. Il y a des _barbes_ qui, dans certains quartiers, sont en réputation comme autrefois les _terreurs_ (Argot des filles et des souteneurs). =BARBE=: Vieux. Par corruption on dit: _birbe_. On appelle les vieux de 1848 qui survivent: des _vieilles barbes_ (Argot du peuple). =BARBE= (en prendre une): Se pocharder. Dans les imprimeries quand un camarade a pris une _barbe_, on dit aussi qu’il était _chargé à cul_. Allusion au cheval qui ne peut pas avancer quand sa _charge_ est trop lourde (Argot d’imprimerie). =BARBICHON=: Capucin. Allusion à ce que ces religieux laissent croître leur _barbe_ (Argot des voleurs). _N._ =BARBILLON=: Souteneur. Diminutif de _brochet_, quoiqu’ils soient aussi voraces l’un que l’autre pour dévorer la recette de la _marmite_ (Argot des souteneurs). =BARBILLON DE BEAUCE=: Légumes. Les voleurs disent également: _barbillon de Varenne_ pour _navet_. Cette dernière expression est des plus anciennes; on lit en effet dans _le dictionnaire_ d’Olivier Chéreau: _barbillons de Varanne_ (Argot des voleurs). =BARBISE=: Apprenti souteneur. Il en existe qui n’ont pas quinze ans et qui _macrotent_ déjà les petites bouquetières, quelquefois leurs sœurs (Argot des souteneurs). _N._ =BARBISET=: Diminutif de _barbe_. Plus jeune et moins en faveur (Argot des voleurs). _N._ =BARBOTS=: Voleurs. La romance du _pègre_ dit: Pègres et barbots, rappliquez au Sauvage Et sans traquer livrez vous au plaisir. On aurait tort de vouloir être sage Puisqu’après tout on sait qu’il faut mourir. (Argot des voleurs). =BARBOTTER=: Fouiller les poches de quelqu’un. C’est une spécialité qui demande une certaine adresse. La ménagère souvent la nuit, pendant que son mari sommeille, pratique, sans mandat, une visite domiciliaire dans les _poches_ du dormeur (Argot du peuple). =BARBOTTIER=: Canapé (Argot des voleurs). _N._ =BARBUE=: Plume. Allusion à la _barbe_ des anciennes plumes d’oie (Argot des voleurs). =BARON DE LA CRASSE=: Individu malpropre, sale, puant, dégoûtant, ne se débarbouillant, suivant une vieille expression, que lorsqu’il pleut (Argot du peuple). =BARRE=: Aiguille (Argot des voleurs). _N._ =BARRÉ=: Taisez-vous, en voilà assez. Fermez çà, _barré_. _Barrée_ (la rue est). Elle l’est, en effet, pour ceux qui n’y peuvent passer à cause d’un créancier récalcitrant. On dit aussi: on _pave_ (Argot du peuple). =BARRÉ= (Être): Individu bouché, crédule, ignorant, qui comprend difficilement. Mot à mot: il a la cervelle _barrée_ (Argot du peuple). =BARRÉE= (La): Échelle. Allusion aux échelons qui forment barreaux (Argot des voleurs). =V.= _Montante_. =BAS PERÇÉ=: Être à fond de cale, à bout de ressources. Allusion aux _bas percés_ qui indiquent la misère (Argot du peuple). =V.= _Lac_. =BASANE=: Peau. Les tabliers des forgerons se nomment _basane_ (Argot du peuple). =BASCULE=: La guillotine. Allusion à la planche qui _bascule_ pour pousser le condamné sous la lunette (Argot des voleurs). =BASCULES=: Épaules (Argot des voleurs). =V.= _Porte turbin_. _N._ =BAS DU CUL=: Petite femme. Dans le peuple, pour bien caractériser sa petitesse, on dit: quand elle pète elle fait des ronds dans le sable (Argot du peuple). =BAS DE BUFFET=: Injure à l’adresse des vieilles femmes prétentieuses qui se maquillent outrageusement. Pour accentuer on dit: _vieux bas de buffet_ (Argot du peuple). =BASARDER=: Vendre. —Je basarde mes _frusques_, mon mobilier. _Basarder_ veut dire aussi renvoyer: —Je _basarde_ ma maîtresse (Argot du peuple). =BASTRINGUE=: Bal de bas étage où se donne rendez-vous la canaille du quartier dans lequel il est situé. _Bastringue_, faire du bruit, du tapage. Quand l’homme rentre au logis, un peu humecté et qu’il casse la vaisselle, la ménagère, furieuse, lui dit: —T’as pas bientôt fini ton _bastringue_, sale chameau? (Argot du peuple). =BASSE= (La): La terre. Pour qualifier un fainéant qui ne veut pas travailler on dit: il a les _côtes en long_, ce qui l’empêche de se baisser. La _terre_ est trop _basse_ (Argot du peuple). _N._ =BASSIN=: Insipide, ennuyeux (Argot du peuple). =V.= _Bassinoire_. =BASSINOIRE=: Individu qui répète cent fois la même chose pour ne rien dire (Argot du peuple). =BATACLAN=: Outils de malfaiteurs (Argot des voleurs). =V.= _Agobilles_. =BATACLAN=: Mobilier. Les jours de terme les ouvriers disent: —Nous déménageons le _bataclan_, ou bien: nous enlevons le _Saint-Frusquin_ (Argot du peuple). =BATAILLE DES JÉSUITES=: Habitudes de masturbation. Dans les ateliers, quand un apprenti reste trop longtemps au cabinet, un ouvrier dit à un autre apprenti: —Vas donc voir s’il ne se fait pas _sauter la cervelle_. L’allusion est transparente (Argot du peuple). =BATH AU PIEU=: Femme qui a des qualités extraordinaires au lit (_pieu_). Terme employé par les passionnés qui, généralement, s’y connaissent (Argot des souteneurs). =BATH AUX POMMES=: Tout ce qu’il y a de mieux, le _nec plus ultra_ en toutes choses (Argot du peuple). =BATIF= ou =BATIVE=: Beau tout ce qu’il y a d’admirable, de supérieur, de merveilleux. —J’ai un homme, y en a pas de pareil, il est _bath_ (Argot des filles). =BÂTIR SUR LE DEVANT=: Être enceinte. —L’allusion est facile à saisir (Argot du peuple). =V.= _Avaler le pépin_. =BÂTON=: Juge de paix (Argot des voleurs). _N._ =BATOUSE=: Toile neuve, de _batousier_ (tisserand): —J’ai une _rouillarde_ en _batouse_ toute _battante_ (neuve) (Argot des voleurs). =V.= _Rouillarde_. =BATOUSIER=: Voleur de toile ou de linge que les blanchisseurs de la campagne font sécher dans les prairies ou sur les haies (Argot des voleurs). =BATTAGE=: Se moquer de quelqu’un, dire ce que l’on ne pense pas. —C’est du _battage_ il n’est pas plus malade que moi (Argot du peuple). =BATTANT=: Le cœur (Argot des voleurs). =V.= _Grand ressort_. =BATTANT=: L’estomac. —J’ai le ventre creux, rien a me coller dans le _battant_ (Argot du peuple). =BATTANT=, =BATTANTE=: Chose neuve. On dit dans le peuple à tout bout de champ: —Elle est _battante_, _neuve_. C’est un double emploi (Argot du peuple). _N._ =BATTANCOURT=: Soulier (Argot des voleurs). =V.= _Ripatons_. =BATTANDIER=: Mendier (Argot des voleurs). =V.= _Aller à la chasse avec un fusil de toile_. =BATTOIRS=: Les mains, allusion au bruit que font les blanchisseuses avec leur _battoir_; quand les _claqueurs_ applaudissent trop bruyamment, les voyous logés au poulailler crient: Remisez donc vos battoirs (Argot du peuple). =BATTRE UNE BASANE=: Geste familier aux gamins qui se frappent la cuisse du revers de la main droite. Ce geste veux dire: Merde (Argot du peuple). =BATTRE LE BRIQUET=: Frotter en marchant les deux jambes de son pantalon l’une contre l’autre (Argot du peuple). =BATTRE LA COUVERTURE=: Ne savoir que faire et rester couché toute la journée (Argot des troupiers). =BATTRE LE JOB=: =V.= _Battre comtois_. =BATTRE COMTOIS=: Un compère _bat comtois_ en demandant un gant devant une baraque de lutteur. Les spectateurs le prennent pour un adversaire sérieux; dans l’arène il se laisse _tomber_. Un accusé _bat comtois_ en feignant de ne pas comprendre les questions du juge d’instruction. Une femme _bat comtois_ lorsqu’elle vient de coucher avec son amant et qu’elle jure à son mari en rentrant qu’elle lui est fidèle (Argot du peuple). =BATTRE ENTIFFE=: Faire le niais, l’imbécile. —Tu _battras entiffe_ quand le _quart_ te demandera comment tu as _rousti_ la _tocante_ à ta _dabe_ (Argot des voleurs). =BATTRE LA SEMELLE=: Dans les grands froids les troupiers _battent la semelle_ pour se réchauffer les pieds, soit qu’ils frappent sur le sol, soit qu’ils frappent en cadence _semelles_ contre _semelles_ (Argot des troupiers). =BATTRE LA SEMELLE=: Arpenter le trottoir, faire les cent pas en attendant quelqu’un (Argot du peuple). =BATTRE LA SEMELLE=: Se dit d’une femme sans homme qui, à l’instar de certain photographe, opère elle même. Elle _bat la semelle_ mais ne frappe pas aussi fort que le cordonnier sur son pavé (Argot du peuple). _N._ =BATTRE DE LA FAUSSE MONNAIE=: Battre sa femme (Argot du peuple). _N._ =BATTRE UN DIG-DIG=: Simuler une fausse attaque d’épilepsie sur la voie publique. L’homme qui pratique ce truc pour donner à l’attaque simulée l’apparence de la vérité, se met préalablement dans la bouche un morceau de savon. En le mâchonnant le savon mousse et lui amène l’écume aux lèvres comme si l’attaque était naturelle. Les _batteurs de dig-dig_ font souvent de fortes recettes (Argot des voleurs). =BAUCE= ou =BAUSSE=: Patron. Dans toutes les chapelleries de France on emploie ce terme (Argot des chapeliers). =BAVASSER=: Personnage qui ne sait ce qu’il dit, qui _bavasse_ à tort et à travers. Mot à mot _baver_ des paroles vides de sens (Argot du peuple). _N._ =BAVAROISE AU LARD=: Absinthe épaisse à couper au couteau (Argot du peuple). _N._ =BAVER DES CLIGNOTS=: Pleurer. Le peuple plus expressif dit: _chier des chasses_ (Argot du peuple). =V.= ce mot. =BEC DE GAZ=: Sergent de ville. Il _éclaire_ les malfaiteurs quand il n’est pas chez le marchand de vins en train d’_étouffer un glacis_ (Argot des souteneurs). _N._ =BEC DE GAZ=: À la _manille_ aux enchères, quand le joueur auquel le point est adjugé rencontre un jeu sur lequel il ne comptait pas dans les mains d’un de ses adversaires, il dit: J’ai rencontré un _bec de gaz_ (Argot du peuple). _N._ =BÉCANE=: Mauvaise machine à vapeur rafistolée par les Auvergnats de la rue de Lappe, qui marche comme une montre réparée par un charron (Argot du peuple). =V.= _Seringue_. =BÉCHER EN DOUCE=: Blaguer un ami doucettement mais lui dire de dures vérités sous des apparences de bonhomie (Argot du peuple). =BÉCHEUR=: Avocat général. Il _bèche_ le prévenu pour le faire condamner quand même. Pour l’_avocat bécheur_ il n’y a pas d’innocents. Ou le _bécheur_ commence à _jaspiner_. (Argot des voleurs). =BÉCOT=: Bouche, baiser. —Mon petit homme, donne-moi un _bécot_. Embrasse-moi (Argot des filles). =BÉCOTTER=: Embrasser. —C’est dégoûtant! Ces jeunes mariés se _bécottent_ toute la journée (Argot du peuple). =BECQUETER=: Manger. —J’ai encore cent _ronds_ à _becqueter_. Viens-tu _manger_ une friture à Auteuil (Argot du peuple). =BEDON=: Gros ventre. En Normandie on dit _bedolle_ pour _bedon_ (Argot du peuple). =BEFFEUR= (C’est un): homme qui fait des dupes. Homme d’affaires _marron_. Ses clients le sont plus souvent que lui (Argot des voleurs). =BÉGUIN=: Petit serre-tête en toile que l’on met sur la tête des enfants nouveau-nés (Argot des nourrices). =V.= _Avoir un béguin_. =BÉGUIN CARABINÉ=: Avoir un amour de première force auquel il est impossible de résister (Argot du peuple). _N._ =BELETTE=: =V.= _Blanchisseuse_. =BELLE= (faire la): Jouer une troisième partie qui décidera quel sera le vainqueur des deux adversaires ayant perdu chacun une manche (Argot du peuple). =BELLE DE NUIT=: Fille publique déjà vieille qui raccroche la _nuit_ parce que la _nuit_ tous les chats sont gris. Cette expression est ancienne. Vers 1850, on chantait dans une revue intitulée: _Vive la Joie et les Pommes de terre_ représentée aux Folies-Dramatiques, à l’ancien boulevard du Temple. ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ Tous les soirs l’amateur contemple Les _belles de nuit_ qui s’font voir, Sur le boulevard du Temple. (Argot du peuple). =BÉNISSEUR=: Homme qui trouve toujours tout très bien et n’a jamais une parole amère pour personne. Le critique H. de Lapommeraye fut et restera le plus illustre _bénisseur_ du siècle (Argot du peuple). =BENOIT=: Maquereau. _Benoit_, dans le langage populaire, est synonyme d’imbécile, de niais, n’en déplaise à ceux qui portent ce nom. Il veut dire aussi _maquereau_, dans le monde des filles (Argot des souteneurs). _N._ =BÉQUILLARDS= (Les): Vieillards infirmes et mendiants que la police arrête quotidiennement et qu’elle est forcée de relâcher faute de délit. Ainsi nommés parce qu’ils ont des _béquilles_ ou qu’ils boitent s’appuyant sur une canne (Argot des voleurs). _N._ =BERDOUILLE=: Ventre. —Que _boulottes_-tu donc, mon vieux, pour avoir une sacrée _berdouille_ comme ça? On dit aussi _bedaine_ (Argot du peuple). =BERGE=: Brigadier. Pour distinguer un sous-ordre, on ne dit pas un _sous-brigadier_, mais par abréviation un _S. B._ (Argot des agents de police). _N._ =BERGE=: Année. —Je tire cinq _berges_ à la _Centrousse_ de Melun (Argot des voleurs). =BERGERONNETTE=: Année. Diminutif de _berge_ (Argot des voleurs). =BÉQUILLER=: Manger (Argot des voleurs). =V.= _Becqueter_. =BERLINE=: Couverture (Argot des voleurs). _N._ =BERLINE DE COMMERCE=: Commis-voyageur (Argot des voleurs). =BERNIQUE=: Non. Je ne veux pas. On dit aussi _Bernique Sansonnet_ (Argot du peuple). =V.= _Brenicle_. =BESSONS=: Les deux seins (Argot des voleurs). =BERTELO=: Un franc (Argot des voleurs). =BÉTA=: Niais, crétin, superlatif d’imbécile (Argot du peuple). =BÉTASSE=: Mou, flasque (Argot du peuple). =BÊTE A CHAGRIN=: Une femme légitime. Quand elle est acariâtre, et elle l’est souvent par les nécessités de la vie, on lui donne ce nom peu aimable (Argot du peuple). _N._ =BÊTE A BON DIEU=: =V.= _Bête à pain_. =BÊTE A CORNES=: Fourchette (Argot des voleurs). _N._ =BÊTE A PAIN=: Homme bon et simple. Mot à mot: _bon_ comme du _bon pain_ (Argot du peuple). =BÉTINET=: Queue rouge. Le peuple donne ce nom aux _paillasses_ qui font le _boniment_ sur les places publiques ou devant les baraques de saltimbanques pour amasser la foule. L’un d’eux fut célèbre sous le nom de _Bétinet_, de 1840 à 1850, sur la place de la Bastille. Il était renommé pour ses _bêtises_ stupéfiantes (Argot du peuple). =BEUGLANT=: Café chantant où les spectateurs chantent en chœur avec les artistes. Les deux plus célèbres furent le _Beuglant_ de la rue Contrescarpe et le _Divan japonais_ de Jehan Sarrazin (Argot du peuple). =BEUGLER=: Enfant qui crie à en perdre haleine. —As-tu fini de _beugler_, horrible crapaud (Argot du peuple). =BEURRE DANS LES ÉPINARDS= (en avoir ou en mettre): Bourgeois qui augmente sa fortune par tous les moyens possibles. On sait que les cuisiniers appellent les _épinards_ la mort au beurre, parce qu’ils en absorbent considérablement. L’allusion est facile à comprendre (Argot du peuple). =BIBASSE=: Vieille femme. Arrivée à un certain âge, la femme c’est comme les vieux souliers, ça boit; elle _bibasse_ dans les bars (Argot du peuple). =BIBASSON=, =BIBASSIER=: Vieillard (Argot du peuple). =V.= _Birbe_. =BIBERON=: Pochard qui boit comme une éponge, sans soif. Mot à mot: il _tète_ ou _suce_ tous les liquides possibles (Argot du peuple). =V.= _Suce-Canelle_. =BIBI=: Instrument de cambrioleur (Argot des voleurs). =V.= _Tâteuse_. =BIBINE=: Assommoir de bas étage, où tous les liquides les plus étranges, comme jadis à la _bibine_ du _Lapin blanc_, chez le père Mauras, sont servis aux consommateurs (Argot du peuple). =V.= _Assommoir_. =BICHER=: Ça prend, ça mord. Dupe qui, comme le poisson, mord à l’hameçon (Argot des gens d’affaires et des pêcheurs). =BICHET=: Mensonge (Argot des voleurs). =BICHON=: Petit chien à tout faire. Cet animal est fort affectionné des dames d’un certain monde qui évitent avec lui les accidents et les maladies de neuf mois (Argot des filles). =BICHON=: Outil de chapelier. C’est une sorte de petit tampon de soie ou de velours qui sert à _bichonner_ les chapeaux de soie et à leur donner le coup de _fion_ (Argot des chapeliers). =BICHONNER= (se): Homme qui a grand soin de lui-même et qui se _bichonne_ comme une petite maîtresse (Argot du peuple). =V.= _Pommadin_. =BICHONNET=: Menton. Ce mot exprime bien l’habitude qu’ont certaines gens de se passer à tout moment la main sur le menton pour se _bichonner_ (se caresser) (Argot du peuple). =V.= _Banquette_. =BICLER=: Pour _cligner_ de l’œil. _Bicler_ est une très vieille expression (Argot des voleurs) =V.= _Guigne à gauche_. =BIDARD=: Heureux, veinard. C’est un nommé _Bidard_ qui gagna un gros lot à une loterie quelconque. On en fit une chanson qui courut les rues: Le père _Bidard_, la mère _Bidard_, etc. Depuis ce temps, les _chançards_ sont des _Bidards_ (Argot du peuple). _N._ =BIDET=: Vase intime que l’on rencontre dans les cabinets de toilette un peu chics. _Bidet_, ainsi nommé par allusion au _bidet_ sur lequel monte le cavalier: madame se met à _cheval_ dessus, et généralement l’eau ne pourrait servir qu’à faire du Thé de la Caravane (Argot des filles). _N._ =BIDET=: La ficelle qui sert aux prisonniers pour se transmettre leurs correspondances d’étages en étages. Allusion au _bidet_ de poste (Argot des voleurs). =V.= _Postillon_. =BIDOCHE=: Viande. Cette expression est connue depuis 1830. Le nom de la _mère Bidoche_ avait été donné à la marchande de soupe qui tenait le restaurant des _Pieds humides_ à l’ancien marché des Innocents, aux Halles. Le mot est resté dans le peuple, qui dit aussi quand la _bidoche_ est trop dure: c’est de la _carne_ (Argot du peuple). =BIDON=: Ventre. Corruption de _bedon_; on dit aussi _bidouard_. S’emplir le _bidon_ chez le _mastroquet_: boire (Argot du peuple). =BIFFARD=: Bourgeois (Argot des voleurs). =BEEFSTEACK À CORBEAU=: Vieille fille publique qui a servi de litière à tout un régiment de cuirassiers (Argot du peuple). _N._ =BEEFSTEACK À MACQUART=: Macquart est l’équarrisseur qui a la spécialité d’abattre les vieux chevaux, les _carnes_ hors de service (Argot du peuple). =BIFFIN=: Chiffonnier. Ainsi dénommé par le peuple à cause de son crochet qui lui sert à _deux fins_: à se défendre et à travailler. Depuis 1848, on dit d’un chiffonnier qu’il est _membre du comité de recherches_. Allusion à ce qu’il fouille dans les tas d’ordures pour y trouver sa vie (Argot du peuple). =BIFFETON=: Billet. Quelques-uns écrivent _Buffeton_, c’est une erreur (Argot des camelots). =BIJOUTIER SUR LE GENOU=: Savetier. Allusion aux clous nommés _bijoux_ avec lesquels il ferre les semelles des souliers (Argot du peuple). =V.= _Gniaff_. =BILBOQUET=: grosse femme. Il paraît pourtant impossible de jongler avec elle. C’est sans doute par allusion à la _boule du bilboquet_ (Argot des voleurs). =BILLANCER=: Condamné qui a fait sa prison. C’est la corruption de _billancher_, _payer_; en effet, le prisonnier qui a fait sa prison a _payé_ sa dette (Argot des voleurs). _N._ =BILLANCHER=: Payer. —C’est dégoûtant, il faut toujours _billancher_ (Argot du peuple). =BILLER=: Diminutif de _billancher_. Même signification (Argot du peuple). =BILLET DE LOGEMENT=: Quand les filles vont à _Montretout_ (la visite sanitaire), si elles sont malades, elles sont retenues et dirigées sur l’infirmerie de Saint-Lazare; le médecin inscrit la nature de la maladie sur un bulletin dont la couleur varie suivant la gravité du cas. Une fois installées dans leur lit, le bulletin est placé à la tête du lit dans un petit cadre spécial. De là le nom de _billet de logement_ (Argot des filles). _N._ =BINELLE=: Faillite. —Il est tombé en _binelle_, mais si les _Anglais_ se _tapent_, il a _carré_ l’_oseille_ (Argot des voleurs). _N._ =BIRBE=: Vieillard (Argot du peuple). =BIRIBI= (dés): Ce jeu se joue dans les foires et dans les fêtes publiques. C’est un vol audacieux (Argot des camelots). =BISOT=: Ami (Argot des voleurs). =V.= _Aminches_. =BISTOURNE=: Cor de chasse. Allusion à la forme _tournée_ de l’instrument (Argot du peuple). =BISTRO=: Marchand de vins. On dit aussi des petits commis des magasins de nouveautés qu’ils sont des _bistros_ (Argot du peuple). =BITURE= (s’en flanquer une): Se saouler comme un cochon (Argot du peuple). =BLAIRE=: Nez. Cette expression est en usage depuis plus de cinquante ans dans les faubourgs, où les _terreurs_ à la sortie des bals publics se _bouffaient le blaire_ (Argot des souteneurs). =BLANCHETTE=: Hiver. Allusion à la neige et au givre qui couvre les rues et les toits d’une nappe _blanche_ (Argot des voleurs). _N._ =BLANCHISSEUSE=: Pièce de cinquante centimes (Argot des voleurs). _N._ =BLANCHISSEUR=: Avocat. Ce mot date du procès du fameux empoisonneur Conty de Lapommerais. Dans les couloirs du palais, avant l’audience des assises, on discutait la condamnation ou l’acquittement; la majorité des avocats étaient d’avis qu’il serait acquitté parce que _Lachaud blanchit_. Lachaud était le défenseur de Lapommerais. Les voleurs se souviennent du calembour (Argot des voleurs). _N._ =BLANCHISSEUSE DE TUYAUX DE PIPES=: Blanchisseuse qui ne blanchit jamais rien, elle n’a que l’apparence. Elle habite généralement aux environs des hôtels, pour avoir la clientèle des commis-voyageurs qui désirent être _servis_ à la minute (Argot du peuple). =BLANCHOUILLARDE=: Hiver. Diminutif de _blanchette_ (Argot des voleurs). =BLAGUE À TABAC=: Vieilles tétasses molles et flasques qui tombent outrageusement (Argot du peuple). =BLANQUETTE=: Argenterie (Argot des voleurs). _N._ =BLAVE=: La cravate (Argot des voleurs). _N._ =BLAVIN=: Mouchoir. Une vieille chanson dit: Le _parrain_ _care_ sa _frime_ dans son _blavin_. (Argot des voleurs). =V.= _Aniterge_. =BLAVINISTE=: Voleur qui a la spécialité de faire le _blavin_ (Mouchoir) (Argot des voleurs). =BLAZE=: Numéro (Argot des voleurs). _N._ =BLÉ=: Argent monnayé (Argot des voleurs). =V.= _Aubert_. =BLÉCHARD=: Laid, disgrâcié de la nature. Dans les faubourgs on dit d’une femme dans ce cas: —Elle est rien _blèche_ (Argot du peuple). =BLÉCHARDE=: C’est le superlatif de _bléchard_. Pour bien accentuer on ajoute qu’elle a une gueule à faire tourner la soupe au lait (Argot du peuple). =BLEU= (Passer au bleu): Faire disparaître un objet quelconque. Le samedi de paye quand l’ouvrier _care_ un peu de _galtouze_, la ménagère dit: —Mon vieux tu m’as fait passer cent sous au _bleu_ (Argot du peuple). =BLEU=: Jeune soldat. Se dit de tous les hommes qui arrivent au régiment. Ils sont _bleu_ jusqu’à ce qu’ils soient passés à l’école de peloton (Argot des troupiers). =BLEU= (J’en suis): Être étonné, ne rien comprendre, en rester ébahi (Argot du peuple). =BLEU= (N’y voir que du): Être volé sans s’en apercevoir (Argot du peuple). =BLEUET=: Billet de banque. Allusion à la couleur _bleue_ des précieux papiers (Argot des voleurs). =V.= _Talbin d’altèque_. =BLOKAUS=: Chapeau haut de forme (Argot du peuple). =V.= _Bloum_. =BLOUM=: Même signification que précédemment (Argot du peuple). =BLOT= (C’est mon blot): J’ai ce que je désire, elle fait bien mon _blot_. Ça fait le _blot_, ça fait le compte (Argot du peuple). =V.= _Balle_. _N._ =BOBÉCHON= (Se monter le): On dit aussi se monter le _bourrichon_. Croire qu’une chose fausse est vraie et prendre un désir pour une réalité (Argot du peuple). _N._ =BOBINE=: Tête (Argot du peuple). =V.= _Tronche_. =BOBINCHE=: L’ancien théâtre _Bobino_. Les étudiants disaient _Bobinsky_ (Argot des étudiants). =BOBINO=: Montre (Argot des voleurs). =V.= _Babillarde_. =BOBINO EN JONC=: Montre en or (Argot des voleurs). =BOBINO EN PLÂTRE=: Montre en argent (Argot des voleurs). =BOCARD=: Maison de tolérance (Argot du peuple). =V.= _Magasin de blanc_. =BOCHE=: Allemand (Argot du peuple). =V.= _Alboche_. =BOG EN JONC=: Montre en or. Quelques-uns écrivent _bogues_ et _baube_, mais ce n’est pas exact (Argot des voleurs). =BOILARD=: Le temps (Argot des voleurs). =BOIRE DU LAIT=: Être content. Se réjouir du mal qui arrive à un ennemi (Argot du peuple). =BOIRE À LA GRANDE TASSE=: Se jeter dans la Seine. En effet, l’homme qui se noie peut boire à son aise, la tasse est assez large et assez profonde (Argot du peuple). =BOIT SANS SOIF=: Ivrogne (Argot du peuple). =V.= _Sac à vin_. =BOÎTE= (La grande): La préfecture de police (Argot des voleurs). =V.= _Tour pointue_. =BOÎTE À CORNES=: Chapeau. Allusion aux cocus qui y cachent leurs _cornes_ (Argot du peuple). =BOÎTE À OUVRAGE=: L’outil avec lequel les filles gagnent leur vie. Quand l’une d’elles va au Dispensaire, elle dit qu’elle va faire voir sa _boîte à ouvrage_ (Argot des filles). _N._ =BOÎTE AUX CAILLOUX=: Prison où l’on couche sur la dure. Allusion aux matelas qui sont rembourrés avec des noyaux de pêches (Argot des voleurs). _N._ =BOÎTE À DOMINO=: Brancard couvert qui sert dans les hôpitaux à transporter les morts de leur lit à l’amphithéâtre. Allusion de forme (Argot du peuple). =BOÎTE À DOMINOS=: La bouche. Allusion à la blancheur des dents et à leur forme qui ressemble aux dés (Argot du peuple). =BOÎTE À LAIT=: Les seins. L’allusion est jolie. Les seins d’une jolie femme sont certainement des _boîtes à lait_ à même lesquelles on voudrait boire (Argot des voleurs). _N._ =BOÎTE À PANDORE=: C’est une boîte ronde qui a la forme exacte d’une montre ordinaire. Elle contient une cire molle très malléable préparée pour prendre les empreintes des serrures des maisons marquées pour être dévalisées. Ce travail est fait par les _larbiniers_ qui préparent la besogne des _cambrioleurs_ (Argot des voleurs). =BOÎTE À PANTES=: Maison de tolérance. Cette expression n’est pas juste; il n’est pas nécessaire d’être un _pante_, c’est-à-dire un imbécile, pour s’offrir une satisfaction avec G. D. G (Argot des voleurs). =V.= _Bocard_. =BOÎTE À SIGUES=: Gilet. Allusion aux poches qui servent à mettre des pièces de vingt francs (_sigues_)... quand on en a (Argot des voleurs). _N._ =BOÎTE À VÉROLE=: Fille de barrières ou rôdeuse de casernes qui s’affranchit de la visite sanitaire et en fait d’eau ne connaît que l’eau d’aff (Argot du peuple). =BOÎTE À VIANDE=: Cercueil. Ce n’est pas une boîte de conserve (Argot des voleurs). _N._ =BOISSEAU=: Chapeau haut de forme. Allusion de forme et aussi à la grandeur de certains chapeaux qui, assurément, pourraient servir à mesurer des pommes de terre (Argot du peuple). =V.= _Bloum_. =BOITEUX D’UN CHASSE=: Borgne. _Manchot_ eût été plus juste (Argot des voleurs). =V.= _Caliborgne_. =BOMBE=: Mesure non classée qui contient environ un demi-litre de vin. Quand un ouvrier en a bu un certain nombre, ses camarades disent: Il est en _bombe_. Quand il rentre au logis, la ménagère fait une scène épouvantable; les voisins entendant le _pétard_ disent: la _bombe_ éclate, gare! (Argot du peuple). _N._ =BON À NIB=: Paresseux. Mot à mot: bon à rien (Argot des voleurs). =BONBON À LIQUEURS=: Bouton qui suinte constamment une humeur liquide. Individu qui a des écrouelles (Argot du peuple). _N._ =BONBONNIÈRE=: Tonneau de vidange. Allusion, sans doute, à ce qu’en l’ouvrant on prend une prise. Dans le peuple on dit d’un vidangeur qu’il en prend plus avec son nez qu’avec une pelle (Argot du peuple). =BONBONNIÈRE À FILOUS=: Omnibus. Les voyageurs sont serrés, le vol à la tire est facile; il y a des voleurs qui n’ont que la spécialité de voler les _morlingues_ en _bonbonnière_ (Argot des voleurs). _N._ =BONDE=: Prison Centrale. Dans les prisons, le fromage réglementaire est le _bondon_, sorte de fromage rond qui se fabrique à Neufchâtel. La portion, une moitié, se nomme un _système_. Par corruption, on a fait _bonde_ (Argot des voleurs). =BONNET À POIL=: Le bonnet que portaient les grenadiers et les sapeurs. Cette coiffure a été supprimée. On l’applique à un tout autre objet (Argot du peuple). =V.= _As de pique_. _N._ =BONNETEAU=: Jeu des trois cartes. Ce jeu ou plutôt ce vol s’exécute à Auteuil, Saint-Ouen et dans les wagons de chemin de fer. M. Marcel Schwob, pour arriver à expliquer l’expression de _bonneteur_, dit qu’il faut passer par des intermédiaires: _bonnet_, _bonneteur_, _lingerie_. _Bonnet_, dans les ateliers, signifie se réunir plusieurs pour former une coterie, résister au patron ou aux autres camarades. Les _bonneteurs_ sont généralement trois pour opérer: le _bonneteur_ qui tient le jeu, l’_engageur_ qui ponte pour allécher les naïfs, le _nonneur_ qui est en _gaffe_ pour avertir si la _rousse dévale_. Ce trio forme donc bien un _bonnet_, et _bonneteur_ en dérive tout naturellement, et il n’est nullement question de _lingerie_. _Bonnet_ et _bonneteur_ sont deux expressions en circulation depuis plus de cinquante ans; Vidocq en parle dans ses _Voleurs_ (Argot du peuple). =BONNET DE NUIT=: Triste comme un _bonnet de nuit_. Homme taciturne, mélancolique, dont la tristesse est communicative, sa présence dans une réunion _jette un froid_ (Argot du peuple). =BONIMENT=: Discours pour attirer la foule. Forains, orateurs de réunions publiques, hommes politiques et autres sont de rudes _bonimenteurs_. Quand un _boniment_ est par trop fort, on dit dans le peuple: c’est un _boniment_ à la graisse de chevaux de bois (Argot du peuple). =BONNIR=: Parler. On appelle le pître qui fait le _boniment_ le _bonnisseur_ (Argot des camelots). =BONNIR QUE PEAU=: Être muet comme une carpe (Argot des voleurs). =BONJOURIER=: Vol au _bonjour_. Ce vol se pratique dans les chambres d’hôtels. Le _bonjourier_ monte lestement les escaliers comme s’il allait faire une visite, généralement le matin à l’heure à laquelle les gens dorment encore; il voit une clé sur la porte, il entre doucement. Si le dormeur s’éveille, il lui souhaite le _bonjour_ et s’excuse de s’être trompé de porte; au cas contraire, il vole rapidement ce qui lui tombe sous la main et s’esquive. Il y a six mois, on arrêta une bande de _bonjouriers_ qui avaient la spécialité de voler les souliers des locataires. Ils avaient sous le bras une serviette d’avocat gonflée de vieux journaux; ils les jetaient dans un coin du couloir et les remplaçaient par les bottines et les souliers (Argot des voleurs). =BOQUABELLE=: La bouche (Argot des voleurs). =V.= _Affamée_. =BOUCAN=: Bruit, tapage, chahut, scandale. Un _boucan_ s’organise pour empêcher un orateur de parler ou un acteur de remplir son rôle. Les étudiants sont passés maîtres dans l’art d’organiser un _boucan_ (Argot du peuple). =BOUCARD=: Boutique (Argot des voleurs). =V.= _Boutanche_. _N._ =BOUCARDIER=: Le petit _pégriot_ qui s’introduit dans la boutique pour aider son complice à voler (Argot des voleurs). =V.= _Raton_. =BOUCHER=: Chirurgien. On dit aussi _charcutier_. Il _charcute_ les chairs du patient (Argot du peuple). =BOUCHON=: Mauvaise gargote où l’on vend du vin sans raisin. Allusion à l’usage ancien de placer comme enseigne, au-dessus de la porte d’entrée, une branche de sapin ou de houx; cela se nomme un _bouchon_ (Argot du peuple). =BOUCHON DE PAILLE=: Objets à vendre. On place un _bouchon de paille_ au collier ou à la queue d’un chien que l’on désire vendre. On dit de certains individus dont la moralité est plus que douteuse: Ils ont un _bouchon de paille_ à la conscience. Mot à mot: elle est à vendre (Argot du peuple). _N._ =BOUCLER=: Enfermer. Dans les prisons, on _boucle_ les prisonniers chaque soir dans leurs cellules. On _boucle_ la _lourde_ (fermer la porte) (Argot des voleurs). =BOUDER AU TURBIN=: Ouvrier qui cherche tous les moyens possibles pour ne pas travailler. Fille publique qui ne veut plus _turbiner_ pour son souteneur. Dans la fameuse chanson: _Lamentations d’un souteneur_, on lit: Quoi? C’est éteint... Tu r’buttes au flanche, Y’a pu de trottinage à la clé, Des dattes pour que tu fass’la planche, L’anse de la marmite est cassé. Pour parer c’gnon qui m’met su’l’ sable, Comme ta peau n’veut plus qu’feignanter, J’vas me r’coller avec ta dabe, Qui ne r’foul’ pas pour _turbiner_. (Argot des souteneurs). =BOUDINOTS=: Cuisses (Argot des voleurs). _N._ =BOUILLON DE ONZE HEURES=: Dans le peuple, on est persuadé que l’on vous administre dans les hôpitaux un _bouillon_ qui fait mourir. Cette légende vient de ce qu’un malade à qui on donna un _bouillon à onze heures_ mourut à midi. Quand il arrive quelque chose de désagréable à quelqu’un, on lui dit : —Comment, trouves-tu le _bouillon_? (Argot du peuple). =BOUIS-BOUIS=: Endroit mal famé. Se dit d’un café comme d’un théâtre de dernier ordre (Argot du peuple). =BOUFFARDE=: Pipe. Allusion à la _bouffée_ de fumée que le fumeur tire par intervalles de sa pipe et lance dans le vide (Argot du peuple). =BOUFFE-TOUT=: Il est des individus atteints de _boulimie_, qui mangent tout ce qui se présente. Thomas l’Ours, le modèle bien connu de Montmartre, mangeait en guise de hors-d’œuvre huit livres de pain en buvant un seau de vin. Les rapins racontent encore qu’un jour de famine Thomas l’Ours avait dévoré un poêle de faïence (Argot du peuple). =BOUFFER LA BOTTE=: Amour platonique... faute de mieux (Argot du peuple). =BOUFFER SON CRAN=: Ne pas être content, _marronner_. On dit aussi: _bouffer son bœuf_ (Argot d’imprimerie). =BOUFFER À L’AS=: Dîner par cœur. Même signification que _passer à l’as_, passer devant Chevet, regarder mais ne pas toucher (Argot du peuple). =BOUFFER DES BRIQUES À LA SAUCE AUX CAILLOUX=: Se dit par ironie. Mot à mot n’avoir rien à se mettre sous la dent (Argot du peuple). _N._ =BOUFFI=: Noyé. Allusion à l’eau qui gonfle la face de l’individu qui reste longtemps immergé (Argot du peuple). =BOUFFI=: Être joufflu. D’un vaniteux on dit qu’il est _bouffi_ d’orgueil. On dit aussi ironiquement: tu l’as dit _bouffi_, dans le sens de _grosse bête_. _Bouffi_ est le synonyme (Argot du peuple). =BOUGE=: Endroit infect. _Bouge_ vient certainement de _bauge_ où les cochons se vautrent dans la boue et dans leurs excréments. C’est dans les _bouges_ que se réunissent les voleurs de bas étage (Argot des voleurs). =V.= _Bagnole_. =BOUGNAT=: Charbonnier. Il y a fort peu de temps que cette expression est en usage, depuis la liberté des marchands de vin (Argot du peuple). =V.= _Auverpin_. =BOUILLOTTE=: La tête. Dans le peuple pour exprimer que l’on a une forte migraine on dit: Ma _cervelle bout_. _Bouillotte_ est la conséquence (Argot du peuple). =V.= _Tronche_. =BOULE DE LOTO=: Gros yeux presque à fleur de tête (Argot du peuple). =BOULE DE SON=: Pain. Ainsi nommé à cause de sa forme ronde et de sa couleur, car autrement il n’entre pas de son dans la confection du pain de munition, pas plus que dans celui qui se fabrique à la boulangerie centrale de Saint-Lazare pour les prisons de la Seine (Argot des voleurs). =BOULEAU=: Travail. Ce mot a pris naissance chez les sculpteurs sur bois, parce que tout morceau de bois à travailler est un _bouleau_. Cette expression s’est étendue à tous les corps de métiers qui disent: —Je cherche du _bouleau_ (Argot du peuple). _N._ =BOULENDOS=: Bossu. On dit aussi: _boscando_. Dans le peuple par allusion à la gibbosité on dit également: —_Il a volé un pain._ —_Il a un orgue de Barbarie dans le dos._ —_Il a un durillon dans le dos._ Les troupiers disent d’un bossu: —_Il a le sac au dos_ (Argot du peuple). =BOULER=: Envoyer promener quelqu’un. _Sabouler_ veut dire la même chose. —Je l’ai salement _saboulé_ ce pierrot-là (Argot du peuple). =BOULET=: Femme légitime. —Tu traînes toujours ton _boulet_ mon vieux Boireau? —Mon Dieu oui, elle ne veut pas crever. —Fous-lui un lavement au verre pilé. _Boulet_, allusion au forçat condamné aux travaux forcés qui en traînait un autrefois pendant la durée de sa peine (Argot du peuple). =V.= _Paillasse_. =BOULETTE=: Commettre une erreur, se tromper. —J’ai fait une rude _boulette_ en me mariant. —Quelle boulette j’ai faite en quittant ma place. La dernière _boulette_ est de mourir (Argot du peuple). =BOULETTES=: Billes de billard. Allusion à la forme ronde (Argot des voleurs). _N._ =BOULETTE=: Mélange de chair à saucisse et de bœuf bouilli, haché menu. Elles sont rondes, de là: _boulette_ (Argot du peuple). =V.= _Attignolles_. =BOUL’MICHE=: Abréviation de boulevard Saint-Michel (Argot des étudiants). =BOULIN=: Perche de sapin qui sert au maçon pour construire ses échafaudages (Argot du peuple). =BOULINE=: Cette expression désigne une vieille coutume en usage dans les petites fêtes locales. Les camelots qui _font_ ces fêtes sa cotisent pour produire une certaine somme elle est destinée à faire boire le garde-champêtre pour détourner sa surveillance ou à l’indemniser s’il y consent pendant qu’un des compères qui tient un jeu de hasard vole les paysans. _Bouliner_, faire le tour de la _bouline_ (Argot des camelots). =BOULOTTAGE=: Nourriture (Argot du peuple). =BOULOTTE=: Femme rondelette, grassouillette, bien en chair, ayant du _monde_ devant et derrière (Argot du peuple). _N._ =BOULOTTER=: Manger (Argot du peuple). =BOULOTTER=: Faire ses petites affaires. Quand ça va bien on dit: ça _boulotte_ à la _douce_, comme le marchand de cerises. On sait que ce dernier pour annoncer sa marchandise crie: —À la _douce_, à la _douce_ (Argot du peuple). =BOURBEUX=: Paysan. Allusion à ce que pendant la saison des pluies il est toujours couvert de boue (Argot des voleurs). =V.= _Pétrousquin_. =BOURSICOTIER=: Agioteur qui _boursicote_ des valeurs qui n’en ont pas. _Tripoteur_, qui vend et achète des _résidus_ au _marché des pieds humides_ à tous les négociants qui, voulant faire une jolie faillite, achètent des valeurs tombées pour justifier de grosses pertes vis-à-vis du syndic (Argot des boursiers). =BOURDON=: Fille qui fait le trottoir. Cette expression vient de ce que les filles chantent sans cesse, ce qui produit aux oreilles des passants un _bourdonnement_ semblable à celui du petit insecte que l’on nomme _bourdon_ (Argot des souteneurs). =BOURGUIGNON=: Le soleil. Il fait mûrir les bons vins de _Bourgogne_ (Argot des voleurs). =BOURRASQUE=: Rafle faite par des agents. —Ne vas pas ce soir au _bistro_, il y aura une _bourrasque_ à cause du _gonce estourbi_ par la Saucisse. _Bourrasque_ peint bien les agents arrivant sur les boulevards et les balayant comme une trombe, ou pénétrant dans une maison comme un ouragan (Argot des voleurs). _N._ =BOURRE-COQUIN=: Haricots (Argot des voleurs). =BOURREUR DE PÈGRES=: Le Code pénal. Généralement les figures employées sont plus exactes; mieux vaudrait dire _bourreur de bondes_, car c’est d’après le Code que les _prisons_ sont _bourrées_ et non les _pègres_ (Argot des voleurs). =BOURRIQUE=: Indicateur (Argot des voleurs). _N._ =BOUTERNIÈRE= (La): C’est une voleuse qui, dans les foires de villages, expose dans une vitrine nommée _bouterne_ des bijoux véritables. Les paysans, alléchés de courir la chance de gagner une montre en or pour deux sous, prennent des billets mais ils ne gagnent jamais. Les dés sont _plombés_ (Argot des voleurs). =BOUSCULADE= (Vol à la): Ce vol est une variété du _vol à l’esbrouffe_. Il y a quelques années, un facteur fut victime, place de la Bourse, du vol d’un pli chargé contenant quarante mille francs. Ce vol est très commun (Argot des voleurs). =V.= _Esbrouffe_. =BOUSILLER=: Flâner, gouaper. Mettre quinze jours sur un ouvrage où il en faudrait deux et ensuite le terminer rapidement avec une _mal façon_ (Argot du peuple). =V.= _Saboter_. =BOUSILLEUR=: Ouvrier qui _bousille_ (Argot du peuple). =BOUT COUPÉ=: Juif (Argot du peuple). =V.= _Baptisé au sécateur_. =BOU-CI BOU-LÀ=: Deux numéros tête-bêche =69= (Argot du peuple). =BOUTANCHE=: Boutique. Quelques-uns disent que _boutanche_ veut dire _bouteille_, c’est une erreur. _Boutanche_ veut dire _boutique_ (Argot des voleurs). =V.= _Boucard_. =BOUTIQUE À SURPRISES=: Maisons qui, en apparence, vendent des livres, des tableaux ou de la parfumerie et chez lesquelles l’acheteur trouve tout autre chose que la marchandise annoncée. Ces maisons ne sont pas au coin du quai, on ne rend pas l’argent si le client n’est pas content (Argot des filles). _N._ =BOTTOCHE=: Fusil (Argot des voleurs). _N._ =BOUSSOLE=: Tête. La tête, comme la _boussole_, dirige (Argot du peuple). =BOUTORD=: Tabac à chiquer. On sait que ce qui affecte le plus le prisonnier c’est la privation du tabac. Une chanson célèbre dans les prisons centrales: _Pour du tabac_, dit ceci: Pour du tabac, disait un _pègre_. Et pour trois ponces de _Saint-Père_, J’ai _basardé_ ma _viande_ hier. Et j’ai _turbiné_ comme un nègre Pour un petit bout de _boutord_. Je vends ma _bonde_ et mon pain même Et, bourreau de mon pauvre corps, Je suis doublement au _système_ Pour du tabac, pour du tabac. (Argot du peuple). _N._ =BOYAU=: Il a toujours un _boyau_ de vide pour _soiffer_ (Argot du peuple). =V.= _Poivrot_. =BOXON=: Maison de tolérance. Maison _mal famée_, dit le sénateur Bérenger, sans doute parce qu’il y a de fort _jolies femmes_. Question d’appréciation (Argot du peuple). =V.= _Bocard_. =BRACQUEMARD=: _Pennis_. =V.= _Paf_ (Argot du peuple). =BRAISE=: Argent. Allusion à la _braise_ du boulanger qui enflamme très vite le charbon ou le bois. Donner de la _braise_ à une fille c’est l’enflammer. La _braise_ passe vite dans les deux cas (Argot des filles). =BRANDILLANTE=: Sonnette. Par le mouvement que lui imprime le cordon, elle _brandille_ (Argot de voleurs). _N._ =BRANCARDS=: Jambes. Elles traînent le corps. Cette expression a donné _naissance_ à une autre. Se mettre dans les _brancards_. La situation explique le fait, surtout si on ajoute d’une femme passionnée: _elle rue dans les brancards_ (Argot des souteneurs). _N._ =BRANLEUSE DE GENDARMES=: Allusion au fer à repasser qui porte ce nom. Les blanchisseuses _branlent_ pour repasser ce fer toute la journée (Argot des blanchisseuses). =BRASSEUR DE FAFFES=: Fabricant de faux papiers à l’usage des filles de maisons et des voleurs (Argot des voleurs). =V.= _Lopheur_. =BREDOUILLE=: Suivre une femme et ne pas réussir à la _lever_. Aller à la chasse et revenir _bredouille_ (n’avoir rien tué). Aller chercher de l’argent et n’en pas recevoir. Mot à mot, _bredouille_ est le synonyme de _rater_ (Argot du peuple). =BRÈME DE FOND=: Pièce de cinq francs en argent (Argot du peuple). =BRÈMES=: Les cartes (Argot des filles). =BRÈME DE PATELINS=: Cartes de pays. Elles servent aux _rabatteurs de sorgues_ pour se guider (Argot des voleurs). =BRÉMER=: Jouer aux cartes (Argot des voleurs). =BRENICLE=: Non. C’est une corruption de _bernique_ (Argot des voleurs). _N._ =BRICULE=: Officier de paix (Argot des voleurs). =BRIDE=: Chaîne de montre. Elle _bride_ le gilet (Argot des voleurs). =V.= _Cordelettes_. =BRIDOUX=: Fou (Argot des voleurs). =BRIFFE=: Pain (Argot des voleurs). =V.= _Bricheton_. =BRIFFER=: Manger. Vient de _briffe_ (Argot du peuple). =BRIGEANT=: Cheveux (Argot des voleurs). =V.= _Alfa_. =BRIGEANTE=: Perruque. On dit aussi _réchauffante_, en effet, elle préserve les cheveux du froid (Argot des voleurs). _N._ =BRIGNOLET=: Pain (Argot du peuple). =V.= _Bricheton_. =BRILLARD=: Pièce de vingt francs. Elle brille (Argot des voleurs). =V.= _Sigues_. =BRINGUE=: Grande femme haute en jambes. Quand elle est mal _ficelée_ mal habillée, c’est une _bringue_ (Argot du peuple). =V.= _Asperge montée_. =BRISEURS=: Bande noire. Cette bande est composée de plusieurs Auvergnats qui achètent des marchandises neuves et qui les _brisent_ pour les revendre ensuite à la ferraille comme marchandises d’occasion (Argot des voleurs). =BROCHET=: Marlou, souteneur (Argot du peuple). =V.= _Barbillon_. =BROQUE=: Un sou (Argot des voleurs). =BROQUILLE=: Minutes (Argot des voleurs). =BROQUILLEURS=: Les voleurs qui portent ce nom pratiquent _le vol à l’étiquette_. Ce vol consiste à faire fabriquer des bagues en _toc_ ornées de pierres fausses et à les substituer adroitement aux vraies dans les écrins que montrent les bijoutiers aux faux acheteurs (Argot des voleurs). _N._ =BROUILLÉ AVEC LE DIRECTEUR DE LA MONNAIE=: N’avoir pas le sou (Argot du peuple). =V.= _Les toiles se touchent._ =BROUILLOTTE=: La nuit (Argot des voleurs). =V.= _Brunette_. =BRÛLÉ=: Affaire manquée. Se dit plus communément d’un agent chargé d’une surveillance, lorsqu’il est _éventé_ par le surveillé il est _brûlé_. On _brûle_ également une carte vue par les joueurs (Argot des voleurs). =BRÛLE-GUEULE=: Pipe dont le tuyau est très court. En fumant, la pipe vous _brûle la gueule_ (Argot du peuple). =V.= _Bouffarde_. =BRÛLER LE PÉGRIOT=: Faire disparaître les traces d’un vol (Argot des voleurs). =BRÛLOTTE=: Lanterne (Argot des voleurs). =BRUNETTE=: La nuit (Argot des voleurs). =V.= _Brouillotte_. _N._ =BÛCHE=: Imbécile. Borné, bête, grossier comme une bûche. _Bûche_: une figure, dame, roi ou valet, qui ne compte pas au jeu de baccara (Argot des voleurs). =BÛCHER=: Travailler. —Je suis dans mon _dur_, je _bûche_ ferme. (Argot du peuple). =BÛCHER=: Frapper fort, allusion au bûcheron. _Bûcher_(se): Se battre avec acharnement. _Bûcher le bouleau_: attaquer avec énergie une pièce de bois (Argot des sculpteurs). _N._ =BUREAU DES PIEDS=: Salle du Dépôt de la Préfecture de Police où M. Bertillon fait passer les détenus à la mensuration pour reconnaître leur identité (Argot des voleurs). _N._ =BURETTE=: Visage (Argot des voleurs). _N._ =BURLINGUE=: Bureau. J’ai été au _burlingue_ du _quart_ (Argot des voleurs). =BUQUER=: Voleurs qui dévalisent dans les boutiques sous le prétexte de demander de la monnaie (Argot des voleurs). =BUTTE= (Monter à la): Quand l’échafaud avait treize marches, cette expression était juste, aujourd’hui qu’il est de plein-pied, elle n’a plus de raison d’être (Argot des voleurs). =BUTTER=: Tuer (Argot des voleurs). C =ÇÀ= (Il a de): Se dit de quelqu’un qui possède beaucoup d’argent. Les filles, pour vanter les agréments d’un homme, disent: _Il a de çà_; mais ce n’est pas d’argent qu’il s’agit (Argot du peuple). =CABASSEUR=: Cancanier ou cancanière (Argot du peuple). =CABASSER=: Bavarder sans cesse à tort et à travers (Argot du peuple). =CABESTAN=: Officier de paix. Il fait virer ses sous-ordres (Argot des voleurs). =V.= _Bricule_. =CABOCHE=: Tête (Argot des voleurs). =CABOMBE=: La chandelle. Quelques-uns écrivent _calombe_ ou _calbombe_; le vrai mot est _cabombe_ (Argot du peuple). =CABOT=: Chien (Argot du peuple). =V.= _Alarmiste_. =CABOT FERRÉ=: Gendarme. Allusion aux clous qui garnissent les semelles de bottes des gendarmes (Argot des voleurs). =V.= _Hirondelle de potence_. =CABOT=: Chien du commissaire de police. Par abréviation on dit simplement le _cabot du quart_ (Argot du peuple). =CABRIOLET=: Corde de boyau de chat, ou forte ficelle de fouet, terminée par deux chevilles. Les gardes et les agents passent le _cabriolet_ au poignet des prisonniers pour prévenir les évasions et empêcher les récalcitrants de se révolter. (Argot des voleurs). =CABOULOT=: Cabaret de bas étage. Brasserie où les consommateurs sont servis par des femmes. _Caboulot_ n’est pas juste, on devrait dire _maison tolérée_. Cette expression a pour berceau le quartier latin (Argot du peuple). =CACHALOT=: Femme qui a des aptitudes spéciales. Elle rend par le nez ce qu’elle a avalé par la bouche (Argot des filles). _N._ =CACHE-FRINGUES=: Armoire (Argot des voleurs). _N._ =CACHET DE M. LE MAIRE=: Tache à la chemise, derrière, ce qui indique l’oubli du papier traditionnel (Argot du peuple). =CADENNE=: Chaîne de montre. Quelques-uns écrivent _cadelle_, mais c’est bien _cadenne_, car on appelait ainsi la grande _chaîne_ de forçats qui autrefois partaient de Bicètre pour les bagnes de Brest ou de Toulon. Cette expression est restée (Argot des voleurs). =CADET=: Le postérieur. —Viens ici, bibi, que je torche ton petit _cadet_. —Tu as une figure qui ressemble à mon _cadet_ (Argot du peuple). =CADETS=: Outils de voleurs (Argot des voleurs). =V.= _Agobilles_. =CADRAN SOLAIRE=: Le derrière. Allusion à sa forme ronde. Cette expression vient du _Pont cassé_, pièce représentée au théâtre Séraphin, au Palais-Royal. Nicolas, le comique de la troupe de marionnettes, répondait à l’officier, le jeune premier, qui lui demandait l’heure, en lui montrant son _derrière_. En même temps il lui chantait: Voilà le _cadran solaire_, Tire lire, lire.... (Argot du peuple). =CAFARD=: Individu qui affecte des dehors religieux. Hypocrite qui n’en croit pas un traître mot et exploite la crédulité publique. _Cafard_ est employé comme terme de mépris (Argot du peuple). _N._ =CAFARD=: Ouvrier qui, dans les ateliers, capte la confiance de ses camarades pour rapporter aux patrons ce qu’ils pensent et ce qu’ils disent (Argot du peuple). _N._ =CAFARDE=: La lune (Argot des voleurs). =V.= _Moucharde_. =CAFARDER=: Moucharder, dénoncer (Argot du peuple). _N._ =CAFIOT=: Mauvais café fait avec de la chicorée ou avec des résidus de vieux marc de café déjà épuisés (Argot du peuple). =V.= _Jus de chapeau_. =CAILLOU=: Tête. Il a rien un sale caillou (Argot du peuple). =CAISSE D’ÉPARGNE=: Le marchand de vin. C’est là, en effet, que les ouvriers placent non seulement leurs économies, mais souvent l’argent de la paie (Argot du peuple). _N._ =CALANCHER=: Mourir. Pour indiquer qu’un objet n’est pas d’aplomb, on dit: il _calanche_ (penche) à droite ou à gauche (Argot du peuple). =CALEBASSE=: Seins. Se dit quand les malheureux sont sans consistance, qu’ils pendent et se _répandent_ (Argot du peuple). =CALÈCHE DU PRÉFET=: Le panier à salade qui transporte les voleurs des postes de police au Dépôt de la préfecture (Argot des voleurs). =CALENDRINER SUR LE SABLE=: Être dans une misère noire (Argot des voleurs). =CALER=: On _cale_ un meuble avec un coin de bois. Un homme riche est _calé_. Les typographes emploient cette expression pour dire qu’ils attendent de la copie, ils _calent_ (Argot du peuple). =CALER LES JOUES=: Bien boire et bien manger. Allusion aux joues qui gonflent lorsqu’elles sont pleines (Argot du peuple). =CALIBORGNE= ou =CALIBORGNON=: Borgne (Argot des voleurs). =V.= _Guigne à gauche_. =CALOQUET=: Chapeau (Argot du peuple). =V.= _Bloum_. =CALOTS=: Les yeux mauvais. _Calots_ à la manque (Argot des voleurs). =CALOT=: Grosse bille avec laquelle les enfants jouent, à la _poucette_ (Argot du peuple). =CALTER=: S’en aller. _Calter_ est synonyme de _débiner_; on dit à quelqu’un en danger: _calte_ au plus vite ou bien _débine_-toi (Argot du peuple). =CAMARDE=: La mort. Mais si la _grive_, Parfois arrive, Pour nous _servir_, Nous _suivre_ ou nous _courir_, Cont’ la _camarde_, Toujours en garde, On a bien soin, De jouer du _surin_. (_Romance du Pegre_). (Argot des voleurs). =CAMARLUCHE=: Camarade (Argot du peuple). =CAMAROS=: Même signification. Même argot. =CAMBOLA=: Faux épileptique (Argot des voleurs). =V.= _Battre un dig-dig_. =CAMBRIOLEUR=: Vol à la _cambriotte_. Ce vol fut célébré par B. Maurice: Travaillant d’ordinaire, La _sorgue_ dans _Pantin_, Pour mainte et mainte affaire, Faisant très bon _chopin_. Ma gente _cambriotte_. _Rendoublée_ de _camelotte_, De la _dalle_ au _flaquet_, Je vivais sans disgrâce, Sans _regout_ ni _morace_, Sans _taf_ et sans regret. Le _quart-d’œil_ lui _jabotte_: _Mange_ sur tes _nonneurs_; Lui tire une carotte, Lui montrant la _couleur_. L’on vient, l’on me _ligotte_, Adieu, ma _cambriotte_, Mon beau _pieu_, mes _dardants_. Je monte à la _Cigogne_. On me _gerbe_ à la _grotte_, Au _tap_ et pour douze ans[1]. [1] La traduction de toutes ces expressions est dans le _Dictionnaire_. =CAMBROUSIER=: Escarpe qui vole tout ce qui lui tombe sous la main on parcourant la France. Ce nom lui vient de ce qu’il opère dans les _cambrousses_ (maison) (Argot des voleurs). =CAMBUSE=: Maison qui ne tient pas debout, bâtie avec de la boue et du crachat. _Cambuse_: cabaret où l’on sert mal et de mauvaise marchandise (Argot du peuple). =CAMBUSIER=: Le maître de la _cambuse_. _Cambusier_: qui tient la cantine au bagne ou à bord (Argot du peuple). =CAMELOTTE=: Marchandise. Pour qualifier quelque chose d’inférieur on dit: c’est de la _camelotte_ (Argot du peuple). =CAMOUFLE=: Chandelle (Argot du peuple). =V.= _Cabombe_. =CAMOUFLER= (se): Changer de costumes et de physionomie afin de n’être pas reconnu (Argot des souteneurs et des agents de la Sûreté). =CAMOUFLER=: Réparer. On _camoufle_ un décor (Argot des artistes). =CANAPÉ=: Femme copieusement douée du côté des fesses. Le mot est en usage chez les pédérastes qui ne recherchent pas cet avantage du côté féminin (Argot des voleurs). =CANARD=: Mauvais journal. Quand un journal est mal rédigé, mal imprimé, pas même bon pour certain usage, car le papier se déchire, c’est un _canard_ (Argot du peuple et des journalistes). =CANARD=: Terme de mépris employé dans les ateliers vis-à-vis d’un mauvais camarade. —Bec salé, c’est un sale _canard_ (Argot du peuple). _N._ =CANARD=: Nouvelle fausse ou exagérée. Ce système est employé par certains journaux aux abois. On pourrait en citer cinquante exemples depuis les écrevisses mises par un mauvais plaisant dans un bénitier de l’église Notre-Dame-de-Lorette et qui retournèrent à la Seine en descendant par les ruisseaux de la rue Drouot; jusqu’au fameux _canard_ belge. Un huissier à l’aide d’une ficelle pêcha vingt _canards_ qui s’enfilèrent successivement, comme Trufaldin dans les _Folies Espagnoles_ de Pignault Lebrun, il fut enlevé dans les airs, mais la ficelle se cassa et il tomba dans un étang où il se noya. Ce _canard_ fit le tour du monde arrangé ou plutôt dérangé par chacun, il y a à peine quelques années qu’il était reproduit par un journal, mais la fin était moins tragique, l’huissier était sauvé par un membre de la Société des Sauveteurs à qui on décernait une médaille de 1^re classe. Pour sauver un huissier on aurait dû lui fourrer dix ans de prison (Argot du peuple). =CANARDER SANS FAFFS=: Braconner sans port d’armes (Argot des voleurs). =CANASSON=: Vieux cheval hors de service. On appelle aussi les vieillards: _canasson_ (Argot du peuple). =V.= _Gaye_. =CANFOUINE=: Domicile (Argot des voleurs). =CANICHE=: Ballot à oreilles. Allusion aux longues oreilles de chien-mouton (Argot des voleurs). _N._ =CANER=: Avoir peur, reculer. _Caner_: synonyme de lâcheté (Argot du peuple). =CANER LA PEGRENNE=: Mourir de faim (Argot des voleurs). =CANNE D’AVEUGLE=: Bougie. Allusion à la forme droite comme la _canne_ sur laquelle s’appuie l’_aveugle_ (Argot des voleurs). =CANON=: Verre de vin. Allusion à la forme sphérique du verre (Argot du peuple). =CANONNER=: Boire des _canons_ sur le _zinc_ du _mastroquet_ (Argot du peuple). =CANONNIER DE LA PIÈCE HUMIDE=: Soldat infirmier qui opère sur les derrières de l’armée (Argot du peuple). =CANONNIER=: Les _cambrioleurs_. =V.= ce mot. =CANTON=: Prison. Le prisonnier y est en effet _cantonné_ (Argot des voleurs). =CAPISTON=: Capitaine (Argot des troupiers). =CAPITONNÉE=: Femme bien en chair, qui a une gorge bien développée, qui se tient ferme sans le secours du corset. On dit aussi qu’elle est _meublée_. —Ah! Gugusse, mince de viande, ça ferait rien un bath traversin (Argot du peuple). _N._ =CAPSULE=: Chapeau (Argot du peuple). =V.= _Bloum_. =CARAMBOLAGE=: Choc de deux voitures dans la rue. Les voyous que cela amuse disent: —Ah zut, _mince_ de carambolage (Argot du peuple). =CARAMBOLER=: Au billard, faire toucher les trois billes (Argot du peuple). _N._ =CARAMBOLER=: =V.= _Rouscailler_. =CARCAGNOT=: Brocanteur, usurier, juif qui achète tout à vil prix sans s’occuper de la provenance (Argot des voleurs). _N._ =CARCASSER=: Tousser. —_Carcasse_-donc ton dernier poumon tu ne nous emmerderas plus la nuit (Argot du peuple). =CARE= (Vol à la care): Les _careuses_ entrent dans un magasin, principalement dans les bureaux de tabacs et demandent à changer des pièces d’un certain millésime contre d’autres. Profitant de l’inattention des commerçants, elles escamotent une partie des pièces (Argot des voleurs). =CARGOT=: Cantinier. Ce n’est pas une corruption, de _gargotier_, car d’après les règlements des prisons le _cargot_ ne fait pas de cuisine et ne vend que des aliments froids, du fromage et de la charcuterie. Comme les cantiniers sont _arabes_, qu’ils étranglent le plus qu’ils peuvent, on les a baptisés du nom de _cargot_, synonyme d’_usurier_, abréviation de _carcagnot_ (Argot des voleurs). _N._ =CARRÉMENT=: N’aie pas peur, vas-y carrément. ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ Maintenant que tu n’as plus q’ta chemise, Tu peux y aller _carrément_. (Argot du peuple). =CARME=: Argent (Argot des souteneurs). =V.= _Aubert_. =CARME À L’ESTORGUE=: Fausse monnaie (Argot des voleurs). =CARMER=: Payer (Argot des voleurs). =V.= _Billancher_. =CARNE=: Viande dure. On dit d’un homme impitoyable: —Il est dur comme une vieille _carne_. L’ouvrier qui ne veut rien faire est également une _carne_ (Argot du peuple). =CAROTTE=: Mensonge pour tromper ou duper quelqu’un. Tirer une _carotte_: emprunter de l’argent. Tirer une _carotte de longueur_: la préparer de longue main. Le troupier, tire une _carotte_ à sa famille quand il lui écrit qu’il a perdu la clé du champ de manœuvre, ou qu’il a cassé une pièce de canon (Argot du peuple). =CAROTTIER=: Homme qui fait le métier d’en tirer pour vivre (Argot du peuple). =CARRÉ DES PETITES GERBES=: La police correctionnelle (Argot des voleurs). =CARRÉ DE REBECTAGE=: La Cour de cassation. Quelquefois elle diminue la peine du condamné ou l’acquitte complètement. Il est _rebecqueté_. _Rebecqueté_ se dit pour raccommoder, se rapprocher (Argot des voleurs). =CARREAUX=: Les yeux (Argot des voleurs). =CARREAUX=: Outils spéciaux des malfaiteurs (Argot des voleurs). =V.= _Tateuse_. =CARREAUX=: Fer à repasser dont se servent les tailleurs pour aplatir les coutures (Argot du peuple). =CAROUBLE=: Clé employée par les _carroubleurs_ (Argot des voleurs). =CAROUBLEUR=: Vol à l’empreinte à l’aide de fausses clés (Argot des voleurs). =V.= _Boîte de Pandore_. =CARRUCHE=: Prison (Argot des voleurs). =V.= _Gerbe_. =CASIMIR=: Gilet. Allusion à l’étoffe (Argot des voleurs). =V.= _Boîte à Sigue_. =CASQUE= (Avoir le): Être malin, savoir profiter des occasions, les saisir aux cheveux, même lorsqu’elles sont chauves. _Avoir son casque_: avoir bu a en être saturé. —_Il a son casque_, il en a plein la peau (Argot du peuple). =CASQUER=: Payer (Argot des filles). =V.= _Billancher_. =CASTU=: Infirmerie, hôpital (Argot des voleurs). =CASUEL=: Vente de hasard sur laquelle on ne comptait pas. _Casuel_: ce que les mariages, les baptêmes et les enterrements rapportent aux curés. _Casuel_: le _miché_ que fait la fille en dehors de son entreteneur (Argot du peuple). _N._ =CASSANTES=: Les dents (Argot du peuple). =V.= _Dominos_. =CASSER LA HANE=: Couper la bourse (Argot des voleurs). =CASSER DU SUCRE=: Dénoncer. _Casser du sucre_ sur quelqu’un: en dire du mal (Argot des voleurs). =V.= _Mouton_. =CASSE-POITRINE=: Mauvaise eau-de-vie. En effet, elle _casse_ rudement la poitrine de ceux qui en boivent (Argot du peuple). =V.= _Eau d’aff_. =CASSER SA CANNE=: Rompre sa surveillance. _Casser sa canne_: mourir. _Casser une canne_: dormir (Argot du peuple). =V.= _Sorguer_. =CASSER SA PIPE=: Mourir. On donne pour origine à cette expression qu’un fumeur, attablé dans un cabaret, mourut subitement. Sa _pipe_ lui tomba des lèvres et se cassa. Quand on le releva, un des assistants s’écria: —Tiens il a _cassé_ sa _pipe_ (Argot du peuple). =CASSER UNE LOURDE=: Briser une porte (Argot des voleurs). =CASSER SA FICELLE=: S’évader de la prison. Allusion au hanneton qui s’évade quand le fil qu’il a à la patte se brise (Argot des voleurs). _N._ =CASSER SON VERRE DE MONTRE=: Tomber sur le derrière (Argot du peuple). =V.= _Tomber pile_. =CASSEROLE= (La remuer): Dénoncer. Mot à mot: _cuisiner_ (faire parler). Allusion au _cuisinier qui remue la casserole_ (Argot des voleurs). =CATIN=: Fille publique. _Catin_: petite poupée. _Catin_: nom d’amitié donné à une maîtresse. C’est aujourd’hui la St-Crépin Les savetiers se frisent Mon cousin ira voir catin. ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ (Argot du peuple). =CATICHE=: Diminutif de _catin_ (Argot du peuple). =CAVALER=: Se sauver. —_Cavale_-toi v’là la rousse (Argot du peuple). =CAVE=: Homme. Allusion à l’estomac de l’homme qui emmagasine une foule de choses (Argot des voleurs). =CELLOTTE=: Cellule (Argot des voleurs). =CENT PIEDS DE MERDE= (Je voudrais te voir dans): Souhait d’un gendre à sa belle-mère féroce ou à une femme crampon (Argot du peuple). _N._ =CENTRE=: Nom. Quant une personne donne un faux nom, c’est un _centre à l’estorgue_ (Argot des voleurs). =CENTROUSSE=: Maison centrale (Argot des voleurs). =CERF-VOLANT=: Jouet d’enfant composé de baguettes d’osier, recouvertes de feuilles de papier, que les gamins enlèvent en l’air avec une ficelle. Les voleuses qui dans les jardins publics s’emparent des boucles d’oreilles des jeunes enfants se nomment des _cerf-volants_, parce que le vol accompli elles se sauvent en courant comme un _cerf_ (Argot des voleurs). =CES MESSIEURS=: Agents de police. —Ne vous hasardez pas ce soir sur le trottoir, _ces messieurs_ y seront (Argot des filles). =C’EST PLUS FORT QUE DE JOUER AU BOUCHON AVEC DES PAINS À CACHETER DANS SIX PIEDS DE NEIGE=: Expression employée pour marquer le comble de l’étonnement. Ou dit aussi _c’est fort de café_ (Argot du peuple). _N._ =CHABANNAIS=: Faire du tapage, du bruit. —Allons, viens boire le dernier verre. —Y a pas de pet, la bourgeoise ferait un rude _chabannais_. Faire du _chabannais_ dans une assemblée: troubler l’ordre (Argot du peuple). =CHABLER=: Lancer des pierres dans un arbre pour en abattre les fruits. _Chabler_ est le synonyme de _gauler_ (Argot du peuple) _N._ =CHAMBARD= (En faire): Faire un _potin_ infernal (Argot du peuple). =V.= _Chambarder_. =CHAMBARDER=: Tout casser, tout démolir, bouleverser une maison de fond en comble, renouveler son personnel. Mot à mot: faire _balai neuf_ (Argot du peuple). =CHAMBERTER=: S’amuser. Quand les troupiers mettent les lits en bascules, qu’ils _chahutent_ toute la chambrée, ils _chambertent_ les camarades (Argot du troupier). =CHAMP DE NAVET=: Cimetière d’Ivry. Il est ainsi nommé parce qu’il est sur l’emplacement de champs dans lesquels jadis les paysans cultivaient des _navets_. Au Château d’Eau sur l’emplacement de la caserne du prince Eugène (ci-devant) il existait un bal qui se nommait aussi pour les mêmes raisons, vers 1855, _le Champ de Navet_ (Argot du peuple). =CHANDELLE= (Moucher la): On dit cela au moutard qui laisse pendre sous son nez un filet de morve. On appelait autrefois _chandelle_ les troupiers qui faisaient le service des postes de Paris pour conduire les voleurs aux bureaux des commissaires de police. —J’ai été conduit entre _quatre chandelles_. Allusion à la raideur du fusil (Argot du peuple). =CHANGER SON POISSON D’EAU=: Aller pisser. L’allusion est claire (Argot du peuple). =CHANGER SON FUSIL D’ÉPAULE=: Changer d’avis ou d’opinion. On dit pour exprimer la même chose: _mettre son drapeau dans sa poche_. Ou bien encore: _retourner sa veste_ (Argot du peuple). =CHANGEUR=: Le fripier chez lequel les voleurs vont se _camoufler_ moyennant un abonnement: tout comme les avocats chez le costumier du barreau. Ils trouvent là tous les costumes nécessaires pour leurs transformations (Argot des voleurs). =CHAPARDER=: Aller à la maraude (Argot des troupiers). =CHAPARDEUR=: Qui _chaparde_ (Même argot). =CHAPELET DE SAINT-FRANÇOIS=: Chaîne qui sert à attacher les condamnés. C’est un _chapelet_ que volontiers ils n’égrèneraient bien pas (Argot des voleurs). =CHAPELLE BLANCHE=: Le lit. Allusion à la blancheur des draps (Argot du peuple). _N._ =CHAPELURE SUR LE JAMBONNEAU= (Pas de): Absence complète de cheveux. Genou hors ligne. On dit aussi: _pas de cresson sur le caillou_ (Argot du peuple). =CHAPERONNER=: Protéger quelqu’un. Mot à mot: lui servir de _chaperon_ pour le couvrir (Argot du peuple). =CHARGÉ=: Quand une fille fait un _miché_ elle dit: —J’ai _chargé_. Dans la nuit elle fait le contraire elle le _décharge_ de son _morlingue_ (Argot des filles). _N._ =CHARGÉ PAR LA CULASSE=: Prendre un lavement. Les _passifs_ se _chargent_ également par le même côté. Allusion aux canons (Argot du peuple). =V.= _Passifs_. =CHARLEMAGNE= (faire): Se mettre au jeu avec peu d’argent, gagner une certaine somme et se retirer de la partie sans donner de revanche (Argot des joueurs). =CHATELLERAULT=: Couteau. Allusion à la ville renommée pour sa fabrication. On pourrait aussi bien dire _Thiers_ ou _Nontron_ (Argot des voleurs). =V.= _Lingre_. =CHARRIAGE À LA MÉCANIQUE=: Ce genre de vol est l’enfance de l’art; un mouchoir suffit. Le voleur le jette au cou d’un passant, il l’étrangle à moitié, le charge sur son épaule pendant qu’un complice le dévalise. C’est exactement _le coup du père François_, toutefois pour exécuter celui-ci les voleurs se servent d’une courroie flexible ou d’un foulard de soie (Argot des voleurs). =CHARRIAGE AU POT=: Ne demande pas non plus un grand effort d’imagination: _un pot_ et un imbécile aussi bête que lui suffisent. Deux voleurs abordent un individu à l’air naïf. Après quelques stations dans les cabarets, ils lui offrent de le conduire dans un _bocard_ éloigné. En chemin, ils avisent un terrain vague, l’un des deux voleurs exprime à ses compagnons la crainte d’être volé car il porte sur lui une grosse somme. Devant eux il la cache dans le pot qu’il enterre. Plus loin il se ravise et dit au naïf d’aller déterrer l’argent caché, mais auparavant il lui fait donner ce qu’il a sur lui. Le naïf part, ne trouve que des rouleaux de plomb dans le _pot_ et quand il revient les voleurs sont loin (Argot des voleurs). =CHARRIAGE AU COFFRET=: Ce vol là est plus drôle. Un individu, avant l’aspect d’un anglais s’adresse à la dame de comptoir d’un grand café, et lui confie _un coffret_, mais avant de le fermer à clé il lui fait voir qu’il contient une quantité de rouleaux d’or. Il le ferme, la dame le serre précieusement. Dans la soirée, il revient dire qu’il a perdu sa clé, et lui emprunte quelques centaines de francs. Sans crainte (elle est garantie), elle les lui donne, et ne le revoit plus. Finalement, on fait ouvrir le coffret, il n’y a que des jetons de cercles (Argot des voleurs). =CHARRIER=: Signifie se moquer de quelqu’un. Synonyme de _mener en bateau_ (Argot du peuple). =CHARLOT=: Le bourreau (Argot des voleurs). =CHARLOTTE=: Pince (Argot des voleurs). =V.= _Monseigneur_. =CHARIBOTÉE=: En avoir sa charge. Cela veut aussi dire beaucoup. —Elle a une _charibotée_ d’enfants (Argot du peuple). =V.= _Tiolée_. =CHARMANTE=: La gâle. Par allusion aux vives démangeaisons que cause cette maladie, on la nomme aussi _la frotte_ (Argot du peuple). =CHAROGNE=: Individu rugueux, difficile à vivre, être insociable. Ou dit aussi de quelqu’un qui sent mauvais: —Tu pues comme une _charogne_. De _charogne_ on a fait _charognard_. Généralement les patrons ou les contremaîtres qui commandent durement sont qualifiés tels par les ouvriers (Argot du peuple). _N._ =CHASSES=: Les yeux. On dit d’une femme qui pleure: —Elle chie des yeux (Argot du peuple). =CHASSER AVEC UN FUSIL DE TOILE=: Mendier dans les campagnes. Allusion à la _besace_ de _toile_ que portent les mendiants pour y mettre ce qu’on leur donne (Argot des voleurs). =CHÂTAIGNE=: Soufflet. —Je vais le coller une _châtaigne_, ou je vais te _plaquer_ un _marron_ (Argot du peuple). =CHATTE=: Homme aimé des pédérastes pour ses manières câlines. La femme aussi est _chatte_; si elle est câline à ses heures, à d’autres elle sait _griffer_ (Argot du peuple). _N._ =CHAUD= (Il est): Malin, rusé, méfiant. Se dit de quelqu’un difficile à tromper (Argot du peuple). =CHAUD DE LA PINCE=: Hommes pour qui toutes les femmes sont bonnes. On dit d’un homme _chaud_: —Chien enragé mord partout (Argot du peuple). =CHAUDE LANCE=: Maladie qui se soigne à l’hôpital Ricord, ou chez les charlatans qui vantent leurs spécifiques dans les pissotières. —Traitement facile à suivre, en secret, même en voyage, guérison radicale sans rechute (Argot du peuple). =CHAUDE COMME BRAISE=: Femme hystérique qui aime tous les hommes (Argot du peuple). =CHAUFFE LA COUCHE=: Homme qui fait dans son ménage l’ouvrage de la femme. Il soigne les enfants, il _chauffe la couche_ (Argot du peuple). =CHAUFFE GRIPPARD=: Chaufferette (Argot du peuple). =CHAUFFER=: On _chauffe_ une pièce pour la faire réussir et obtenir un succès. _Chauffer_ une réunion publique. _Chauffer_ une femme: la serrer de près, lui faire une cour assidue. On disait autrefois: _coucher une femme en joue_. On ajoute de nos jours, par ironie: —Tu ne la _tireras_ pas, ou bien encore: Ce n’est pas pour toi que le _four chauffe_. _Chauffer_ une affaire pour attirer les actionnaires (Argot du peuple). =CHAUSSETTES RUSSES=: Être nu-pieds dans ses souliers (Argot du peuple). =CHAUSSON=: Putain. Femme pour qui tout homme est bon. On dit _putain_ comme _chausson_, parce que le _chausson_ prête beaucoup et va à tous les pieds (Argot du peuple). =CHAUSSURE À SON PIED=: Femme laide et défectueuse qui trouve quand même un amant ou à se marier. Elle a trouvé _chaussure à son pied_ (Argot du peuple). _N._ =CHELINGOTER DE LA GUEULE=: Puer de la bouche (Argot du peuple). =V.= _Trouilloter de la hurlette_. =CHENILLE=: Femme laide (Argot du peuple). _N._ =CHEVALIER GRIMPANT=: Les _cambrioleurs_. Allusion à ce que les voleurs opèrent aux étages supérieurs des maisons et qu’ils gravissent tous les escaliers (Argot des voleurs). =CHEVALIER DE LA GRIPETTE=: Homme qui suit les femmes (Argot du peuple). _N._ =CHEVRONNÉ=: Voleur récidiviste qui a fait plusieurs congés en prison. Allusion aux anciens _briscards_ de l’armée qui portaient des _chevrons_ sur le bras (Argot des voleurs). =CHIALER=: Pleurer. On dit aussi: y aller de sa larme (Argot du peuple). =CHIARD=: Petit enfant. Allusion à ce qu’il fait dans ses couches (Argot du peuple). _N._ =CHIASSE= (Avoir la): Avoir peur. Mot à mot: se lâcher dans sa culotte (Argot du peuple). =V.= _Taf._ =CHIASSE=: Vieille fille publique. C’est le dernier degré de l’abaissement (Argot des souteneurs). =CHICAN=: Marteau (Argot des voleurs). =V.= _Balançon_. =CHIC=: Il a du _chic_, il est bien. C’est une femme _chic_, un beau porte-manteau, sa toilette est bien accrochée. L’origine de cette expression n’est pas éloignée. Un ministre de l’Empire, habitué des coulisses de l’Opéra, envoya deux danseuses du corps de ballet souper à ses frais chez le restaurateur Maire. Très modestes, elles ne dépensèrent à elles deux que quinze francs. Quand le ministre demanda la note, il fit la moue. Le soir même il leur en fit le reproche et leur dit: Vous manquez de _chic_, pas de _chic_. Quelques jours plus tard il renvoya deux autres danseuses souper au même restaurant. Elles dépensèrent cinq cents francs. Quand il paya il fit une grimace sérieuse: Trop de _chic_, trop de _chic_, fit-il. Le mot fit fortune dans les coulisses et est resté (Argot des filles). =CHICANE= (Grinchir à la): Variété du vol à la rencontre. _Chicaner_ un individu pour le battre, pendant, qu’un complice le dévalise (Argot des voleurs). =V.= _Aquigeurs_. =CHICHE=: Avare de son argent, lésineur qui tondrait un œuf. _Chiche_ de ses pas, de sa personne, qui ne rendrait jamais un service à qui que ce soit. _Chiche_ veut aussi dire: défier quelqu’un de faire quelque chose. —_Chiche_ de faire ça (Argot du peuple). =CHIE TOUT DEBOUT=: Se dit d’un ouvrier indolent, nonchalant. Synonyme de _dort debout_ (Argot du peuple). _N._ =CHIEN TOUT PUR=: Eau-de-vie. Allusion au buveur qui a la voix rauque et _aboie_ en parlant (Argot du peuple). =V.= _Eau d’aff_. =CHIEN= (Avoir du): Posséder un aplomb remarquable. Femme qui n’est pas belle, mais qui a beaucoup d’audace et plaît quand même. Elle a du _chien_ (Argot du peuple). =CHIÉE= (En avoir une): Avoir une _chiée_ d’enfants. Avoir une _chiée_ d’ennuis à ne savoir où donner de la tête (Argot du peuple). _N._ =CHIER= (Tu me fais): Tu m’ennuies (Argot du peuple). =CHIER DANS MON PANIER JUSQU’A L’ANSE= (Il a): Je n’en veux plus, j’en ai plein le dos. On dit aussi: il a _chié dans ma malle_ (Argot du peuple). _N._ =CHIER DU POIVRE=: Se sauver des mains des agents. S’en aller sans tambour ni trompette. Synonyme de _pisser à l’anglaise_ (Argot du peuple). _N._ =CHIER DES CORDES À PUITS=: Individu qui est tellement constipé qu’il reste une heure sur la tinette en poussant des soupirs à fendre l’âme (Argot du peuple). _N._ =CHIER DES YEUX=: Pleurer (Argot du peuple). =V.= _Baver des clignots_. =CHIEUR D’ENCRE=: Écrivain (Argot du peuple). =V.= _Cul de plomb_. =CHIFFARDE=: Pipe (Argot du peuple). =V.= _Bouffarde_. =CHINER=: Blaguer quelqu’un. —Il est tellement _chineur_ que tout le monde passe à la _chine_ (Argot du peuple). _N._ =CHINER=: Courir les rues ou les campagnes pour vendre sa _camelotte_. _Chiner_ est synonyme de _fouiner_. Comme superlatif on dit _chignoler_ (Argot du peuple). =CHINEUR=: Genre de voleurs dont les procédés se rapprochent de ceux des _charrieurs_. Ils sont pour la plupart originaires du Midi (Argot des voleurs). =CHIPER=: Prendre (Argot du peuple). =CHIPOTER=: Marchander. _Chipoter_ dans son assiette avant de manger (Argot du peuple). _N._ =CHIQUER-CONTRE=: =V.= _Battre comtois_. =CHLASSE=: Saoul à ne pas tenir debout (Argot des souteneurs). _N._ =CHOPIN= (Faire un). Bonne affaire. Mettre la main sur une femme qui possède des qualités exceptionnelles. Si la chose faite ne vaut rien, on dit: —Tu as fait un sale _chopin_ (Argot du peuple). =CHOUCROUTMANN=: Allemand. Allusion au mangeur de choucroute (Argot du peuple). _N._ =CHOUETTE=: Superlatif de tout ce qu’il y a de plus beau, le suprême de l’admiration. _Chouette_ (être fait): être arrêté par les agents. Ce n’est pas _chouette_: ce n’est pas bien. Elle n’est pas _chouette_: elle est laide (Argot du peuple). =CIBIGE=: Cigarette (Argot du peuple). =CIGOGNE=: Le Dépôt de la Préfecture de police (Argot des voleurs). =CINGLER LE BLAIRE= (Se): Se saouler. Se piquer le nez (Argot du peuple). =CIPAL=: Abréviation de municipal. Il est franc et loyal, Y craint pas le _cipal_. (Argot du peuple). =CINQ CONTRE UN=: =V.= _Bataille des jésuites_. =CINQ ET TROIS FONT HUIT=: Boiteux. On dit aussi _ban-ban_. Allusion au balancement du boiteux en marchant (Argot du peuple). =CIREUX=: Qui a de la _cire_ aux yeux. Dans le peuple on dit de celui qui est affligé de cette infirmité qu’il fournit les cierges au Sacré-Cœur (Argot du peuple). =CIREUR=: Vol à la _cire_. Voleur qui barbotte les couverts dans les rares restaurants où l’on se sert encore d’argenterie. Il s’attable, déjeune tranquillement, puis, profitant du mouvement occasionné par le service, il colle adroitement avec de la cire un couvert sous la table, puis s’en va tranquillement. Quelques instants plus tard un complice vient s’asseoir à la même table et fourre le couvert dans sa poche. Ce vol est sans danger, si on s’aperçoit de la soustraction, le voleur demande que l’on le fouille, comme on ne trouve rien on lui fait des excuses (Argot des voleurs). =CITRON=: Se dit d’un individu qui n’a jamais à la bouche que des paroles amères pour tous (Argot du peuple). _N._ =CLAQUE=: Maison de tolérance. Abréviation de _claque-dents_ (Argot du peuple). =CLAQUER=: Donner une _claque_ sur la figure ou sur le contraire. Synonyme de _gifle_. Allusion au bruit que produit la main (Argot du peuple). =CLAQUER=: Mourir. Allusion à un objet qui _claque_, qui _casse_ (Argot du peuple). =CLAQUER DU BEC=: Avoir faim et ne rien avoir à se mettre sous la dent. La faim donne la fièvre, les dents _claquent_ (Argot du peuple). =CLAQUEURS=: Applaudisseurs à gages (Argot du peuple). =V.= _Romains_. =CLAVINS=: Clous. Les voleurs ne connaissent pourtant guère le latin. _Clavin_ vient de _clavus_ (Argot des voleurs). =CLIGNOTS=: Yeux (Argot des voleurs). =V.= _Chasses_. =CLIQUETTES=: Oreilles (Argot du peuple). =V.= _Esgourdes_. =CLOCHE DE BOIS=: Déménager furtivement sans prévenir son propriétaire. Quand le déménagement s’opère par la fenêtre on dit: _déménager à la ficelle_. Brûler ses meubles, c’est _déménager par la cheminée_. On dit aussi: _déménager à la cloche de cuir_ ou à la _sonnette de bois_. =CLOU=: Le mont-de-piété. On va, les jours de _dèche_, y accrocher ses habits. On dit aussi: aller chez _ma tante_, mon oncle en aura soin. On dit également: au _plan_ (Argot du peuple). =CLOUS=: Fausses clés (Argot des voleurs). =V.= _Caroubles_. =CLOUS=: Terme de mépris employé dans les ateliers. —Tu n’es qu’un _clou_ (Argot du peuple). =COCU=: Pourquoi diable fait-on dériver _cocu_ de _coucou_? Si l’on suivait la véritable étymologie du mot, ce n’est pas le _mari_, mais bien l’_amant_, qu’on devrait appeler _cocu_; en effet la légende veut que le _coucou_ lasse ses petits dans le _nid_ des autres oiseaux. Qui cinquante ans aura vécu Et jeune femme épousera, S’il est galeux se grattera Avec les ongles d’un cocu. (Argot du peuple). =COGNE=: Gendarme (Argot des voleurs). =V.= _Hirondelle de potence_. =COIFFÉ=: Être né _coiffé_, avoir de la chance, réussir toutes ses entreprises. _Coiffé_ de quelque chose ou de quelqu’un (Argot du peuple). =V.= _Béguin_. =COIRE=: Ferme ou métairie (Argot des voleurs). =COLBACE=: Conscrit. C’est une erreur d’écrire _colbasse_ pas plus que _colback_. Ce mot est employé par les vieux _briscards_ qui n’aiment pas les _bleus_. Il l’est également, par les anciens marlous pour désigner les jeunes souteneurs inexpérimentés (Argot des souteneurs). =COLLE=: Mensonge. Synonyme de _craque_. —Tu penses que l’on ne croit pas à tes _craques_ (Argot du peuple). =COLLÉ= (Être): Vivre maritalement avec une femme sans avoir passé par la mairie (Argot du peuple). =COLLÉ= (Être) à un examen. Avoir sa bille au billard, _collée_ sous bande. Être _collé_: être pris en flagrant délit de mensonge (Argot du peuple). =COLLÈGE=: Prison. Cette expression est d’une grande justesse; c’est, en effet, en prison que les voleurs se perfectionnent dans leur art et que nos grands financiers du jour apprennent à ne plus se faire repincer (Argot des voleurs). =COLIS=: Les courtiers ou placeurs qui racolent les femmes sur la voie publique pour les expédier dans les maisons de tolérance; nomment les femmes des _colis_: —J’ai à vous expédier un _colis_ de 50 kilos (Argot dos souteneurs). _N._ =COLIFICHET=: Pain (Argot des voleurs). =V.= _Brichelon_. =COLLIGNON=: Cocher de fiacre. Cette expression date de l’assassinat de M. Juge par un cocher de fiacre nommé _Collignon_, qui fut arrêté par Proudhon, rue de l’Ouest. _Collignon_ fut exécuté. Ce nom est resté un terme de mépris (Argot du peuple). =COMBERGE=: Aller à confesse (Argot des voleurs). =COMBERGO= (Aller à): =V.= _Comberge_. =COMPAS= (L’Avoir dans l’œil): Ouvrier qui a le coup d’œil juste, qui réussit une pièce d’un coup comme s’il avait pris ses mesures avec un _compus_ (Argot du peuple). _N._ =COMPLET= (Il est): Avoir bu outre mesure (Argot du peuple). _N._ =COMMANDITE=: Association d’un certain nombre d’ouvriers compositeurs pour faire un journal (Argot d’imprimerie). =COMPTER SON LINGE=: Vomir (Argot du peuple). =V.= _Mettre du cœur sur du carreau_. =CONCE DE CASTU=: Infirmier d’hôpital. _Conce_ doit être une corruption de _gonce_ (Argot des voleurs). =CONDÉ= (Avoir un): Individu qui obtient l’autorisation de tenir un jeu ou une boutique ambulante sur la voie publique, à condition de rendre des _services_ à la préfecture de police. Avoir un _condé_ c’est être protégé et faire ce que les autres ne peuvent pas (Argot des camelots). =CONASSE=: Fille peu au courant du métier, qui raccroche à n’importe quel prix (Argot des souteneurs). _N._ =CONNERIE=: Bêtise. —Tu _déconnes_, tu ne sais pas ce que tu dis. Mot à mot: tu es un _c-o-n_, pantoufle, un crétin. Ce mot ancien vient de _conard_. Il est employé dans le peuple pour désigner un autre objet (Argot du peuple). =CONSOLATION= (S’en offrir une): Aller boire un coup et même plusieurs chez le marchand de vin pour faire passer un chagrin réel ou imaginaire. Un _assommoir_ de Belleville avait pris cette enseigne; les buveurs se _consolaient_ en s’empoisonnant (Argot du peuple). =CONSOLATION=: Jeu qui se joue dans les wagons de chemins de fer au retour des courses. Les _bonneteurs_ offrent la _consolation_ aux joueurs malheureux, qui ont celle de se voir encore dépouillés (Argot des camelots). =CONTRE-COUP=: Contre-maître. Quand un ouvrier fait un _loup_ (manque une pièce), c’est le contremaître qui reçoit le _contre-coup_ du patron (Argot du peuple). _N._ =CONVALESCENCE= (Être en): Sous la surveillance de la haute police (Argot des voleurs). =V.= _Surbine_. =COPAIN=: Camarade de collège, compagnon. Ce mot n’appartient pas à Ed. About, comme le dit M. Lorédan Larchey, c’est un dérivé du vieux mot français _compaing_. _Copaille_ pour _copain_ (Argot des voleurs). =COQUER=: Dénoncer (Argot des voleurs). =V.= _Mouton_. =COQUER DE RIFLE=: Allumer une femme. S’enflammer en la regardant (Argot des voleurs). =COQUER LA LOFFITUDE=: Prêtre qui donne l’absolution. —J’ai été _à comberge_ et le _ratichon_ m’a _coqué la loffitude_ (Argot des voleurs). =CORBEAU=: Frère ignorantin. Quand les gamins rencontrent un frère, ils crient: _Couac! couac!_ imitant le _croassement_ du corbeau (Argot du peuple). =CORBILLARD=: On écrivait autrefois _corbeillard_, parce que ce mot désignait le coche d’eau qui faisait le service entre Paris et Corbeil. On a écrit également _corbillas_ et _corbillat_. Gouffé a chanté la lugubre voiture: Que j’aime à voir un _corbillard_; Ce goût-là vous étonne? Mais il faut partir tôt ou tard, Le sort ainsi l’ordonne Et loin de craindre l’avenir, Moi de cette aventure Je n’aperçois que le plaisir D’aller en voiture. L’expression de _corbillard_ date de 1793, époque de la création de ces voitures (Argot du peuple). _N._ =CORBUCHE LOFF=: Faux ulcère. Les mendiants, pour exciter la charité publique, employent toutes sortes de moyens; ils se font manchots, culs-de-jatte, boiteux, etc. Le truc le plus usité est celui des faux ulcères; une simple mouche de Milan suffit pour produire une plaie artificielle qui peut disparaître par un simple lavage. Les troupiers carottiers pratiquent ce moyen pour aller à l’infirmerie (Argot des voleurs). _N._ =CORCIFÉ=: La prison de la Conciergerie (Argot des voleurs). =CORDELETTE=: Chaîne de montre (Argot des voleurs). =V.= _Cadenne_. =CORNARD=: Vient de _cornette_, de la _cornette_ des femmes. Autrefois, un mari qui se laissait tromper par sa femme était appelé _porteur de cornette_ (Argot du peuple). =COSQSIS=: =V.= _Balanceur de tinettes_. =COSTEL= ou =CAUSTEL=: Souteneur. Balance moi-là: et ne sois plus _caustel_, Casser des lourdes vaut mieux que... des chats. (Argot des souteneurs). =COTES EN LONG=: Fainéant (Argot du peuple). =V.= _la Basse_. =CÔTELETTE DE PERRUQUIER=: Deux sous de fromage de Brie (Argot du peuple). =COTTERET=: Forçat libéré. _Cotteret_: Petit fagot de bois. _Cotteret de bordel_: Paquet de petites bûchettes qui coûte dix centimes et s’allume instantanément. Allusion à la courte durée de la passe qui ne dure pas plus que le petit paquet de bois (Argot du peuple). =COUACHE=: Tête (Argot des voleurs). =COUCHE= (En avoir une): Être bête à manger du foin. Allusion à la _couche_ de fumier que mettent les maraîchers dans leurs châssis pour faire hâtivement pousser les melons; plus la _couche_ est épaisse, meilleur est le résultat (Argot du peuple). _N._ =COUCHER À LA BELLE ÉTOILE=: Dormir dans les champs. On dit aussi: _coucher dans le lit aux pois verts_ (Argot du peuple). =COUILLE EN BÂTON= (De la): C’est une bêtise. Mot à mot: ce n’est rien (Argot du peuple). =COUILLON=: Imbécile, peureux (Argot du peuple). =COULAGE= (Avoir du): Ne pas surveiller ses ouvriers. Perdre sur une commande ou sur une vente. _Couler_ le patron: le ruiner petit à petit (Argot du peuple). =COULE= (Être à la): Malin qui croit que personne ne peut le tromper. On dit: _Il la connaît dans les coins_; pas moyen de lui introduire: _il est à la coule_ (Argot du peuple). =COULER DOUCE= (Se la): Faire le moins de travail possible et vivre pour le mieux (Argot du peuple). =COULER UN ENFANT=: Faire avorter une femme (Argot du peuple). =COULER QUELQU’UN=: _Couler_ un individu dans l’esprit de quelqu’un en disant de lui pis que pendre; le perdre dans l’estime d’autrui (Argot du peuple). =COULEURS= (En faire voir de toutes les): Mentir, tromper. Faire à quelqu’un tous les tours possibles (Argot du peuple). =COUILLONADE=: Il ne faut pas faire attention à ce qu’il dit, il ne raconte jamais que des _couillonades_ (Argot du peuple). =COUP=: Procédé secret et particulier (Argot des voleurs). =COUP DE BAS=: Coup dangereux. Achever quelqu’un, le finir (Argot des voleurs). =COUP DE FLAN=: Voler au hasard (Argot des voleurs). =COUP DE FUSIL=: Vendre à n’importe quel prix (Argot des camelots). =COUP A MONTER=: Piège à tendre. Tromper quelqu’un (Argot des voleurs). =COUP DE LA BOUFFÉE=: Genre de vol pratiqué chez les grands bijoutiers. Le voleur fume un énorme cigare, il lance au visage de la bijoutière un formidable jet de fumée; aveuglée, elle ne voit pas les mains du voleur travailler (Argot des voleurs). =COUP DE CHASSES=: Coup d’œil. Système employé par certaines filles pour raccrocher les passants. —Tu ne _marches_ pas, as-tu vu ce _coup de chasses_? (Argot du peuple). =COUP DE CANIF DANS LE CONTRAT=: Homme qui trompe sa femme ou femme qui trompe son mari. On dit aussi, quand une femme a une masse d’amants, que le _contrat est criblé de coups de sabre_ (Argot du peuple). =COUP DE FION=: Terminer un ouvrage (Argot du peuple). =V.= _Fignoler_. =COUP DU CHANDELIER= (Le): Dans les maisons de rendez-vous ou chez les femmes publiques un peu cossues, une fois la séance terminée, la bonne vous reconduit en vous éclairant (c’est à charge de revanche), on lui donne généralement un pourboire; elle vous remercie gracieusement, en ajoutant comme Bilboquet: —Si vous êtes content et satisfait, envoyez-nous du monde. C’est le _coup du chandelier_ (Argot des filles). =COUP DU LAPIN=: Achever un adversaire, lui donner le coup suprême. Le bourreau donne le _coup du lapin_ au condamné à mort (Argot des voleurs). =COUP DU MALADE=: Le voleur va chez un bijoutier choisir des bijoux; il demande qu’on lui porte sa commande à son appartement; il s’en va, et, aussitôt rentré, il se couche en attendant le commis et simule un mal subit. Quand le commis arrive il trouve l’acheteur entouré de fioles et de pommades, gémissant, il paraît souffrir mille douleurs. Il renvoie le commis chercher un autre objet, qu’il dit avoir commandé la veille; le commis part sans défiance en laissant les bijoux sur la cheminée; aussitôt le malade se lève et se sauve au plus vite. Quand le commis revient, visage de bois (Argot des voleurs). =COUP DE MARTEAU=: Fou par instant (Argot du peuple). =V.= _Mailloché_. =COUP DU MOINEAU=: Un _pégriot_ a un pierrot apprivoisé; il avise une boutique et lâche son oiseau; celui-ci se sauve derrière les sacs; il entre, pleure, se désole: —Mon pierrot, mon pierrot. Les garçons, le patron, la patronne, tout le monde est après le pierrot. Le _pégriot_ profite de cette chasse improvisée pour fouiller dans le comptoir et prendre une poignée de monnaie. Le pierrot est pris, le gamin se sauve en remerciant, le tour est joué (Argot des voleurs). _N._ =COUP DU PÈRE FRANÇOIS=: Ce coup est très ancien. Autrefois les détenus l’employaient pour se débarrasser d’un personnage qui _moutonnait_. Il consiste simplement à étrangler un passant à l’aide d’un foulard de soie. Louis le _Bull-Dogue_, élève du _père François_ explique ainsi la manière d’opérer: Pour faire le coup du Père _François_, Vous prenez un foulard de soie; Près au client en tapinois Vous vous glissez sans qu’il vous voie Et crac! vous lui coupez la voix. Sitôt qu’il est devenu de bois Vous lui prenez son _os, ses noix_. Et c’est ainsi qu’un Pantinois Peut faire fortune avec ses doigts. =COUP DE POUCE=: Système employé par certains commerçants pour aider la balance à pencher du côté de la pesée. Les bouchers jouissent d’une grande habileté pour le _coup de pouce_ (Argot du peuple). =COUP DE SOLEIL=: Avoir trop bu du petit bourguignon. On dit aussi un _coup de sirop_ (Argot du peuple). =COUPE SIFFLET=: Couteau (Argot des voleurs). =V.= _Lingre_. =COUPER=: Échapper. —Tu n’y échapperas pas, tu n’y _couperas pas_. On _coupe_ à une corvée, à une obligation quelconque (Argot du peuple). =COURIR= (D’une peur et d’une envie de): Voleur qui s’offre un paletot à l’étalage sans s’occuper du prix. —Te voilà bien rupin, ma vieille branche, combien que ta pelure te coûte? —Une peur et une envie de _courir_ (Argot du peuple). =V.= _Foire d’empoigne_. _N._ =COURTAUD DE BOUTANCHE=: Lourdaud de boutique. Synonyme de _calicot_ (Argot des voleurs). =COURTIER=: Voleur qui prépare le coup à faire (Argot des voleurs). =V.= _Nourrisseur de poupard_. =CRACHER DANS LE SAC=: Allusion à la tête du condamné à mort qui tombe dans le sac de sciure. On dit aussi: _éternuer dans le sac_ (Argot des voleurs). =CRACHER DES PIÈCES DE QUATRE SOUS=: Avoir la gorge sèche au lendemain d’une soulographie. Allusion à l’absence de salive (Argot du peuple). =V.= _Gueule de bois_. =CRACHER AU BASSINET=: Faire _cracher_ (payer) un débiteur dur à la détente (Argot du peuple). =CRAIE D’AUVERPIN=: Charbon (Argot du peuple). CRAMPE (La tirer): =V.= _Rouscailler_. =CRAMPON=: Femme ou maîtresse qui ne vous lâche pas et dont rien ne peut vous débarrasser pas même la mort—quand on en rêve (Argot du peuple). =CRAMPONNER= (Être): =V.= _Crampon_. =CRAN= (Être à cran): Être furieux. On dit aussi: être à _crin_ (Argot du peuple). =CRANEUR= (Faire le): Homme qui se fait plus fort qu’il ne l’est, au physique comme au moral. Un souteneur qui veut tenir le haut du pavé, est un _crâneur_ (Argot du peuple). =CRAPAUD=: Cadenas (Argot des voleurs). =CRAPAUD=: Moutard (Argot du peuple). =CRAPSER=: Mourir. D’aucuns écrivent _clamser_ ou _krapser_. C’est _crapser_ qui est le vrai mot (Argot des voleurs). =CRAPULARD=: Superlatif de _crapule_. Synonyme de canaille, gredin, scélérat. Injure adressée à des individus assez adroits pour commettre des délits sans tomber sous l’application des lois. Terme très usité dans le peuple (Argot du peuple). _N._ =CRAQUEUR=: Menteur (Argot du peuple). =CRÈME=: C’est une _crème_ d’homme pour dire: _il est bon_. Même signification que: _c’est un beurre_. Les bourgeois pour exprimer qu’un être est beau disent également: —C’est une _crème_. —C’est une bonne pâte d’homme (Argot du peuple). =CRÊPER LE CHIGNON= (Se): Se dit de deux femmes qui se battent avec acharnement. C’est le contraire qu’il faudrait dire, car après la bataille, le _chignon_ est plus que _décrêpé_ (Argot du peuple). =CRESSON SUR LE CAILLOU= (N’en plus en avoir): Homme chauve (Argot du peuple). =CREVER LE BOCAL= (S’en faire): Avoir trop mangé. S’être bourré au point que le _bocal_ (ventre) en _crève_ (Argot du peuple). =CREVETTE=: Nom donné aux filles du demi-monde. On appelle aussi _crevette_ une femme maigre (Argot du boulevard). =V.= _Agenouillée_. =CRIBLER À LA GRIVE=: Crier à la garde. Appeler au secours (Argot des voleurs). =CRIBLEUR DE VERDOUZE=: Marchand des quatre saisons (Argot des voleurs). =CRIBLEUR DE FRUSQUES=: Marchand d’habits (Argot des voleurs). =CRIER AUX PETITS PÂTÉS=: Femme qui accouche difficilement et qui crie comme une baleine (Argot du peuple). =CRIGNE=: Viande dure comme une vieille semelle (Argot des voleurs) =V.= _Bidoche_. =CRIGNOLIER=: Boucher. Marchand de _crigne_ (Argot du peuple). =CRIN= (Être comme un): Homme sans cesse furieux. Individu plus gênant que gêné (Argot du peuple). =CRIN-CRIN=: Violon. Allusion au grincement de l’archet sur les cordes (Argot du peuple). =CROCHETTES=: Clés (Argot des voleurs). =V.= _Carouble_. =CROMPER LA TANTE=: Détenu qui s’emploie, pour faire évader un de ses camarades (Argot des voleurs). =CRONÉE=: Écuelle. Une _cronée_ de _barbillons de Beauce_, voilà la _pitance_ à la _Centrousse_. =CROQUE-MORT=: Porteur de mort. Monsieur le Mort, laissez-vous faire, Il ne s’agit que du salaire. Le _croque-mort_ est généralement joyeux, il a toujours le _petit mort_ pour rire. C’est l’un d’eux qui a trouvé que la meilleure _bière_ est celle de _sapin_ (Argot, du peuple). =CROQUANT=: Paysan (Argot du peuple). =V.= _Pétrousquin_. =CROQUENEAUX VERNEAUX=: Souliers vernis (Argot du peuple). =CROSSEUR=: L’avocat général (Argot des voleurs). =V.= _Bêcheur_. =CROTTE DE PIE=: Pièce de cinquante centimes (Argot des voleurs). =CROTTE D’ERMITE=: Poire cuite. Allusion à la forme (Argot des voleurs). =CROUSTILLAGE=: Nourriture (Argot du peuple). _N._ =CROUSTILLANT=: Quelque chose qui _croustille_ sous la dent. Pain appétissant, bien cuit. Jolie fille dont les appâts sont pleins de promesses. Un récit vif, animé, plein de situations égrillardes, est _croustillant_. Paul de Kock et Pigault Lebrun sont restés les maîtres du genre (Argot du peuple). =CROUTER=: Casser la croûte. Le matin, avant de commencer la journée et à quatre heures, les ouvriers mangent un morceau sur le pouce. Ils cassent une _croûte_. On dit aussi: l’heure de la _croustille_ (Argot du peuple). _N._ =CROUTON=: Vieillard bon à rien (Argot du peuple). =V.= _Birbe_. =CRU DU CHÂTEAU LA POMPE=: Eau. Se dit par ironie (Argot du peuple). CUILLER DANS LA TASSE (L’avoir laissée): Femme enceinte (Argot du peuple). =V.= _Avaler le pépin_. =CUIR=: Peau (Argot du peuple). =CUIR À RASOIR=: Tétasses d’une vieille femme dont la peau est dure comme du _cuir_. On pourrait repasser ses rasoirs dessus (Argot du peuple). =V.= _Calebasse_. =CUISINER=: Quand un prisonnier ne veut pas avouer, les agents le «cuisinent» pendant trois ou quatre heures s’il le faut. Ils réussissent presque toujours, et le prisonnier ne trouve jamais cette _cuisine_ à son goût (Argot des voleurs). =CUITE= (En prendre une): Se saouler royalement (Argot du peuple). =V.= _Culotte_. =CULBUTE OU CULBUTANT=: Pantalon (Argot du peuple). =V.= _Falzar_. =CULBUTE= (Faire la): Négociant qui fait faillite. Il fait littéralement _la culbute_ (Argot du peuple). =CUL DE PLOMB=: Employ rivé à son fauteuil d’un bout de l’année à l’autre (Argot du peuple). =CULOTTE= (En prendre une): Être abominablement pochard. On dit également: il est _cuit_, il a trop _chauffé le four_ (Argot du peuple). =CULOTTE= (Prendre une): Perdre une grosse somme au jeu (Argot des joueurs). =CUL TERREUX=: Paysan. L’allusion est transparente (Argot du peuple). =V.= _Pétrousquin_. =CURÉ DE CAMPAGNE=: Femme à tout faire, qui sait se retourner à l’occasion (Argot des filles). =CURIEUX=: Juge (Argot des voleurs). =V.= _Palpeurs_. =CŒUR SUR LE CARREAU= (Mettre le): Vomir (Argot du peuple). D =DAB= ou =DABE=: Père (Argot du peuple). =DAB DES RENIFLEURS=: Préfet de police (Argot des voleurs). =DABIER=: Père (Argot du peuple). =DADA= (Avoir un). =V.= _Marotte_. =DAIM=: Imbécile (Argot du peuple). =V.= _Couillon_. =DANDILLANTE=: La cloche. Dans les usines, la _cloche_ sonne les heures d’entrées et de sorties et aussi l’heure des repas. —Si je suis en retard c’est parce que tu as foutu un _coup de pouce_ à la _tocante_ du _singe_. Mot à mot: la cloche _dandille_ (Argot du peuple). =DANDINETTE=: Diminutif de _danse_, battre légèrement. _Dandinette_ est une correction infligée à un enfant désobéissant (Argot du peuple). =DANDILLER=: Sonner. Les faubouriens en ont fait _dardiller_, de _dard_. —Je _dardille_ pour une belle fille (Argot du peuple). _N._ =DANSE= (En donner une): Battre un individu. Entrer en _danse_, entrer dans une affaire, apparaître (Argot du peuple). =DANSER=: Faire _danser_ quelqu’un. Synonyme de faire payer (Argot du peuple). =DANSER DU BEC=: Puer de la bouche (Argot du peuple). =V.= _Trouilloter de la hurlette_. =DANSER L’ANSE DU PANIER= (La faire): Domestique qui majore les denrées qu’elle achète et fait payer cent sous à la patronne ce qui en vaut quarante (Argot du peuple). =DARDANTS=: Mes amours (Argot des voleurs). =DARDUNNE=: Cinq francs (Argot des voleurs). =V.= _Tune_. =DARIOLE=: Soufflet, coup de poing. _A. D._ La _dariole_ est une pâtisserie commune qui se vend dans les fêtes publiques. Le pâtissier se nomme _darioleur_ (Argot du peuple). _N._ =DARON=: =V.= _Dabe_. =DARONNE=: Mère; dans le peuple on dit la _dabuche_ (Argot du peuple). =DAUF=: =V.= _Paf_. =DAUDÉE= (Passer à la): Souteneur qui _floppe_ sa _marmite_ quand elle ne rapporte pas de _pognon_ (Argot des souteneurs). _N._ =DÉBACHER LA ROULOTTE=: Changer la voiture de place. Les forains emploient cette expression pour indiquer qu’il vont d’une ville à une autre (Argot des saltimbanques). =DÉBAGOULER=: Cette expression est usitée dans les faubourgs pour qualifier un orateur de réunion publique qui _débagoule_ son _boniment_ (Argot du peuple). =DÉBALLAGE=: Étalage par les camelots de marchandise sur la voie publique ou dans des boutiques louées au mois. _Déballage_ se dit aussi dans le peuple d’une femme avec qui on couche pour la première fois. —Tu la crois dodue, bien faite tu vas la voir au _déballage_; elle a été moulée dans un cor de chasse (Argot du peuple). =DÉBALLER=: Soulager ses entrailles pour quinze centimes, ce que ne pouvait digérer Villemessant qui trouvait exorbitant d’être forcé de donner trois sous pour restituer un petit pain qui n’en coûtait qu’un et encore en laissant la marchandise (Argot du peuple). =DÉBALLONNER= (Se): S’évader. Mot à mot: se sauver du _ballon_ (prison). _Déballonner_: accoucher. Se défaire de son _ballon_ ou mieux du _lève-jupes_ (Argot des voleurs). =DÉBINE=: Se prend de manières différentes. Être dans la misère la plus complète. —Je suis dans la _débine_. —Je m’en vais, je me sauve, je me _débine_ (Argot du peuple). =DÉBINER=: Dire du mal de quelqu’un. —Nous l’avons tellement _débiné_ qu’il n’a pu réussir (Argot du peuple). =DÉBINER LE TRUC=: Compère mécontent qui révèle le secret de son associé (Argot des voleurs). =DÉBOUCLER SA VALISE=: Mourir. On devrait plutôt dire _boucler_ car le voyage est assez long (Argot des commis voyageurs). =DÉBOULER=: Arrivée subite de quelqu’un que l’on n’attendait pas. —Il _déboule subito_ (Argot du peuple). =DÉBOULER=: Femme qui accouche. Allusion de forme; enceinte à pleines ceintures, elle est ronde comme une boule; accouchant elle _déboule_ (Argot du peuple). =DÉBOULONNER SA COLONNE=: Mourir. Cette expression n’est employée que depuis 1871, lorsque les communards jetèrent la colonne Vendôme par terre parce qu’elle gênait Courbet (Argot du peuple). =DÉBOURRER SA PIPE=: =V.= _Déballer_. =DÉBRIDOIRE=: Outil de malfaiteurs (Argot des voleurs). =V.= _Tâteuse_. =DÉBOUTONNER=: Parler, avouer. —Tu peux te _déboutonner_ mon vieux, il faut que nous sachions ce que tu as dans le ventre. On dit aussi: _Déculotte ta pensée_ (Argot du peuple). =DÉBROUILLARD=: Individu qui sait se débrouiller au milieu des ennuis de la vie et qui en sort victorieux. On emploie, dans les ateliers, cette image caractéristique, mais peu parfumée: —Il sortirait de cent pieds de merde (Argot du peuple). =DÉCALITRE=: Chapeau. Il a, en effet, la forme d’un boisseau (Argot du peuple). =DÉCAMPER SANS TAMBOUR NI TROMPETTE=: Lâcher une femme ou un patron sans les prévenir. Fausser compagnie à quelqu’un. Laisser une affaire en plan (Argot du peuple). =DÉCANILLER=: Se lever de sa chaise ou de son lit. —Allons, paresseux, _décanille_ plus vite que ça (Argot du peuple). =DÉCARADE=: S’en aller au plus vite. En un mot, _décarrer_, partir. Une vieille chanson dit: Allons, Flipote, Met ta capote, Et puis, _décarrons_-nous. (Argot du peuple). =DÉCARCASSER= (Se): S’échiner à faire un travail qui produit peu. Se _décarcasser_ à courir pour arriver à l’heure de la cloche. —J’ai beau me _décarcasser_, je ne suis pas plus avancé une année que l’autre (Argot du peuple). =DÉCARRER DE BELLE=: Sortir de prison à la suite d’une ordonnance de non-lieu. Mot à mot: Je l’échappe belle (Argot des voleurs). =DÉCARTONNER=: Mourir de consomption. Les commères disent: mourir à petit feu. _Décartonner_ est synonyme de _décoller_ (Argot du peuple). =DÉCHARD=: Qui est dans la dèche (Argot du peuple). =DÈCHE=: Synonyme de _débine_. Cette expression est due à une circonstance curieuse: Un colosse, nommé _Hache_, marchand de _ribouis_ au marché du Temple, avait la passion du théâtre; il figurait au cirque de l’ancien boulevard du Temple. Il occupait l’emploi de tambour-major de la garde; c’était insuffisant pour son ambition: il voulait parler. À force d’obsessions, il obtint de Lalouc de dire un mot dans une pièce. Il devait dire à Napoléon: —Quel échec, mon Empereur! La langue lui fourcha, il avait oublié sa phrase. Alors, à tout hasard, il s’écria: —Sire, ah! quelle _dèche_! L’expression est restée, et, dans le peuple, quand on veut indiquer un grand malheur elle est employée (Argot du peuple). =DÉCHIRER SA TOILE=: Péter. Allusion au bruit qui souvent ressemble à un déchirement (Argot du peuple). =V.= _Peau courte_. =DÉCORS=: Bijoux. L’expression est jolie. On dit dans le peuple, d’une femme chargée de bijoux: Elle est _décorative_ (Argot du peuple). =DÉCRASSER=: Les filles _décrassent_ un homme en le débauchant d’abord, en le ruinant ensuite. Les voleurs _décrassent_ un pante en le volant. _Décrasser_, dans un autre sens, est synonyme de _déniaiser_ (Argot du peuple). =DÉCROCHER UN LARDON=: Faire avorter une femme. Les spécialistes qui se livrent à ce genre de travail se nomment des _faiseuses d’anges_ (Argot du peuple). _N._ =DÉCROCHER LA LUNE AVEC LES DENTS=: Vouloir accomplir une chose impossible. Expression employée par ironie (Argot du peuple). =DÉCROCHER LA TIMBALE=: Arriver bon premier, réussir. Allusion au mât de cocagne, où le premier arrivé au sommet _décroche_ le premier prix qui est généralement une _timbale_. Cette expression est populaire depuis la représentation de la pièce intitulée la _Timbale_ (Argot du peuple). _N._ =DÉCROCHEZ-MOI ÇA=: Vêtements fripés que vendent les marchandes à la toilette. Comme les vêtements sont _accrochés_ et étiquetés, inutile de marchander; on n’a qu’à dire à la vendeuse: _Décrochez-moi ça_. Toute personne mal habillée sent le _décrochez-moi ça_ (Argot du peuple). =DÉCROCHER SES TABLEAUX=: Individu qui sans cesse se fourre les doigts dans le nez pour on retirer les ordures. —Tu reçois donc du monde que tu _décroches tes tableaux_? (Argot du peuple). =DÉCULOTTÉ=: Homme qui a mis son mobilier ou son commerce au nom de sa femme. Il ne porte plus la _culotte_. _Déculotté_ aussi quand la femme est maîtresse au logis: elle porte les _culottes_ (Argot du peuple). =DÉFARGUER=: Pâlir. Le parrain fargue, Le bêcheur défargue, dit une vieille chanson (Argot des voleurs). =DÉFARGUER=: Les joueurs disent cela d’une carte qui les gêne. Au _polignac_ ils se _défarguent_ du valet de pique (Argot des voleurs). _N._ =DÉFENDRE SA QUEUE=: Défendre sa peau dans une bataille. Quand deux chiens se battent dans la rue, les spectateurs crient: —Toto, _défend ta queue_. _Défendre sa queue_, c’est défendre ses intérêts de toutes manières (Argot du peuple). =DÉFILER LA PARADE=: Se dit à quelqu’un que l’on chasse. —Allons, _défilez la parade_, et plus vite que ça (Argot du peuple). =DÉFLEURIR= ou =DÉFLOUER LA PICOUSE=: Voler le linge qui sèche dans les campagnes, sur des haies (Argot des voleurs). =V.= _Batousier_. =DÉFOURAGER=: S’en aller, quitter un endroit pour un autre. —Je _défourage_ de la _Centrousse_ pour _renquiller_ à _Pantin_ (Argot des voleurs). =DÉGLINGUE= (Tomber dans la): Être tout à fait par terre. Plus misérable que les misérables (Argot du peuple). _N._ =DÉGOBILLER=: Vomir (Argot du peuple). =V.= _Mettre du cœur sur le carreau_. =DÉGOTTER=: Se dit de quelqu’un mal habillé. —Tu la _dégottes_ mal. _Dégotter_, signifie également trouver. —Il y a deux mois que je la cherche, j’ai fini par la _dégotter_. _Dégotter_ quelqu’un: faire quelque chose mieux que lui. Victor-Hugo, par exemple _dégotte_ Sarrazin, le poète aux olives (Argot du peuple). =DÉGOURDI=: Se dit par ironie d’un homme lourd et pâteux. —J’ai froid, je vais marcher vite pour me _dégourdir_ les jambes. On dit d’une gamine qui connaît à six ans ce qu’elle devrait ignorer à quinze: elle est _dégourdie_ pour son âge (Argot du peuple). =DÉGRAISSEUR=: Le garçon de banque qui à chaque échéance vient _dégraisser_ les débiteurs (Argot du peuple). _N._ =DÉGRINGOLADE=. =V.= _Dégringoler_. =DÉGRINGOLADE À LA FLÛTE=: Vol commis par une fille sur un _miché_ de passage. L’expression _flûte_ est assez significative (Argot des voleurs). =DÉGRINGOLER=: Tomber d’une haute situation dans la misère. _Dégringoler_ un _pante_: tuer un bourgeois. _Dégringoler_ des hauteurs d’un succès pour tomber dans la médiocrité (Argot du peuple). =DÉGUEULAS, DÉGUEULATIF, DÉGUEULBIF, DÉGOÛTATIF ET EMMERDATOIRE=: Individu à l’aspect tellement dégoûtant que sa vue soulève le cœur et donne envie de vomir (Argot du peuple). _N._ =DÉGUISER EN CERF= (Se): Se sauver le plus rapidement possible. —Je t’invite à un bal masqué, quel costume prendras-tu? —Je me _déguise en cerf_. Mot à mot: Je n’y vais pas (Argot du peuple). _N._ =DÉMARQUEUR DE LINGE=: Homme de lettres qui pille ses confrères sans façon. _Démarquer_ un article de journal: changer simplement les phrases. Allusion aux voleurs qui _démarquent_ le linge avant de le _bazarder_ au _fourgat_ (Argot du peuple). =DEMI-AUNE=: Le bras. Les mendiants disent: —_Je tends la demi-aune._ C’est une façon de ne pas avoir l’air que l’on tend la main (Argot des mendiants). =DEMI-RÉCOLTE=: Personne petite, naine, chétive. On dit dans le peuple: —Sa mère devait être concierge, un locataire aura demandé le cordon au bon moment (Argot du peuple). =V.= _Bas du cul_. =DEMOISELLE DE PAVEUR=: Sorte de pilon en bois garni à sa base d’un fort morceau de fer. Il sert à enfoncer les pavés pour égaliser la rue. Ce pilon a deux anses en forme de bras; pour le soulever, les paveurs le prennent par les bras. Allusion au bras que l’on donne aux _demoiselles_. Elles sont généralement moins dures à soulever que la _demoiselle_ du paveur (Argot du peuple). _N._ =DÉMONTER SON CHOUBERSKI=: Mourir. L’expression n’est pas juste, on devrait plutôt dire: _monter son chouberski_, car chacun sait que ce poêle n’a rien de commun avec l’élixir de longue vie (Argot du peuple). _N._ =DÉMORGANER=: Accepter une observation. Comprendre que la _morgue_ est inutile (Argot du peuple). =DEMORRE=: Homme (Argot des voleurs). =DÉMURGER=: Fuir. Cette expression est fréquemment employée par les souteneurs au cours d’une bataille: —Voilà la rousse, _démurge_, ou y vont le faire _chouette_. La _copaille_ va rendre l’_affe_, il est _saigné_ au bon coin (Argot des voleurs). =DÉNICHEUR DE FAUVETTES=: Terme ironique employé pour se moquer d’un individu qui se vante de prendre la virginité des filles (Argot du peuple). =V.= _Dépuceleur de nourrices_. _N._ =DÉPAILLER=: Jusqu’ici cette expression était employée pour dire qu’une chaise n’avait plus de paille: elle était _dépaillée_. Dans les quartiers pauvres, les ouvriers n’ont généralement pas de sommiers; ils couchent sur des _paillasses_ garnies de _paille_ de seigle; quand un propriétaire, un vautour impitoyable, veut les faire expulser, ils disent: —Tu peux aller chercher le _quart_ et tous ses _sergots_, tu ne me feras pas _dépailler_. Mot à mot: _abandonner ma paille_ (Argot du peuple). _N._ =DÉPENDEUR D’ANDOUILLES=: Homme grand comme une perche à houblon. Allusion à ce qu’il pourrait sans échelle _dépendre les andouilles_ suspendues au plafond (Argot du peuple). =DÉPENSER SA SALIVE=: Orateur qui parle à un auditoire distrait; il parle en pure perte et _dépense sa salive_ inutilement. On dépense sa salive à vouloir convaincre quelqu’un qui ne veut rien savoir (Argot du peuple). _N._ =DÉPIAUTER=: Synonyme de _dépouiller_. Terme commun. —Je me déshabille, je me _dépiaute_. Quand les voleurs _s’en veulent_ pour un motif quelconque, ils tentent de _s’arracher la peau_. Mot à mot: se _dépiauter_ comme un lapin (Argot des souteneurs). =DÉPITÉ=: Ennuyé, éprouver du _dépit_, dans le sens de _déception_. Dans le peuple on applique cette expression aux _députés_ non réélus. Le mot français est devenu un mot d’argot. —C’est un _dépité_ de la Seine ou d’ailleurs. On dit encore qu’il a été _dépoté_, prenant la Chambre pour un _pot_. Ou bien: —Les électeurs l’ont enfin _déporté_ (Argot du peuple). _N._ =DÉPLANQUER=: Quand un voleur est en prison, il est en _planque_. Il est également en _planque_ quand il est _filé_ par un agent; quand il sort de prison ou quand il _grille_ l’agent, il se _déplanque_ (Argot des voleurs). =V.= _Déplanqueur_. =DÉPLANQUEUR=: Complice qui déterre les objets volés pendant que son camarade subit sa peine. C’est un usage chez les voleurs d’enterrer pour les soustraire à la justice, les objets volés; au moins s’ils subissent une peine ils ne font pas du _plan de couillé_ (Argot des voleurs). =DÉPONER=: _Levare ventris onus_. _A. D._ Nous voilà suffisamment renseigné si on ajoute pour comprendre que _déponer_ vient de _ponant_, _derrière_, et que _déponer_ est synonyme de _débourrer_. Quand un individu vous cramponne par trop, on l’envoie... _déponer sur la planche_ où il met son pain (Argot du peuple). =DÉPOTOIR=: Confessionnal. C’est bien en effet un _dépotoir_, puisque l’on y laisse ses ordures, une fois l’absolution reçue (Argot des voleurs). =V.= _Comberge_. =DÉPOT=: Prison située sous le Palais de Justice, où l’on conduit par le _panier à salade_ tous les individus arrêtés par les agents. C’est un lieu infect, indigne de notre époque, en raison de la promiscuité des détenus et de l’absence d’air et de lumière. Ce n’est pas _dépôt_ que l’on devrait dire, mais bien _dépotoir_, car il y passe annuellement 67,000 individus. Environ 15,000 vagabonds et 22,000 filles publiques. Je ne compte pas les voleurs qui ont horreur de ce lieu de détention surnommé la _Cigogne_ (Argot des voleurs). _N._ =DÉPUCELEUR DE NOURRICE=: Fanfaron qui s’imagine avoir trouvé la pie au nid et qui y trouve souvent une chose désagréable (Argot du peuple). =DÉPUCELEUR DE FEMME ENCEINTE=. =V.= _Enfonceur de porte ouverte_. =DÉRONDINER=: Un sou se nommant un _rond_, de là l’expression pour indiquer que l’on s’en sépare en payant: —Je me _dérondine_ tous les jours pour _sorguer_ (Argot du peuple). =DÉROUILLER=: Recouvrer sa souplesse, se mettre au fait d’un service _L. L._ _Dérouiller_: enlever la _rouille_ d’une pièce de fer ou d’acier. _Dérouiller_: perdre ses habitudes casanières pour reprendre ses relations. _Dérouiller_ a dans le peuple une autre signification. Pour _dérouiller_, ce n’est pas le papier émeri qui est employé, mais la première femme venue (Argot du peuple). _N._ =DÉSATILLER=: Châtrer (Argot des voleurs). =DESCENDRE LA GARDE=: Mourir (Argot du peuple). =DESCENDRE À LA CRÈMERIE=: Cette expression est employée par les filles qui n’aiment pas les hommes; elle est suffisamment claire. Par la satisfaction qu’elles éprouvent, elles boivent du lait non écrémé (Argot des filles). =V.= _Accouplée_. _N._ =DESCENTE DE GOSIER=: Avoir une soif perpétuelle. Pochard jamais rassasié (Argot du peuple). =DESCENTE DE LIT=: Femme facile, qui se couche au moindre signe. Synonyme de _paillasse_ (Argot du peuple). _N._ =DÉSENFLAQUER=: Se tirer d’un mauvais pas. Mot à mot: sortir de la merde. Un prisonnier est _enflaqué_; le _désenflaquer_, c’est lui rendre la liberté (Argot des voleurs). =DÉSENTIFLAGE=: Rompre avec quelqu’un avec qui on était lié. Mot à mot: se _désentifler_, se quitter, se séparer. C’est l’opération contraire à celle d’_entifler_ (Argot du peuple). =DESSALÉ=: Noyé que l’on retire de l’eau. Allusion à la morue que les ménagères font _dessaler_ avant de la manger (Argot du peuple). =DESSALEURS=: C’était une compagnie d’assassins qui attendaient sur les quais déserts du canal Saint-Martin les passants attardés. Ils les dépouillaient d’abord et les jetaient ensuite à l’eau. Le lendemain matin ils arrivaient comme par hasard sur la berge, armés d’un croc et repêchaient le _dessalé_ pour avoir la prime. L’opération était doublement fructueuse. La bande fut arrêtée et condamnée. L’expression est restée dans le peuple; tout _noyé_ pour lui est un _dessalé_ (Argot du peuple). _N._ =DÉTACHER LE BOUCHON=: Vider ses intestins. Allusion à la bouteille qui se vide le bouchon retiré (Argot du peuple). =V.= _Débourrer sa pipe_. =DÉTOCE=: Détresse, misère. Quand les _aminches_ n’ont plus d’os, ils sont dans la _détoce_ (Argot du peuple). =DÉTOURNEUR=: Voleur. _Détourner_, un objet de sa destination (Argot du voleurs). =DÉTOURNEUSE=: Voleuse qui opère spécialement dans les grands magasins de nouveautés. Il y a bien des manières de pratiquer ce vol, elles sont expliquées à leur place (Argot des voleurs). =DÉTOURNEUSE AU MOMIGNARD=: =V.= _Abéqueuse_. =DEUX SŒURS= (mes): Dans le peuple, par abréviation, on dit: _mes deux_ pour te faire une paire de lunettes. Ce n’est pas des fesses qu’il s’agit, comme le dit Delvau, mais des testicules. On appelle aussi _deux sœurs_, les deux nattes de cheveux que les femmes portent sur leurs épaules (Argot du peuple). =DÉVIDAGE A L’ESTORGUE=: Acte d’accusation lu en cours d’assises par le greffier. _Dévider_: parler; à _l’estorgue_, faussement (Argot des voleurs). _Dévider_: promenade en _dévidoir_ que font les prisonniers sur le préau (Argot des voleurs). =V.= _Queue de cervelas_. =DÉVIDER SON CHAPELET=: Les portières se chargent de cette opération en _cancanant_ sur les locataires (Argot du peuple). =DÉVISSER SON BILLARD=: Mourir. Quand le _billard_ est _dévissé_, adieu la partie. Un à peu près dit qu’il n’y a plus _Moyaux_ de faire une partie de _Billoir_ quand on joue _Troppmann_ (Argot du peuple). =DIABLE=: Agent provocateur. Malgré que ce mot fasse partie du vocabulaire des voleurs, il n’est pas d’usage que les agents de la sûreté provoquent les voleurs à commettre un vol; ils n’ont pas besoin d’être stimulés pour cela. En politique c’est un fait constant, car, sous l’Empire, jamais il n’y a eu un complot sans que, parmi les pseudo-conspirateurs, il n’y se soient trouvés plusieurs agents de la préfecture de police. Il y en eut même un du service du fameux Lagrange dans l’affaire des bombes d’Orsini. Dans le peuple on dit simplement _mouchard_ (Argot du peuple). =DIGELETTES= ou =DÉGELETTES=: Bagues (Argot du peuple). =DILIGENCE DE LYON=: (La promettre). Chose invraisemblable que promit un jour une fille à un client de hasard. Elle mourut subitement avant d’avoir réalisé sa promesse. C’était, à ce qu’il paraît, vraiment fantastique: il fallait cinquante mètres de câble, une ancre de marine en acier fondu, cinq kilos de chandelles-des-six, un tonneau de mélasse, un kilo d’essence de géranium, trente éponges, la graisse d’un guillotiné, un fémur de fille vierge, dix litres de pétrole, deux cartouches de dynamite.... Le client parcourut le monde entier à la recherche de la _diligence de Lyon_, il mourut à son tour sans la rencontrer (Argot des filles). _N._ =DINDORNIER DE CASTU=: Infirmier. Prisonnier employé comme auxiliaire pour remplir ces fonctions dans les infirmeries des prisons (Argot des voleurs). _N._ =DINGUER=: Envoyer _dinguer_ quelqu’un, c’est l’envoyer promener. Quand deux hommes se battent et que l’un tombe sur le pavé, sa tête _dingue_. Synonyme de _sonner_ (Argot du peuple). =DISTRICT=: Maison de tolérance. Ces maisons sont parquées dans des quartiers spéciaux. C’est un restant des vieilles coutumes du moyen-âge, où les _ribaudes_ étaient parquées dans les _clapiers_ de la Cité. Mot à mot: maison dans un _district_ (Argot des souteneurs). =V.= _Bocard_. =DIX-HUIT=: Ce mot est né d’un calembourg. Un soulier ressemelé est deux fois _neuf_. 2 fois 9 18 (Argot du peuple). =DOIGT DANS L’ŒIL= (Se fourrer le): Prendre ses désirs pour la réalité, croire que s’est _arrivé_. S’imaginer être aimé pour soi-même. Se figurer avoir du talent (Argot du peuple). =DOMBEUR=: Pince qui sert aux voleurs pour fracturer les portes (Argot des voleurs). =V.= _Monseigneur_. =DONNER=: Dénoncer. Les _nonneurs_ en _dénonçant_, mot à mot: _donnent_ (livrent) leurs complices à la justice (Argot des voleurs). =DONNEZ-LA=: Prenez garde, il y a du danger. Mot d’avertissement pour prévenir de l’arrivée de la police. Synonyme d’_acrée_ (Argot des voleurs). =DONNER UN COUP DE PILON=: Les mendiants qui ont une jambe de bois nomment cette jambe un _pilon_. L’allusion de forme est juste. Quand ils vont mendier à une porte, ils ont soin de faire voir leur infirmité, de là l’expression _donner un coup de pilon_ (Argot des mendiants). _N._ =DONNER À LA BOURBONNAISE= (La): Vouloir du mal à un individu, n’oser lui en faire, ne lui rien dire, mais le regarder d’un _mauvais œil_. —Qu’est-ce que tu as donc que tu _la donnes à la Bourbonnaise_ sur le _barbauttier_? —Y m’a foutu huit _jornes_ de _franc carreau_ (Argot des voleurs). =DORANCHER=: Pour dorer, par extension comme _billancher_ pour _biller_. On trouve fréquemment dans l’argot du peuple un changement de finale pour exprimer un mot (Argot du peuple). =DORMIR À LA CORDE=: Avant l’invention des refuges municipaux (les haras de la vermine) il existait, rue des Trois-Bornes, un bouge tenu par le père Jean. L’unique salle avait à peu près vingt mètres de long sur trois mètres de largeur. Dans toute la longueur, une grosse _corde_ était tendue; elle était terminée par deux forts anneaux qui la fixaient à chaque extrémité. Les clients, la plupart des _giverneurs_, payaient trois sous d’entrée; cette somme leur donnait le droit de s’accroupir les bras sur la _corde_ et de dormir. Cinquante environ pouvaient y trouver place. À cinq heures du matin le père Jean sonnait le réveil en tapant avec un morceau de fer sur une vieille casserole. Parmi les dormeurs il y en avait dont le sommeil était dur: ils ne se levaient pas. Alors le père Jean _décrochait la corde_ et les dormeurs tombaient sur les dalles. _Dormir à la corde_ est resté légendaire (Argot du peuple). _N._ =DORMIR DANS L’AUGE=: Paresseux pour qui le travail est un supplice. Allusion au cochon, qui, lorsqu’il est gavé, s’endort dans son _auge_ (Argot du peuple). _N._ =DORMIR EN CHIEN DE FUSIL=: Dormir en cerceau. Allusion à la forme de l’ancien chien de fusil à piston (Argot du peuple). =DORMIR D’UN ŒIL=: Faire semblant de dormir, avoir l’_œil_ ouvert et l’oreille aux aguets. Le prévenu enfermé dans sa cellule avec un _mouton_ ne _dort_ que d’_un œil_ pour ne pas, pendant son sommeil, laisser échapper des révélations. On dit aussi _dormir en gendarme_ (être en éveil) (Argot du peuple). =DORMIR SUR LE PAN DE LA CHEMISE DE SA FEMME=: Quand un ouvrier arrive en retard à l’atelier, les camarades le plaisantent et le saluent par cette phrase, qui a un sens caché. —Tu as _dormi sur le pan de la chemise_ de ta _femme_ (Argot du peuple). _N._ =DORMIR SUR LE RÔTI=: Être couché avec sa femme et s’endormir au moment psychologique. S’_endormir_ sur son travail (Argot du peuple). _N._ =DORT EN CHIANT=: Ouvrier qui va fréquemment au cabinet et y reste longtemps: pendant ce temps-là il ne travaille pas. Cette expression s’applique surtout aux maçons qui restent accroupis jusqu’à ce que les jambes leur fassent mal. Dans le peuple on dit: —_Tu chies comme les maçons_ (Argot du peuple). _N._ =DOUBLE-SIX=: Nègre (Argot des voleurs). =DOUBLEUR DE SORGUE=: Voleur de nuit. Il _double_ la journée (Argot des voleurs). =V.= _Attristé_. =DOS VERT=: Maquereau. Ce poisson, en effet, est mélangé de plusieurs couleurs sur le _dos_. L’allusion est transparente (Argot du peuple). =DOSSIÈRÉ=: Chaise (Argot du peuple). _N._ =DOUCE= (S’en offrir une): =V.= _Bataille des Jésuites_. _N._ =DOUCETTE=: =V.= _Mordante_. =DOUILLARD=: Peut s’entendre de deux manières. Clovis Hugues a beaucoup de _douilles_ (cheveux). Rothschild a beaucoup de _douilles_ (argent) (Argot du peuple). =DOULOUREUSE= (La): La carte à payer. Quand on paye c’est toujours douloureux, c’est l’éternel _quart d’heure_ de Rabelais (Argot du peuple). =DOUILLES=: Cheveux (Argot du peuple). =V.= _Alfa_. =DOUILLES SAVONNÉES=: Cheveux blancs. Lorsque les cheveux commencent à grisonner, la chevelure est _poivre et sel_ (Argot du peuple). _N._ =DOUSSIN=: Plomb (Argot des voleurs). =V.= _Gras double_. =DRAGEOIRES=: Les joues (Argot des voleurs). =V.= _Jaffles_. =DRAGUE=: Le médecin. Allusion à la _drague_ qui nettoye la Seine. Le médecin de prison qui a le purgatif facile, _drague_ les intestins des malades qui sont au _castu_ (Argot des voleurs). =DRINGUE=: Pièce de cinq francs en argent (Argot des voleurs). =V.= _Tune_. =DROGUER=: Demander. Allusion à _droguer_, attendre. —Voilà deux heures que ce pierrot-là me fait _droguer_ pour la _peau_ (Argot du peuple et des voleurs). =DROGUEUR DE LA HAUTE=: Voleur du grand monde (Argot des voleurs). =DUC DE GUICHE=: Guichetier. À l’instar des anciens ducs féodaux, il règne sur ses vassaux:—les prisonniers (Argot des voleurs). =DUCONNEAU=: Être niais. —Tu es plus bête que celui d’où tu sors (Argot du peuple). _N._ =DU MÊME TONNEAU=: La même chose. Un homme politique veut tout réformer, il fait de belles promesses à ses électeurs et ne fait pas mieux que ses devanciers. C’est _du même tonneau_. Du vin à douze ou du vin à seize, Bordeaux ou Bourgogne: C’est _du même tonneau_ (Argot du peuple). _N._ =DUO D’AMOUR=: Yeux pochés (Argot des voleurs). _N._ =DUR=: Il est au _dur_: en prison. C’est _dur_: pénible, difficile. C’est _dur à digérer_: grosse sottise ou blague impossible à avaler. _Dur à cuire_: vieux troupier qui ne ressent rien. _Dur_ (être dans son): être ce jour-là plus courageux qu’à l’ordinaire (Argot des voleurs). =DURAILLE=: Pierre (Argot des voleurs). =DURAILLE SUR MINCE=: Diamant sur carte (Argot des voleurs). _N._ =DURE= (La): Terre. Les vagabonds, qui y couchent souvent, savent par expérience qu’elle n’a pas la mollesse d’un lit de plume (Argot des voleurs). =DURÈME=: Fromage blanc (Argot des voleurs). =DURINER=: Ferrer. Allusion à la _dureté_ des chaînes avec lesquelles autrefois on _ferrait_ les forçats (Argot des voleurs). E =EAU D’AFF=: Eau-de-vie (Argot du peuple). =EAU DE SAVON=: Absinthe. Allusion à l’eau troublée par la dissolution qui ressemble à de _l’eau de savon_ surtout l’absinthe blanche (Argot du peuple). =V.= _Poileuse_. =EAUX BASSES=: Les _eaux_ sont _basses_ quand arrive la fin de la semaine. Quand la rivière est _basse_ les bateaux ne circulent pas, quand les _eaux_ sont _basses_ qu’il n’y a plus d’argent pas _mèche_ de naviguer (Argot du peuple). _N._ =ÉCARTER DU FUSIL=: Lancer en parlant des jets de salive. On dit aussi: lancer des _postillons_. Quand quelqu’un a cette infirmité on ouvre son parapluie en l’écoutant et on ajoute: —Tu baves et tu dis qu’il pleut (Argot du peuple). =ÉCHAPPÉ DE CAPOTE=: Chétif, malingre (Argot du peuple). =V.= _Avorton_. =ÉCLAIRER=: Payer. —C’est mon vieux qui tient le _flambeau_. Mot à mot qui _éclaire_. =ÉCOPPER=: Épuiser l’eau d’un bateau avec une _écoppe_. _Écopper_: recevoir un mauvais coup dans une bagarre. Dans les faubourgs on dit par ironie: —Tu boiras de l’anis dans une _écoppe_. _D’écopper_, par corruption, on dit de celui qui est blessé: il est _escloppé_ (Argot du peuple). =ÉCORNER LES BOUTANCHES=: Forcer les portes des boutiques. Cela indique bien l’action de la pince-monseigneur qui fait éclater le bois par la pesée (Argot des voleurs). =ÉCREVISSE DANS LA TOURTE= (Avoir une): Être à moitié toqué (Argot du peuple). =ÉCURER LE CHAUDRON=: Aller à confesse (Argot des voleurs). =V.= _Comberge_ et _Dépotoir_. =ÉCUREUIL= (Faire l’): Faire une besogne inutile, marcher sans avancer. _A. D._ On nomme _écureuil_ les ouvriers qui tournent la roue chez les petits tourneurs en bois; c’est au contraire un métier extrêmement fatiguant. Autrefois les _écureuils_ se réunissaient au carré Saint-Martin; c’était un ramassis de toute la fripouille parisienne; depuis que la machine à vapeur s’est vulgarisée ils ont presque disparu. On les nomme aussi _chiens de cloutier_. C’est une allusion au pauvre animal qui tourne la roue toute la journée pour actionner les soufflets de forge, allusion également à _l’écureuil_ qui tourne sans cesse dans sa cage (Argot du peuple). _N._ =EFFAROUCHER=: Prendre, s’évanouir sur la monnaie. Cela arrive fréquemment dans les cercles, où l’on a remplacé l’expression _effaroucher_ par celle _d’apprivoiser_. —J’ai _apprivoisé_ un _sigue_. =ÉGRUGEOIR= (l’): Une tribune quelconque. L’orateur _égruge_ ses paroles. _Égrugeoir_: la chaire à prêcher. _Égrugeoir_: les petites boîtes qui ressemblent à un comptoir dans lequel se tiennent les sœurs qui font la lecture aux prisonnières de Saint-Lazare. Allusion à l’antique _égrugeoir_ qui sert à piler le sel (Argot du peuple). _N._ =ELLE EST ENCEINTE D’UN PET ELLE ACCOUCHERA D’UNE MERDE DEMAIN=: Se dit d’une femme qui a un gros ventre sans pour cela être enceinte (Argot du peuple). _N._ =EMBALLEUR=: Les agents de la sûreté. Ils _emballent_ en effet les prisonniers dans le _panier à salade_. =EMBARDER=: Entrer dans une affaire (Argot du peuple). =EMBAUDER=: Voler de force, d’autorité. Il est évident que personne ne se laisse voler de bonne volonté, mais il est des voleurs qui reculent devant l’emploi de la force. _Embauder_: signifie voleur que rien n’arrête, pas même la police et qui assassine à l’occasion (Argot des voleurs). =EMBOÎTÉ= (Il est): Suivi ou arrêté. On _emboîte_ le pas à quelqu’un pour le suivre sans le perdre. Être _emboîté_ dans une affaire. _Emboîté_, embauché; mot à mot: entrer dans la _boîte_. —Je vais _t’emboîter_ (te battre) (Argot du peuple). _N._ =EMBRASSADE= (Le vol à l’): Le voleur feint de reconnaître un ami dans un homme qui vient de faire un encaissement; il se jette dans ses bras et l’embrasse chaleureusement. En un tour de main il lui vole son portefeuille ou son porte monnaie; il s’excuse de l’erreur qu’il a commise grâce à une ressemblance extraordinaire, puis il file lestement. Ce tour s’exécute aux environs de la Banque de France et des grandes maisons de crédit (Argot des voleurs). =ÉMÊCHÉ= (Être): N’avoir pas assez bu pour être pochard mais suffisamment pour avoir une légère _pointe_; être _allumé_. Allusion à la rougeur du visage (Argot du peuple). =EMMAILLOTER UN MÔME=: Combiner un vol. C’est une redondance de _nourrir un poupard_ (Argot des voleurs). =EMMANCHÉ=: Individu qui se tient raide comme un pieu. Dans le peuple, on dit qu’il à un _manche_ à balai de cassé quelque part. On _emmanche_ une affaire. _Emmanché_ se dit aussi dans une autre sens. —J’ai _emmanché_ la gosse (Argot du peuple). =EMMERDÉ=: L’être jusqu’à la garde. N’avoir plus rien à espérer. C’est un démenti an dicton populaire qui prétend que marcher dans la _merde_ cela porte bonheur (Argot du peuple). =EMMERDEMENT=: J’en éprouve un à cinquante francs par têtes. Se dit de tous les ennuis possibles. Travailler, par exemple, est un _emmerdement_ perpétuel (Argot du peuple). =ÉMOUCHEUR=: =V.= _Bête à chagrin_. =EMPAVES=: Drap de lit. —Je vais m’_empaver_ dans mon pieu (Argot des voleurs). _N._ =EMPAILLÉ=: Imbécile qui ne remue pas plus que s’il était _empaillé_ dans une vitrine du Musée zoologique (Argot du peuple). =EMPIFFRER=: Manger comme un cochon (Argot du peuple). =EMPOUSTEUR=: Truc très commun employé par des placiers. Ils déposent chez des commerçants des mauvaises marchandises, à condition; des compères les achètent; les marchands alléchés prennent de nouveaux dépôts qui, cette fois, leur restent pour compte (Argot des voleurs). =EMPROSEUR=: Variété de pédéraste (Argot des voleurs). =ENCALDOSSÉ=: Superlatif d’_endossé_ (Argot des voleurs). =V.= _Passif_. =ENCHTIBÉ= (Il est): Être pris, arrêté (Argot des voleurs). =ENCLOUÉ=: Allusion au canon dont on _encloue_ la lumière (Argot des voleurs). =V.= _Passif_. =ENDORMI=: Juge. Allusion à ce que les juges _dorment_ dans leur fauteuil pendant que les avocats plaident (Argot des voleurs). _N._ =ENDORMEUR=: Individu qui sans cesse promet une chose et ne la tient jamais. _Endormir_ est aussi synonyme de voler. —Il s’est _endormi_ sur des bijoux (Argot des voleurs). =ENDORMEUR=: Voleur qui opère au moyen d’un narcotique. Les _romanichels_ se servent pour ce genre de vol d’une décoction de _datura stramonium_. Ce vol se pratique en wagon. Le voleur profite du sommeil d’un voyageur pour lui couvrir le visage d’un mouchoir imbibé de chloroforme. Les voleurs qui ont cette spécialité forment une secte à part (Argot des voleurs). =ENDROGUER=: Chercher un coup à faire. Le voleur _drogue_ (attend) sur le trottoir l’occasion favorable (Argot des voleurs). =V.= _Arracheur de chiendent_. =ENFIGNEUR=: Vient de _fignoton_. Ce dernier mot en dit assez. C’est l’_actif_ du _passif_ (Argot du peuple). =ENFLAQUÉ= (Être): Enfermé, emprisonné (Argot des voleurs). =ENFLÉE=: Femme enceinte. On dit aussi: avoir une fluxion de neuf mois (Argot du peuple). =ENFONCEUR=: Banquier qui promet 50% par mois aux imbéciles et qui termine ses opérations en emportant la _grenouille_ à l’étranger (Argot du peuple). =ENFONCEUR DE PORTE OUVERTE=: Homme qui se vante d’avoir pris la virginité d’une fille alors qu’elle était enceinte de six mois (Argot du peuple). _N._ =ENFRIMER= ou =ENFRIMOUSSER=: Dévisager quelqu’un. Les agents de la Sûreté _enfriment_ les voleurs pour reconnaître les récidivistes (Argot des voleurs). =ENGAYEUR=: Complice qui attire le _trèpe_ (la foule) pendant que son complice explore les poches des badauds. L’_engayeur_ est indispensable à tous les camelots; c’est lui qui le premier achète l’objet mis en vente, pour entraîner les acheteurs. L’_engayeur_ est le complice du _bonneteur_; il mise pour engager les pontes à jouer (Argot des camelots). =ENQUILLER=: Entrer. —Il y a longtemps que je cherche à m’_enquiller_ dans cette boîte (Argot du peuple). =ENQUILLEUSE=: Voleuse qui opère dans les grands magasins de nouveautés. Elle _enquille_ la marchandise volée entre ses cuisses. Il faut vraiment être organisée particulièrement pour cacher un coupon de soie à cet endroit-là (Argot des voleurs). =ENRHUMÉ DU CERVEAU=: Allusion au nez qui coule sans cesse. Mais ce n’est pas du nez qu’il s’agit (Argot du peuple). =V.= _Lazzi-loff_. =ENTAILLER=: Tuer quelqu’un. C’est en effet une fameuse _entaille_. Avinain et Billoir étaient deux rudes _entailleurs_ (Argot des prisons). =ENTAULER=: Entrer dans une _taule_ (maison) (Argot des voleurs). =ENTAULER À LA PLANQUE=: Entrer dans une cachette pour se soustraire aux recherches de la police. On _entaule_ aussi _à la planque_ des objets volés pour les reprendre au sortir de prison (Argot des voleurs). =ENTERREMENT=: Morceau de gras-double, de lard et de pain que les femmes vendent aux environs des halles. On les appelle _Mesdames la poële_, parce qu’elles font frire leur marchandise dans cet instrument de cuisine. Un _enterrement_ de première classe coûte trois sous, de deuxième deux sous, de troisième un sou. Ces femmes gagnent de dix à douze francs par jour (Argot du peuple). _N._ =ENTOILÉ=: Emprisonné. Synonyme d’_enflaqué_. Cette expression vient de ce que dans les camps, la salle de police est sous une tente-abri: de là _entoilé_. Mot à mot: emprisonné sous la _toile_. S’_entoiler_: se coucher, se fourrer dans ses draps (Argot du peuple). _N._ =ENTRAVES=: Les cordes et les courroies qui ligottent les condamnés à mort pour _entraver_ leurs mouvements quand ils marchent à l’échafaud (Argot des voleurs). =ENTRAVER=: Empêcher une affaire. Mettre des bâtons dans les roues. _Entraver_: comprendre. —_J’entrave bigorne._ Mot à mot: Je _comprends_ l’argot et non pas je le _parle_. _Entraver_ a un double sens: —_J’entrave nibergue ou niente._ Je n’entends rien, je ne comprends pas (Argot des voleurs). =ENTRECÔTE DE BRODEUSE=: Une saucisse de deux sous ou une côtelette panée que les charcutiers tiennent au chaud dans des boîtes de fer blanc, et que les ouvrières mangent pour leur déjeuner—pas la boîte, mais la côtelette (Argot du peuple). =ENTROLER=: Emporter des objets volés. _Troller_ serait plus exact, car ce mot signifie _porter_ (Argot des voleurs). =ENVOYER UNE LETTRE CHARGÉE AU PAPE=: Allusion au papier employé qui est en effet _chargé_ d’un singulier cachet (Argot du peuple). =V.= _Déballer_. =ENVOYER AUX PELOTTES=: Envoyer promener quelqu’un. On dit aussi envoyer à la _balançoire_, ou va le _baigner_ (Argot du peuple). =V.= _Dinguer_. =ENVOYER À LA GOUILLE=: Jeter quelque chose en l’air, au hasard. Jeter une poignée de sous à des enfants (Argot du peuple). =ÉPARGNER LE POITOU=: Cette expression se comprend peu; en effet, _Poitou_ veut dire _public_; or, il n’est pas d’usage que les voleurs l’_épargnent_, puisque c’est lui justement qui forme toute sa clientèle. _Poitou_ veut aussi dire _non point_. =ÉPASTROUILLANT=: Extraordinaire (Argot du peuple). _N._ =ÉPATANT=: M. Jean Rigaud, dans son _Dictionnaire d’argot moderne_ (1881) dit à ce propos du mot _épater_: —_Épater_, _épate_ et leurs dérivés viennent du mot _épenter_, qui signifiait au XVIII‧ siècle _intimider_. Il y a quelques années, M. Francisque Sarcey écrivait que le vocable appartenait à Edmond About, qu’il avait été dit par Pradeau dans le _Savetier et le Financier_, pièce représentée en 1877 aux Bouffes Parisiens; le savant écrivain ajoutait que huit jours après, le «Tout-Paris» répétait ce mot. Cette expression, n’en déplaise au maître critique et à M. Jean Rigaud, n’appartient ni au XVIII^e siècle ni à Edmond About, elle a _cinquante quatre ans_ seulement d’existence. Elle a pris naissance au =Café Saint-Louis=, rue Saint-Louis, au Marais (aujourd’hui rue de Turenne). Des ouvriers ciseleurs sur bronze jouaient au billard une partie de _doublé_. À la suite d’un _bloc fumant_, Catelin, une contrebasse du Petit Lazzari, qui avait parié pour un des joueurs et qui perdait par ce coup, se leva furieux, et d’un brusque mouvement fit tomber son verre sur la table de marbre. Le verre se _décolla_ net. —Tiens, dit Catelin, mon verre est _épaté_—le verre n’avait plus de _pied_. À chaque coup, les joueurs répétaient à l’adversaire: tu es _épaté_ et, quand la partie se termina par un coup merveilleux, un des joueurs dit au vainqueur:—Si nous sommes _épatés_, tu es _épatant_. Catelin, sans le savoir, se servait du mot _épaté_ qui est en usage depuis des siècles dans les verreries, parmi les ouvriers verriers. Ils disent d’un _verre sans pied_, mis à la refonte pour ce motif, il est _épaté_. _Épaté_ signifie étonnement (Argot de tout le monde). _N._ =ÉPINGLE AU COL= (En mettre une): Avaler un demi setier d’un seul trait. On dit aussi: mettre _une épingle à sa cravate_ (Argot du peuple). _N._ =ÉPOILANT=: Plus fort que tout ce que l’on peut rêver. Pourtant la source de ce mot est des plus simples et ne signifiait au début rien d’extraordinaire. À l’école de Saumur, en faisant un travail dans le manège, un cheval tomba et se couronna les deux genoux. En le relevant, l’élève dit: —Mon pauvre cheval est _époilé_. L’expression est restée, mais elle est autrement appliquée (Argot du peuple). _N._ =ÉPOUFFER=: Saisir à l’improviste un passant par derrière, comme cela se pratique pour exécuter le _coup du père François_ (Argot des voleurs). =ÉPOUSER LA VEUVE=: Être guillotiné. C’est _Charlot_ qui remplit l’office de maire et les aides qui servent de témoins pour ce mariage forcé (Argot des voleurs). =ÉPOUSER LA FOUCANDIÈRE=: Quand un voleur est pris par les agents en flagrant délit, en se sauvant, il jette sur la voie publique ou dans les égouts, s’il le peut, les objets volés, afin de se débarrasser des preuves compromettantes (Argot des voleurs). =ÉPPRENER=: Appeler quelqu’un. L’_auseignot_ vient d’_épprener bancalo_ pour aller au _rastue_ (greffe) (Argot des voleurs). _N._ =ERMITE=: Voleur de grands chemins. Ainsi nommé parce qu’il opère généralement seul. On dit aussi un _solitaire_ (Argot des voleurs). =ESBIGNER= (s’): Se sauver. Dans les faubourgs, quand un voyou sait qu’il va recevoir une maîtresse correction, il s’_esbigne_ (Argot du peuple). =ESBROUFFE= (En faire): Faire des embarras, du vent, de la mousse. _Esbrouffe_ est un vieux mot qui vient d’_esbouffer_, éclabousser. C’est Théophile Gautier qui a transformé ce mot dans le sens de _vent_ et de _mousse_. Les escarpes se sont emparés du mot _esbrouffer_ pour désigner un genre de vol assez répandu. Ce vol consiste à _bousculer_ un passant dans la rue, à profiter de sa surprise pour le voler et s’excuser ensuite (Argot des voleurs). =ESBROUFFER=: Dire des sottises à quelqu’un, le secouer vertement (Argot du peuple). =ESBROUFFEUR=: Qui fait des _esbrouffes_. Voleur à l’_esbrouffe_ (Argot des voleurs). =ESCABRANTE=: Échelle (Argot des voleurs) =V.= _Montante_. =ESCARGOT=: Vagabonds, les habitués des refuges, les gouapeurs des halles, les _hirondelles du Pont-Neuf_. Dans la pièce des _Bohémiens de Paris_, Colbrun chantait: ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ Sur mon dos comme un limaçon, Portant mon bagage, Mon mobilier et ma maison. (Argot du peuple). =ESCARGOT=: Casquette que portaient les souteneurs avant la _david_, laquelle fut à son tour détrônée par la casquette à trois ponts (Argot des souteneurs). _N._ =ESCARGOT D’HIVER=: Vieillard impuissant. L’allusion est on ne peut mieux trouvée. Comme _l’escargot_ il rentre dans sa coquille (Argot du peuple). _N._ =ESCARPE=: Voleur, assassin. A. Delvau pense que cette expression vient de _scarp_ mot allemand qui signifie instrument tranchant et aigu ou bien du couteau _d’escalpe_ (du _scalp_ des sauvages). C’est aller chercher bien loin une étymologie bien simple. Les voleurs et les assassins travaillent dans des endroits isolés, _escarpés_ (Argot des voleurs). =ESCARPER UN ZIGUE À LA CAPAHUT=: Assassiner un complice pour lui voler sa part de butin. Sur les deux mots, il y en a un de trop, _capahut_ comme _escarpe_ voulant dire assassin (Argot des voleurs). _N._ =ESCOFFIER=: Blesser ou tuer quelqu’un. Se dit également au point de vue moral. —Je l’ai rudement _escoffié_ dans l’estime de ses amis (Argot du peuple). =ESCOLE=: Trois francs (Argot des voleurs). =ESCLOTS=: Sabots (Argot des voleurs). =ESCRACHE=: Passeport, papier. _L. L._ _Escrache_ veut dire voleur; c’est le synonyme _d’escarpe_ et de _fripouille_ (Argot du peuple). _N._ =ESGOURDES= ou =ESGOURNES=: Oreilles. Quand elles sont démesurées on dit: Ah! _quelles feuilles de chou_. On dit également: _plat à barbe_. Les voleurs disent: _cliquettes_. =ESPATROUILLANT=: Cette expression est employée pour exprimer le comble de l’admiration. C’est le mot _épaté_ allongé (Argot du peuple). _N._ =ESQUINE=: Le temps (Argot des voleurs). =V.= _Boilard_. =ESQUINTÉ=: Fatigué, moulu, rompu. L’ouvrier qui travaille mal _esquinte_ son ouvrage. Quand deux individus se battent, le plus fort _esquinte_ son adversaire. Dans une polémique, on _esquinte_ son contradicteur pour avoir raison (Argot du peuple). =ESTAFFIOU= ou =ESTAFFION=: Chat. _Estaffiou_ veut dire aussi gifle, baloche (Argot des voleurs). =ESTAMPER=: Tromper quelqu’un. Emprunter de l’argent sens le rendre, c’est _estamper_ le prêteur. Allusion au _balancier_ de machine qui frappe. _L’estampeur tape_ (Argot du peuple). =ESTAMPEUR=. =V.= _Estamper_. =ESTOURBIR=: Tuer un individu par surprise (Argot des voleurs). =ESSENCE DE CHAUSSETTES=: Sueur des pieds (Argot du peuple). =ÉTALER SA BIDOCHE=: Se décolleter par en haut. Raccourcir ses jupes par en bas. Mot à mot: _étaler sa viande_. Les filles appellent cette manière de s’habiller ou plutôt de se déshabiller _l’éloquence de la chair_ car elles ne pratiquent pas le proverbe: À bon vin pas d’enseigne (Argot du peuple). _N._ =ÉTEIGNOIR=: Cafard qui éteint l’intelligence des enfants qu’il est chargé d’instruire. _Éteignoir_: individu morose qui _éteint_ toute gaieté dans une réunion. _Éteignoir_: nez monumental. —Dérange donc ton nez que je voie la tour Eiffel (Argot du peuple). =ÉTOUFFER=: Du vieux mot _estouffer_, prendre, cacher, faire disparaître (Argot du peuple). =V.= _Étouffeur_. =ÉTOUFFEUR=: On _étouffe_ une affaire, un scandale. Un libraire _étouffe_ un livre qu’il ne sait pas lancer. Le caissier qui vole son patron _étouffe_ la monnaie. C’est surtout dans les cercles que les croupiers _étouffent_ les jetons. On _étouffe_ un _perroquet_. _Étouffer_, en un mot, est le synonyme de voler (Argot du peuple). =ÉTOUFFOIR=: Agence d’affaires ou de renseignements (Argot des voleurs). _N._ =ÊTRE CHARGÉ À CUL=: Être saoul comme la bourrique à Robespierre. Allusion à une voiture _chargée à cul_ qui ne peut avancer; l’ivrogne fait de même (Argot du peuple). =ÊTRE EN FINE PÉGRAINE=: Être sur le point de mourir. —Le _ratichon_ vient d’être _eppréné_ au _castu_; pour faire avaler _le père la Tuile_ au _frisé_, il va _tourner de l’œil_ (Argot des voleurs). =ET TA SŒUR?= Façon ironique de répondre à une question ennuyeuse. Il arrive fréquemment que la réponse est raide. —_Et ta sœur?_ —Elle est à Saint-Lazare qui bat du beurre; quand elle battra de la merde la crème sera pour toi. —_Et ta sœur?_ —Elle est couverte d’ardoises, les crapauds ne montent pas dessus. —_Et ta sœur?_ —Elle est à Saint-Lazare qui fait de la charpie pour la tienne. —_Et ta sœur?_ —Elle est au Panthéon qui prie le bon Dieu pour que tu soies moins... melon. On pourrait varier à l’infini ces citations (Argot du peuple). _N._ =ÉTUI=: =V.= _Cuir_. =EUSTACHE=: Couteau (Argot du peuple). =V.= _Lingre_. =EXPULSER UN LOCATAIRE GÊNANT=: Péter (Argot du peuple). F =FABE=: Poches (Argot des voleurs). =V.= _Fouilleuse_. =FABRIQUÉ=: Fait, cuit, pris. _Fabriquer_ quelqu’un: le prendre dans un piège sans qu’il s’en doute. _Fabriquer_ est synonyme de voler (Argot du peuple). _N._ =FACE=: Argent. Allusion à l’effigie des pièces de monnaie. —As-tu des _faces_, nous irons voir jouer la _misloque_ (Argot des voleurs). =FACTIONNAIRES= (En relever un): Aux Halles, les porteurs ne peuvent abandonner leur poste tous à la fois, pour aller boire chez le marchand de vin, ils laissent le verre de chaque camarade au comptoir, le _bistro_ donne un _jeton_; quand le camarade vient boire son verre, il _relève le factionnaire_. À la fin de la journée le _jeton_ souvent répété devient une _contremarque_ pour _la sorgue_ car la soulographie est complète (Argot du peuple). _N._ =FAFFES À L’ESTORGUE=: Faux papiers. Il faut que les filles aient vingt-et-un ans pour être admises dans les maisons de tolérance; il existe des fabriques de faux papiers pour _maquiller_ les états civils; d’une brune on en fait une blonde, d’une Marseillaise on en fait une Lilloise (Argot des souteneurs). =V.= _Lopheur_. _N._ =FAFIOT À PIPER=: Mandat d’amener délivré par le juge d’instruction. Ce sont les agents de la sûreté qui sont chargés du _mandat à prendre_. Mot à mot: _fafiot_, papier; _pipé_, pris (Argot des voleurs). =FAFIOTS À PARER=: Papiers en règle. Il est à remarquer qu’il n’y a que les gens qui n’ont pas la conscience nette qui sont toujours munis des meilleurs papiers (Argot des voleurs). =FAFIOT SEC=: Livret. _Fafiot à roulotter_: papier pour circuler. _Fafiot à roulotter_: papier à cigarettes. _Fafiot garaté_: billet de banque, quand c’était =M.= _Garat_ qui les signait. _Fafiot du Bourguignon_: quand il était signé _Soleil_ (Argot des voleurs). =V.= _Talbin d’altèque_. =FAFIOTEUR=: Banquier. Allusion aux billets de banque ou à ordre qu’il manie sans cesse (Argot des voleurs). =FAFFLARD D’EMBALLAGE=: Même signification que _fafiot à piper_ (Argot des voleurs). =FAGOTS= (En débiter): Passer son temps à dire des niaiseries, à raconter des histoires de grand’mères (Argot du peuple). =FAIBLARD=: Un homme en convalescence après une longue maladie, est _faiblard_. Un article de journal mal conçu, mal écrit, sans conclusion, est _faiblard_. _Faiblard_: synonyme de rachitique. On dit aussi quelquefois, pour exprimer la même pensée. —C’est _faiblot_ (Argot du peuple). _N._ =FAIRE ALLER EN BATEAU=: Trimballer quelqu’un et le remettre toujours au lendemain (Argot du peuple). =FAIRE CHAPELLE=: Il existe une catégorie d’individus certainement malades du cerveau, car leur passion idiote ne peut autrement s’expliquer. Ils s’arrêtent devant la devanture des magasins ou travaillent les jeunes filles, généralement des modistes, ils entr’ouvrent leur paletot, en tenant un pan de chaque main et font voir ce que contient leur culotte déboutonnée. Ces cochons opèrent également dans les jardins publics ou jouent les petites filles. Ce n’est pas la police correctionnelle qu’il leur faudrait mais bien un cabanon à Charenton. On les nomme aussi des _exhibitionnistes_, de ce qu’ils font une _exhibition_ (Argot du peuple). =FAIRE CHAPELLE=: Écarter les jambes et retrousser ses jupes pour se chauffer devant le feu. Une _accouplée_ se chauffe de cette manière, l’autre qui la regarde lui dit: —Fais-le assez cuire car je ne l’aime pas saignant (Argot des filles). _N._ =FAIRE CHIBIS=: S’enfuir d’une prison avec le concours d’un camarade, sans prévenir le gardien. C’est brûler la politesse au directeur (Argot des voleurs). =FAIRE CUIRE SON HOMARD=: Rougir subitement. Synonyme de _piquer son fard_ (Argot du peuple). =FAIRE DES YEUX DE HARENGS=: Crever les yeux à quelqu’un au moyen d’un coup bien connu des voleurs. Allusion à l’œil vide du hareng quand il arrive des ports de mer sur nos marchés (Argot du peuple). =FAIRE DES PETITS PAINS=: Faire des manières. Prendre des airs mystérieux pour causer avec quelqu’un, lui dire des riens et avoir l’air de lui parler de choses intéressantes. Faire la cour à une femme c’est _faire des petits pains_ (Argot du peuple). _N._ =FAIRE DU POTIN=: Faire du bruit, du tapage (Argot du peuple). =FAIRE ÉTERNUER SON CYCLOPE=: Inscrire cent sous sur son carnet de dépenses sous cette rubrique significative: On n’est pas de bois! (Argot du peuple). _N._ =FAIRE FAUX-BOND À L’ÉCHÉANCE=: Manquer à un rendez-vous, ne pas payer une traite (Argot du peuple). =FAIRE L’ÉGARD=: Garder la part d’un vol qui revient à un complice. Ce devrait être plutôt _faire l’écart_, à moins que ce ne soit pris dans le sens de _manquer d’égard_ en ne partageant pas (Argot des voleurs). =FAIRE DE L’HARMONE=: Parler bruyamment dans un lieu public. Abréviation _d’harmonie_ (Argot du peuple). =FAIRE LA GRANDE SOULASSE=: Assassiner tous les habitants d’une maison (Argot des voleurs). =FAIRE LA NIQUE=: Se moquer de quelqu’un au moyen d’un geste familier aux voyous (Argot du peuple). =V.= _Battre une basane_. =FAIRE LA PAIRE (Se)=: Se sauver à toutes jambes. Ou dit aussi: se _tirer des deux_ (Argot du peuple). =FAIRE LA SOURIS=: Fille qui vole son client pendant qu’il dort. Albert Glatigny a dit à ce sujet: En robes plus ou moins pompeuses, Elles vont comme des _souris_. Ce sont les jeunes _retapeuses_ Qui font la gloire de Paris. (Argot des filles). =FAIRE LE JACQUES=: Faire l’imbécile. On fait le _Jacques_ auprès d’une femme pendant qu’elle est la maîtresse d’un autre (Argot du peuple). _N._ =FAIRE LE LÉZARD=: Battre sa _flemme_ sur l’herbe, le ventre au soleil. On dit aussi: _manger une soupe à l’herbe_ (Argot du peuple). =V.= _Loupeur_. =FAIRE LE POIREAU=: Attendre longtemps quelqu’un, si la personne ne vient pas, celui qui attend est planté là pour reverdir. On dit aussi: _poiroter_. Synonyme de: _Attends-moi sous l’orme_ (Argot du peuple). =FAIRE NONNE=: Se rendre le complice d’un vol préparé de longue main par le _nonneur_ lui-même (Argot des voleurs). =FAIRE SA GUEULE=: Faire une figure renfrognée. Être mécontent sans en rien dire (Argot du peuple). _N._ =FAIRE SA MERDE=: Faiseur d’embarras. Les gascons ont ce privilège (Argot du peuple). =FAIRE SA POIRE=: Ne jamais rien trouver de bien; s’imaginer être au-dessus de tout et de tous (Argot du peuple). _N._ =FAIRE SA SOPHIE=: Faire le dégoûté, à table ne manger que du bout des lèvres. Mot à mot: faire des manières. Synonyme de _chipie_ (Argot du peuple). _N._ =FAIRE SES ORGES=: Gratter. Faire _danser l’anse du panier_. Engraisser ses poches aux dépens de celles des autres (Argot du peuple). =FAIRE SON BEURRE= a la même signification. =FAIRE SUER=: Faire _suer_ une affaire, lui faire rendre l’impossible. _Faire suer_, expression employée par les cuisiniers pour faire revenir certaines viandes très légèrement dans la casserole. Dire à quelqu’un: _Vous me faites suer_, signifie: _Vous m’embêtez_ (Argot du peuple). FAIRE SUER LE CHÊNE: Tuer un homme (Argot des voleurs). =FAIRE SUISSE=: Ouvrier qui boit seul et ne fraternise jamais avec ses camarades (Argot du peuple). =V.= _Ours_. =FAIRE UN HOMME=: Action de _lever_ au bal ou ailleurs un individu à la recherche d’une bonne ou d’une mauvaise fortune, à l’heure, à la course ou à la nuit (Argot des filles). =FAIRE UN RIGOLO=: Vol identique à celui que l’on nomme l’_embrassade_. L’homme volé n’a guère envie de _rigoler_ et ne trouve pas _rigolo_ le vol dont il est victime (Argot des voleurs). =FAIRE UN TROU DANS LA LUNE=: Faire banqueroute (Argot du peuple). =FALOURDE ENGOURDIE=: Un cadavre. Allusion à la rigidité (Argot du peuple). =FANAL=: La gorge. —Viens-tu nous arroser le _fanal_. L’ivrogne, en buvant son premier verre de vin, s’écrie: —Place-toi bien, mon vieux, il y aura foule ce soir (Argot du peuple). _N._ =FALZAR=: Pantalon (Argot des voleurs). =FANANDEL=: Ami. Expression usitée dans les prisons (Argot des voleurs). =FANFE=: Tabatière (Argot des voleurs). =FANTABOCHE=: Fantassin (Argot du peuple). =FANTAISIE SUR LA TRINGLE=: =V.= _Bataille, des Jésuites_. _N._ =FARAUDENE=: Madame (Argot des voleurs). =FARAUDEC=: Mademoiselle. Ce mot vient de _faraude_; c’est un simple changement de finale (Argot des voleurs). =FARCHER DANS LE PONT=: Tomber dans un piège tendu par les agents (Argot des voleurs). =FARFOUILLARD= pour =FARFOUILLEUR=: Individu obstiné et méticuleux qui cherche sans cesse ce qu’il ne trouve jamais, excepté quand il _farfouille_ les poches d’un homme cossu. On dit également: il cherche la petite-bête (Argot du peuple). =FARFOUILLER DANS SES ESGOURDES (Se)=: Nettoyer ses oreilles pour en enlever les mucosités (Argot du peuple). =FARGUER=: Rougir (Argot des voleurs). =FARIDONDAINE= (Être à la): Être dans la purée la plus complète. Par abréviation, on dit être à la _faridon_ (Argot du peuple). =FAUCHANTS=: Les ciseaux (Argot des voleurs). =FAUCHÉ=: Guillotiné. Par allusion au supplicié qui est sans _tête_, on dit d’un homme sans le sou, qui n’a pas de _faces_ dans ses poches: —Il est _fauché_ (Argot des voleurs). =FAUCHE-ARDENTS=: Les mouchettes. Les mouchettes coupent, en effet, la mèche de la chandelle (Argot des voleurs). =FAUCHEMANN=: _Fauché_. —Je suis _fauchemann_ (Argot des souteneurs). _N._ =FAUCHEUR=: Le bourreau (Argot des voleurs). =FAUX-BLAZE=: Donner un faux numéro (Argot des voleurs). =FAUSSE COUCHE=: Homme, petit, chétif, qui n’a pas été terminé. Terme de mépris employé dans les ateliers (Argot du. peuple). =V.= _Avorton_. =FAUVETTE À TÊTE NOIRE=: Gendarme. Allusion au chapeau bicorne (Argot des voleurs). =V.= _Hirondelle de Potence_. =FÉE AUX YEUX VERTS (La)=: Absinthe. Elle charme les buveurs, qui ne savent se soustraire à son influence (Argot du boulevard). =FEIGNANT=: Propre à rien. Lâche, poltron, paresseux. Descends-donc de ton cheval, eh! _feignant!_ Apostrophe d’un voyou charitable à Henri IV sur le Pont-Neuf pour lui offrir un canon. On dit également _feignasse_ (Argot du peuple). =FÊLÉ=: Toqué, un peu fou. —Il a le coco _fêlé_. Allusion à une marmite _fêlée_, elle fuit; par la _fêlure_ de la tête, la mémoire s’en va (Argot du peuple). =FENDRE À S’ÉCORCHER= (Se): Dépenser tout son argent sans profit. —Allons _fends_-toi d’une tournée (Argot du peuple). =FENDRE L’ARCHE=: Quand un homme pressé marche vite, les voyous lui crient: —Prends garde, tu vas te _fendre l’arche_. Couper une carte de son adversaire, c’est lui _fendre l’arche_ (Argot du peuple). =FENDRE L’OREILLE=: Mise à la retraite de quelqu’un, fonctionnaire, officier ou employé avant l’âge révolu. —Sacré nom de Dieu, les cochons m’ont _fendu l’oreille_: J’ai pourtant encore du sang. Allusion à la coutume de _fendre l’oreille_ aux chevaux mis à la réforme (Argot des troupiers). =FENÊTRE=: =V.= _Carreau_. =FERLAMPIER=: Homme à qui tous les métiers sont bons. Mendiant, voleur, souteneur (Argot des voleurs). =FERME ÇA=: _Ferme_ ta bouche (Argot du peuple). =FERMÉ SON VASISTAS= (Avoir): Mourir (Argot du peuple). =FERRÉ À GLACE=: Sachant parfaitement ce qu’il doit savoir. _A. D._ Dans le peuple, cette expression signifie être _affranchi_, ne rien craindre. C’est la conséquence d’un vieux proverbe: —Il est _ferré à glace_. Il ne craint ni putain ni garce (Argot du peuple). _N._ =FERTANCE= ou =FERTILLE=: La paille. —Dans mon _garno_ à quatre _ronds_ la _sorgue_, y a des _pégoces_ dans la _fertance_ (Argot des voleurs). =FESTILLANTE=: La queue du chien; il la remue pour témoigner sa joie à son maître. Elle _frétille_. _Festillante_ est la corruption de _frétillante_ (Argot des voleurs). =FESTONNER=: Pochard qui ne tient pas sur ses jambes. Il _festonne_ en marchant, pour essayer de maintenir son équilibre (Argot du peuple). =FESSER LA MESSE=: Prêtre qui expédie à la vapeur une messe d’enterrement de dernière classe. —Le _ratichon_ a _fessé sa messe_ en cinq secs (Argot du peuple). =FEUILLES DE CHOUX=: Oreilles (Argot du peuple). =V.= _Esgourdes_. =FEUILLE DE CHOU=: Mauvais journal qui ne se vend qu’au poids (Argot d’imprimerie). =FICELÉ=: Se dit de quelqu’un bien habillé, tiré à quatre épingles (Argot du peuple). =FICELEUSE=: La ceinture (Argot du peuple). =V.= _Anguille_. =FICELLE=: Être _ficelle_, malin, rusé, employer toutes sortes de _ficelles_ pour réussir dans une affaire. —Je la connais, vous êtes trop _ficelle_ pour ma cuisine. —Vous ne me tromperez pas, je vois la _ficelle_ (Argot du peuple). =FIÈVRE CÉRÉBRALE=: Condamné à mort. Il meurt, en effet subitement (Argot des voleurs). =FIGNE=: Le _podex_ (Argot des voleurs). =FIGNOL=: Joli (Argot des voleurs). =FIGNOLER=: Polir une pièce d’ouvrage, l’achever avec un soin tout particulier (Argot du peuple). =FIGNOTON=: Derrière (Argot du peuple). _N._ =FIGURE DE CAMPAGNE=: Faire ses nécessités en plein air. On comprend quelle figure est au vent (Argot du peuple). =FIGURANTS DU SALON=: Certaines maîtresses de maison de tolérance pour faire croire à une clientèle choisie, paient chaque soir plusieurs individus qui _figurent au Salon_. Rue Sainte-Appoline, une de ces maisons eut pour _figurants_ pendant plusieurs années deux acteurs devenus très célèbres (Argot du peuple). _N._ =FIGURE À CLAQUES=: Visage ingrat, pas précisément laid, mais antipathique de prime abord. Dans le peuple, tout individu qui ne vous regarde pas en face, franchement, comme on dit l’œil dans l’œil, est une _figure à claques_. —Tiens, tu me dégoûtes, ta gueule appelle la _claque_ (Argot du peuple). =FIGURE D’ÉCUMOIRE=: Homme affreusement grêlé (Argot du peuple). =V.= _Poêle à marrons_. =FIGURE DE PAPIER MÂCHÉ=: Personne sans couleur, aux joues creuses et à visage pâle. Le peuple, sans pitié, ne manque jamais d’employer cette expression pour un malheureux qui meurt de consomption. —Il ne tient pas debout avec sa _figure de papier mâché_ (Argot du peuple). =FIL À LA PATTE= (En avoir un): Être gêné par quelqu’un. Être entravé dans ses affaires, n’avoir pas ses coudées franches. Une femme crampon est un rude _fil à la patte_ (Argot du peuple). =FIL À RETORDRE= (Avoir du): Peiner pour réussir une affaire. Essayer de convertir un incrédule. —Pas moyen de venir à bout de cette mauvaise tête d’Alfred, En voilà un enfant qui m’a donné du _fil à retordre_ (Argot du peuple). =FILATURE=: Terme employé par les agents de la Sureté pour indiquer qu’ils _filent_ un voleur (Argot des voleurs). =FIL DE SOIE=: Filou, voleur (Argot du peuple). =FIL EN QUATRE=: Eau-de-vie supérieure (Argot du peuple). =FILER=: Suivre. Pour organiser une _filature_, les agents se mettent deux, l’un devant le _filé_, l’autre derrière, de façon à ce qu’il ne puisse échapper. Il y a des _filatures_ qui sont extrêmement mouvementées, c’est une véritable chasse où toutes les ruses sont mises en œuvre. Le _gibier_ cherche toutes les occasions de se dérober pour éviter le _sapement_ (Argot des voleurs). =FILER LA COMÈTE=: Malheureux qui n’a pas de domicile et qui marche toute la nuit pour éviter d’être emballé par les agents. Quand il n’y a pas de _comète_ il _file les étoiles_ quand il n’est pas _filé_ lui-même (Argot du peuple). =FILER UN SINVE=: _Filer_, suivre, _sinve_, homme facile à duper. Mot à mot: le filer jusqu’au moment favorable pour le dévaliser sans danger (Argot des voleurs). =FILOCHE=: Bourse. Avoir sa _filoche à jeun_, c’est être sans le sou (Argot du peuple). =FINIR EN QUEUE DE POISSON=: Chose qui commence bien et finit mal ou pas du tout. Un livre qui commence en empoignant ses lecteurs et se termine bêtement, c’est _finir en queue de poisson_ (Argot du peuple). =FLAC D’AL=: Sacoche à argent. _Flac_ sac, _dal_ argent: abréviation d’_altèque_. Pour _flaquer_, on dit aussi je vais à _flacdal_ (Argot du peuple). =FLAGORNER=: Flatter quelqu’un bassement. Trouver une _croûte_, une œuvre de maître. Comparer un mauvais vaudevilliste à Molière ou à Legouvé. Mot à mot: prodiguer des éloges tarifés ou intéressés (Argot du peuple). =FLAGORNEUR=: Flatteur. Race assez commune. Il y en a toujours au moins un dans un atelier. Le _flagorneur_ descend sans vergogne au rôle de mouchard (Argot du peuple). =FLAMAND=: Amis (Argot des voleurs). =V.= _Aminche_. =FLAMBEAU= (En avoir un): —Je connais le _flambeau_, c’est-à-dire je connais la chose. Faire une belle invention c’est avoir un _chouette flambeau_. —Tu ne me monteras pas le coup, mon vieux, je sais ou est le _flambeau_. Être très habile dans un métier c’est avoir le _flambeau_. _Flambeau_, dans le peuple, veut dire être supérieur aux gens de sa profession. Francisque Sarcey, Bouguereau, Ambroise Thomas, Clovis Hugues, sont des _flambeaux_. Émile de Girardin, Victor Hugo, Lamartine, Diaz, etc., étaient des _flambeaux_ (Argot du peuple). _N._ =FLANCHER=: Avoir peur (Argot du peuple). =FLANCHER=: Jouer sur les places publiques au _bouchon_ (_radin_) ou à l’_anglaise_ (_monac_). En général de tous jeux on dit _flancher_ (Argot du peuple). =FLANCHET=: Part de vol. Lot qui échoit à un brocanteur. Morceau de viande qui forme la _pointe_ dans l’intérieur du bœuf (Divers argots). =FLANCHEUR=: Qui _flanche_ (Argot du peuple). =FLANELLE= (Faire): Entrer dans une maison de tolérance, peloter le personnel sans consommer (Argot des souteneurs). =FLAQUER=: =V.= _Déballer_. =FLAQUET=: L’endroit ou le dos change de nom. Dans le peuple on ne prend pas de mitaine pour donner au _flaquet_ son vrai nom (Argot du peuple). =FLEMME=: Maladie que la plupart des ouvriers ont les lundis. On dit: battre une _flemme_. Bien souvent la _flemme_, la _flemme_, Bien souvent la _flemme_ me prend. En hiver comme en été, Elle ne m’a jamais quitté. (Argot du peuple). =FLEURE-FESSES=: Homme qui moucharde ses compagnons d’atelier et est sans cesse _derrière_ le patron (Argot du peuple). =V.= _Lèche-cul_. =FLEUR DE SACRISTIE=: Calotin qui fréquente les églises sans en croire un mot. C’est un commerce comme un autre. On dit aussi: _rat de sacristie_ (Argot du peuple). _N._ =FLIQUE= ou =FLICK=: Sergent de ville (Argot du peuple). =V.= _Bec de gaz_. =FLIC À DARD=: Sergent de ville. Allusion à ce que dans les manifestations, ils mettent sabre au clair, ils _lardent_ les manifestants. Dans le peuple, le mot est soudé, on dit _flicadard_ (Argot du peuple). _N._ =FLINGOT=: Fusil (Argot des troupiers). =V.= _Bottoche_. =FLÔME=: Femme. Cette expression est nouvelle dans les faubourgs. D’où vient-elle? Probablement de ce que les femmes d’ouvriers, pendant que leurs maris travaillent, _flemment_ chez les voisines. _Flôme_ est une corruption de _flemme_, comme _flemmard_ pour paresseux, et une adjonction de finale à _flemme_ (Argot du peuple). _N._ =FLOPPÉE=: En donner une ou la recevoir. Être battu ou battre violemment. Quand la _marmite_ du souteneur ne rapporte pas, elle reçoit une _floppée_. Allusion au cordonnier qui _bat_ son cuir pour l’assouplir: il le _floppe_ (Argot des souteneurs). =FLOTTE=: Eau. La rivière _flotte_. On dit d’une personne mince dans des vêtements trop larges: —Ses membres _flottent_. Toute la _flotte_ (l’atelier en entier) a été manger une friture. Nous étions une _flotte_ pour nous étions un _tas_ (Argot du peuple). _N._ =FLOTTANT=: Bal où se réunissent les souteneurs du quartier. Toute la _flotte_ s’y donne rendez-vous. Les souteneurs n’ont pas de préjugés, une expression même injurieuse glisse sur les oreilles de ces messieurs. Ils savent très bien que le mot _flottant_ vient de _flotte_, eau, or les _poissons_ sont dans leur élément (Argot des souteneurs). _N._ =FLOUMANN=: Floueur, filou. _Mann_, en allemand veut dire _homme_. Mot à mot, en retournant la finale, cela fait _homme floueur_. Être _floué_, est synonyme d’être trompé. Ainsi, un homme épouse une femme qu’il croyait vierge, elle sort de la maternité. —Il est _floué_ (Argot du peuple). _N._ =FLOUPIN=: Diminutif de _floumann_, comme _pégriot_ l’est de _pègre_. Un _floupin_ est un petit filou qui travaille dans les bas prix. —Il vole un mouchoir; le _floumann_ vole des millions (Argot du peuple). _N._ =FLOUTIÈRE=: Rien. Au XVI^e siècle on critiquait les archi-suppôts chargés de réformer le langage (l’argot) en usage dans les _cours des Miracles_, on disait d’eux... sans _ficher floutière_. Le mot est resté en usage (Argot du peuple). =FLUTES=: Jambes. On dit d’une femme maigre: Elle a volé les _flutes_ du boulanger. _Flute_, synonyme de _zut_ (Je ne veux pas) (Argot du peuple). =FLUTENCUL=: Pharmacien. Bonjour Mam’zelle Zirzabelle J’vous apporte un p’tit lavement, Ça vous r’fra le tempérament. Allons, tournez-vous, mam’zelle. Fi! Monsieur, pas tant d’raideur, Car jamais apothicaire Ne verra c’que par pudeur Je n’fais voir qu’à ma chère mère! (Argot du peuple). =FLUXION DE PAVÉS=: Pochard qui tombe et s’abime la figure: elle enfle comme s’il avait mal aux dents. De là l’expression (Argot du peuple). =FOIRE D’EMPOIGNE=: Voler à la force du poignet (Argot des voleurs). =FOIREUX=: Poltron. On dit aussi: _foireux comme un geai_. L’ami Mac-Nab nous a laissé une chanson connue, à ce sujet: ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ Il reste les Napoléon, Des muff’s qu’a toujours la colique Et qui _foire_ dans ses pantalons Pour em... bêter la République. Allusion à la fuite de _Craint-plomb_, pendant la guerre de Crimée (Argot du peuple). =FOIRON=: Le derrière (Argot du peuple). =FOND DE PÊCHE=: Le nombril (Argot des voleurs). _N._ =FONDRIÈRES=: Les poches. Allusion à leur profondeur (Argot du peuple). =FORTANCHE=: Fortune. C’est un changement, de finale comme _boutanche_ pour _boutique_, _dorancher_ pour _dorer_, _brodancher_ pour _broder_, etc., etc. —_Turbiner_, c’est bon pour les _pantes_, j’ai fait ma _fortanche_ à la _foire d’empoigne_ (Argot des voleurs). _N._ =FORT EN GUEULE=: Crier beaucoup. Les poissardes bavardes et insolentes sont _fortes en gueule_ (Argot du peuple). =FOU=: Marteau (Argot du peuple). =V.= _Balançon_. =FOUETTER DU BEC=: Avoir une haleine fétide qui exhale une odeur d’égout (Argot du peuple). =FOUILLE AU POT=: Petit cuisinier qui sert les ouvriers dans les gargotes. —Il _fouille au pot_ pour en retirer les légumes (Argot du peuple). =FOUILLE MERDE=: Tatillon qui fourre son nez partout (Argot du peuple). =FOUILLER= (Tu peux te): Tu n’auras rien, ou il ne reste rien (Argot du peuple). =FOUILLEUSES=: Poches (Argot du peuple). =FOUINETTE=: Juge. Diminutif de _fouinard_, malin, rusé, chercheur (Argot des voleurs). =V.= _Palpeur_. =FOULER= (Ne pas se): Ouvrier ou employé jamais pressé, plus exact à la soupe qu’au travail. —Tu vas te _fouler la rate_. —Prends garde de _te casser_. Même signification (Argot du peuple). =FOUR= (En faire un): Manquer une affaire (Argot du peuple). =FOURBI=: Piège, malice. _A. D._ C’est une erreur. Cette expression très usitée vient du régiment, où le caporal chargé de l’ordinaire gratte sur la nourriture des hommes. _Fourbi_ signifie bénéfice (Argot du peuple). _N._ =FOURCHETTE=: Voleur à la tire. Allusion à ce que les voleurs qui ont cette spécialité, ne se servent que des deux doigts de la main droite qui forment _fourchette_ pour extraire les porte-monnaies des poches des badauds (Argot des voleurs). _N._ =FOURGAT=: Recéleur qui achète les objets volés (Argot des voleurs). =V.= _Meunier_. =FOURGUER=: Vendre des objets volés (Argot des voleurs). =FOURLINES=: Voleurs et meurtriers à l’occasion (Argot des voleurs). =FOURMILLON=: Marché. La foule _fourmille_: endroit propice pour les voleurs. —Il y a un riche coup à faire sur la _placarde_ du _fourmilion_ (Argot des voleurs). =FOURNAISE=: On sait que les _mornifleurs-tarte_ sont réunis en _tierce_ (par trois). Le _mornifleur_, le faux monnayeur, le _gaffe_ qui détient la réserve des pièces fausses, et _l’émetteur_ qui écoule les pièces chez les commerçants. L’_émetteur_ se nomme la _fournaise_. L’allusion est juste, car il est dans le _feu_, courant à chaque minute le risque d’être pincé. Mot à mot: il est _dans la gueule du loup_ (Argot des voleurs). _N._ =FOURNEAU=: Vagabond, mendiant habitué du fourneau de charité. _L. L._ _Fourneau_, signifie crétin, imbécile. Quand on imprime dans les journaux que nos ministres et nos députés sont des _fourneaux_ ils ne sont pas je pense habitués des asiles de nuit (Argot du peuple). _N._ =FOURNEAUTIN=: Diminutif de _fourneau_ (Argot du peuple). _N._ =FOURNITURE=: Allusion aux fines herbes que l’on met dans la salade pour lui donner du goût et la _parer_ (Argot du peuple). =V.= _As de pique_. =FOURRACHON=: Le lit (Argot des voleurs). =V.= _Juge de paix_. =FOUTAISE=: Rien. —Tu m’offres cent sous d’acompte sur mille francs la belle _foutaise_. —Tu nous en raconte des _foutaises_. On dit aussi: —C’est de _la fouterie de pauvre_ (Argot du peuple). =FOUTIMASSER=: S’applatir sur un ouvrage, le faire traîner en longueur. C’est une corruption de deux mots accouplés _foutu_, mauvais, _masseur_, travailleur (Argot du peuple). _N._ =FRANC CARREAU=: Quand un prisonnier est incorrigible il est mis au cachot. On lui enlève sa literie, il couche alors sur le _franc carreau_ (Argot des voleurs). _N._ =FRACASSÉ=: Être vêtu d’un habit, d’un _frac_. C’est un mauvais calembour. —J’en ai du _frac assez_. Il me rappelle la célèbre scie d’atelier sur le mot _Afrique_: —J’ai de la _fricassée_, du _fracandeau_, de la _fripouille_, de la _friture_, etc., etc (Argot des ateliers). =FRANC DE COLLIER=: Cheval qui remplit sa besogne en conscience. Homme franc, ouvert, loyal. —Il est _franc du collier_ (Argot du peuple). _N._ =FRANGIN=: Frère (Argot du peuple). =FRANGINE=: Sœur (Argot des voleurs). =FRÈRE FRAPPART=: Marteau. L’allusion est frappante (Argot des forgerons). =V.= _Balançon_. =FRÈRE JACQUES=: Pince (Argot des voleurs). =V.= _Monseigneur_. =FRÉROT DE LA CAQUE=: Filou (Argot des voleurs). =FRÉTILLON=: Grisette chantée par Béranger. L’expression est heureuse, rien de plus _frétillant_ en effet qu’une fille du peuple qui s’amuse et aime pour son compte (Argot des bourgeois). =V.= _Grisette_. =FRIAUCHE=: =V.= _Aller au rebectage_. =FRIC-FRAC= (Vol au). Ainsi nommé à cause du bruit que produit l’outil en fracturant les portes (Argot des voleurs). =FRICADIER=: Un sou. C’était l’expression favorite de Pradier, le célèbre bâtonniste qui travaillait devant l’Institut (sur la place) (Argot du peuple). =FRICASSÉE DE MUSEAU=: S’embrasser mutuellement. Cela indique bien le frottement de deux visages. Mot à mot: s’embrasser avec effusion (Argot du peuple). =FRIMASSARD=: Le froid (Argot des voleurs). =V.= _Frisbi_. =FRIME=: La figure. _Tomber en frime_, se rencontrer face à face avec quelqu’un (Argot du peuple). =FRIME= (Pour la): Pour rien. Faire semblant (Argot du peuple). _Frimer_: Faire de l’embarras. —Il est bien mis, il _frime_ (Argot du peuple). =FRIMOUSSE=: Vieille expression qui veut dire _visage_. On la trouve dans la _Henriade travestie_ (Argot du peuple). =FRINGUER=: S’habiller. Rabelais dans _Pantagruel_ écrit _fringuez_ (Argot du peuple). =FRIPE=: Nourriture. —L’heure de la _fripe_ va sonner (Argot d’imprimerie). =FRIPES=: Mauvais vêtements que revendent les _fripiers_ sur le carreau du Temple (Argot du peuple). =V.= _Loques_. =FRIPOUILLE=: Rien de bon. Dans le peuple, quand on a dit d’un homme c’est une _fripouille_, c’est tout dire. _Fripouille_ est certainement une corruption de _friperie_, donc on avait fait _fripaille_ (Argot du peuple). =FRIQUET=: Mouchard. _A. D._, _L. L._ C’est une erreur, _friquet_ est un _moineau_, c’est une variété du pierrot parisien, l’effronté gavroche de la gent ailée (Argot du peuple). =FRISBI=: Froid. On dit aussi: il fait _friot_, _frisquet_, et comme superlatif: —Nom de Dieu, que ça _pince_ il gèle à pierre _fente_ (pour _fendre_) (Argot du peuple). =FRISÉ=: Juif (Argot des voleurs). =FRISER SON NAZ=: Être mécontent. _Friser son naz_ est une variante de la vieille expression, même adressée à un chauve: —Ça te _défrise_, mon vieux (Argot du peuple). _N._ =FROMGY=: Fromage (Argot du peuple). =FROTTE-BOTTES=: Domestique (Argot du peuple). =FROTTÉE=: Recevoir une bonne _frottée_ ou la donner. Se battre (Argot du peuple). =FROTTER=: Faire la cour à une femme. —Elle est rien raide, faut pas s’y _frotter_ (Argot du peuple). _N._ =FROTTIN=: Billard. —Viens-tu faire une partie de _frottin_? (Argot du peuple). =FROUSSARD=: Individu qui a peur (Argot du peuple). _N._ =FROUSSE=: =V.= _Taf_. =FRUSQUES=: Vêtements. Pour indiquer des habits en mauvais état, on dit des _frusques boulinées_. Quand ils sont tout à fait effilochés, on dit que l’on pourrait y _accrocher toute une batterie de cuisine_ (Argot du peuple). _N._ =FUITE DE GAZ= (En avoir une): Laisser échapper un pet en sourdine; si on ne l’entend pas, on le sent. Allusion à l’odeur insupportable du gaz, quand un conduit est crevé (Argot du peuple). =FUMER SANS TABAC=: Être furieux, _fumer_ de colère (Argot du peuple). _N._ =FUMER SES TERRES=: Être enterré dans sa propriété. Épouser une fille riche quand on n’a pas le sou. Déposer dans son jardin ce que l’on dépose pour trois sous dans un châlet, de nécessité (Argot du peuple). _N._ =FUMERONS=: Les jambes. —Il est à moitié _décati_, il ne tient plus sur ses _fumerons_. Pour exprimer la même idée, on dit aussi: —Il tremble sur ses _fils de fer_ (Argot du peuple). =FUMERON=: Galopin qui fume dans la rue en allant à l’école. —Comment tu fumes sale crapaud? —Mais oui. —Tu as raison les étrons _fument_ bien! (Argot du peuple). _N._ =FUMIER DE LAPIN=: Bon à rien, individu inutile. On dit aussi: il ne vaut pas un _pet de lapin_ (Argot du peuple). _N._ =FUMISTE=: Farceur, mystificateur, qui cherche toutes les occasions possibles de faire des blagues. Les plus grands fumistes des temps passés furent Romieu et Sapeck. Ils sont remplacés par _Lemice-Terrieux_. À propos de Sapeck dont la réputation est encore grande au quartier latin; la fameuse farce des bougies coupées ne lui appartient pas, elle fut faite quarante ans avant lui, on la raconte dans une brochure intitulée: _Les mystères de la Tour de Nesles_ (Paris 1835) (Argot du peuple). _N._ =FUNICULÉ= (Être): Refuser de marcher ou de travailler. Allusion au _funiculaire_ de Belleville, qui marche quand il veut. _Funiculé_ remplace le mot _capricieux_ et modifiera le dicton: _capricieux_ comme une jolie femme. —Cette jolie femme est _funiculée_ (Argot du peuple). _N._ =FUSAIN=: Curé. Allusion au vêtement noir (Argot du peuple). =FUSEAUX=: Jambes minces comme des baguettes de fusil. Dans le peuple, on dit: Minces du bas, fines du haut. On dit également: _Mince_ d’aiguilles à tricoter (Argot du peuple). _N._ =FUSÉE= (En lâcher une): Quand un ivrogne a trop bu, il soulage son estomac en _lâchant une fusée_. Allusion à ce que la déjection retombe en _gerbe_. Quand elles se suivent, on dit dans le peuple: —Quel riche feu d’artifice, voilà le bouquet (Argot du peuple). =FUSER=: Fusée d’un autre genre qui ne s’envole pas par le même côté. —Où donc qu’il est, Dumanet? —Il est en train de _fuser_ (Argot des troupiers). =FUSILLER=: Donner un mauvais dîner. _A. D._ _Fusiller_ se dit des _soldeurs_ qui _fusillent_ des marchandises volées. Ils les vendent à n’importe quel prix. On les nomme des _fusilleurs_ (Argot des camelots). _N._ G =GABARI=: Perdre au jeu, jargon des ouvriers de fer. _L. L._ Le _gabari_ est une plaque de tôle ou de zinc taillée sur un modèle donné pour que l’ouvrier mécanicien ou menuisier puisse confectionner exactement sa pièce. Avant l’invention de la machine à diviser, une roue d’engrenage ne pouvait être juste sans le secours du _gabari_ pour aligner les dents (Argot des ouvriers). _N._ =GÂCHER DU GROS=: Aller pisser comme les poules. Allusion aux maçons qui mangent énormément et qui _font_ de même (Argot du peuple). =GÂCHEUR=: Le président de la Cour d’assises. Quand il condamne, il _gâche_ la vie des gens (Argot des voleurs). _N._ =GADIN=: Vieux chapeau. _L. L._ Le _gadin_ est un _bouchon_. Le jeu qui consiste à abattre le bouchon chargé de gros sous se nomme _gadiner_. Il y a plus de cinquante ans que cette expression est populaire (Argot du peuple). _N._ =GAFFE= (En commettre une): Dire ou faire une bêtise, parler trop et à côté (Argot du peuple). =GAFFE=: Faire le guet pour avertir des complices de l’arrivée de la rousse ou des passants qui pourraient les déranger (Argot des voleurs). =GAFFE DE SORGUE=: Gardien de marché ou surveillant de maisons en construction. Autrefois, c’étaient des invalides qui remplissaient ces fonctions (Argot des voleurs). =GAFFEUR=: Qui commet des _gaffes_. Il y en a de célèbres, par exemple, dire au maître de la maison dans laquelle on est invité: —Qui est donc cette vilaine bossue qui fait tant de grimaces. —Monsieur, c’est ma femme (Argot du peuple). =GAGNER LE GROS LOT=: C’est assez extraordinaire de ne pas mettre à une loterie et d’avoir cette chance. Ce _gros lot se gagne_ sans billet. La garde qui veille aux barrières du Louvre N’en défend pas les rois. On dit aussi: je suis _assaisonné_ (Argot du peuple). =V.= _Quinte, quatorze et le point_. =GAILLARDES=: Joues (Argot des voleurs). =V.= _Jaffles_. =GAJARD=: Gros homme (Argot des voleurs). _N._ =GALBEUX=: Avoir du _galbe_, posséder un visage correct et avenant. On dit d’une jolie fille: —Elle est _galbeuse_. Au superlatif: elle est _truffée de galbe_ (Argot des filles). =GALETTE=: Argent (Argot du peuple). =V.= _Aubert_. =GALOUBET= (En avoir): Posséder une belle voix ou crier bien fort. On dit d’un chanteur émérite: —Il a un rude _galoubet_. =GALTOUZE=: Argent (Argot du peuple). =V.= _Aubert_. =GALURIN=: Chapeau. On dit quand il a une hauteur exagérée: —_Mince_ de _galure_ (Argot du peuple). =V.= _Bloum_. =GAMBETTES=: Jambes. —Elle est bien _molletonnée_ (montée en _gambettes_) (Argot du peuple). =V.= _Brancards_. =GAMBILLER=: Danser. Mot à mot: faire marcher ses _gambettes_ (Argot du peuple). =GAMBILLEUR=: Danseur (Argot du peuple). =GAMBILLEUR DE TOURTOUSE=: Danseur de corde. _Gambiller_, danser, _tourtouse_, corde. Cette expression servait autrefois à désigner la _corde_ employée par le bourreau pour expédier ses clients dans l’autre monde. L’image est juste, le condamné _gambille_ au bout de la _tourtouse_ (Argot des voleurs). =GAMELLES=: Seins. Les troupiers, dans les jardins publics, se placent de préférence sur les bancs, à côté des nourrices qui allaitent leurs nourrissons. Ils se pourlèchent les lèvres à la vue des _nichons_ blancs et volumineux. —Mademoiselle, en voilà un heureux gaillard de manger à une pareille _gamelle_. Quand il y en a pour un, il y en a pour deusse. Le camarade se penche: «Il y en aurait bien pour troisse» (Argot des troupiers). _N._ =GAMELLE= (En attacher une): Quitter une femme avec laquelle ou est collé, sans la prévenir. Rendre son tablier sans faire ses huit jours (Argot du peuple). =GANCE=: Bande. Association de malfaiteurs (Argot des voleurs). =GANDIN D’ALTÈQUE=: Homme décoré d’un ruban quelconque. Homme portant une particule (Argot du peuple). =GANTS= (Pour mes): Pourboire sous quelque forme que ce soit. Cette expression, néanmoins, est plus généralement employée pour les filles qui réclament un supplément au prix convenu. _Gant_ est synonyme d’_épingle_ (Argot des filles). =GANTER=: Il ou elle me _gante_. Synonyme de _chausse_. —Cet homme me _gante_, il a une rude pointure. Pas d’explications superflues (Argot des filles). =GARÇON=: Les hôtes habituels des prisons appellent _garçon_ un voleur. Le _garçon de campagne_ est un voleur de grand chemin, qui a pour spécialité de dévaliser les _garnaffes_. =V.= ce mot (Argot des voleurs). =GARDE NATIONAL=: Paquet de couennes. On dit aussi _nœud_ d’épée. Allusion à la forme (Argot des charcutiers). =GARDE NATIONALE= (En être): Femme pour femme (Argot des filles). =V.= _Accouplées_. =GARE À FAFFLARDS=: Bureau. Allusion à l’utilité de ce meuble pour _garer_ ses papiers. _Garer_, serrer, _fafflards_ papiers (Argot des voleurs). =GARER SON PITON=: Mettre son nez à l’abri des coups qu’il pourrait recevoir. Cette précaution est nécessaire dans les quartiers excentriques où les souteneurs mangent sans faire de façon, le _piton_ du bourgeois qui n’apprécie pas les charmes de leurs marmites. Avant l’annexion de la banlieue à Paris, Belleville et la Villette étaient renommés pour ce genre d’exercice (Argot des souteneurs). =GARGAMELLE=: Le gosier. C’est une très vieille expression qui a été remplacée par celles plus modernes de _dalle_, _sifflet couloir_ (Argot du peuple). =GARGOINE=: La bouche. Par abréviation: _la gargue_. Quelques-uns écrivent _gargouenne_ (Argot du peuple). =V.= _Affamée_. =GARGOTER=: Cuisinière qui rate tous ses ragoûts. Mot à mot: faire de la mauvaise cuisine, de la _gargote_. _Gargoter_ un travail ou le _savater_, le _gâcher_ en un mot (Argot du peuple). =GARGUE=: La bouche (Argot du peuple). =GÂTE-SAUCE=: Garçon pâtissier. _A. D._ _Gâte-sauce_ ne s’emploie pas exclusivement pour désigner un garçon pâtissier, cette expression s’applique à tous les métiers. Dire à un mari qu’il est cocu et troubler la félicité des amants, c’est _gâter la sauce_. Quand un commissaire de police tombe comme un aréolithe au milieu d’un tripot, la _sauce_ est _gâtée_ pour les joueurs. Dans le peuple, de tout ce qui va mal, la _sauce se gâte_. Le synonyme est: _ça tourne au vinaigre_ (Argot du peuple). =GAULES DE SCHTARD=: Barreau de prison. _Gaule_: allusion à la rigidité du fer (Argot des voleurs). =GAU PICANDI=: _Pou_ qui _pique_. Quand il provoque des démangeaisons trop vives, qu’il _pique_ trop fort, comme aux jours d’orages, par exemple, pour s’en débarrasser on le tue; cela s’appelle: _basourdir un gau_ (Argot du peuple). =GAVIOT=: Le gosier. Serrer le _gaviot_: faire passer le goût du pain. Mot à mot: étrangler un individu (Argot du peuple). =V.= _Qui-Qui_. =GAYE=: Cheval. Quand le cheval est vieux on dit qu’il est une _rosse_ (Argot des maquignons). =GENDARME=: Fer à repasser. _Gendarme_ est le nom du fabricant le plus renommé (Argot des blanchisseuses). =GÊNÉ=: Malheureux momentanément, embarrassé dans ses affaires. _Gêné_ dans ses entournures: être habillé trop étroitement. _Gêné_ par quelqu’un: n’avoir pas ses coudées franches, être tenu en laisse. _Gêné_: être mal à l’aise dans un milieu auquel on n’est pas habitué. Dans le peuple, _gêné_ a une signification toute différente. Quand une femme a un amant, elle lui dit au moment psychologique: —Fais comme mon mari, _gêne-toi_ (Argot du peuple). _N._ =GÉNÉRAL PAVÉ=: Les filles publiques qui arpentent les rues du matin au soir à la recherche de clients sont entretenues par ce _général_, qui est souvent bien dur pour elles. L’allusion est claire (Argot du peuple). _N._ =GERBE=: Prison. _Gerbé_: condamné. _Gerbé à vioc_: être condamné aux travaux forcés à perpétuité. _Gerbé à la passe_: condamné à mort (Argot des voleurs). =GERBIER=: président de la Cour d’assises (Argot des voleurs). =GERCE=: Femme (Argot du peuple). =GERMINYSER=: Membre d’un cercle catholique qui cherche à pénétrer dans un centre ouvrier. La condamnation qui frappa un personnage célèbre reconnu coupable d’un délit, qui n’était assurément qu’un acte de folie érotique a donné naissance à cette expression devenue populaire (Argot du peuple). =GIBELOTTE DE GOUTTIÈRE=: Il existe des industriels qui, la nuit, vont chasser les chats! Ils les fourrent dans un sac de toile, les dépouillent, puis les vendent aux restaurateurs de bas-étage qui les transforment en _lapin sauté_ ou en _lapin chasseur_. Ils les préparent plus particulièrement en _gibelotte_ parce que le vin et les épices atténuent un peu l’odeur sauvage du chat-lapin. Dans les portions servies au public, jamais il n’y a de tête; elle ferait reconnaître facilement la nature du _lapin_ (Argot du peuple). =GIGOLETTE=: Fille des faubourgs qui, à l’âge où les autres vont encore à l’école, a déjà jeté son bonnet par dessus la Tour Eiffel. La _gigolette_ travail pour l’amour de l’art. Comme elle fréquente les bals publics où elle _gigotte_ avec frénésie, l’expression _gigolette_ est indiquée (Argot du peuple). =GIGOLO=: L’amoureux de la _gigolette_. Un vieux refrain très populaire, dit: Si tu veux être ma _gigolette_ Moi, je serai ton _gigolo_. _Gigolo_ s’applique aussi à un individu peu aimable. —Qu’est-ce qui nous a foutu un _gigolo_ aussi _bassinant_ que toi (Argot du peuple). =GIGOTS=: Les cuisses. —Mon cher elle a des _gigots épastrouillants_, c’est de la _bidoche_ première catégorie (Argot du peuple). =V.= _Boudinots_. =GIBIER DE POTENCE=: Filou, voleur, souteneur; tous ceux qui, en un mot, se mettent en dehors des lois et sont justiciables de la _planche à pain_ ou du _carré des petites gerbes_ (Argot du peuple). =GILET=: La poitrine. On dit d’une femme qui en possède une copieuse: —La nature a _rien_ été généreuse, _pige_ donc le _bath devant de gilet_. On dit également: —Elle a un rude plastron. Cela a donné naissance à un jeu de mots que les farceurs ne manquent jamais de faire. À l’époque des élections, ils arrêtent une fille dans la rue et lui demandent: —Mademoiselle, pour qui _vos têtons_? Une autre plaisanterie est encore commune: —Mademoiselle qu’avez-vous donc dans votre corset? —Du foin pour amuser les ânes? (Argot du peuple). _N._ =GINGLARD=, =GUINGLET= ou =REGINGLARD=: Petit vin aigre, il faut se cramponner à la table pour le boire. Une vieille chanson dit: C’est un nectar, un vrai chasselas Ça vous coupe la gueule à quinze pas. Ce petit vin tire son nom d’un clos très ancien qui était situé sur les hauteurs du Mesnil-Montant: il appartenait au XVI^e siècle à un nommé _Guinguet_ (Argot du peuple). _N._ =GIROFLÉE À CINQ FEUILLES=: Gifle. Allusion aux cinq doigts (Argot du peuple). =V.= _Salsifits_. =GIROLLE=: Soit, volontiers, je marche. Par abréviation on dit simplement: —_Gy_, mon ange (Argot des voleurs). =GIRONDE=: Belle femme. Le souteneur qui se lamente lorsqu’elle vieillit, lui chante: Dans ce temps-là t’était rien _gironde_. Maint’nant tu toquardes de la frime T’es comme une planche toujours en bombe, T’es même des mois sans changer de lime. (Argot des souteneurs). =GIVERNEUR=: Vagabond habitué des refuges municipaux et de la _bouchée de pain_. Quand le _giverneur_ ne trouve pas à coucher, il _file la comète_ (Argot des voleurs). =GLACE=: Verre. On dit également _glacis_. —Allons-nous _sucer_ un _glacis_? (Argot du peuple). =GLAVIOT=: Crachat. Un poitrinaire qui _crache_ ses poumons lâche son _glaviot_. Dans les ateliers, par plaisanterie, on compte les _glaviots_; arrivés à onze, les ouvriers, sans pitié, disent au malheureux: —Il n’en faut plus qu’un pour faire la douzaine de _Portugaises_. Pas ragoûtant pour les amateurs d’huîtres (Argot du peuple). _N._ =GLIER=: Le diable. Quand quelqu’un vous embête par trop, on dit dans le peuple: —Va-t’en aux cinq cents _diables_. —Que le _diable_ t’emporte. —Que le _diable_ te _patafiole_. Dans le monde des prisons on dit: —Que le _glier t’entôle en son patelin_. _Patelin_ (l’enfer), le _pays_ du _diable_ (Argot des voleurs). =GLISSER= (Se laisser): Mourir (Argot du peuple). =GLOBE=: La tête. Allusion de forme (Argot des voleurs). =GLUAU= (Lâcher son): Déballer. Pisser son _gluau_: accoucher. Allusion à l’aspect gélatineux du nouveau-né (Argot du peuple). =GLUAU= (En poser un): Quand les agents tendent un piège pour prendre des voleurs, ils _posent un gluau_. Allusion au chasseur qui _pose des gluaux_ dans les arbres pour prendre les petits oiseaux. —Ne va pas _rôder_ avec la _Tine_, vous allez vous _faire poser un gluau_. Mot à mot: ne va pas avec les autres, vous allez vous faire mettre en prison (Argot des voleurs). =GNIAF=: Plusieurs degrés au-dessous du savetier. On appelle _gniaf_ tout individu qui gâte un ouvrage. Se conduire comme un _gniaf_: commettre des bassesses (Argot du peuple). =GNIAFFERIE= (En faire une): Faire une malpropreté à un camarade. Mot à mot: se conduire vis à vis de lui comme un _goujat_. =GNIAS= ou =GNIASSE=: Soi-même. —Pas _mèche_ de me _gerber_, il n’y a que _nib_ sur mon _gniasse_ (Argot des voleurs). =GNOLLE= ou =GNOLE=: Imbécile aussi niais qu’il est possible de l’être. —Si ton _point de côté_ savait que nous _pagnotons_ ensemble, il te _carderait_ le _cuir_. —Y a pas de _pet_, il est trop _gnolle_, il a de la _merde_ dans les _chasses_ (Argot du peuple). =GNON=: Donner un _coup_ ou le recevoir. —Ce pauvre Léon, il est _crapsé_ du _gnon_ que lui a _foutu_ sa _pouffiace_ (Argot des souteneurs). =GNOUGNOUTTE=: Cette expression est employée par les filles dont ce n’est pas la profession d’_aimer_ à crédit. Pas de _galette_, pas de _gnougnoutte_. L’expression est claire: pas d’argent, pas de viande (Argot des filles). =GOBE MOUCHE=: Flâneur qui s’arrête à chaque boutique. Allusion à ce qu’il _baille_ ébahi (Argot du peuple). =GOBE-SON=: Le calice. À l’élévation le prêtre _gobe son_ hostie (Argot des voleurs). =V.= _Baignoire à bondieu_. =GOBER=: Aimer quelqu’un. _Gober_: croire à quelque chose, même à une chose fausse. =GOBER LA CHÈVRE=: Être furieux d’une chose qui va de travers. On dit aussi pour exprimer la même idée: _bouffer son bœuf_. Ce que font souvent les typographes quand les casses sont embrouillées et que les lettres de différents corps y sont mélangés. Ils _gobent aussi la chèvre_ quand un auteur méticuleux, qui ne connaît pas le métier, se mêle de leur donner des conseils (Argot d’imprimerie). =GOBER=: la pilule. _Gober_ une aventure extraordinaire. _Gober_ (se): s’imaginer valoir plus que les autres (Argot du peuple). =GOBET=: Morceau de viande, bœuf ou mouton entier. —Je ne veux pas de cette viande coupée, elle a été _tripotée_. —Je vais vous en couper dans un _gobet_, répond le boucher (Argot des bouchers). =GOBETTE=: Gobelet de fer-blanc qui mesure 33 centilitres. Ce gobelet, sert aux détenus dans les prisons pour prendre une ration de vin à la cantine où ils ont droit à trois _gobettes_ par jour, en payant, bien entendu. _Passer à la gobette_, c’est prendre une tournée chez le marchand de vin (Argot des voleurs). _N._ =GOBEUR=: Individu qui avale tout, même les bourdes les plus impossibles (Argot du peuple). =GODAILLER=: Courir les cabarets. Ce verbe est un souvenir de l’occupation de Paris par les Anglais, amateurs de _good ale_. _A. D._ _Godailler_ est synonyme d’être en _patrouille_ et aussi de _flâner_. Manquer un travail, c’est le _godailler_. _Godailler_, c’est ne jamais se trouver bien nulle part. —On n’en fera jamais rien, c’est un mauvais ouvrier, il _godaille_ sans cesse (Argot du peuple). _N._ =GODAN= (Donner dans le): Croire à un mensonge. Synonyme de _couper dans le pont_ (Argot du peuple). =GODAN= (Le connaître): Éventer le mensonge et ne pas se laisser tromper (Argot du peuple). =GODETS=: Les yeux (Argot des voleurs). =V.= _Boule de loto_. =GODILLER=: Se réjouir, être content. _A. D._ _Godiller_ veut dire _convoiter_ une femme. Ce couplet de la célèbre chanson d’_Alphonse du Gros Caillou_ me dispensera d’explication: Pourtant, des fois, fallait être solide Le 15 août, fête de l’empereur. C’était chez nous tout rempli d’invalides, De fantassins, de dragons, d’artilleurs, Dame! Ce jour-là, ce que le soldat _godille_! Eh bien tout ça sortait content de chez nous. ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ _Godille_ vient du mot ancien _gaudille_ (Argot du peuple). =GODINETTE=: Grisette. Elle _gode_ pour tous les hommes (Argot du peuple). =GOGUENOT=: Pot de chambre. Le locataire de la table de nuit (Argot du peuple). =GOINFRE=: Gourmand qui mange à en crever. On dit aussi: _goulaffe_ (Argot du peuple). =GOINFRE=: Chantre. Sans doute parce qu’ils ouvrent, pour chanter, des bouches aussi grandes que des fours. On y _engamerait_ un pain de deux livres (Argot des voleurs). _N._ =GOLGOTHE=: Martyr imaginaire. Ceux qui sont atteints du délire de la persécution _golgothent_ sans cesse (Argot du peuple). =GONCE=, =GONCIER=: Bourgeois facile à tromper (Argot des voleurs). =GONDOLER= (Se): Se tordre de rire. Rire à s’en mordre l’œil. C’est _gondolant_ (Argot du peuple). _N._ =GONGONNER=: Terme employé dans les ménages d’ouvriers lyonnais et aussi par _Gnaffron_ dans les _Guignols_: —Ma vieille colombe _gongonne_ toujours quand je _liche_ une chopine. —Tais-toi donc, vieux _gongon_. _Gongonner_, synonyme de _bougonner_ et de _ronchonner_ (Argot du peuple). _N._ =GOUALER=: Chanter. On se souvient de la _goualeuse_ des _Mystères de Paris_. La _goualante_ signifiant chanson, la chanter, _goualer_, cela va de soi (Argot du peuple). =GOUAPEUR=: Individu qui ne travaille jamais (Argot du peuple). =V.= _Loupeur_. =GOUGNOTTE=: Femme qui déteste les hommes et qui a des mœurs à part. On dit aussi _gousse_ (Argot des filles). =V.= _Accouplées_. =GOULU=: Dévorer ses aliments (Argot du peuple). =V.= _Baffrer_. =GOUPINER=: Voler. On applique également ce mot à quelqu’un de mal habillé. —Est-il _goupiné_? (Argot des voleurs). =GOUPINEURS=: Voleurs qui ont la spécialité de dévaliser les pochards qui s’endorment sur la voie publique. Ils _goupinent_ les _profondes_ (Argot des voleurs). =GOUPLINE=: Litre de vin. —C’est pas malin que nous étions _chlasse_; à quatre, nous avons étranglé douze _gouplines_ de _ginglard_ à Charonne, au _Petit Bonhomme qui chie_ (Argot du peuple). _N._ =GOURDE=: Homme pâteux, paysan mal dégrossi. Au superlatif: _crème de gourde_ (Argot du peuple). _N._ =GOURDIFFLOT=: Petite _gourde_ (Argot du peuple). _N._ =GOUREURS=: Les _goureurs_ sont des individus qui se déguisent en marins étrangers venant des pays lointains. Ils offrent au public des marchandises qu’ils ont soi-disant rapportées de l’Inde ou de la Perse, et qui proviennent tout bonnement d’un bazar quelconque (Argot des voleurs). =GOUVERNEMENT=: Épée à l’École Polytechnique. _A. D._ _Gouvernement_: La femme dans les ménages d’ouvriers. —Mon vieux, pas _mèche_ d’aller _gouaper_ avec toi, mon _gouvernement_, est tellement _rosse_ que je serais _engeulé_ toute la semaine (Argot du peuple). _N._ =GRAILLON=: Cuisinière, laveuse de vaisselle. Fille sale qui pue la mauvaise graisse (Argot du peuple). =GRAILLONNEUSE=: Ménagère qui va laver accidentellement son linge au lavoir (Argot des blanchisseuses). =V.= _Baquet_. =GRAISSER=: Je vais te _graisser_, te battre. _Graisser_ les poches de quelqu’un: y mettre de l’argent. _Graisser_ sa femme: allusion au _graissage_ de l’essieu pour que la voiture roule mieux (Argot des souteneurs). =GRAISSER LES BOTTES=: Mourir. _L. L._ _Graisser les bottes_: l’extrême-onction. Mot à mot: _graisser les bottes_ pour le voyage lointain (Argot du peuple). _N._ =GRAND PRÉ= (Le): Bagne. Les voleurs, autrefois, appelaient ainsi Toulon et Brest; depuis ils disent _la Nouvelle_ (Argot des voleurs). =GRAND RESSORT=: Le cœur. C’est en effet le _grand ressort_ de la vie. Quand un individu meurt on dit: le _grand ressort est cassé_ (Argot du peuple). =GRAS= (Il y a): Il y a beaucoup d’argent. —Nous pouvons _nettoyer_ le _gonce_, il y a _gras_ dans sa _cambrousse_. C’est de cette expression, _gras_, qu’est née celle de _dégraisseur_ (le garçon de banque), pour exprimer qu’il enlève le _gras_ (Argot des voleurs). _N._ =GRAS DOUBLE=: Plomb (Argot des voleurs). =V.= _Limousinier_. =GRATIN=: Il y a du _gratin_, il y a de quoi. Il est _gratin_: il est à la mode. Pour un homme du monde, on dit: C’est un homme du _gratin_. On traduit dans le peuple: _personna grata_ par _personne gratinée_, du _gratin_. Les moutards préfèrent manger le _gratin_ qui s’attache à la casserole, quand la mère prépare la bouillie du petit frère (Argot du peuple). _N._ =GRATOUILLE=: La gale (Argot du peuple). =V.= _Charmante_. =GRATTE-CUL=: Vieille femme repoussante, laide à faire peur. —Elle est laide comme un _cul gratté à deux mains_ (Argot du peuple). =GRATTE-PAPIER=: Employé aux écritures (Argot du peuple). =V.= _Chieur d’encre_. =GRATTE= (En faire): Chiper sa patronne en majorant les achats (Argot du peuple). =V.= _Gratter_. =GRATTER=: Battre quelqu’un. —Je vais te _gratter_. _Gratter_: prendre, _grapiller_ sur tout pour grossir son lopin (Argot du peuple). =GRATTER LA COUENNE= (Se faire): Se faire raser (Argot du peuple). =GREFFER=: Attendre (Argot des voleurs). =GREFFIER=: Chat (Argot du peuple). =GRÊLE=: Patron. Il tombe souvent sur le dos des ouvriers comme la _grêle_ sur les vignes. —Attention, gare la _grêle_. Signal pour prévenir les camarades (Argot du peuple). _N._ =GRELOT=: La voix (Argot du peuple). =V.= _Affaler son grelot_. =GRENADIER=: Pou énorme. Allusion à l’expression populaire qui dit d’un enfant pouilleux: il a une rude garnison. _Grenadier_: pou d’élite (Argot du peuple). =GRENAFE=: Grange. Les mendiants qui voyagent couchent dans les _grenafes_. Cela vient de ce que la grange abrite les _grenailles_ (Argot des voleurs). =GRENOUILLE=: Femme de rien (Argot du peuple). =GRIACHES=: Seaux qui étaient dans les cellules des prisonniers et dans lesquels ils faisaient leurs ordures. Ce terme était employé dans les prisons vers 1790; on le trouve dans un rapport sur la Conciergerie, adressé au roi, qui voulait détruire l’horrible infection qui empoisonnait les malheureux (Argot des prisons). =GRIB’LOGE=: Individu qui se plaint lorsqu’il est battu (Argot des voleurs). =GRILLÉ=: Une affaire est _grillée_ quand on n’en peut plus rien tirer. Un agent est _grillé_ quand il est démasqué par ceux qu’il est chargé de poursuivre (Argot des voleurs). =V.= _Brûlé_. =GRILLE= (Jeter de la): Arrêter un individu au nom de la loi. —Il n’y a pas de _grille_ (il n’y a pas de danger) (Argot du peuple). =GRILLEUSES DE BLANC=: Les repasseuses sont souvent distraites par les passants qui admirent leurs bras blancs; alors, si le fer est trop chaud, tant pis pour la chemise elle est _grillée_ (Argot du peuple). =GRIMPANT=: Pantalon (Argot du peuple). =V.= _Falzar_. =GRINCHE=: Voler (Argot des voleurs). =GRINCHISSEUR=: Voleur (Argot des voleurs). =GRINCHISSEUSE À LA MITAINE=: Voler avec les pieds. La voleuse laisse tomber un objet qu’elle cache prestement dans son soulier sans empeigne (Argot des voleurs). =GRINGALE=: Pain (Argot des voleurs). =V.= _Bricheton_. =GRINGALET=: Mièvre, malingre, enfant pas réussi (Argot du peuple). =V.= _Avorton_. =GRIPPARD= et non _Griffard_: Chat (Argot du peuple). =V.= _Greffier_. =GRIPPE-SAUCISSES=: Apprenti qui va chercher le déjeuner des ouvriers et qui en chemin égratigne un petit morceau de chaque saucisse (Argot du peuple). _N._ =GRIPPE-SOUS=: Avare qui pousse sa passion jusqu’à se relever la nuit pour mettre un bouchon dans la douille de son soufflet pour en économiser le vent (Argot du peuple). _N._ =CRIS COMME UN CORDELIER=: Saoul à n’en plus pouvoir, incapable de retrouver sa maison et être obligé de s’asseoir sur une borne pour attendre qu’elle passe. _Gris_, allusion à la couleur de la robe de ces religieux (Argot du peuple). =GRISAILLE=: Sœur de charité (Argot des voleurs). =V.= _Pampine_. =GRISETTE=: Jeune fille, ouvrière plumassière, fleuriste, modiste ou polisseuse qui fit la joie de nos pères et le désespoir des leurs. Depuis qu’elle a passé les ponts, ce n’est plus qu’une vulgaire cocotte. Type charmant, _grisette_ sémillante, Au frais minois, sous un piquant bonnet Où donc es-tu, gentille étudiante Reine sans fard de nos bals sans apprêts. Ainsi s’exprime la chanson en vogue autrefois au quartier latin (Argot du peuple). =GRIVIER=: Soldat de la ligne (Argot du peuple). =V.= _Lignard_. =GROSSE CULOTTE=: Ivrogne, beau parleur. _L. L._ _Grosse culotte_ est encore en usage dans les ateliers de forgerons. C’est une expression connue. Chez les compagnons forgerons depuis la création du compagnonnage, on l’applique à l’ouvrier le plus habile de la partie, à celui qui était appelé à finir les grosses pièces avant l’invention des marteaux pilons. Deux d’entre eux furent célèbres, on s’en souvient, encore dans les ateliers; ils se nommaient Dany et Pierre Virmaitre, dit _Bourguignon_. _Grosse culotte_ est toujours un terme consacré (Argot des ouvriers). _N._ =GROSSES LÉGUMES=: Gens millionnaires, magistrats élevés, généraux, etc. Quand, sous la Commune, un voyou demandait à être nommé général, à entrer dans les _grosses légumes_, il donnait pour raison qu’une de plus ou de moins dans le tas ça ne paraîtrait pas (Argot du peuple). _N._ =GROSSES LÈVRES=: La tinette. Allusion aux rebords (Argot des voleurs). _N._ =GROTTE=: Prison (Argot des voleurs). =V.= _Gerbe_. =GRUE=: Fille publique, jolie mais bête à manger du foin. De cette allusion est né un mauvais calembourg: Les camelots crient: Demandez l’_Indicateur des grues de Paris_ pour _rues_ (Argot du peuple). =GUENILLON=: Femme mal habillée. Traîneuse des rues. On dit aussi: vieille _guenipe_ (Argot du peuple). =GUEULE EN CUL DE POULE=: Individu mâle ou femelle qui en faisant la moue serre les lèvres (Argot du peuple). =GUEULE EN COUP DE SABRE=: Bouche fendue jusqu’aux oreilles. —Il peut manger la soupe avec une cuiller à pot (Argot du peuple). =GUEULE D’EMPEIGNE=: Palais habitué aux liqueurs fortes. _L. L._ Dans tous les ateliers de France, _gueule d’empeigne_ signifie bavard intarissable qui a le verbe haut, qui _gueule_ constamment. C’est un sobriquet généralement donné aux Parisiens qui font partie du compagnonnage (Argot du peuple). _N._ =GUETTE AU TROU=: Sage-femme (Argot du peuple). =GUEUSARD=: Rideau (Argot des voleurs). _N._ =GUEUX=: Misérable. Tout le monde connaît la chanson de Béranger: Les gueux, les gueux Sont des gens heureux, Ils s’aident entre eux, Vivent les gueux! (Argot du peuple). =GUEUX=: Coquin, canaille, gredin. —Vous êtes un _gueux_ d’avoir commis une aussi mauvaise action (Argot du peuple). =GUEUX=: Petit vase en argile qui sert de chaufferette aux portières ou aux marchandes des halles. C’est la chaufferette primitive. Le _gueux_ a donné naissance à une plaisanterie assez drôle. À la foire de Saint-Romain, qui a lieu à Rouen tous les ans le 1^er novembre, une marchande, pour utiliser son feu, fait cuire des harengs; elle a son _gueux_ sous ses jupons, un gamin lui crie: —Hé? la mère, tes harengs vont brûler. —A pas peur, petit, j’ai l’_œil_ dessus (Argot du peuple). =GUIBOLLES=: Jambes (Argot du peuple). =V.= _Brancards_. =GUICHES=: Les cheveux que les souteneurs ramènent sur les tempes. On dit aussi _roufflaquettes_ (Argot du peuple). =GUIGNE À GAUCHE=: Se dit d’une personne qui louche. Dans le peuple, on dit de celui qui est affligé d’une semblable infirmité, qu’il trempe la soupe et renverse les légumes dans les cendres, ou bien qu’il regarde en Bourgogne si la Champagne brûle (Argot du peuple). _N._ =GUINAL=: Juif (Argot des voleurs). =V.= _Bout coupé_. =GUINCHE=: Bal de barrière (Argot du peuple). GUINCHER et non _Guinguer_: Danser, fréquenter la _guinche_ (Argot du peuple). =GUITARE=: Soufflet dont se servent les plombiers. Allusion de forme (Argot du peuple). H =HABIT À QUEUE DE MORUE=: Habit de soirée. Les pans ressemblent, en effet, à une _queue de morue_ (Argot du peuple). =HABIT À QUEUE DE PIE=: Même signification (Même argot). =HABILLÉ DE SOIE=: Cochon ou sanglier. Allusion à la peau dont les _soies_ servent aux cordonniers pour préparer leur fil (Argot du peuple). =HARICOT VERT=: Voleur en grande réputation dans le monde des prisons (Argot des voleurs). =HARPE=: Barreau de prison. Les voleurs disent plus communément d’un prisonnier qui s’ennuie: —Il pince de la _guitare_ à travers ses barreaux (Argot des voleurs). =HAUTOCHER=: Monter à une certaine hauteur. —J’ai _hautoché_ jusqu’au sixième (Argot des voleurs). =HERBE À LA VACHE=: L’as de trèfle (Argot du peuple). =HERBE SAINTE=: L’absinthe (Argot du peuple). =HIBOU=: Voleur solitaire qui ne travaille que la nuit (Argot des voleurs). =V.= _Attristé_. =HIRONDELLES=: Les moustaches. Les voleurs emploient généralement l’expression plus caractéristique d’_ombreuses_ (Argot des voleurs.) =HIRONDELLES D’HIVER=: Les ramoneurs et les marchands de marrons. Quand les hirondelles partent pour un climat plus doux, on les voit arriver (Argot du peuple). =HIRONDELLES DE POTENCE=: Les gendarmes (Argot des voleurs). =HIRONDELLES DU PONT-NEUF=: Messieurs les _Giverneurs_ viennent l’été coucher sous le pont; ils y font fréquemment de bonnes ripailles avec les produits des vols de la journée (Argot du peuple). =HOMELETTE=: Homme tout petit. La ménagère n’a pas mis la quantité d’œufs nécessaire (Argot du peuple). _N._ =HOSTO=: Prison (Argot des voleurs). =HOTEL DES QUATRE COLONNES (L’)=: Salle commune du Dépôt de la préfecture de police où sont enfermés les prévenus, voleurs, souteneurs et vagabonds. La raison de ce nom est que quatre colonnes supportent les voûtes de cette salle (Argot des voleurs). _N._ =HUGREMENT=: Beaucoup. Corruption de l’expression _bougrement_, qui signifie beaucoup (Argot du peuple). =HUMILIÉ (L’)=: Le dos. On dit d’un homme qui s’_humilie_: il baisse le dos (Argot des voleurs). _N._ =HURE=: La tête (Argot du peuple). =V.= _Tronche_. =HUS-MUS=: Grand merci (Argot des voleurs). =HUSSARDS DE LA VEUVE=: Les gendarmes ou la garde républicaine qui entourent l’échafaud les matins où l’on exécute un condamné à mort (Argot des voleurs). I =ICIGO=: Ici. On dit aussi _icicaille_. _Icicaille_ est un vieux mot français; on le trouve en effet dans une édition du _Jargon_, imprimée à Troyes, de 1686 à 1711. _Icicaille_ est le théâtre Du petit _Dardant_. On avait attribué cet opuscule à Cartouche, le célèbre voleur, mais M. Marcel Schwob détruit cette légende. Il faut croire que les voleurs ont le respect de la tradition, puisque le mot _icicaille_ est encore en usage (Argot des voleurs). =IL PLEUT=: Quand un étranger pénètre dans un atelier de compositeurs-typographes, les ouvriers crient: _il pleut_ pour avertir. _Il pleut_ veut dire: silence. Ce mot est en usage chez les forains; quand un pitre allonge par trop son boniment, le patron lui dit: —_Écoute s’il pleut_ (silence). _Il pleut_ est également un terme ironique, une façon de répondre négativement à une demande: Prête-moi cent sous. —_Il pleut._ (Argot du peuple). _N._ =IMPAIR=: Commettre un _impair_: _se couper_ dans un interrogatoire et dire ce qu’il ne faudrait pas. Faire un _impair_ à quelqu’un, c’est lui manquer de respect. _Impair_: commettre une faute, se tromper dans l’appréciation de la valeur d’une affaire. Aller un peu trop de l’avant, c’est commettre un _impair_ (Argot du peuple). _N._ =INCONOBRÉ=: Inconnu ou étranger. On dit aussi: _inconnu au bataillon_ (Argot des voleurs). =INSÉPARABLE=: Cigare à sept centimes et demi. Petites perruches. Femmes qui s’aiment (Argot du peuple). =V.= _Accouplée_. =INSINUANT=: Pharmacien. Malgré l’invention du docteur Eguisier, qui permet avec le petit appareil que l’on sait, d’opérer seul, le mot _insinuant_ est resté pour caractériser le pharmacien, descendant de l’apothicaire _Flutencul_, qui _insinuait_ la canule de la seringue dans le derrière du malade (Argot du peuple). =INSOUMISE=: Fille en carte qui s’affranchit volontairement de la visite sanitaire imposée par le règlement. Les _insoumises_ sont très nombreuses à Paris et forment la majeure partie du personnel de la prostitution (Argot des filles). _N._ =INSPECTER LES PAVÉS=: Fille qui raccroche à la _flan_ (au hasard). Elle espère voir surgir des clients (Argot des filles). _N._ =INSPIRÉ=: Le front (Argot des voleurs). _N._ =INTERMITTENTE=: Femme qui fréquente par intervalle irrégulier, suivant les besoins de son ménage, les maisons de rendez-vous; elle est toujours servie comme _nouvelle_ aux étrangers (Argot des filles). _N._ =ISOLÉE=: Fille publique qui travaille seule dans les rues, loin de son quartier, et qui n’a pas de souteneur. L’_isolée fait_ les bureaux d’omnibus, les jardins publics, les églises et les cimetières (Argot des filles). _N._ =ITALO=: Abréviation d’Italien (Argot du peuple). =INVALO=: Invalide. Il est à remarquer que l’argot moderne a une tendance à transformer la finale de la plupart des expressions: sergent, _sergot_; mendiant, _mendigot_; Saint-Lazare, _Saint-Lago_, etc. Ce procédé est des plus simples; il suffit de couper le mot et d’y ajouter le suffixe _o_: invalide, _invalo_ (Argot du peuple). _N._ J =JABOT=: La gorge. Allusion au jabot du dindon. Dans l’argot des voleurs, on dit aussi _étal_, sans doute par analogie avec l’_étal_ du boucher, sur lequel il passe toutes sortes de viandes (Argot des voleurs). _N._ =JABOT= (S’arroser le): Boire. —Toute la _tine_ s’arrose le _jabot_ (Argot des voleurs). _N._ =JACQUES=: Sou (Argot du peuple). =V.= _Fricadier_. _Jacques_: mollets (Argot du peuple). =V.= _Jacquots_. =JACQUELINE=: Grisette. —J’ai été promener ma petite _jacqueline_ (Argot du peuple). _N._ =JACQUOT=: Niais, bavard importun. _A. D._ _Jacquot_: mollet (Argot du peuple). _N._ =JACOBIN=: Pince à l’usage des cambrioleurs (Argot des voleurs). =V.= _Monseigneur_. _N._ =JACTE=: Crie (Argot des voleurs). =JACTER=: Parler, crier. Si quelque _pante_ Se glisse et entre Et se permet Chez nous de faire du _pet_ On l’_saigne_, on l’_frotte_, Et c’est fini par là. S’il se _cavale_ et _jacte_ dans la rue Pour ameuter tous les daims contre nous, dit une des plus vieilles chansons d’argot connue. _Jacter_ vient sûrement de _jactare_ (Argot des voleurs). =JAFFLES= ou =JAFFES=: Les joues. En Normandie, on dit _jaffe_ pour _soufflet_ (Argot du peuple). =JAMBES EN L’AIR=: Potence. _A. D._ Il est vrai que le _pendu_ a les _jambes_ en l’air; mais le peuple ne donne pas du tout le même sens à cette expression quand il dit: _faire une partie de jambes en l’air_. Généralement cette _partie_ se joue sans témoins. Ce jeu est connu chez tous les peuples (Argot du peuple). _N._ =JAMBES EN MANCHE DE VESTE=: Individu mal bâti, tordu, qui festonne en marchant (Argot du peuple). _N._ =JAMBES DE LAINE=: Individu peu solide sur ses jambes. Quand un homme sort de l’hôpital, il a généralement des _jambes_ de laine: il flageole. Autrefois on disait, pour exprimer la même image: _jambes de coton_ (Argot du peuple). _N._ =JAMBONNEAU=: Les cuisses (Argot du peuple). =V.= _Boudinots_. =JARDINER=: Médire de quelqu’un, fouiller dans sa vie, comme le _jardinier_ fouille dans la terre pour en mettre à jour les coins les plus secrets. _Jardiner_ est synonyme de _bêcher_ (Argot du peuple). _N._ =JARDINIER=: Nom donné au complice des voleurs _à l’américaine_ (Argot des voleurs). =JARNAFFLE= ou =JARNAFFE=: Jarretière (Argot des voleurs). =JASANTE=: Prière. —Y me fait suer le _ratichon_ avec sa _jasante_ en _latimpem_ (Argot des voleurs). =JASPINER=: Signe convenu d’aboyer sur la voie publique pendant que des complices dévalisent les poches des badauds (Argot des voleurs). =JAVARD=: Lin que les paysans mettent en _javelles_ avant le _rouissage_ (Argot des voleurs). _N._ =J’MENFOUTISTE=: Gens qui se foutent de tout et de tous. Cette catégorie devient chaque jour de plus en plus nombreuse. —Que pensez-vous de la politique? —_J’m’en fous._ —Votre femme vous trompe. —_J’m’en fous_ (Argot du peuple). _N._ =JE ME LA BRISE=: Je m’en vais. Quand un individu vous ennuie, dans le peuple on lui dit sans façon: —Tu peux te la _briser_, il y aura moins de perte qu’une pièce de vin (Argot du peuple). _N._ =J’EN AI MON PIED=: J’en ai assez. J’_en ai soupé_ signifie la même chose. _J’ai soupé de ta fiole_, de même. _Donne-moi mon pied_ veut dire: Donnez-moi ma _part_. Ça fait le _pied_, synonyme de ça fait le _joint_ (l’affaire) (Argot des voleurs). _N._ =JÉSUITE=: Dindon. Ce sont les _jésuites_ qui, en 1570, ont introduit le dindon en France; mais tous ceux qui ont été leurs victimes ne pensent pas comme les voleurs (Argot des voleurs). =JÉSUS=: Jeune homme à l’aspect efféminé, frisé, parfumé, qui sert d’appât pour attirer les individus à passions honteuses. Souvent il travaille réellement pour son compte (Argot des voleurs). =JETER SON BONNET PAR DESSUS LES MOULINS=: Traîner sa fleur d’oranger dans les ruisseaux (Argot du peuple). =JETER UN FROID=: Au milieu d’une soirée joyeuse, raconter une histoire macabre. L’invité au maître de la maison: —Quelle est donc cette horrible femme, laide, vieille, sèche et revêche qui fait tapisserie. —C’est ma sœur. Voilà qui s’appelle _jeter un froid_ (Argot du peuple). =JEUNE HOMME= (Avoir son): Être ivre (Argot du peuple). =JEUNE HOMME= (Suivez-moi): Rubans que les femmes laissent pendre sur leur dos (Argot du peuple). _N._ =JONC=: Or (Argot des voleurs). =JONCS=: Lit des prisonniers. Allusion à la dureté de la paille des matelas (Argot des voleurs). =V.= _Plumes de beauce_. =JONQUILLE=: Cocu. Allusion à la couleur jaune qui est l’emblème des prédestinés (Argot du peuple). =JORNE=: Le jour (Argot des voleurs). _N._ =JOSEPH=: Homme trop chaste. _A. D._ _Joseph_, dans le peuple, est le patron des _cocus_. On ne dit pas: tu fais ton _Joseph_, mais bien: tu es un _Joseph_, à celui qui a assez de _cornes_ sur la tête pour alimenter de manches une fabrique de couteaux (Argot du peuple). _N._ =JOSÉPHINE=: Mijaurée, bégueule. _A. D._ _Joséphine_ est le nom donné à la tête de carton sur laquelle les modistes essayent l’effet des chapeaux avant de les ajuster sur la tête de la cliente (Argot du peuple). _N._ =JOUER À LA MAIN= =CHAUDE=: Être guillotiné. Cette expression n’est plus juste, car, comme autrefois, le condamné ne s’agenouille plus pour recevoir le coup fatal, il est couché sur la planche. On dit: _Il fait la planche_ (Argot des voleurs). _N._ =JOUER UN AIR DE VIOLON=: Prisonnier qui scie les barreaux de sa cellule pour s’évader (Argot des voleurs). =JOUER UN PIED DE COCHON=: Jouer un bon tour à quelqu’un; s’en aller, le laisser en plan au moment de payer son écot, sachant qu’il est sans le sou (Argot du peuple). _N._ =JOUR DE LA SAINT-JEAN-BAPTISTE= (Le): Le jour de l’exécution d’un condamné. À la prison de la Roquette, le jour d’une exécution, les prisonniers ne descendent pas à l’atelier, à l’heure réglementaire, ils savent ce que cela veut dire: c’est le _jour de la Saint-Jean-Baptiste_: on décolle un copain (Argot des voleurs). =JOURNAILLE=: La journée. On dit d’un paresseux qu’il trouve la _journaille_ plus longue que la queue au pain (Argot du peuple). =JOURNALISTES À RICHER=: Les vidangeurs. Cette expression vient d’un mauvais calembour. _Les journalistes_ publient souvent des _fausses nouvelles_. _Les vidangeurs_ recherchent les _fosses nouvelles_ (Argot du peuple). _N._ =JUDÉE=: La préfecture de police. Ce mot n’est plus en circulation depuis la démolition de la rue de _Jérusalem_ (Argot des voleurs). =JUGE DE PAIX=: Le lit. Dans le peuple, on trouve qu’après une dispute et même une bataille, le lit est un instrument de raccommodement. Cette expression vient d’une enseigne d’un marchand de meubles établi boulevard de Belleville. L’enseigne figurait un lit complet, et sur l’oreiller placé au milieu, il y avait cette inscription: =Au Juge de Paix= (Argot du peuple). _N._ =JUGE DE PAIX=: Un cornet contenant trois dés, la partie qui se nomme _zanzibar_ se joue sur le comptoir du marchand de vins. Ce jeu est ainsi appelé parce qu’il met les joueurs d’accord (Argot du peuple). _N._ =JUGEOTTE= (En avoir): Bien _juger_ les choses, avoir un _jugement_ sain (Argot du peuple). =JULES=: Pot de chambre (Argot du peuple). =V.= _Goguenot_. =JUS DE CHAPEAU=: Mauvais café, celui que les femmes vendent le matin au coin des rues, aux ouvriers qui se rendent à leur travail. Quand il pleut sur un _chapeau_, le _jus_ a exactement la couleur de ce café (Argot du peuple). =JUTEUX=: Il a du _jus_, il est _rupin_. Une affaire est _juteuse_, quand elle donne beaucoup de bénéfices. Tomber à l’eau, c’est tomber dans le _jus_. Boire du vin, licher un coup de _jus_. Faire du _jus_, faire de l’embarras (Argot du peuple). _N._ K =KANGUROO= (Le vol au): Ce vol consiste à engloutir les dentelles ou les coupons volés aux étalages dans une vaste poche dissimulée sous la robe (Argot des voleurs). =KILO=: Litre (Argot du peuple). _N._ =KLÉBER=: Manger. Ce mot vient du russe _kleb_ (manger). Nos soldats l’ont rapporté de la guerre de Crimée, et il est resté en usage dans le peuple (Argot du peuple). L =LAC= (Être dans le): Être pendu. _L. L._ _Être dans le lac_, c’est ne plus rien avoir à espérer, être aussi bas que possible. _Lac_, ici, est synonyme de _lacet_, être _enlacé_, pris par la misère, _enserré_ dans les filets d’une femme ou d’un usurier, comme le pauvre oiseau dans le _lac_ du braconnier (Argot du peuple). _N._ =LACETS=: Menottes. Le gendarme ou l’agent sont des marchands de _passe-lacets_ (Argot des voleurs). =V.= _Alliances_. =LACHARD=: Diamant de vitrier (Argot des voleurs). _N._ =LÂCHER LA BONDE=: Se comprend de deux manières. _Lâcher la bonde_: faire ses besoins. _Lâcher la bonde_ à son tempérament: donner cours à sa violence, à son mauvais caractère. Dans les ateliers, quand le _contre-coup_ gueule trop fort, on dit: Gare, il a _lâché sa bonde_ (Argot du peuple). _N._ =LÂCHEZ-MOI D’UN CRAN=: Allez-vous en. Compliment peu flatteur fait habituellement aux gens qui vous importunent. On _lâche_ sa ceinture _d’un cran_ quand on a trop mangé. On la _serre d’un cran_ quand on a faim. On _lâche_ sa femme ou sa maîtresse _d’un cran_ quand elle est par trop embêtante. Mourir, c’est _lâcher_ la vie _d’un cran_. Quand un homme est maussade en société, on lui dit: —Allons, _lâchez-vous d’un cran_, déboutonnez-vous. Ce à quoi un farceur répond.—Ah! non, il y a des dames. On dit aussi: _remonter d’un cran_ dans l’estime du monde (Argot du peuple). _N._ =LÂCHER LES ÉCLUSES=: Pisser. L’allusion est juste, malgré que cela ne fasse pas monter la Seine. On dit aussi: mon pantalon ne tient pas l’eau (Argot du peuple). _N._ =LÂCHER LA RAMPE=: Mourir (Argot des serruriers). =LÂCHER SON GAZ=: Éternuer bruyamment, par en bas. Quand cela arrive à quelqu’un dans la rue, les gamins lui disent: —Dieu vous bénisse! (Argot du peuple). _N._ =LÂCHER UNE TUBÉREUSE=: Pet foireux qui répand une odeur qui ne rappelle pas précisément la rose (Argot du peuple). =LÂCHER UNE SOURNOISE=: Vesser en sourdine. Pet avorté (Argot du peuple). =LACHETON=: Diamant de vitrier (Argot du peuple). =V.= _Lachard_. =LAFFE=: Soupe. On dit aussi: _mouise_, _tambouille_. Les maçons disent _mortier_, parce qu’ils empilent du pain dans le bol tant qu’il en peut tenir, ce qui forme une pâtée épaisse qui ressemble à du _mortier_ (Argot du peuple). _N._ =LAISSEZ PISSER LE MÉRINOS=: Ne vous tourmentez pas, laissez marcher les choses, elles vont bien. Autrefois on disait: _Laissez pisser le mouton_, ce qui est absolument la même chose (Argot du peuple). =LAISSER TOMBER UNE PERLE=: Ces _perles_-là ne pourraient guère se mettre aux oreilles des dames car elles n’ont pas le parfum de celles de la gazelle (Argot du peuple). =V.= _Pousser sa moulure_. =LAIT À BRODER=: Encre. Dans les prisons, quand le _lazagneur_ écrit une lettre pour un camarade, il dit qu’il se sert du _lait à brodancher_ pour attendrir celui à qui on écrit. _Brodancher_ pour _broder_. _Encre_ est ici une figure, car souvent c’est le _lait_ qui en sert. Dans les prisons on sait que toutes les lettres des détenus adressées à des parents ou à des amis passent par le greffe. Le greffier ou le directeur lit la lettre et si elle ne contient rien de contraire au règlement il la vise par ce signe: =V.= Le plus grand souci des prisonniers est d’éviter cette formalité gênante surtout si la lettre est adressée à un complice. Alors ils emploient le _lait_ pour écrire entre les lignes écrites à l’_encre_. Pour cela il faut du _lait_ écrémé et du papier non glacé, parce que l’écriture serait grasse, brillante et la supercherie serait apparente. Pour faire apparaître l’écriture il suffit de frapper fortement la lettre avec un chausson plein de poussière; la poussière s’attache aux caractères qui deviennent lisibles. Autrefois dans les prisons on se servait d’oignons, mais le truc fut découvert, on n’en vend plus dans les cantines, tandis que l’on y trouve du _lait_ (Argot des voleurs). _N._ =LAMPISTRON=: Lanterne. Vient de _lampiste_, c’est le mot déformé (Argot des voleurs). =V.= _Brulotte_. _N._ =LANCE=: Eau, pluie. —Il tombe de la _lance_ à ne pas mettre un chien dehors. Le peuple a emprunté ce mot à l’argot des voleurs. =LANCIER DU PRÉFET=: Balayeur. Allusion au long manche du balai qui ressemble à celui de la lance des lanciers (Argot du peuple). =LANGUE DE CHAT=: Petit morceau de savon très mince, en forme de _langue de chat_, que les vagabonds portent constamment dans leur poche. On nomme aussi _langue de chat_, une sorte de petit gâteau sec que l’on mange en buvant du thé (Argot du peuple). _N._ =LANSQUAILLER=: Faire ses besoins. Je viens de mettre dans un trou rond Ce qu’un jour avec impudence Le ministre Thiers sur un balcon Fit voir aux citoyens de France. Ce quatrain est de Gérard de Nerval (Argot des voleurs). =LANSQUINE=: Eau, pluie (Argot du peuple). =V.= _Lance_. =LANSQUINER=: Pleuvoir. —Il _lansquine_ à torrent. _Lansquiner des chasses_: Pleurer. La pluie tombe des yeux (Argot du peuple). =LANSQUINEUR=: Petit mendiant qui fait semblant de pleurer à chaudes larmes sur la voie publique pour attendrir les passants (Argot du peuple). =LANTERNER=: Faire une chose mollement, accomplir un travail à regret: _lanterner_ pour l’achever. _Lanterner_: synonyme de _muser_ (abréviation de s’_amuser_). Marcher comme un chien qu’on fouette (Argot du peuple). =LANDIER=: Employé de l’octroi. Autrefois, lorsque la foire du _landit_ battait son plein, toutes les marchandises devaient payer un droit fixe, des employés étaient préposés pour le percevoir; les fraudeurs nombreux les nommaient les _landiers_. Dans le peuple, on dit des _gabelous_, en souvenir de la _gabelle_ (Argot du peuple). =LANDIÈRE=: Boutique de marchand forain. Ce mot est également un souvenir de la célèbre foire du _landit_ où les escholiers de la rue du Fouarre allaient en procession s’approvisionner de papier. Une chronique du temps dit que la tête de la colonne était à la Plaine-Saint-Denis, alors que la queue était encore sur le parvis Notre-Dame (Argot des forains). =LANTIPONNER=: Synonyme de _rasoir_ et de _bassinant_. Généralement, les concierges passent leur temps à _lantiponner_, c’est-à-dire à bavarder (Argot du peuple). =LAPIN= (En poser un): Promettre cinq louis à une fille, ne pas les lui donner et lui faire son mouchoir. Faire attendre quelqu’un dans la rue par dix degrés de froid (Argot des filles). _N._ =LAPIN FERRÉ=: Gendarme à cheval (Argot des voleurs). =LAPIN= (Un rude): Homme fort, un risque tout, en tout et en toutes choses. Dans le peuple, une femme dit: —Mon homme est un rude _lapin_ (Argot du peuple). _N._ =LAPIN DE COLLIDOR=: Domestique. Quand une femme vient aux halles accompagnée d’un _larbin_, les marchandes, en remettant les achats au domestique pour les porter à la voiture, lui disent: —Tiens, mon vieux _lapin de collidor_ (Argot du peuple). _N._ =LAPINEUR=: Genre de vol accompli par le conducteur d’omnibus qui _oublie_ de sonner les voyageurs. _Lapineur_ vient sans doute du nom du voyageur, qu’on désignait jadis sous le nom de _lapin_ (Argot des voleurs). =LARBIN=: Domestique (Argot du peuple). =LARBINIER=: Complice qui se déguise en domestique pendant que le _cambrioleur_ opère. C’est le _larbinier_ qui va préalablement en reconnaissance pour préparer le vol (Argot des voleurs). =LARD= (Vieux): Terme de mépris employé pour qualifier les vieilles rouleuses. Superlatif: _Vieux lard rance_ (Argot du peuple). _N._ =LARDON=: Enfant. Diminutif de _lard_. Dans le peuple, pour la _chair_ de l’homme ou de la femme, on dit: le _lard_; comme l’_enfant_ est le produit des deux sexes, de là, _lardon_. Quand quelqu’un, dans une conversation, vous _pique_ à chaque moment, on dit: —As-tu bientôt fini de me _larder_? Allusion au veau que le charcutier _pique_ de _lardons_ (Argot du peuple). _N._ =LARGUE=: Femme publique. Les voleurs disent _larguepé_ par une adjonction de finale. M. Marcel Schwob dit que _largue_ s’explique par _marque_ (Villon. _J. de l’arg._), qu’on a eu _lasquemé_, puis que la finale _mé_ est tombée; de là _largue_. Halbert d’Angers donne _largue_ ou _lasque_. C’est _largue_ qui a subsisté (Argot des voleurs). =LARMON=: Étain (Argot des voleurs). _N._ =LARTIF= ou =LARTILLE=: Pain (Argot des voleurs). =V.= _Bricheton_. =LARTON=: Pain (Argot des voleurs). =V.= _Bricheton_. =LARTONNIER=: Voleur qui a pour spécialité de dévaliser les boutiques de boulangers. _Lartonnier_ est impropre; on devrait dire _lartonneur_ (Argot des voleurs). _N._ =LASQUÉ=: Vingt centimes (Argot des voleurs). _N._ =LA SEMAINE DES QUATRE JEUDIS=: On dit d’une personne sale et crasseuse qu’elle se débarbouille _la semaine des quatre jeudis_, c’est-à-dire jamais. Un paresseux ne travaille jamais que cette semaine-là. —Quand allez-vous me paver mon terme? demande un propriétaire à son locataire. —_La semaine des quatre jeudis._ Cette expression est synonyme de remettre aux _calendes grecques_ (Argot du peuple). _N._ =LA TABLE EST MISE=: Les enfants du peuple portent des pantalons fendus par derrière, on en comprend la raison. Quand le moutard a fait ses besoins, il oublie de rentrer sa chemise; il en passe toujours un lambeau, souvent taché de _moutarde_; les gamins lui crient: —_La table est mise._ Allusion à la _nappe_ (Argot du peuple). _N._ =LATIF=: Linge blanc (Argot des voleurs). =LAUMIR=: Perdre. —Il a _laumi_ son _pognon_ (Argot des voleurs). =LAVER=: Vendre ses _frusques_. On dit aussi _nettoyer son complet_ (Argot du peuple). =LAVER LA VAISSELLE=: =V.= _Descendre à la crémerie_. =LAVER SON LINGE= (Avoir): Le condamné qui a subi sa peine a _lavé son linge_. Il sort de prison _blanc_ comme neige (Argot des voleurs). =LAVER SON LINGE SALE EN FAMILLE=: Se disputer dans son intérieur, se faire des reproches sanglants (Argot du peuple). _N._ =LAVEUR=: Complice qui vend aux recéleurs les effets volés (Argot des voleurs). =LAVETTE=: Langue. Dans le peuple, cette expression veut dire _mou_. On dit aussi: _Mou comme une chiffe_, apocope de _chiffon rouge_, langue (Argot des voleurs). _N._ =LAVOIR=: Confessionnal. Mot à mot, on y lave sa conscience (Argot des voleurs). =V.= _Planche à lavement_. =LAZAGNE=: Lettre (Argot des voleurs). =LAZAGNEUR=: Prisonnier qui écrit pour ses camarades de prison (Argot des voleurs). =LAZZI-LOFF=: M. Prudhomme tient son fils par la main, un collégien de quinze ans, rue Notre-Dame-de-Lorette; il hèle l’omnibus Batignolles-Clichy-Odéon: —Conducteur, vous passez rue de Tournon, devant chez Ricord? —Oui, Monsieur. Alors, poussant son fils dans la voiture: —Montez, petit cochon! (Argot du peuple). =V.= _Chaude-lance_. =LE 36 DU MOIS=: Réponse à un créancier qui demande: —Quand me paierez-vous? (Argot du peuple). _N._ =LÉCHARD=: Jeune homme (Argot des voleurs). _N._ =LÈCHE-CUL=: =V.= _Fleure-fesse_. =LÉCHER=: Peindre un tableau avec un soin méticuleux. Dans les ateliers, on dit d’un peintre _lécheur_ qu’il fait de la peinture de demoiselle (Argot des artistes peintres). _N._ =LECTURE= (Être en): Femme occupée sur sa chaise longue (Argot des filles). _N._ =LÉDÉ=: Dix centimes (Argot des voleurs). _N._ =LÈGRE=: Foire, marché (Argot des voleurs). =V.= _Légreur_. =LEGRER=: Lever, tromper (Argot des voleurs). _N._ =LÉGREUR= (Le): Est un forain qui tient un jeu dans les foires et qui annonce, pour allécher le public, des lots imaginaires (Argot des voleurs). _N._ =LÉON=: Le président de la cour d’assises. —Quelle _tapette_, le _léon_ de la _planche à pain_. _Léon_, dans le peuple, est employé à tout propos:— —Vas y _Léon_, tape dessus (Argot du peuple). =LENTILLE=: Punaise (Argot des voleurs). _N._ =LESBONDE=: =V.= _Accouplée_. =LES ROUTES SONT SURES ICI, ON NE VERSE PAS SOUVENT=: Exclamation d’un ivrogne dans une maison où l’on verse à boire avec parcimonie (Argot du peuple). _N._ =LES TOILES SE TOUCHENT=: Cette expression signifie ne pas avoir d’argent: les _toiles_ des poches se touchent (Argot du peuple). _N._ =LES VINGT-HUIT JOURS=: Quand les réservistes partent, ils emportent généralement dans un mouchoir quelques menus objets de toilette. Quand les agents arrêtent un individu, on le conduit au poste de police où on le fouille très minutieusement; les objets qu’il possède sont enveloppés dans un mouchoir. Quand le lendemain, à 9 heures du matin, on le conduit au bureau du commissaire de police, l’agent qui le tient porte le petit paquet; comme généralement ils sont huit ou dix à la file, quand ils passent, le peuple dit par allusion: Tiens! _les vingt-huit jours!_ (Argot du peuple). _N._ =LESSIVANT=: Avocat d’office (Argot des voleurs). =LESSIVEUR=: Avocat. Il y a souvent des clients qui en ont besoin d’une rude de _lessive_ pour blanchir leur conscience. =V.= _Blanchisseur_. =LESSIVEUR DE PÉTROUSQUIN=: Voleur qui dévalise les paysans. Mot à mot: Il les _lessive_ (Argot des voleurs). =LEVAGE AU CRACHOIR= (Un): Lever une femme par une faconde intarissable, l’éblouir par un luxe de paroles, pour l’empêcher de songer à la _galette_ (Argot du peuple). =LEVANQUÉ=: Deux francs (Argot des voleurs). _N._ =LÈVE-PIEDS=: =V.= _Montante_. =LEVER=: _Lever une affaire_, la prendre à un autre. _Lever_ un homme au café ou sur une promenade publique. —À quelle heure vous _levez_-vous? —Quand on me couche (Argot des filles). =LEVER LA LETTRE=: Prendre les lettres dans la casse pour aligner les mots dans le composteur et former les phrases (Argot d’imprimerie). =LEVER LE CUL DEVANT= (S’être): Être de mauvaise humeur. On dit aussi: il est de mauvais poil (Argot du peuple). =LEVER LE PIED=: =V.= _Mettre la clé sous la porte_. =LICHANCE=: Repas épatant où les convives repus roulent sous la table. —À la noce de mon cousin Bo-bosse, il y a eu une si _bath lichance_, que j’en ai _boulotté_ pour quinze jours (Argot du peuple). =LICHE-FRITE=: Pommes de terre frites (Argot du peuple). =LIGNARD=: =V.= _Fantaboche_. =LIGOTTANTE=: La corde (Argot des voleurs). =LIGOTTER=: Attacher les mains. Quand le prisonnier est trop récalcitrant, on le ficèlle comme un saucisson (Argot du peuple). =LIMACE=: =V.= _Rodeuse_. =LIMACE=: Chemise (Argot du peuple). =LIMANDE=: Plate comme une _limande_. —Prends garde, ta _limande_ va te couper dans le _pieu_. On dit également d’une femme qui a la _figure en lame de couteau_: —Elle a une gueule de _limande_. Quand elle grimace: —Elle a une gueule de raie (Argot du peuple). =V.= _Sac à os_. =LIME=: Diminutif de _limace_ (Argot des souteneurs). =LIMER=: Fait qui se produit après trente ans de mariage (Argot du peuple). =LIMONADE=: Eau. Tomber dans la _limonade_, ce n’est pas «se laisser choir dans l’eau», comme le dit A. Delvau, c’est tomber dans la misère:—Il est tombé dans la _limonade_. Il existe à ce sujet une chanson: Ah! il est tombé dans la _limonade_. (Argot du peuple). _N._ =LIMOUSINIER=: Voleur de tuyaux de plomb dans les maisons en construction. Il se nomme également voleur de _gras double_, parce que les feuilles de plomb ou de zinc roulées ressemblent aux rouleaux de tripes que l’on voit à l’étalage des tripiers (Argot du peuple). =LINCÉ=: Vingt-cinq centimes (Argot des voleurs). =LINGE LAVÉ= (Avoir son): Les voleurs en prison comme les troupiers, n’ont plus à s’occuper de la blanchisseuse (Argot des voleurs). =LINGOT=: Forain qui met de la porcelaine ou de la verrerie en loterie. La roue qui tourne pour indiquer le numéro gagnant se nomme un _lingot_ (Argot des forains). _N._ =LINGRE=: Couteau. Quelques auteurs disent _lingue_, c’est une erreur, _lingre_ est une corruption de _Langres_, ville renommée pour la fabrication de ses couteaux (Argot des voleurs). =LINGREUR=: Assassin qui tue à l’aide d’un couteau (Argot des voleurs). =LINSPRE= ou =L’INSAPRÉ=: C’est plutôt cette dernière expression qui est la vraie, car elle signifie _inspecteur_ et non _prince_ (Argot des bouchers). =LINVÉ=: Un franc (Argot des voleurs). _N._ =LIQUETTE=: =V.= _Limace_. =LIQUIDE DE BACCHUS=: Vin (Argot du peuple). =LIQUIDE DE CANARD=: Eau (Argot du peuple). =V.= _Lance_. =LIRE AUX ASTRES=: Synonyme de _bailler à la lune_, mettre trois heures pour faire une course de cinq minutes (Argot du peuple). =V.= _Gobe-mouches_. =LISDRÉ=: =V.= _Fricadier_. =LITARGE=: =V.= _Lance_. =LIVRAISON DE BOIS DEVANT LA PORTE=: =V.= _Capitonnée_. =LOCANDIER=: =V.= _Bonjourier_. =LOCANDIER=: Variété de voleur au bonjour (Argot des voleurs). =V.= _Bonjourier_. =LOCHE=: Oreilles (Argot des voleurs). =V.= _Esgourdes_. =LOCHE=: Paresseux, fainéant. Allusion à la _loche_ qui se traîne péniblement. On dit également: Paresseux comme un _loir_. Le _loir_ dort au soleil (Argot du peuple). _N._ =LOCHER=: Branler, tomber. —Tu _branles_ dans le manche, tu vas être renvoyé de ta place. Ce à quoi les farceurs répondent: —Tout ce qui _branle_ ne _tombe_ pas (Argot du peuple). _N._ =LOGER RUE DU CROISSANT=: Si tous les maris cocus devaient rester rue du Croissant, il faudrait prolonger cette rue jusqu’à Vincennes (Argot du peuple). =V.= _Joseph_. _N._ =LOITÉ=: Quinze centimes (Argot des voleurs). _N._ =LONG DU MUR= (Le): Les murs sont blancs; quand on s’y frotte, on blanchit ses effets. Allusion à une bonne qui, avant d’entrer en place, demande ce qu’elle gagnera: —Nourrie, vingt francs par mois, un jour de sortie. —Et blanchie? —Le _long des murs_ (Argot du peuple). _N._ =LONGE=: =V.= _Berge_. =LOPHEUR=: Fabricant de faux papiers (Argot des voleurs). =LOQUES=: Vieux vêtements usés jusqu’à la corde. Cette expression s’applique également aux vieux morceaux de ferrailles qui servent d’enjeu aux enfants (Argot du peuple). =LORCEFÉ DES PONIFFES=: Prison de Saint-Lazare (Argot des filles). =LORGNE=: Borgne. On dit aussi: _lorgnebé_. Le _borgne_ ne _lorgne_ que d’un œil. On dit aussi: Il ne peut voir que d’_un bon œil_ (Argot du peuple). =LOUCHONNE=: La cuillère (Argot des voleurs). _N._ =LOUF=: Abréviation de _loufoque_ (Argot du peuple). =LOUFIARDER=: Vesser sourdement (Argot du peuple). _N._ =LOUFOQUE=: Fou (Argot des bouchers). =LOUP=: =V.= _Contre-coup_. =LOUPEUR=: Mauvais ouvrier qui flâne, qui tue le temps en _loupant_ pour attendre l’heure de la sortie et qui a plus souvent les yeux fixés sur la pendule que sur son ouvrage. En 1848, un marchand de vins, boulevard de Belleville, avait pris pour enseigne: _Au camp de la loupe_, tenu par _Feignant_ (Argot du peuple). =LOUPEUR=: Désigne le voleur qui, à la tombée de la nuit, vole des diamants chez les bijoutiers au moyen d’une _loupe_ à deux branches (Argot des voleurs). =LOUP-CERVIER=: Alors que les _boursiers_ se réunissaient devant Tortoni, on les nommait ainsi. Aujourd’hui, l’expression n’est plus en vogue, mais le _boursier_ est toujours synonyme de _loup-cervier_ (Argot des boursiers). =LOUPIOT=: Enfant (Argot du peuple). =LOURDIER= (Le): =V.= _Pessigner les lourdes_. =LUISANT=: Le jour (Argot des voleurs). _N._ =LUISARD=: =V.= _Bourguignon_. =LUMIGNON=: =V.= _Bourguignon_. =LUNE= (La faire voir): Montrer son cul: Quand j’étais petit je n’étais pas grand Je montrais mon cul à tous les passants. Allusion à la rondeur; facile à comprendre (Argot du peuple). =LUQUEUR=: Voleur qui escroque les gens à l’aide de faux papiers (Argot des voleurs). =LUSQUINEUR=: Voleur qui s’habille en charbonnier pour dévaliser les haquets des véritables charbonniers. C’est une variété du _roulottier_ (Argot des voleurs). =LUSQUIN=: Charbon (Argot des voleurs). =LUSTRE=: =V.= _Palpeurs_. M =MAC=: Diminutif de maquereau. Quelques-uns écrivent _mec_, d’autres _mecque_. C’est _mac_ qui est le vrai mot (Argot des souteneurs). =MACADAM=: Accoster les hommes. _L_. _L_. On voit d’ici les filles faire le _macadam_ qui est la chaussée des boulevards, pour raccrocher sans doute les omnibus, les fiacres et les becs de gaz. _Macadam_ est le nom donné à un vin blanc épais, venant soi-disant de Montbazillac, qui est vendu par les mastroquets au moment des vendanges (Argot du peuple). _N._ =MACARONER=: Vient de _macaron_. _Macaron_ dans le peuple veut dire _huissier_; dans l’argot des voleurs, il veut dire _traître_. Il est vrai qu’il n’y a pas grande différence entre les deux. Un voleur est traître en _dénonçant_ ses complices; un huissier est traître vis-à-vis des malheureux (Argot des voleurs). _N._ =MACÉDOINE=: Combustible. _L. L._ _Macédoine_ est une salade composée de toutes sortes de légumes; on la nomme _salade russe_. _Macédoine_ est également synonyme d’_arlequin_ (Argot du peuple). _N._ =MACHER LES MOTS= (Ne pas): Dire carrément à quelqu’un ce que l’on pense. Parler grossièrement; ainsi, dans le peuple, quand on dit _merde_ à quelqu’un, on répond: _mâche_ (Argot du peuple). _N._ =MACROTIN=: Petit maquereau d’occasion qui glane par-ci par-là quelques sous, en attendant qu’il soit assez fort pour avoir une _marmite_ à lui seul. Le petit _macrotin_ commence généralement à être _raton_ et _pégriot_ (Argot des souteneurs). _N._ =MACCHABÉE=: Cadavre. Se dit plus particulièrement d’un noyé que les mariniers retirent de l’eau. Les croque-morts disent aussi du mort qu’ils vont enlever: —Emballons vivement le _macchabée_, il _fouette_ à en crever (Argot du peuple). =V.= _Bouffi_. =MADAME LA RESSOURCE=: La marchande à la toilette, la brocanteuse, le mont-de-piété (ma tante), tous ces rongeurs sont _madame la Ressource_ pour les pauvres gens qui vendent ou engagent leurs dernières nippes (Argot du peuple). =MADEMOISELLE DU BITUME=: Péripatétitienne qui foule le _bitume_ du matin au soir. Le _bitume_, c’est son atelier, son champ de manœuvres, elle y règne en souveraine, elle l’a conquis à la pointe de ses bottines (Argot du peuple). =MADEMOISELLE DU PONT NEUF=: Fille publique. L’allusion est typique. Comme sur le _Pont-neuf_ tout le monde y passe librement, avec cette différence, toutefois que le pont est à péage (Argot du peuple). _N._ =MADRICE=: Finesse. Vient de _madré_. —Il a _roulé_ le _palpeur_. Il est rien _madrice_, le _gonce_ (Argot des voleurs). =MAGASIN DE BLANC=: Maison de tolérance. Il est assez difficile d’expliquer le pourquoi de cette expression; elle vient sans doute de ce que dans le peuple, tous ceux qui vivent de la femme sont des _mangeurs de blanc_. La maquerelle est dans ce cas (Argot du peuple). _N._ =MAGNES=: Abréviation de _manières_. Magne est ici pour _façon_. —Ne fais donc pas tant de _magnes_, il faut y aller carrément. —Tu fais des _magnes_ ma vieille, ça ne prend pas (Argot du peuple). _N._ =MAILLOCHÉ= (Il est): Synonyme d’avoir reçu un coup de marteau. On connaît la légende de Martin et Martine, de l’horloge de Cambrai, qui a donné naissance au dicton populaire pour qualifier un être déséquilibré: —Il a passé à Cambrai, il a reçu un coup de marteau. Mot à mot: _il est timbré_ (Argot du peuple). _N._ =MAILLOCHONS=: Les pieds. Allusion au bruit que font les pieds en marchant. —Ils frappent le pavé, ce qui produit des coups de _mailloche_ (Argot des voleurs). _N._ =MAÎTRES CHANTEURS=: Individus qui font payer des imbéciles pour acheter leur silence. Il y en a de différentes catégories. Le _maître chanteur_ financier qui fait _chanter_ les sociétés financières. Le _maître chanteur_ qui se sert d’un _Jésus_ pour faire _chanter_ l’homme à passions contre nature. Il y a des _maîtres chanteurs_ dans toutes les classes de la société (Argot du peuple). =MAÎTRESSE DE PIANO=: Professeur qui apprend aux cocottes illettrées le moyen de tirer des carottes par correspondance à leurs amants. En fait de musique elle coupe les cors et tire les cartes. Elle procure au besoin (Argot des filles). =MAJOR DE TABLE D’HÔTE=: Individu à tout faire, qui est maquereau à l’occasion. Le _major_ a toutes les apparences d’un militaire en retraite; il porte à la boutonnière une rosette multicolore d’ordres exotiques. Le _major de table d’hôte_ est un _rastaquouère_ de premier ordre (Argot du peuple et des filles). =MAL BLANCHI=: Nègre. Une plaisanterie populaire très usitée consiste à dire à un nègre: —Si on te conduit chez le commissaire, je ne te vois pas blanc (Argot du peuple). _N._ =MALADIE=: Emprisonné (Argot des voleurs). =MALTAISE=: Pièce de vingt francs (Argot des voleurs). =V.= _Sigue_. =MALTOUSE=: Contrebande. Halbert d’Angers dit _pasquiner la maltouse_. C’est une erreur; c’est _pastiquer_, parce que ce mot veut dire _passer_. Mot à mot, _pastiquer_ la _maltouse_: passer de la contrebande, faire la fraude sur des objets soumis aux droits de l’octroi (Argot des voleurs). =MAMAN-MACA=: Maquerelle qui tient une maison de tolérance. Les pensionnaires appellent la tenancière _maman_; quand elle est vieille, ce qui est fréquent, elles y joignent le mot _maca_, abréviation de _macaque_ qui, dans le peuple, signifie _vieille guenon_ (Argot des filles). _N._ =MANCHE= (Faire la): Mendier, quêter. Les voleurs restés en liberté font la _manche_ pour venir en aide à un camarade qui est en prison. Les sœurs de charité font la _manche_ dans les maisons aisées pour soulager les pauvres et les malades des hôpitaux (Argot des voleurs). _N._ =MANCHE À MANCHE=: Quand deux adversaires ont perdu chacun une partie, ils sont _manche à manche_ (Argot des voleurs). =V.= _Belle_. =MANCHON= (Avoir des vers dans son): Avoir le crâne dénudé par place. Allusion aux mites qui font des stries dans les étoffes de laine (Argot du peuple). =MANDOLLE= (En jeter une): Donner un soufilet à quelqu’un (Argot des voleurs). =V.= _Giroflée à cinq feuilles_. =MANGER LA GRENOUILLE=: Caissier qui mange le contenu de la caisse. Notaire qui vole les fonds qui lui sont confiés. Sergent-major qui lève le pied avec la solde de sa compagnie. Se dit en général de tous ceux qui _mangent_ l’argent qui ne leur appartient pas. Cette expression vient de ce que, en Hollande, les banquiers avaient pour emblème protecteur, sur la serrure de leur coffre-fort, une _grenouille_ en bronze; lorsque le coffre-fort était fracturé, la _grenouille_ était déplacée. De là, _manger la grenouille_ (Argot du peuple). _N._ =MANGER LE MORCEAU=: Dénoncer ses complices, ou avouer ses méfaits (Argot des voleurs). =V.= _Mouton_. =MANGER DE LA VACHE ENRAGÉE=: Malheureux qui ne mange pas tous les jours. —Ah! tu ne veux pas travailler, propre à rien, tu vas foutre le camp, tu _mangeras de la vache enragée_ (Argot du peuple). =MANGER DU PAIN ET DU FROMAGE=: Repas de funérailles. C’est une vieille coutume. Quand on enterre un camarade, on _mange du pain et du fromage_, ou on casse la gueule à un lapin en souvenir du mort (Argot du peuple). =MANGER LE BON DIEU=: Communier. L’allusion est claire (Argot du peuple). =MANGER SUR L’ORGUE=: Charger un complice. Mot à mot: lui mettre ses méfaits sur le dos pour essayer de s’en décharger (Argot des voleurs). =MANGEUR DE BLANC=: Homme qui vit aux dépens des autres, et particulièrement des femmes qui se livrent à la prostitution. L’allusion est suffisamment claire pour se passer d’explication (Argot du peuple). =MANGEUSE DE VIANDE CRUE=: Cette figure dégoûtante, mais très caractéristique, désigne une fille publique qui a une certaine spécialité (Argot des souteneurs). =MANNEQUIN= (Tu n’es qu’un): Pas grand’chose de bon. _Mannequin_: individu guindé, habillé à la dernière mode. Mot à mot, qui ressemble à un _mannequin_ exposé à la porte d’un tailleur. _Mannequin_: hotte de chiffonnier (Argot du peuple). =MANNEQUIN DE MACHABÉES=: Corbillard. Allusion au _panier_ dans lequel est jeté le condamné après l’exécution (Argot des voleurs). =V.= _Omnibus de coni_. =MAQUEREAU=: Les uns croient que ce mot vient de l’hébreu _machar_, qui signifie vendre, parce que c’est le métier de ces sortes de gens de vendre les faveurs des filles. D’autres font dériver cette expression d’_aquarius_ ou d’_aquariolas_, parce que chez les Romains les porteurs d’eau étaient les intermédiaires de la prostitution, d’où nous avons fait, en ajoutant la lettre _M_, _Maquariolus_, et que de là s’est formé le nom de _maquereau_. D’autres encore affirment que ce mot vient du latin _macalarellus_, parce que dans les anciennes comédies, à Rome, les proxénètes de la débauche portaient des habits bizarres, et ils étayent leur opinion sur ce que ce nom n’a été donné à l’un de nos poissons de mer que parce qu’il est mélangé de plusieurs couleurs dans le dos (Dessessart, _Dictionnaire de police_, Bulenger _opuscul_.) Quoi qu’il en soit, la signification du mot _maquereau_ est de vivre aux dépens de quelqu’un, mais l’expression s’applique plus généralement à ceux qui vivent de la prostitution des femmes. _Souteneur_, qui vit des filles publiques, ou mari qui laisse sa femme se prostituer, lequel est un _maquereau légitime_ (Argot du peuple). =MAQUERELLE=: Maîtresse de maisons de tolérance ou de maisons de rendez-vous, femme qui vit du travail des filles (Argot du peuple). =V.= _Maman-Maca_. =MAQUECÉE=: Abbesse d’une maison de tolérance. Vient des deux mots: _maq_, abréviation de _maquerelle_, et de _cé_, femme d’argent; de là _maquecée_ (Argot des souteneurs). _N._ =MAQUILLER=: Se farder le visage. Pour réparer des _nuits_ l’irréparable outrage. Quand un ouvrage est raté, on le _maquille_ pour le faire accepter. _Maquiller un tableau._ Il existe des peintres spéciaux qui font du vieux avec du neuf. Une toile est fabriquée par un rapin quelconque, une signature de maître figure au bas, le _maquilleur_ lui donne l’aspect de la vétusté, et un amateur naïf l’achète. Il y a comme cela des Velasquez peints à Montmartre (Argot des filles et des peintres). _N._ =MAQUILLEUSE DE BRÊMES=: La tireuse de cartes. Il en existe de célèbres dans le monde des filles. Elles font des recettes fructueuses. La _maquilleuse de brêmes_ ne se borne pas à tirer les cartes, elle procure pour les deux sexes. Généralement, c’est une ancienne fille sur le retour qui ne peut plus peloter que le valet de cœur (Argot des filles). =MARBRE=: Ainsi nommé parce que c’est une table en fonte. Table sur laquelle les typographes alignent les _paquets_ composant les articles. _Avoir un article sur le marbre_: attendre son tour pour être imprimé. Quand un article reste trop longtemps sur le marbre, il faut le distribuer. _Marbre_ est une ironie pour les pauvres journalistes. Leurs articles _refroidissent_ sur le marbre (Argot d’imprimerie). _N._ =MARCANDIER=: Cette expression désigne les marchands, quel que soit leur commerce (Argot des voleurs). =MARCHAND DE MORT SUBITE=: Le maître d’armes et le bourreau. Le maître d’armes apprend à ses élèves les moyens de tuer un homme proprement. Le bourreau coupe la tête du condamné pour lui apprendre à vivre (Argot du peuple). _N._ =MARCHER DEDANS=: Mettre les pieds sur une _sentinelle_. _Marcher dans la merde_, suivant un dicton populaire, cela porte bonheur. On dit d’un homme heureux en toutes choses, à qui tout réussit: —C’est pas possible, il a _marché dans la merde_. On dit également: —Il a _écrasé un colombin_ (Argot du peuple). _N._ =MARCHER SUR LE DERNIER QUARTIER=: User le restant de ses souliers. Par dérision, on dit à un homme dont les souliers boivent l’eau du ruisseau: —Tes _pafs_ sont _pochards_. On dit encore: —Tu vas t’enrhumer, tes _rigodons_ ont un courant d’air (Argot du peuple). _N._ =MARCHEUSE=: Belle femme qui figure à l’Opéra. _Marcheuse_: la femme qui appelait les passants en termes très engageants; elle détaillait avec complaisance les charmes de la marchandise qui était dans l’intérieur de la maison. La _marcheuse_ était généralement un _beefteack à corbeau_ hors d’âge et de service. Les _marcheuses_ furent supprimées à la porte des maisons de tolérance par arrêté de M. Andrieux, préfet de police, en 1881 (Argot des souteneurs). =MARGOT=: Femme de peu. —Tu n’es qu’une sale _Margot_. Pourquoi chercher dans _Margot_ le diminutif de _Marguerite_? Toutes les _Marguerites_ ne sont pas de Bourgogne. Il y en a qu’on aimerait à effeuiller. On dit aussi _Margoton_ (Argot du peuple). _N._ =MARGOULETTE=: La bouche. Il existe en Bourgogne des vases en terre vernissée qui ont un _goulot_ semblable à la bouche. Pour cette raison, on appelle ces vases des _goulettes_. _Mar_ a tout simplement été ajouté, déformant le mot primitif pour en former un autre qui a le même sens, car les nourrices disent aux enfants: —Viens que j’embrasse ta petite _goulette_. _Rincer la margoulette_ à un ami, c’est lui payer à boire (Argot du peuple), _N._ =MARGOULIN=: Débiteur de mauvaises boissons. Marchand de vin qui a une fontaine dans sa cave pour fabriquer le fameux cru de _Château la Pompe_. _Margoulin_: méchant ouvrier, fainéant, grossier, brutal, qui lève plus souvent le coude qu’un marteau. C’est, dans le peuple, un gros terme de mépris que de dire à un individu: —Tu n’es qu’un _margoulin_! (Argot du peuple). _N._ =MARIAGE À LA DÉTREMPE=: Mariage à la colle. Quand elle est trop _détrempée_, le papier ne tient pas. Autrefois, avant l’annexion de la banlieue à Paris, on disait: —Ils sont mariés au treizième arrondissement. Parce qu’il n’y en avait que douze. Aujourd’hui on dit au vingt et unième, parce qu’il n’y en a que vingt (Argot du peuple). _N._ =MARIE-COUCHE-TOI-LA=: Femme qui se met sur le dos pour un oui ou un non. Rôdeuse de caserne (Argot des troupiers). _N._ =MARIE-SAC-AU-DOS=: Femme toujours prête. Allusion aux troupiers qui, quand le quartier est consigné en vue d’un événement quelconque, campent dans la cour de la caserne _sac au dos, prêts_ à partir (Argot des troupiers). =V.= _Rempardeuses_. _N._ =MARIE-PIQUE-REMPART=: Femme qui rôde la nuit sur les remparts, aux environs des postes de soldats. On devine ce qu’elle _cherche_: un gîte et un restant de soupe. Huit ou dix jours plus tard, le troupier sait ce qu’elle a _apporté_ (Argot des troupiers). _N._ =MARIOLE=: Malin, rusé, roublard. On est _mariole_ ou on le fait. Dans les ateliers, un _mariole_ passe pour un phénix. _Mariole_ doit être pris ici comme synonyme de _marlou_. —Tu n’as pas _coupé la patte à coco_, tu n’es pas si _mariole_ que ça, on pourrait bien _te river ton clou_. Il existe une chanson qui dit: Tant qu’il y aura des _pantes_, Les _marioles_ boulotteront. (Argot du peuple et des souteneurs). =N.= =MARKOUSE=: Carte marquée visiblement par le _bonneteur_. Mais aussitôt qu’elle a été vue par la dupe, elle est _démarquée_. Il la devine, mais ce n’est plus la même (Argot des camelots). =MARLOU=: Individu qui vit de la prostitution des femmes. _Marlou_ vient du vieux mot _marlier_, avec un changement de finale (Argot des filles). =MARLOU À LA MIE DE PAIN=: _Marlou_ qui ne sait pas faire travailler sa _marmite_ ou qui en a une récalcitrante. Je lis dans les _Lamentations d’un souteneur_: Quoi? C’est éteint... tu r’buttes au flanche. Y’a pu de trottinage à la clé. Des dattes pour que tu fass’ la planche, L’anse de la marmite est cassée. (Argot des souteneurs). _N._ =MARLOUPIN=: Jeune _marlou_ qui fait son apprentissage dans les bals publics. On dit aussi _goussepin_: petit vagabond dont la première étape est la petite Roquette et la dernière souvent, la grande. _Goussepin gouspiné_: voler (Argot des voleurs). =MARLOUSIER=: Malin, rusé, diminutif de _marlou_ (Argot des souteneurs). =MARMITE=: D’après M. _Lorédan Larchey_, c’est une fille publique nourrissant son souteneur. Un souteneur sans sa marmite est un ouvrier sans ouvrage, dit _Canler_. _La marmite de terre_ est une prostituée qui ne gagne pas de _pognon_ à son souteneur. La _marmite de fer_ commence à être cotée; elle gagne un peu de _galette_. La _marmite de cuivre_, suivant _Halbert_, c’est une mine d’or. _Marmite_, d’après _Pierre_, est une femme qui n’abandonne pas son mari ou son amant en prison et lui porte des secours. Le peuple qui ne cherche ni si haut ni si loin, considère tout tranquillement la femme comme une _marmite_. Quand elle trompe son mari avec son consentement, _elle fait bouillir la marmite_. Quand elle fait la noce pour son compte, qu’elle ne rapporte pas, _il y a un crêpe sur la marmite_ (Argot du peuple). _N._ =MARMITE ANARCHISTE=: Comme la précédente, celle-là ne rapporte pas; elle fait sauter—pas les écus, mais les maisons. C’est une _marmite_ qui n’est guère en faveur, car elle fait perdre la tête (Argot du peuple). _N._ =MARMITEUX=: Homme qui a sans cesse la larme à l’œil. Corruption par extension du mot _miteux_ (qui a la cire aux yeux) (Argot du peuple). _N._ =MARMITON DE DOMANGE=: Vidangeur. On dit aussi: _marmiton de Richer_ (Argot du peuple). =MARMOTTE=: Madras que les marchandes portent encore sur la tête en guise de coiffure. _Marmotte_: diminutif de _marmite_. —Tu n’es qu’une sale _marmotte_ (Argot du peuple). =MARMOUSET=: Le pot au feu. —Amène-ta _morue_ ce soir, nous _boulotterons_, mince de _bidoche_ dans le _marmouset_. Allusion au bruit que fait l’eau en bouillant: elle _marmouse_ (Argot des voleurs). =MARNER=: Signifie travailler. Les voleurs disent également _marner_ pour voler, puisque voler est pour eux travailler. _Marner_ est une variété du _vol à l’embrassade_, à l’exception toutefois qu’il est généralement pratiqué par des femmes (Argot des voleurs). =MARNEUSES=: Filles publiques qui travaillent au bord des rivières. On dit aussi: _poniffes_ et _magneuses_. Cette dernière expression indique une spécialité (Argot des souteneurs). =MARNOIS=: Souliers énormes. Synonyme de _péniche_ (Argot des voleurs). =MARRAINE=: Témoin femelle (Argot des voleurs). =MARRÉ=: En avoir assez, s’ennuyer d’être en prison. —Je vais me _marrer_ pendant cinq _berges_ (Argot des voleurs). =MAROTTE= (Avoir une): Idée fixe qui varie suivant les tempéraments. Tous les collectionneurs sont des gens à _marotte_. _Marotte_ est synonyme de _dada_. _Marotte_ signifie également _chanter_. —À toi, la Saucisse, c’est ton tour de _marotte_ (Argot des voleurs). _N._ =MARRON=: Livre imprimé clandestinement (Argot d’imprimerie). =MARRONNER UN GRINCHISSAGE=: Cette expression n’est pas juste, car _marronner_ veut dire en vieux français _pirate_, et, en même temps, _bouder_, _murmurer_ entre ses dents. Les voleurs l’emploient pour dire qu’ils ont _manqué un vol_ (Argot des voleurs). _N._ =MARQUE-MAL=: Se dit de quelqu’un qui a un vilain aspect (Argot du peuple). =MARQUÉ OU MARQUETS=: Mois (Argot des voleurs). =MARQUÉ= (Il est): Être gravé par la petite vérole (Argot du peuple). =V.= _Poêle à marrons_. =MARQUÉ=: Être ridé comme une vieille pomme (Argot du peuple). =MARQUE DE CÉ=: Femme légitime de voleur. Femme d’argent (Argot des voleurs). =MARQUER= (Ne plus): Femme qui n’a plus d’échéance à chaque fin de mois (Argot du peuple). =MARQUER À LA FOURCHETTE=: Marchand de vin qui majore ses notes. Allusion aux quatre dents de la fourchette; il fait quatre raies à la fois (Argot du peuple). =MARQUIS DE LA BOURSE PLATE=: Homme absolument sans le sou (Argot du peuple). =V.= _Les toiles se touchent_. =MASTIC=: Terme usité en imprimerie pour indiquer qu’il y a erreur dans le classement des phrases et des alinéas, ce qui rend l’article tout à fait incompréhensible (Argot d’imprimeur). _N._ =MASTIC= (Péter sur le): Le peintre en bâtiment qui, le lundi, veut flâner, emploie cette expression pour dire qu’il ne veut pas travailler: —Je _pète sur le mastic_ (Argot du peuple). _N._ =MASTROQUET=: Marchand de vin. Dernière transformation du mot _mannezingue_. _Mann_, homme, _zinc_, par corruption _zingue_, comptoir (Argot du peuple). =V.= _Bistro_. =MASSEPAIN=: Ce nom se donne généralement à une sorte de gâteau que l’on vend dans les foires; il a aujourd’hui une signification bien autrement «fin-de-siècle»; il sert à désigner la catégorie d’individus qui ont à Paris des salons d’essayages pour dames, avant de les expédier dans les maisons hospitalières de France ou de l’étranger (Argot des souteneurs). _N._ =MASSER=: Travailler, peiner ferme. Allusion au cantonnier qui casse avec une _masse_ les cailloux sur les routes. Il n’existe pas de métier plus pénible, il est vrai qu’ils n’en prennent qu’à leur aise, car la sueur des cantonniers n’a pas de prix. Ce n’est sûrement pas eux qui ont créé la fameuse, légende, que les riches mangeaient la sueur du peuple (Argot du peuple). _N._ =MASTARDIER=: Faire le _mastar_ au _gras_ double (Argot des voleurs). =V.= _Limousinier_. =MATADOR=: Homme riche ou qui en a les apparences. —Tu fais le _matador_, pour: Tu fais rudement tes embarras (Argot du peuple). =MATADOR=: Partie de dominos. Les gros dés: double-six, double-cinq, etc., sont les _matadors_ (Argot du boulevard). _N._ =MATELASSÉE=: Femme qui a des seins énormes. Son estomac est matelassée. Quand c’est une fille et qu’elle maigrit, son souteneur lui dit: —Tu t’débines des _matelassés_. Quand une femme est plate comme une limande elle se _matelasse_ en bourrant son corset d’assez de coton pour donner l’illusion. Les femmes fin-de-siècle en portent en caoutchouc qu’elles gonflent chaque matin (Argot des souteneurs). _N._ =MATHURINS=: Dés pipés qui servent aux camelots pour voler au 7, au _passe-dix_ et à la _consolation_ (Argot des camelots). =MAZAGRAN=: Café servi dans un verre. Par abréviation on dit un _mazag_ (Argot du peuple). =MEC= pour _meg_: Chef, patron, Dieu, le _mec plus ultra_ (Argot des voleurs). =MEC À LA COLLE FORTE=: Se dit d’un voleur redoutable, par opposition au _mec à la mie de pain_. Voleur de rien (Argot des voleurs). =MÈCHE=: Les mauvais ouvriers qui voyagent sans cesse demandent _mèche_ dans les ateliers qu’ils rencontrent sur leur route: —Y a-t-il _mèche_ de travailler? _Mèche_ pour _moyen_ (Argot du peuple). =MÉDAILLE= ou =MÉDAILLON=: =V.= _Pièce de dix sous_. =MÉDAILLON=: Derrière. Les joueurs de manille appellent ainsi les as, par corruption de _manillon_; quelques-uns disent le _merdaillon_ (Argot du peuple). _N._ =MEG DE LA ROUSSE= (Le grand): Le préfet de police (Argot des voleurs). =V.= _Dabe des renifleurs_. =MÉLASSE= (Être dans la): Dans la misère jusqu’au cou (Argot du peuple) =V.= _Purée_. =MÊLÉ CASS.=: Mélange d’eau-de-vie et de cassis que les ouvriers boivent le matin sur le zinc pour _tuer le ver_. On dit dans le peuple: —Faire ses dévotions à Notre-Dame de Mêlé-Cassis (Argot du peuple). _N._ =MELET=: Petit, petite (Argot des voleurs). =MENÉE=: Une douzaine. —Nous étions une _menée_ pour _ratiboiser_ le _goncier_; pas _mèche_ d’en venir à bout, c’était un _rude lapin_ (Argot des voleurs). =MENDIGOT=: Mendiant. D’un petit mendiant on dit qu’il _mendigotte_. _Mendigot_, changement de finale (Argot du peuple). =MENER PAS LARGE= (N’en): Être fort mal à son aise. Mot à mot: _serrer les fesses_ ou n’être pas dans _ses petits papiers_. Le condamné qui va être exécuté _n’en mène pas large_ (Argot du peuple). =MENESSE=: Femme (Argot des souteneurs). =MENTEUSE=: Langue. On dit par opposition d’une langue d’animal: —Allons manger une langue qui n’a jamais _menti_. Parce qu’elle ne parle pas (Argot du peuple). =MENOUILLE=: Monnaie (Argot du peuple). =MENTON DE GALOCHE=: Menton qui avance comme celui du classique Polichinelle. On dit de celui ou de celle qui possède un menton semblable qu’il fait carnaval avec son nez (Argot du peuple). =MÉQUARD=: Commandant d’une bande de voleurs (Argot des voleurs). =MERCE=: Pour _merci_ (Argot des voleurs). =MERDAILLON=: Moins que rien, une _sous-merde_ (Argot du peuple). =V.= _Avorton_. =MERDE=: À bout d’argument, dans le peuple, on dit: —_Merde_, est-ce français? C’est-à-dire: Me comprends-tu? Ce à quoi on répond: —Goûtes tes paroles. —Tu peux te retourner et te mettre à table. —S’il pleuvait de la merde et que chacun en ait suivant son grade, t’en aurais un rude paquet, car tu es le colonel des imbéciles (Argot du peuple). _N._ =MÈRE AU BLEU=: La guillotine. Les voleurs veulent faire croire que c’est le chemin du _ciel_. _A. D._ Pas du tout, c’est parce que le condamné n’y voit que du _bleu_ (Argot des voleurs). =MÈRE D’OCCASION=: Les mendiantes louent à des industriels du quartier Mouffetard des petits enfants qu’elles traînent dans les rues pour exciter la charité publique. Ces enfants changent chaque jour de _mère_; de là, _mère d’occasion_ ou de rencontre (Argot du peuple). _N._ =MERLAN= (Rouler des yeux de merlan frit). Homme langoureux et timide qui, n’osant adresser la parole à une femme, la regarde en roulant des yeux (Argot du peuple). _N._ =MERLAN=: Coiffeur perruquier. Quand le perruquier met de la poudre de riz à son client, il l’enfarine comme le merlan avant d’être mis dans la poêle à frire (Argot du peuple). =MESSE= (Être à la): Quand un ouvrier arrive à l’atelier cinq minutes après la cloche, la porte est fermée, il perd un tiers ou une demie journée; il va pendant ce temps boire des canons sur le zinc, l’autel des pochards; le mastroquet officie. De là, _aller à la messe_ (Argot du peuple). =METTRE À L’OMBRE=: Aller en prison. En effet, on ne craint pas l’ardeur du soleil (Argot du peuple). =METTRE AU CHAUD=: =V.= _Rouscailler_. =METTRE DANS LE MILLE=: Réussir une affaire du premier coup. Terme usité chez les pédérastes; _mille_: _podex_ (Argot du peuple). =METTRE EN BRINDEZINGUE= (Se): Faire la noce. Être dans les _brindezingues_: être pochard (Argot du peuple). _N._ =METTRE EN BRINGUE=: Mettre en morceaux, briser. _A. D._ _Bringue_, signifie femme maigre, l’expression est donc fausse. _Mettre en bringue_, est synonyme de _brindezingue_ (Argot du peuple). _N._ =METTRE EN PÂTE=: Les compositeurs lient les _paquets_ de caractères avec une ficelle. Quand le _paquet_ est mal lié ou que le bout de la ficelle est emprisonné, le metteur en pages met le _paquet_ en _pâte_, c’est-à-dire que les caractères se mélangent et qu’il faut recomposer. Quand, dans le _paquet_, il y a des lettres qui ne sont pas du corps, ou que le _paquet_ n’a pas été assez mouillé, en le déliant, si les lettres tournent, on appelle cela: _faire un soleil_ (Argot d’imprimerie). _N._ =METTRE LA TÊTE À LA FENÊTRE=: Condamné à mort qui passe la tête dans la lunette (Argot des voleurs). =METTRE LA CLEF SOUS LA PORTE=: Se sauver, déménager furtivement. Se dit communément d’un commerçant, qui, ne faisant pas ses affaires, abandonne sa boutique (Argot du peuple). =METTRE LA CLEF SOUS LE PAILLASSON=: =V.= _Mettre la clef sous la porte_. =METTRE LES BOUCHÉES DOUBLES=: Se dépêcher de faire quelque chose. Synonyme de manger un morceau sur le pouce, à la hâte. Cette expression est employée pour tout ce qui est fait précipitamment (Argot du peuple). METTRE DU PAPIER DANS SA SONNETTE: =V.= _Affaler son grelot_. =METTRE SUR LES FONDS DE BAPTÊME= (Se): Quand le _nourrisseur de poupard_ a mal renseigné ses complices et qu’ils sont dans une position difficile, pour se sauver et n’être pas _paumés marrons_: —Ils sont sur _les fonds de baptême_ (Argot des voleurs). =METTRE UNE ÉPINGLE À SA CRAVATE=: S’enfiler un demi-setier (Argot du peuple). _N._ =MEULARD=: Veau. Allusion à la mollesse de la viande. On dit aussi: un _bœuf en bas âge_ (Argot du peuple). _N._ MEULE: Vide. C’est _veule_ qu’il faudrait dire, _veule_ signifie _mou_. _Meule_ est une corruption (Argot des souteneurs). _N._ =MEUNIER=: Recéleur qui a la spécialité d’acheter aux _mastardiers_ ou voleurs de _gras double_, le plomb, l’étain ou le zinc, volés dans les maisons en construction (Argot des voleurs). =MEZIGUE=: Moi. On dit aussi _mezigo_ (Argot des voleurs). =MICHÉ=: Homme qui monte avec une fille, en payant, ou qui y couche. _Miché_ était déjà connu en 1764. Merard de Saint-Just dit ceci: D’où vient qu’on appelle _miché_ Quiconque va de nuit et se glisse en cachette Chez des filles d’amour, Barbe, Rose ou Fanchette? (Argot des souteneurs). =MICHÉ DE CARTON=: Homme à qui une fille demande cinq louis et qui lui offre quarante sous. On dit aussi: _miché à la mie de pain_ (Argot des filles). =MICHETON=: Petit _miché_ qui rale sur le prix des faveurs des filles (Argot des souteneurs). =MIE DE PAIN=: Moins que rien. Les typos, par la grande habitude, savent, du premier coup d’œil, discerner un bon article d’un mauvais. Le mauvais, c’est de la _mie de pain_ (Argot d’imprimerie). =MIE DE PAIN=: Pou. On sait combien une _mie de pain_ est désagréable sur la peau; le _pou_ occasionne une démangeaison semblable (Argot des voleurs). =MIJOU= (Faire le): Simuler une maladie (Argot des voleurs). =MILLED=: Billet de mille francs (Argot des voleurs). _N._ =MILLERIE=: Loterie que tiennent les camelots dans les fêtes publiques (Argot des camelots). =MINCE=: Rien. Mais, dans le peuple, cette expression sert à manifester l’étonnement. —Ah! _mince_ alors, elle en a une nichée dans la paillasse (Argot du peuple). =MINETTE=: =V.= _Descendre à la crèmerie_. =MINISTRE DE L’INTÉRIEUR=: Doigt. Allusion à une coutume très en usage dans les couvents de jeunes filles (Argot du peuple). =MIOU=: Enfant. Allusion au _miaou_ du jeune chat (Argot du peuple). =MIRADOU=: =V.= _Mirante_. =MIRANTE=: La glace (Argot des voleurs). =MIRETTES=: Les yeux (Argot des voleurs). =MIROIR À PUTAINS=: Joli garçon qui s’en croit beaucoup, une espèce de «Nicolas» de faubourg. Dis-lui qu’un miroir à putain Pour dompter le pays latin Est un fort mauvais personnage. Cette expression était employée au temps de Scarron (Argot du peuple). =MIRQUIN=: Bonnet. —J’ai vu une _gerce_ au _raslue_ de _Saint-Lago_; elle était rudement _gironde_ avec son _melet mirquin_; il y manquait un _rayon de miel_ (Argot des voleurs). _N._ =MIRZALES=: Boucles d’oreilles (Argot des voleurs). =MISE-BAS=: Quand une équipe de compositeurs est mécontente pour une raison ou pour une autre, elle _met bas_, elle quitte le travail (Argot d’imprimerie). =MISÉREUX=: Malheureux. Homme qui est dans une profonde _misère_ (Argot du peuple). _N._ =MISLOQUE=: Théâtre (Argot des voleurs). =MISTOUFLES=: Faire des misères, causer des désagréments à quelqu’un (Argot du peuple). =MITARD=: Cachot (Argot des voleurs). =MI-TEMPS=: Milieu. A. Delvau écrit _mitan_, ce n’est pas exact (Argot du peuple). =MITRE=: Cachot. Allusion à la _mitre_ de l’évêque, qui est un signe de dignité. Être au cachot, pour un voleur, est un titre à la considération de ses pareils. —Où donc est Barbe-à-Poux? —Il est _mitré_ pour huit _jornes_ (Argot des voleurs). =MOINE=: Qu’une épreuve typographique soit faite à la brosse ou à la machine, la partie qui ne prend pas l’encre se nomme un _moine_ (Argot d’imprimerie). =MOISSONNEUR=: Le commissaire de police. En effet, il _moissonne_ ceux qui sont amenés à son _burlingue_. Mot à mot: il les _fauche_ comme des blés mûrs... pour la prison (Argot des voleurs). =V.= _Quart d’œil_. =MOLARD=: Cracher des mucosités qui filent comme du macaroni. _Graillonner_ salement. Quand un large crachat s’étale sur un trottoir, on dit: —Quel beau _molard_ (Argot du peuple). =MOLETTE=: La bouche. Je ne vois pas bien qui a pu donner naissance à cette expression. La _molette_ sert à un éperon, elle sert aussi à couper la pâte pour une certaine espèce de gâteau; enfin, quoi qu’il en soit, ce mot est usuel (Argot des voleurs). _N._ =MOME=: Petit. On appelle aussi une femme la _môme_. Il y en a de célèbres: la _Môme-Fromage_, la _Môme-Goutte-de-Sperme_, la _Môme-Caca_. On dit aussi _momaque_ (Argot du peuple). _N._ =MOME D’ALTÉQUE=: Jeune homme beau et efféminé que l’on rencontre vêtu d’un _ça ne te gêne pas dans le parc_ (veston), d’un pantalon collant gris clair, d’une cravate voyante à larges bouts, et maquillé la plupart du temps. On le rencontre dans la galerie d’Orléans, au Palais-Royal, ou au passage Jouffroy. Ce n’est pas l’omnibus qu’il attend. On les nomme aussi _chouard_, en souvenir du fameux procès Germiny (Argot du peuple). _N._ =MOMIGNARD=: Diminutif de _môme_. Petit enfant (Argot des voleurs). =V.= _Abéqueuse_. =MOMINETTE=: Absinte servie dans un petit verre mousseline. Allusion à la petitesse, du verre, qui est un _môme_, en le comparant à un grand verre (Argot du peuple). _N._ =MONSEIGNEUR= (Pince): Outil qui sert spécialement, à fracturer les portes; il est tout spécialement employé par les _cambrioleurs_. Cet outil en acier mesure 45 centimètres de hauteur et 25 millimètres de circonférence. Il est connu depuis le XVIII^e siècle. C’était un des principaux instruments dont se servait le légendaire Cartouche (Argot des voleurs). =MONTANT=: Pantalon. Il _monte_ en effet le long des jambes. Le _montant_ à _pattes d’éléphant_ est, depuis des années, le signe distinctif des citoyens _à trois ponts_ (Argot des souteneurs). =V.= _Falzar_. _N._ =MONTANTE=: Échelle. L’image est frappante. Quand, autrefois, l’échafaud était élevé de treize marches que le condamné devait gravir, on nommait les marches la _montante du calvaire_ (Argot des voleurs). _N._ =MONTE EN L’AIR=: Les cambrioleurs. Ils sont ainsi nommés parce que ces voleurs opèrent généralement dans les chambres de domestiques situées aux étages supérieurs. Ils _montent en l’air_ (Argot des voleurs). _N._ =MONTER UN BATEAU=: Faire croire à une affaire imaginaire; présenter à des niais un projet de mise en actions pour exploiter une fonderie de pavés ou une filature de pains de sucre. _Monter un bateau_, synonyme de _monter le coup_ (Argot du peuple). _N._ =MONTER LE VERRE EN FLEUR= (Se): Se _monter le coup_ à soi-même. S’illusionner sur toutes choses. S’imaginer être aimé par désintéressement. En un mot, croire que c’est arrivé. —Mon _miché_ qui s’est _monté le verre en fleur_ que j’y allais de mon voyage, faut-y qu’il soit _poire_ (Argot du peuple). _N._ =MONTER LE JOB= (Se): Se monter le coup. Croire que c’est arrivé ou vouloir le faire croire à un autre (Argot du peuple). =MONTER À L’ÉCHELLE=: Être guillotiné. Mot à mot: monter à l’échelle de l’échafaud. _L. L._ _Monter à l’échelle_ a une toute autre signification dans le peuple; cela veut dire: faire mettre quelqu’un en colère. —Il a la _tête près du bonnet_, il s’enlève comme une _soupe au lait_. On dit aussi: —Il a un si sale caractère qu’il _grimpe_ à tout bout de champ (Argot du peuple). _N._ =MONTER UN SCHTOSSE=: Mentir. Synonyme de _monter le coup_ à quelqu’un. _Stoss_ en allemand veut dire _coup_. Ce mot s’est francisé et court les ateliers. —Pour faire le lundi et ne pas avoir son _sac_, on _monte un schtosse_ au patron en lui disant que l’on va à l’enterrement de son père. Il en est qui ont enterré leur père autant qu’il y a de jours dans l’année (Argot du peuple). _N._ =MONNAIE DE SINGE=: Une monnaie qui n’a pas cours à la Banque de France, car les garçons de recette n’accepteraient pas des _grimaces_ en paiement (Argot du peuple). =MONTRETOUT= (Aller à): Quand les filles vont au dispensaire, tous les quinze jours, pour passer la visite sanitaire, elles _montrent tout_ au docteur (Argot des filles). =MORACE=: Cri. —Si le _pante morace_ et que les _becs de gaz_ accourent, _lingre_ le pour ne pas être _paumé_ (Argot des voleurs). _N._ =MORBAC=: Moutard désagréable. _Morbac_, diminutif de _morpion_ (Argot du peuple). =MORCEAU DE GRUYÈRE=: Individu grêlé dont le visage est percé de trous comme une passoire. _Morceau de gruyère_ est une allusion aux innombrables trous dont ce fromage est percé (Argot du peuple). _N._ =MORDANTE=: Lime. On dit d’un individu fielleux, qui ne peut prononcer une parole sans dire une méchanceté, qu’il est _mordant_ comme une _râpe_ (Argot des voleurs). =MORFE=: Repas. _Refaite_ du matin, déjeuner. _Refaite_ du jorne, dîner. _Refaite_ de sorgue, souper. _Refaite_ exprimé bien l’action de se _refaire_ l’estomac. _Morfer_ est ici pour manger (Argot des voleurs). =MORFIALLER=: Manger. Vieux mot employé par Rabelais au _Propos des Beuveurs_. Où diable les escarpes ont-ils été dénicher cette expression? (Argot des voleurs). =MORFILLER LE DARDANT= (Se): Se faire du mauvais sang, _se manger le cœur_. _A. D._ _Morfiller_ veut bien dire _manger_, mais _dardant_ signifie _amour_. C’est _morfiller_ le _vermeil_ (sang) ou le _palpitant_ (cœur) (Argot des voleurs). =MORLINGUE=: Porte-monnaie. D’aucuns disent _morningue_. Il serait plus juste de dire _morniflingue_, puisque _mornifle_ veut dire _monnaie_ (Argot des voleurs). _N._ =MORNANTE=: Bergerie (Argot des voleurs). =MORNIFFLE=: Gifle. —Je vais te _plaquer_ une _morniffle_ sur la _hure_ si tu m’emmerdes longtemps (Argot du peuple). =V.= _Giroflée à cinq feuilles_. =MORNIFFLEUR=: Fabricant de fausse monnaie, argent, or, ou billets de banque (Argot des voleurs). =MORNOS=: La bouche. Manger une _bouchée_, avaler une _mornée_ (Argot des voleurs). =MORPION=: Insecte qui occasionne des démangeaisons fort désagréables. Par analogie, on dit de quelqu’un dont on se débarrasse difficilement: —Il colle comme un _morpion_. On dit également: _mille pattes_ (Argot du peuple). =MORUE=: Terme employé par les femmes des halles pour répondre aux _raleuses_ qui leur offrent un prix dérisoire de leurs marchandises. —Va donc, _morue_, faudrait-y pas te foutre du beurre avec et te le porter à ton _poussier_ (Argot du peuple). =MOU COMME UNE CHIQUE=: Homme de peu de consistance, sans volonté, qui travaille _mollement_. Allusion au morceau de tabac que le _chiqueur_ a mâché toute une journée: il est _mou_. De là, _mou comme une chique_ (Argot du peuple). =MOU POUR TON CHAT=: Quand on regarde avec insistance une jolie fille et que cela ne lui plaît pas, elle répond: —Ça, mon vieux, c’est pas du _mou pour ton chat_. D’aucunes, plus expressives, disent: —Tu peux regarder, c’est pas de la _viande pour ton serin_ (Argot du peuple). _N._ =MOUCHARDE=: La lune. Elle se montre souvent fort mal à propos pour déranger messieurs les voleurs dans leurs expéditions nocturnes (Argot des voleurs). _N._ =MOUCHE=: Laid, bête, ridicule. —Elle est _rien mouche_, la _môme_ à Poil-aux-pattes (Argot du peuple). =MOUCHES= (Tuer les): On dit de quelqu’un qui a une haleine infecte: —Il _tue les mouches_ à quinze pas (Argot du peuple). =V.= _Pot de chambre cassé dans l’estomac_. =MOUCHER LE QUINQUET= (Se faire): Recevoir une verte correction, une formidable volée (Argot du peuple). =MOUCHIQUE=: Laid à faire peur. Vient du mot russe _mejiks_ (Argot du peuple). _N._ =MOUCHIQUE À LA SECTION=: Mal noté dans son quartier. Quartier est synonyme de section, depuis la division des arrondissements en _sections_ pour les votes (Argot du peuple). _N._ =MOULE À GAUFRE=: Individu dont le visage a été ravagé par la petite vérole. Allusion au moule employé par les _gaufriers_ (Argot du peuple). _N._ =MOULE À PETS=: Homme qui se lâche facilement. Dans le peuple on dit: —Avec un vent pareil, il va pleuvoir de la merde. On dit également: —Si on chante comme ça à ton enterrement, il y aura plus de cochons que de curés (Argot du peuple). _N._ =MOULE EST CASSÉ= (Le): Se dit d’un personnage exceptionnel, inimitable. _L. L._ Cette expression n’est pas prise dans ce sens parmi le peuple; elle est employée pour dire d’une femme qui a passé l’âge, qui ne _marque_ plus, qu’elle ne peut plus faire d’enfants: le _moule est cassé_ (Argot du peuple). _N._ =MOULIN=: Boutique du recéleur. C’est pour cette raison, sans doute, que l’on nomme le recéleur, le _meunier_ (Argot des voleurs). _N._ =MOULIN À MERDE=: La bouche. En mangeant, elle travaille pour Richer (Argot du peuple). =MOULIN À PAROLES=: Femme bavarde qui ne tarit pas, qui parle avec volubilité. Elle broie les paroles comme le _moulin_, le café (Argot du peuple). =MOULIN À VENT=: Le derrière. Dans la _Chanson du Propriétaire_ on trouve: _Moulin_ à eau par devant, _Moulin_ à vent par _derrière_. (Argot du peuple). _N._ =MOUILLANTE=: La soupe (Argot du peuple). =V.= _Laffe_. =MOUSCAILLE=: La marchandise que l’on abandonne avec satisfaction dans les châlets de nécessité. _Mouscailler_: faire ses besoins (Argot du peuple). =MOUSQUETAIRE GRIS=: Pou. Allusion à la couleur de cet horrible animal que pourtant certains adorent. Un amateur marchande un pou à un chiffonnier; il lui offre d’un pou magnifique un prix dérisoire. L’éleveur le remet délicatement dans sa chemise en lui chantant le refrain célèbre: Tu n’en veux pas! J’l’remets dans ma chemise. Ça n’mange pas d’pain. (Argot du peuple). _N._ =MOUSSANTE=: Bière (Argot du peuple). =MOUSSERIE=: Fosse d’aisance des prisons (Argot des voleurs). =MOUSTIQUE DANS LA BOÎTE AU SEL=: =V.= _Asticot dans la noisette_. =MOUTON=: Dénonciateur qui vend ses complices. Prisonnier qu’on place dans une cellule avec un autre prévenu pour le _moutonner_. C’est-à-dire le faire avouer dans la conversation (Argot des voleurs). =MOUTON=: Matelas. Quand il est plus que plat, on dit: _galette_ (Argot du peuple). =MOUVETTE=: Indicateur qui fournit des _indications_ à la police. C’est généralement un _camelot_; il se _meut_ d’un point à un autre, suivant les cas (Argot des voleurs). _N._ =MUETTE= (Avoir une puce à la): Condamné qui a des remords. On dit aussi: jouer à la _muette_ (ne pas parler) (Argot du peuple). =MUFFÉE= (En avoir une): S’être _empiffré_ jusqu’à en étouffer. Avoir une soulographie numéro un. _Muffée_: n’en plus pouvoir (Argot du peuple). _N._ =MUFFLE=: Communément, ce sont les _maçons_ qu’on appelle ainsi. La chanson dit: Tous les muffles que nous connaissons Ne sont pas à la grève. En effet, il y a plusieurs genres de _muffles_: Tout individu qui se conduit mal avec quelqu’un est un _muffle_. _Muffle_ est synonyme de _goujat_ (Argot du peuple). =MURON=: Sel. _Muronnière_: la salière (Argot des voleurs). =MUSETTE= (S’en faire jouer un air): Expression employée dans les maisons de rendez-vous pour désigner un certain travail très estimé des écoliers (Argot des filles). =MUSETTE= (Couper la): Empêcher quelqu’un de parler. On dit aussi: _lui couper la chique_ (Argot du peuple). =MUSICIEN=: =V.= _Mouton_. N =NAZ=: Nez. On dit aussi _nase_. C’est certainement une abréviation de _naseau_ (Argot du peuple). =NE PAS ATTACHER SON CHIEN AVEC DES SAUCISSES=: Avare. C’est une expression très populaire, superlatif de _chien_, _grippe-sous_. On ne peut rien dire plus d’un homme (Argot du peuple). _N._ =NE RIEN AVOIR DANS LE FUSIL=: Avoir le ventre vide. L’allusion est facile à saisir: J’sens l’paquet d’tripes qui s’cavale. (Argot du peuple). =NEG AU PETIT CROCH=: Chiffonnier. _Neg_ est une abréviation de _négociant_, et _croch_ de _crochet_, outil indispensable aux chiffonniers (Argot du peuple). =NÈGRE=: Heure de minuit, à laquelle l’obscurité est la plus profonde (Argot des voleurs). =NÉGRESSE=: Puce. Allusion de couleur (Argot du peuple). =NÉGRESSE=: Bouteille. —Allons-nous _étouffer_ une _négresse_ de _ginglard_ à Argenteuil? (Argot du peuple). =NEP=: Rastaquouère vendant aux imbéciles des décorations exotiques (Argot des voleurs). =NETTOYÉ=: N’avoir plus rien, être absolument à sec. _Nettoyé_, être à l’agonie, se sentir mourir. —Le médecin m’a dit que j’étais _nettoyé_ (Argot du peuple). =NEZ CULOTTÉ=: Nez d’ivrogne. Dans le peuple on dit: —Si on lui pressait le piton il en sortirait du vin. Le _nez culotté_ a été célébré par Ch. Colmance: Un _nez culotté_, Piquante parure, Gracieuseté De dame nature. Heureux l’effronté doté D’un _nez culotté_. Il y a des _nez culottés_ qui coulent plus cher que s’ils étaient en or (Argot du peuple). =NEZ RETROUSSÉ=: Nez à narines larges et ouvertes. —Il va te pleuvoir dans le _nez_. —Elle se pleure dans le _nez_ quand elle a du chagrin (Argot du peuple). =NIB=: Signifie rien. Cette expression n’est pourtant pas toujours prise dans ce sens. Quand on dit: _nib de blaire_, par exemple, pour qualifier un nez énorme, _nib_ devient synonyme de _mince_ qui veut dire beaucoup (Argot du peuple). _N._ =NIB DE BRAISE=: Pas d’argent. —Par un _bourguignon_ pareil tu restes à la _piaule_, allons _décanille_. —_Nib de braise_, les _valades_ sont _dégraissées_ (Argot des voleurs). =NICHE À SEINS=: Corset. Allusion à ce qu’il soutient les forts, augmente le volume des faibles, discipline les vagabonds et protège les égarés (Argot du peuple). _N._ =NICHONS=: Les seins. —Laissez-moi tâter vos jolis _nichons_. —Combien qu’tu payes? (Argot du peuple). =NIÈRE=: Homme quelconque, lui. —Le _gonce_ a rudement le _trac_ pour son _nière_. On dit aussi: _mon nière bobéchon_ pour _moi_. _Bobéchon_, ici, fait double emploi (Argot des voleurs). =NIF=: Non (Argot des voleurs). =NIPPÉ=: Bien habillé. —J’avais plus rien, les _requins_ m’avaient _bazardée_ pour payer mon _probloque_, j’ai _dégotté_ un _miché_ qui m’a _renippée_, à présent je suis _rupine_ je peux _trimarder_ (Argot du peuple) =NIQUE DE MÈCHE=: N’avoir pas de complice. —J’ai fait mon _coup de vogue_ sans _nique de mèche_ (Argot des voleurs). =NIQUE DE MÈCHE=: Refus d’un complice de partager le produit d’un vol. —_Nique de mèche, je ne fade pas le pognon_ (Argot des voleurs). =NIORTE=: Viande (Argot des voleurs). =V.= _Crigne_. =NOCE DE TAILLEUR=: (Faire une): Se promener le long des berges et faire des ronds dans l’eau avec des cailloux (Argot du peuple). _N._ =NOIX= (En avoir): Avoir beaucoup de bijoux (Argot des voleurs). =NONNE= (Faire): Faire la foule. Rien de plus simple: les _nonneurs_ (complices) se groupent autour de l’un d’eux, qui simule un mal subit, de préférence dans une rue barrée; les badauds s’amassent, le _tireur_ peut à l’aise explorer les poches, et souvent la moisson est féconde. Quand l’un d’eux est pris et qu’il se _met à table_, on dit qu’il _mange sur ses nonneurs_ (complices) (Argot des voleurs). =NONNEURS=: Complices de voleurs, plus particulièrement des pick-pockets (Argot des voleurs). =NORD=: Tête. Dans le peuple, on dit souvent de quelqu’un qui devient fou: —Il perd le _nord_ (Argot du peuple). =NOZIÈRES=: Qui? (Argot des voleurs). _N._ =NOURISSEUR DE POUPARDS=: Complice qui prépare les vols à accomplir. Un bon _nourrisseur de poupards_ est très recherché par les voleurs (Argot des voleurs). =NOUSAILLES=: Nous. _Nosigues_ est beaucoup plus usité (Argot des voleurs). =NOUVELLE= (La): Le bagne. Abréviation de _Nouvelle Calédonie_. Autrefois, quand les bagnes étaient à Brest et à Toulon, on disait le _grand pré_. —Il est _sapé à faucher le grand pré à perpète_ (Argot des voleurs). =NOYEUSE D’ÉTRONS=: Mère de famille qui va au lavoir public laver le linge de ses enfants. Allusion aux déjections des bébés qui souillent les couches (Argot du peuple). =NUAGE=: La tournure, que portent les femmes; ainsi nommé parce qu’il cache la _lune_ (Argot du peuple). _N._ O =ŒIL À LA COQUE=: Recevoir sur l’œil un formidable coup de poing qui le poche et en fait un _œil au beurre noir_. La violence du coup fait extravaser le sang et le lendemain, l’œil est couvert par une large tache noire. On appelle alors le blessé: _tape à l’œil_ (Argot du peuple). =ŒIL EN COULISSE=: Regarder quelqu’un amoureusement, tendrement, avoir l’air de lui dire: —Veux-tu? _Faire le genou_ à sa voisine sous la table, est aussi significatif et beaucoup moins visible, surtout si le mari est là (Argot du peuple). =ŒIL QUI DIT MERDE À L’AUTRE=: Deux yeux qui ne vivent pas en bonne intelligence, qui se regardent en _chiens de faïence_ (Argot du peuple). =V.= _Guigne à gauche_. =ŒIL= (Faire de l’): Les filles font de l’_œil_ aux passants qu’elles veulent raccrocher: Ses deux beaux chasses vous _rembroquaient_ Puis à la piaule tous les gonces rappliquaient, dit la _chanson du marlou_ (Argot des filles). =ŒIL= (Faire l’): Avoir à crédit chez les fournisseurs. Dans le peuple, quand on _oublie_ de payer, le fournisseur refuse crédit; alors on dit que l’_œil_ est crevé (Argot du peuple). =OGRESSE=: La procureuse ou la proxénète, bouquetière ou marchande à la toilette; elle donne cent sous aux filles quand elle touche vingt francs, elle leur vend mille francs ce qui vaut cent francs. Mot à mot: l’_ogresse_ les mange toutes crues (Argot des filles). =OGRESSE=: Femme friande de chair fraîche appartenant à son sexe (Argot des filles). =V.= _Accouplées_. =OIGNON (L’)=: Il s’appelle aussi _trou de balle_ (Argot des souteneurs). =V.= _Figne_. _N._ =OIGNON=: Montre énorme. Argot du peuple qui dit: _ognon_. —Ton _ognon_ marque-t-il l’heure et le linge? (Argot du peuple). =OISEAU=: Hélas! quand il est envolé c’est pour longtemps et les regrets si amers qu’ils soient sont superflus. Heureux encore s’il ne laisse pas un petit dans la cage. —Elle a perdu son _oiseau_ (Argot du peuple). _N._ =OLIVIER DE SAVETIER=: Navet. Comme ils sont économes pour la plupart, ils se servent de l’huile de _navette_ qui se vend bon marché pour assaisonner leur salade. C’est exactement la même chose que pour les pommes de terre; on dit des _oranges de limousins_ (Argot du peuple). =OMNIBUS=: Femme à tous. On dit aussi: _wagons_ et _omnibusardes_. Fréquemment, ces _omnibus_ là donnent une correspondance pour l’hôpital du Midi (Argot du peuple). =OMNIBUS À CONI=: Voiture qui emporte le guillotiné du lieu d’exécution au cimetière (Argot des voleurs). =ONCLE=: Le guichetier qui garde la première porte d’entrée d’une prison. Je ne vois pas trop pourquoi on l’appelle mon _oncle_ car il n’a guère de tendresse pour les visiteurs, à moins que ce ne soit un à peu près. Quand on va au _clou_, mon _oncle_ prend soin des objets déposés (Argot des prisons). =ONGLES CROCHES= (Les avoir): Ce sont généralement les Normands qui ont cette spécialité, car on dit très souvent d’un _grippe-sous_ que l’on pourrait le jeter au plafond qu’il ne retomberait pas. Avoir les _ongles croches_ est synonyme de _poser zéro_ et de _retenir tout_ (Argot du peuple). =ORANGER DE SAVETIER=: Pied de _sarriette_, que les savetiers placent dans leur échoppe à côté d’eux (Argot du peuple). =ORDINAIRE=: La soupe et le bœuf que les ouvriers mangent le matin. Comme presque toute l’année c’est la nourriture _ordinaire_, de là, le nom (Argot du peuple). =ORDINAIRE=: Homme habitué à venir à heure et à jour fixe chez une fille. C’est un protecteur intermittent (Argot des filles). =ORGUE=: Homme. _Mon orgue_, moi. _Ton orgue_, toi. _Son orgue_, lui. _Leur orgue_, eux. (Argot des voleurs). =ORGUE= (Jouer de l’): Ronfler. Il ronfle comme un tuyau d’_orgue_. Il ronfle comme une _toupie d’Allemagne_. Allusion au ronflement sonore que fait la toupie en tournant sur elle-même (Argot du peuple). =ORNICHON=: Oie, volaille. Les voleurs qui ont la spécialité de dévaliser les poulaillers dans les campagnes se nomment des _nettoyeurs d’ornichons_ (Argot des voleurs). =V.= _Angluce_. =ORNIE DE BALLE=: Dindon (Argot des voleurs). =ORPHELIN DE MURAILLE=: Les étrons qui s’alignent le long des murs isolés. Pourquoi _orphelins_? Ils sont parfois en nombreuse société et beaucoup ne peuvent être pris pour des vagabonds étant munis de papiers (Argot du peuple). =ORPHELIN=: Bout de cigare ou de cigare que le fumeur abandonne dédaigneusement. Ils sont aussitôt recueillis par le ramasseur de _mégots_ qui leur _fait un sort_ (Argot du peuple). =ORPHELIN=: Verre de vin à moitié bu que le buveur abandonne sur le comptoir du mastroquet. Quand un consommateur boit seul sans trinquer, il _étouffe un orphelin_. Dans les _bars_, il ne manque pas de Saint-Vincent-de-Paul pour les recueillir (Argot du peuple). =OSEILLE=: _La faire à l’oseille_. Jouer un tour désagréable à quelqu’un. _A. D._ Il attribue ce mot à un cabotin habitué d’une petite gargote de la rue de Malte où mangeaient les artistes des théâtres du boulevard et du Temple. Selon lui, ce mot date de 1861 environ. Comme cette locution: _la faire à l’oseille_ est très répandue, il est bon de rétablir son origine. Le petit père Vinet, mort il y a deux ans dans un taudis de la rue de Tourtille, à Belleville, était vers 1840 un chansonnier en vogue. Il avait été _sauvage_ au _Caveau des Aveugles_, au Palais-Royal, avant le père Blondelet; il mangeait dans la gargote citée par Delvau. La gargote était non rue de Malte, mais rue de la Tour. Un après-déjeuner, il composa une chanson intitulée: _Vous me la faites à l’oseille_. Bouvard, l’_homme à la vessie_ la chantait encore en 1848, place de la Bastille. Voici un couplet de cette chanson: Comme papa j’suis resté garçon Pour bonne j’ai pris Gervaise. Elle est maîtresse à la maison Je la _trouve mauvaise_ De la cave au grenier La danse du panier Que c’est une merveille. Elle mange à son goût Mes meilleurs ragoûts, _Vous me la faites à l’oseille_. Comme on le voit, il y a plus de cinquante ans que l’on connaît cette expression (Argot du peuple). _N._ =OS=: Argent, or ou monnaie. —J’ai de l’_os à moelle_ dans ma poche (plusieurs pièces de cent sous) (Argot du peuple). =OSEILLE=: Argent (Argot du peuple). =V.= _Aubert_. =OSEILLE= (La faire à l’): Réussir un bon vol qui a été bien nourri. _Sûrement_ c’est la _faire à l’oseille_ à celui qui a été dévalisé. Les voleurs sont quelquefois facétieux (Argot des voleurs). =OSSELETS=: Les cinq doigts. Les gamins jouent un jeu qui se nomme _osselet_ avec des _os_ de pied de mouton (Argot du peuple). =V.= _Apôtres_. =OURLER LE BEC=: Besogne terminée. Quand un ouvrier graveur met sa signature au bas de sa planche ou de son bois, le _bec est ourlé_ (Argot d’atelier). =OURS=: Homme sombre, triste. Dans les ateliers, on dit d’un ouvrier qui fuit ses camarades: c’est un _ours_. En réalité, _ours mal léché_ est synonyme de _mufle_ (Argot du peuple). =OURS=: Mauvais livre qui reste pour compte à l’éditeur. Mauvais manuscrit de pièce qui dort dans les cartons du directeur. En un mot, tout ce qui ne vaut rien, qui est raté, est un ours (Argot du peuple). =OURS= (En poser un): Quitter sa casse pour _raser_ un _copain_; la séance se prolongeant, les camarades crient: —_Mince d’ours_ (Argot d’imprimerie). =OURSER=: Il est très difficile d’expliquer le sens brutal de ce mot autrement que comme ceci: Mari qui remplit ses devoirs conjugaux comme un _ours_ (Argot du peuple). _N._ =OUTIL=: Vieille femme. Objet de rebut qui ne peut servir à aucun usage. Terme de mépris fréquemment employé: —Sale _outil_ (Argot du peuple). =OUTIL DE BESOIN=: Femme ou fille. Elles ne deviennent _outil_ que par l’habitude de la cohabitation. Un souteneur qui n’a pas de poigne pour défendre sa _marmite_ est également un _outil de besoin_... jusqu’à temps qu’elle en trouve un autre (Argot du peuple). =OUVRIR SA SOUPAPE=: Péter bruyamment. Allusion à la _soupape_ de la chaudière qui se soulève pour laisser échapper la vapeur quand la pression est trop haute. On crie à celui qui s’oublie aussi fort: —Ferme ta _soupape_, ça pue (Argot du peuple). _N._ =OUVRIR SA TABATIÈRE=: Péter. Par allusion à l’odeur, on dit: Quelle rude _prise_! On en prend plus avec son nez qu’avec une pelle (Argot du peuple). _N._ P =PAF=: Cette expression désigne l’objet qui distingue l’homme de la femme. Ce sont les voyous qui ont inventé le mot. Quand un tenancier d’une maison de tolérance se retire des affaires et qu’il se fait construire une maison à la campagne, s’il éprouve, par vanité, le besoin de mettre au fronton de sa maison un écusson, il peut y ajouter cette devise qui explique le mot _paf_: _Pene erexit domum_ (Argot du peuple). _N._ =PAF= (Être): Être gris. —Je me suis _paffé_ hier soir que c’en est dégoûtant. —_Paf_, ça y est. Chose accomplie. Synonyme de: J’en ai mon pied (Argot du peuple). =PAFFS=: Souliers. C’est à peu près le meilleur mot d’argot pour désigner le bruit que fait le marcheur ou frappant le sol du pied. C’est une image: _paff! paff!_ (Argot du peuple). =PAGNE=: Lit. Allusion au _pagne_ qui entoure la taille des sauvages; les draps cachent également la nudité de l’homme et de la femme (Argot du peuple). _N._ =PAGNE=: Provision. On n’les but’plus, car c’est un mauvais flanche, Y en a toujours qui sont paumés marrons, Mais sans r’niffler, pour eux on fait la manche, On leur envoie le _pagne_ au violon. (Argot des voleurs). =PAGNOTER= (Se): Se coucher. Malgré le double emploi, on dit dans le peuple: —Je vais me _pagnoter_ dans mon _pieu_ avec mes _dardants_ (Argot du peuple). =PAILLASSE=: Femme. Un homme se promène, sa femme au bras; il est rencontré par un ami: —Tiens, tu déménages, Charlot? —Pourquoi donc? —Puisque t’as ta _paillasse_ sous le bras (Argot du peuple). =V.= _Boulet_. =PAILLASSE À SOLDAT=: Femme sur laquelle tout un régiment couche. Mot à mot: qui sert de _paillasse_ (Argot du peuple). _N._ =PAILLASSE=: Pitre qui fait le boniment devant les baraques de saltimbanques. _Paillasses_: les hommes politiques qui servent tous les gouvernements, pourvu qu’ils paient. Paillass’, mon ami, N’saut’ pas à demi. Saute pour tout le monde. (Argot du peuple). =PAILLE= (C’est une): Signe d’étonnement qui veut dire beaucoup, trop gros fardeau à porter: C’est une _paille_ que de porter ça là bas (Argot du peuple). _N._ =PAILLE AU CUL= (Avoir la): Être mis à la réforme. _L. L._ S’en aller la _paille au cul_, c’est quitter le régiment en ayant encore de la salle de police ou de la prison à faire. Allusion à la paille sur laquelle couchent les prisonniers (Argot des troupiers). _N._ =PALABRE=: Discours ennuyeux, prudhommesque. _A. D._ _Palabra_, en langue espagnole, signifie _parole_, il est vrai, mais ce n’est pas le sens dans le langage populaire. _Palabre trembleuse_: figure de bourgeois qui tremble à propos de rien, qui a peur de son ombre, qui se cache au moindre bruit. _Palabre_ signifie _figure_: —Le _biffard_ a tellement la _frousse_ que sa _palabre défargue_ (Argot du peuple). _N._ =PALAIS=: Pièce de cinq francs. Allusion à la forme plate du _palais_ qui sert pour jouer au tonneau (Argot du peuple). =V.= _Tune_. =PALLAS=: Discours. —Tu ne vas pas bientôt nous lâcher le coude avec ton _pallas_ à dormir debout. —Viens-tu entendre le _bénisseur_, il va _pallasser_ sur la tombe de son ami (Argot des voleurs). =PALLASSEUR=: Individu qui parle d’abondance, longuement, sur tout ce qu’il ne sait pas. —Gare aux inondations! le _pallasseur_ a ouvert son robinet (Argot du peuple). =PALPEUR=: Juge d’instruction. Il _palpe_ en effet les prisonniers pour les faire avouer. Cette expression est plus jolie que l’ancienne: _curieux_ (Argot des voleurs). _N._ =PALPITANT=: Le cœur (Argot des voleurs). =V.= _Grand ressort_. _N._ =PAMPINE=: Sœur de charité (Argot des voleurs). =PANAMISTE=: Cette expression date de 1892. Ce sont les dénonciations faites par M. Andrieux contre les 104 députés qui auraient touché des chèques à la caisse du _Panama_ qui ont donné naissance à ce mot (Argot du peuple). _N._ =PANADE=: Soupe de pain qui mijote lentement sur un feu doux. Dans le peuple, être dans _la panade_, c’est être dans la misère. Allusion à ce que _la panade_ est généralement faite avec des croûtes de pain (Argot du peuple). _N._ =PANAIS=: Pan de chemise. Être en _panais_, être en chemise. Dans le peuple, _panais_ est employé comme négation. —Veux-tu me prêter cent sous? —Des _panais_, tu te fouterais de ma _fiole_ (Argot du peuple). _N._ =PANIER=: Lit. —Mon petit homme, veux-tu venir avec moi faire une séance de _panier_, tu verras comme je suis aimable (Argot des filles). =PANIER À SALADE=: Voiture cellulaire pour conduire les prisonniers des postes de police au Dépôt de la préfecture, ainsi nommée parce qu’autrefois cette voiture était à claire-voie (Argot des voleurs). =PANIER À DEUX ANSES=: Avoir une femme à chaque bras (Argot du peuple). =PANIER PERCÉ=: Homme qui n’a rien à lui. Allusion au panier sans fond que jamais on ne peut emplir (Argot du peuple). =PANSU=: Terme de mépris employé par le peuple pour qualifier un bourgeois qui fait un dieu de son ventre et qui a une _panse_ arrondie. _Pansu_: égoïste qui ne songe qu’à lui (Argot du peuple). _N._ =PANTIN=: Paris. Quand on a bien _billanché_ pour son compte, On _défourage_ et _renquille_ à PANTIN. L’long du _trimard_, _bequillant_ son décompte, De gueule en gueule on _pique_ un gai refrain. _Pantin_: Argot du peuple. _Pantruche_: Argot des voleurs. =PANTE=: Imbécile qui se laisse facilement duper. Inutile, je pense, de dire que _pante_ vient de _pantin_: gens de _Paris_ (Argot des voleurs). =PANTRE ARGOTÉ=: Imbécile de la pire espèce, plus bête que ses pieds; être facile à tromper (Argot des voleurs). =PANTRE ARNAU=: Mot à mot: individu qui _renaude_, qui marronne en s’apercevant qu’il vient d’être victime d’un vol (Argot des voleurs). =PANUCHE=: Femme élégamment mise. _L. L._ _Panuche_ est la maîtresse d’une maison de tolérance (Argot des souteneurs). =V.= _Maman-maca_. =PAPILLON=: Blanchisseur de campagne (Argot des voleurs). =PAPILLON=: Vol à la _marque_. Il se pratique dans les voitures de blanchisseuses qui viennent de la campagne et confient leurs voitures à la garde d’un enfant (Argot des voleurs). =PAQUET=: Homme ou femme gros, court sur pattes, sans élégance, ressemblant à un _paquet_ de chair (Argot du peuple). =PARANGONNER=: Arranger au moyen d’interlignes des caractères de différents corps (Argot d’imprimerie). =PARAPHE= (En détacher un): Donner un soufflet à quelqu’un. On dit aussi: —Je vais te _poser un cachet_. _Détacher un paraphe_ est rarement employé, c’est trop long; _bègne_ vaut mieux (Argot du peuple). =PARC AUX HUÎTRES=: Mouchoir. L’allusion n’est pas tout ce qu’il y a de plus distingué, mais l’image est juste (Argot du peuple). _N._ =PARFAIT AMOUR DE CHIFFONNIER=: Eau-de-vie vendue dans les assommoirs (Argot du peuple). =PARFUMEUR=: Avocat. Mot à mot: il couvre son client de fleurs (Argot du peuple). =V.= _Blanchisseur_. =PARISIEN À GROS BEC=: Quand, dans les ateliers, un provincial fait de l’embarras, qu’il prend des airs casseurs, qu’il fait le crâne et dit: nous autres _Parisiens_, parce qu’il habite la capitale depuis six mois, on lui répond: —Tu n’es qu’un _Parisien à gros bec_ (Argot du peuple). _N._ =PARLOIR DES SINGES=: Parloir des prisons. Allusion aux trois grilles entre lesquelles sont enfermés les visiteurs et les prisonniers (Argot des voleurs). =PAROUFLE=: La paroisse. C’est un sale _parouflard_; pour sale _paroissien_ (Argot des voleurs). _N._ =PARRAIN=: Avocat. Il sert en effet de _parrain_ à l’accusé, il le tient sur les fonds baptismaux eu cour d’assises (Argot des voleurs). _N._ =PASCAILLER=: Passer. —Le _gonce_ a _pascaillé_ avant toi au _carré des petites gerbes_, il est _enflaqué_ pour dix _berges_. _Pascailler_ veut dire également prendre le tour ou la place de quelqu’un. —J’ai _pascaillé_ la _Môme Livarot_ au _Rouquin_ (Argot des voleurs). _N._ =PAS CUIT=: Un courtier demande à un libraire un livre ou une revue; s’ils ne sont pas parus, on lui répond laconiquement: _pas cuit_. Mot à mot: ils sont encore au four (en confection) (Argot des libraires). _N._ =PAS SI CHER=: Silence, parlez plus bas, on nous écoute. Expression employée dans les prisons pour signaler l’arrivée d’un gardien qui punirait les causeurs. Synonyme de: _il pleut_, employé dans les imprimeries quand le _prote_ ou le patron entre à l’atelier (Argot des voleurs). =PAS MÈCHE=: Impossible de réussir. _Mèche_ pour _moyen_. —J’ai beau la chauffer, pas _mèche_ d’y arriver (Argot du peuple). =PASSE= (Être gerbé à la): Mauvaise affaire pour celui qui est dans ce cas-là. _Être gerbé à la passe_, c’est être condamné à mort. La _passe_, c’est la guillotine (Argot des voleurs). =PASSE= (Faire une): Fille qui raccroche sur la voie publique et conduit ses clients de hasard au premier hôtel venu. Elle ne fait que _passer_. Faire une _passe_ vient aussi de faire _un passant_ (Argot des filles). =PASSE-BOURGEOISE=: Femme mariée, habituée des maisons de rendez-vous et qui, par ses _passes_, aide à faire bouillir la marmite (Argot du peuple). =PASSER À LA PIPE=: Quand un individu est arrêté et conduit dans un poste, les agents le battent. On le _passe à la pipe_. Mot à mot: il est _fumé_. Synonyme de _passer à tabac_ (Argot du peuple). =PASSER DE BELLE= (Se): Né pas recevoir sa part d’un vol ou d’une affaire. Il s’en _passe de belles_: homme qui vit, joyeusement. Mot à mot: qui _passe de belles journées_. Il s’en _passe de belles_ pour exprimer que dans tel endroit il _se passe de vilaines choses_. Il _en fait de belles_: commettre de mauvaises actions. —Il _en fait de belles_ ton vilain sujet, il crèvera sur l’échafaud (Argot du peuple et des voleurs). _N._ =PASSER DEVANT LE FOUR DU BOULANGER=: Voilà une expression qui n’est pas banale et qui est très usitée. Quand un gamin ou une gamine sont trop précoces, qu’ils ont l’esprit plus éveillé qu’il ne faudrait, on emploie ce mot. Mais il est plus typique dans ce sens. Quand une toute jeune fille _a avalé son pépin_ et qu’elle pose quand même pour la vertu, on lui dit: —Ne fais donc pas tant ta gueule, tu as _passé devant le four du boulanger_. Mot à mot, elle a vu _enfourner_ (Argot du peuple). _N._ =PASSER LE GOÛT DU PAIN=: Étrangler un individu, lui faire _passer le goût du pain_ (Argot du peuple). =PASSER DEVANT LA GLACE=: Payer. Allusion à la _glace_ qui est toujours derrière le comptoir, chez le marchand de vin (Argot du peuple). =PASSER L’ARME À GAUCHE=: Mourir (Argot du peuple). =PASSER L’ÉPONGE=: Oublier, pardonner. Mot à mot: _laver le passé_ (Argot du peuple). =PASSER À TABAC=: Cette expression est toute récente. Quand un individu est arrêté et conduit dans un poste de police, il est souvent frappé par la police, de là: _passer à tabac_ (Argot du peuple). =PASSÉ-SINGE=: Roué. _A. D._ _Singe_ ne doit pas ici être pris dans le sens de patron; _singe_ est l’animal de ce nom. _Passé-singe_, passé maître dans l’art de faire des grimaces et de se contorsionner. Synonyme de souplesse et d’agilité. —Il est donc _passé-singe_ qu’il a pu _cromper la tante_ malgré l’_oncle_ et les _barbauttiers_ (Argot des voleurs). _N._ =PASSE VANTERNE=: Échelle. Mot à mot: passer par la fenêtre (Argot des voleurs). PASSIFS: Souliers. Il en est peu, en effet, qui _résistent_ au mauvais temps, surtout depuis l’invention des semelles en cuir factice (Argot du peuple). =PASSIF=: Homme pour homme, celui qui subit. Habitué des latrines de la berge du Pont-Neuf, des bains de la rue de Penthièvre ou des pissotières des Champs-Élysées. Dans le peuple on dit: —Il va ramasser des marrons dans l’allée des Veuves. L’allusion est claire (Argot du peuple). =PATAPOUF=: Homme gros et court sur jambes, qui peut à peine souffler en marchant. Dans le peuple on dit: —Ce _patapouf_ souffle comme un phoque (Argot du peuple). =PATELIN=: Pays. Corruption du vieux mot _pasquelin_, qui signifiait la même chose (Argot du peuple). =PATINER= (Se): Se sauver. —Je me _patine_ parce que je suis en retard. Allusion aux _patineurs_ qui avancent rapidement. _Patiner_ veut aussi dire se dépêcher de terminer une besogne. —Je me _patine_ de finir ma pièce, autrement samedi pas de _galette_. _Patiner du chiffon rouge_, se _patiner_ de la _langue_: parler vite (Argot du peuple). _N._ =PATOUILLER=: Manier. —Vous n’avez pas bientôt fini de me _patouiller_ avec vos sales pattes? On _patouille_ dans un coffre-fort. On dit également _patrifouiller_. —Ce cochon de _quart d’œil_ a passé deux heures à _patrifouiller_ dans mes _frusques_ pour trouver de quoi me faire _sapé_, mais il est _grinchi_. C’était au _moulin_. _Patrifouiller_ est le superlatif de _fouiller_ (Argot des voleurs). _N._ =PATRICOTAGE=: Les danseurs _patricotent_ des jambes. On dit aussi: —Il a _patricoté_ dans la caisse. _Patricoter_ est ici pour _tricoter_ (Argot du peuple). _N._ =PAUMER=: Perdre. —Tu fais une drôle de gueule. —J’avais deux _sigues d’affaire_ et j’en _paume_ quatre, y a de quoi. —Fallait pas jouer (Argot des voleurs). _N._ =PAUMÉ=: Être pris, empoigné. Les agents arrêtent un voleur en lui mettant généralement la _paume_ de la main sur l’épaule. L’allusion est claire. Être _empaumé_: être fourré en prison (Argot des voleurs). =PAUMÉ MARRON=: _Paumé_, pris, _marron_, l’être. Je suis _marron_ signifie être _refait_. Un gogo est _marron_ dans une affaire qui rate. —On m’a pris ma place, je suis _marron_. Synonyme de _rester en panne_ (Argot des voleurs). _N._ =PAVE= (On): Rue dans laquelle on ne peut passer à cause d’un créancier (Argot du peuple). =PAYER UN HOMME= (Se): Moyen que possèdent toutes les femmes sans débourser d’argent. Cette expression est généralement employée par les femmes à caprices. —Elle se _paye autant d’hommes_ qu’elle change de chemises (Argot des filles). _N._ =PEAU COURTE= (Avoir la): Accident qui arrive à ceux qui mangent trop de haricots. Mot à mot: _péter_ (Argot du peuple). =PEAU DE LAPIN=: Nom donné aux ouvrières cartonnières: —Jamais mes _peaux de lapins ne turbinent_ le lundi (Argot du peuple). _N._ =PÉDÉRASTE=: Ce mot est trop connu pour avoir besoin de l’expliquer autrement que par ceci: homme qui commet volontairement des erreurs de grammaire et met au masculin ce qui devrait être au féminin (Argot du peuple). =PÉGOCE=: Pou. On dit aussi _gau_. _Abasourdir des gaux_: tuer les poux qui _morganent_ sur son cuir (Argot des voleurs). =PÈGRES=: Voleurs. Les _pègres_ forment deux catégories: la _haute_ et la _basse pègre_ (Argot des voleurs). =PÉGRIOT=: Petit voleur. Diminutif de _pègre_. Le _pégriot_ est d’une très grande utilité pour les _ratiboiseurs de boutanches_, qui pratiquent le vol au _radin_ (Argot des voleurs). =PEIGNER UN DIABLE QUI N’A PAS DE CHEVEUX=: Réponse d’un débiteur malheureux à un créancier obstiné (Argot du peuple). =PEIGNE-CUL=: Homme vil, bas, flatteur. Mot à mot: homme de rien. Terme de profond mépris, en usage dans les ateliers, pour qualifier un ouvrier qui donne toujours raison au patron (Argot du peuple). =PÉLAGO=: La prison de Sainte-Pélagie. Cette expression est une défiguration du mot _Pélagie_ par l’emploi du suffixe go. Ce fait se produit souvent en argot (Argot des voleurs). =PÉLO=: Sou. —Je suis dans une _dèche carabinée_, depuis une semaine je n’ai pas louché un _pélo_ (Argot du peuple). =PELOTER LE CARME=: On sait que les changeurs, pour attirer les regards, placent dans leurs vitrines des sébiles remplies d’or; les pauvres diables s’arrêtent à contempler ces richesses comme le savoyard mange son pain à l’odeur des cuisines du Café Anglais. Ils _pelotent le carme_... moralement (Argot du peuple). =PELURE=: Paletot ou veston. —_J’enquille_ ma _pelure_ à manger le rôti (Argot du peuple). =PENDARDS=: Seins qui pendent comme de vieilles vessies. Cette expression est attribuée à Talleyrand. Il assistait à la toilette d’une grande dame. Il regardait une femme de chambre lui lacer son corset; elle lui dit en minaudant: —Vous regardez mes petits coquins? —Vous pourriez dire vos grands _pendards_ (Argot du peuple). =PENDU= (Se payer un): On sait que les brocanteurs _pendent_ à leur étalage les vêtements qu’ils ont à vendre. Ils passent les manches dans un bâton, ce qui donne l’aspect des bras. Vu d’un peu loin, on jurerait un _pendu_. Se _payer un pendu_, c’est acheter ce vêtement (Argot du peuple). =PENDU GLACÉ=: Le candélabre en forme de potence qui supporte le bec de gaz. Les voleurs n’aiment pas beaucoup ces _pendus_-là. —J’ai été _paumé_ pour avoir _barbotté_ un _pante_, sans ce chameau de _pendu glacé_, je me _cavalais_ à la _frime_ du _sergot_ (Argot des voleurs). _N._ =PENDULARD=: Voleur de pendules. Les Allemands, en 1870, nous ont donné un joli échantillon de leur savoir faire dans ce genre de vol. Ce sont les _bonjouriers_ qui pratiquent ce vol, principalement dans les loges de concierges (Argot des voleurs). _N._ =PENDULE À PLUMES=: Le coq qui chante chaque matin à heures fixes. On dit également _réveil-matin_. C’en est un très économique qui n’a pas besoin d’être remonté et qui a l’avantage de pouvoir être mangé quand il a cessé de plaire (Argot du peuple). =PÉNICHES=: Souliers, lorsqu’ils sont d’une dimension démesurée (Argot du peuple). =PÉ-PÈTES=: Sous. —Ça commence à être rudement rasant, pas un _pé-pète_ à la clé (Argot du peuple). =PÉPIN=: Avoir un _pépin_, aimer quelqu’un. Se dit aussi à la poule qui se joue au billard. Quand un joueur a derrière lui un adversaire maladroit, il est protégé par un _pépin_, il est couvert. _Pépin_, par le même motif, signifie parapluie (Argot du peuple). _N._ =PERCHER=: Loger au hasard, tantôt ici, tantôt là. Allusion à l’oiseau qui _perche_ tantôt sur une branche tantôt sur une autre (Argot du peuple). =PERDRE SES BAS=: Oublier. —Tu _perds_ donc _tes bas_, que tu manques au rendez-vous que tu m’as donné? —Prêtez-moi mille francs. —Vous _perdez_ donc _vos bas_, mon vieux? Ici le sens est ironique. On dit aussi: —Tu _fais dans tes bas_. Pour: Tu te moques de moi (Argot du peuple). =PÈRE PEINARD (En)=: Y aller doucement, sans se presser, sans se faire de bile. Les agents arrivent en _Père Peinard_ pour surprendre un voleur en flagrant délit (Argot du peuple). _N._ =PERLOT=: Tabac—dérivé de _semper_. _L. L._ _Semper_ s’écrit _Saint-Père_ dans toutes les prisons. À la _centrousse_ de Melun, on chante depuis des années: Pour du tabac, disait un pègre, Et pour trois pouces de _Saint-Père_. (Argot des voleurs). =PERSIL=: Faire le _persil_, aller au _persil_: raccrocher. On n’est pas fixé sur l’origine et la valeur de cette expression. Francisque Michel la fait venir de _pesciller_; Delvau dit qu’elle a pour motif que les filles raccrochent dans les terrains vagues où pousse le _persil_; le peuple, qui ne connaît ni l’un ni l’autre, applique cette expression aussi bien aux filles de la rue qu’à celles du boulevard, parce que la fille trotte dans la boue et qu’elle a les pieds sales; or, depuis plus de cinquante ans, on dit d’une fille qui a les pieds malpropres: —Elle a du _persil dans les pieds_; de là: faire son _persil_ (Argot des souteneurs). =PERROQUET=: Absinthe. Allusion à la couleur verte de la liqueur, qui ressemble à celle du perroquet (Argot du peuple). =V.= _Poileuse_. =PERRUQUE=: Vieille _perruque_, vieux serin, homme qui n’est pas _fin-de-siècle_. _Perruque_ (En faire une): Vendre des matériaux qui appartiennent à autrui (Argot des entrepreneurs). =PESCILLER D’ESBROUFFE=: Prendre d’autorité. Le voleur à l’_esbrouffe pescille_ de cette façon le portefeuille ou le porte-monnaie du bourgeois (Argot des voleurs). =V.= _Vol à l’esbrouffe_. =PESSIGNER= ou =PESSIGUER=: Ouvrir. —J’ai une _carouble_ qui _pessigne_ toutes les _lourdes_ sans _fric-frac_ (Argot des voleurs). =PESTAILLES=: Agents de la sûreté ou sergents de ville. Pour les voleurs, ce sont des _pestes_; ils ont ajouté la finale de _railles_, l’ancien mot, et n’en ont fait qu’un (Argot des voleurs). _N._ =PET=: Signal convenu pour prévenir ses complices qu’il y a du danger. —_Pet, pet_, v’là les _pestailles_. On dit également: —Au bastringue du Pou Volant, il y aura du _pet_ ce soir (Argot des voleurs). =PET À VINGT ONGLES=: Enfant nouveau-né (Argot du peuple). PÉTARD: Sou. C’est une corruption du mot _patard_, expression employée par François Villon. En Suisse, il y a des siècles, _patard_ était une monnaie divisionnaire; en terme de mépris, on disait: _un patard de vache_ (Argot du peuple). _N._ =PÉTARD=: Le derrière. —Crois-tu qu’elle est bien en viande? Quel riche _pétard_! On en mangerait une tranche. L’allusion se devine; souvent il tire des feux d’artifice (Argot du peuple). _N._ =PÉTARDIER=, =PÉTARDIÈRE=: Faire du tapage, du bruit. —Ah! tu sais, il ne faut pas l’emmener quand il a le _nez sale_, c’est un _pétardier_ (Argot du peuple). =PÉTASE=: Chapeau ridicule comme en portent les paysans les jours de fête. Ce chapeau se transmet de père en fils, tant pis si la tête est plus ou moins forte. Il en est qui datent du siècle dernier (Argot du peuple). =PÉTASSE=: Vieille femme avachie qui perd ses _vestiges_ en marchant. Putain et soularde (Argot des souteneurs). =PÈTE-SEC= (Monsieur): Individu qui ne rit jamais et paraît toujours en colère. Surnom donné au régiment aux officiers dont la rigueur est proverbiale (Argot du peuple). =PÉTER=: Se plaindre. —Ah! mon vieil _aminche_, comme ta _frime_ est _toquarde_, tu as les _douilles savonnées_, d’où que tu sors? —De la _boîte aux cailloux_. À cause d’un mec qui a _pété_ au _moissonneur_, j’ai passé à la _planche à pain_. _Péter_, mot à mot: faire du _pet_, se _plaindre à la justice_ (Argot des voleurs). _N._ =PÉTER LA SOUS-VENTRIÈRE= (S’en faire): Terme ironique employé pour dire à quelqu’un qui vous fait une demande saugrenue: —Tu t’en _ferais péter la sous-ventrière_. Synonyme de: _Tu n’en voudrais pas_. Avoir mangé à s’en _faire péter la sous-ventrière_ (Argot du peuple). _N._ =PÉTER PLUS HAUT QUE LE CUL=: Faire de l’embarras, de l’esbroufe, vouloir prouver que l’on est riche lorsque l’on n’a pas le sou. Homme ou femme qui s’habille élégamment en se privant sur la nourriture: —Ils veulent _péter plus haut qu’ils n’ont le cul_. C’est le cas des filles de boutique et des commis de magasins. Dans le peuple, par ironie, on les appelle: Tout sur le dos, rien dans l’estomac (Argot du peuple). _N._ =PÉTEUR=: Dénonciateur. Comme pour _dénoncer_ il faut parler, le mot _péteur_ doit être pris dans le sens de _péter du bec_ (Argot des voleurs). =PETIT MONDE=: Lentille. On dit aussi par allusion de forme et presque de couleur: _punaise_ (Argot des voleurs). =PÉTILLARDS=: Diamants. _Pétiller_ est dit pour _briller_. C’en est le superlatif. —Les _durailles_ de la _gonzesse_ sont _pétillants_ aux _pendus glacés_ (Argot des voleurs). _N._ =PETIT SALÉ=: Petit enfant. —Tu ne vas pas faire taire ton _salé_; fous-y donc sa _gamelle_ pour qu’il ne _chialle_ plus (Argot du peuple). =PETITE FILLE=: Demi-bouteille. —Viens-tu boire une bouteille? —Non, une _petite-fille_ suffira (Argot du peuple). =PÉTROLE=: Mauvaise eau-de-vie servie dans les _assommoirs_. Elle brûle l’estomac (Argot du peuple). _N._ =PÉTROUSQUIN=: La partie du corps sur laquelle on tombe le plus souvent. _A. D._ _Pétrousquin_, paysan. Malgré la croyance populaire, le paysan n’est pas aussi _cul_ qu’il le paraît. Ce n’est donc pas de là, que vient l’expression. _Pétrousquin_, ne viendrait-il pas de _Pétrus_, avec une finale ajoutée (Argot du peuple). =PETSOUILLE=: Cette expression est suffisamment claire. Elle désigne un jardinier habitué à travailler la terre; elle est un terme de mépris lorsqu’elle est employée vis-à-vis d’un bourgeois (Argot du peuple). =PÈRE LA TUILE= (Le): Dieu. Il n’est pourtant jamais tombé sur personne. Cette expression est en usage dans le monde des prisons. —As-tu entendu le _ratichon balancer sa jasante_ au _Père la Tuile_? (Argot des voleurs). =PÈZE= ou =PÈSE=: Argent. L’expression est due à Frédérick-Lemaître. Il jouait avec Clarisse Miroy à la Porte-Saint-Martin sous la direction Harel. Ce dernier n’aimait pas payer; un soir qu’il était en retard avec les appointements du grand artiste, celui-ci ne voulut pas entrer en scène avant d’être réglé. Il envoya Clarisse à la caisse; elle en revint peu après avec un énorme sac de pièces de cent sous. Elle le tendit à Frédérick. —Tiens, _pèse_? Depuis ce temps, on dit dans le peuple: —As-tu du _pèse_? (Argot du peuple). =PHILÉMON-BAUCIS=: Quand deux bourgeois jouent aux dominos, et que l’un d’eux se débarrasse du double-six, il s’écrie en riant: —_Filez mon beau six_ (Argot des bourgeois). =PIANO DU PAUVRE= (Le): Des haricots. Allusion au bruit du lendemain (Argot du peuple). =PIAU=: Cette expression est employée dans les ateliers de composition en réponse à une question indiscrète ou ridicule. _Piau_, c’est tout dire. Quand on ne veut pas répondre, on se contente de dire: —Il est _derrière le poêle chez Cosson_. C’est tout. Si l’insistance est trop grande, on dit: —Va donc _chier dans le cassetin aux apostrophes_. Cette dernière expression est également employée quand un camarade devient riche: —_Il a chié dans le cassetin aux apostrophes_. En ce cas, elle ne sert pas souvent, car nos camarades, les typos, nous ressemblent, le travail ne les enrichit guère (Argot d’imprimerie). _N._ =PIAULE=: La maison. —Y a pas, faut _rappliquer_ à la _piaule_ de la _dabe_, sans ça pas de _boulottage_ à la clé. Pourquoi _piaule_? Delvau dit que c’est une allusion aux nombreux enfants qui _piaillent_ dans la maison. Ne serait-ce pas plutôt à cause du _pieu_ (lit) dont par déformation on a fait _piaule_? C’est plus que probable (Argot du peuple). =PICHENET=: Petit vin aigre que l’on boit à Argenteuil (Argot du peuple). =PICOREUR=: Voleur de grands chemins. Le _picorage_ est le vol commis au hasard sur le passant qui est _picoré_, ou dans les fermes isolées. Le voleur _picore_ comme la poule, dans les armoires; il y trouve plus de butin que sur le fumier (Argot des voleurs). =PIED DE BICHE=: Pince (Argot des voleurs). =V.= _Monseigneur_. =PIEDS FUNICULÉS= (Avoir les): Refuser de marcher. Allusion au _funiculaire_ de Belleville qui _marche_ quand il veut (Argot du peuple). _N._ =PIERRE À AFFÛTER=: Le pain. En le coupant, cela _n’affûte_ pourtant pas le couteau, mais c’est une allusion au va et vient du couteau sur la _pierre à repasser_, quand le rémouleur lui donne le _fil_, ou quand le boucher l’aiguise sur son _fusil_ (Argot du peuple). =PIERREUSE=: Fille publique qui bat son quart dans les terrains vagues, où il se trouve plus de _cailloux_ que d’herbe (Argot des souteneurs). PIEU: Le lit. Se fourrer au _pieu_. Se coller dans le _pieu_. Allusion à ce que l’on s’y enfonce comme le _pieu_ s’enfonce dans la terre (Argot du peuple). =PIÈCE DE DIX SOUS=: Monnaie affectionnée par les pédérastes. Ils la préfèrent particulièrement quand elle est neuve (Argot du peuple). _N._ =PIGE=: Année. Synonyme de _berge_ (Argot des voleurs). =PIGE=: Expression employée dans les imprimeries pour constater quel est celui des compositeurs qui _lève_ le plus de lignes à l’heure (Argot des imprimeurs). =PIGE=: Employé par les enfants quand ils jouent aux billes; à l’aide d’une paille ou d’un petit morceau de bois, ils mesurent la distance de la bille la plus près du but pour trancher le différend (Argot du peuple). =PIGEON=: Homme facile à _plumer_. _Patiner un pigeon_, c’est _plumer_ un individu qui a un _béguin_ pour une fille. —Je tiens mon _pigeon_, il laissera sa dernière _plume_ dans mon alcove (Argot des filles). =PIGNOCHER=: Terme employé dans les ateliers de peintres pour désigner un artiste qui peint à petits coups de pinceau. Il _pignoche_ sa toile. Meissonier était le roi des _pignocheurs_ (Argot des artistes). PIGNOUF: Un _miché_ qui pose un lapin à une fille est un _pignouf_ (Argot des filles). =PILE= (En recevoir une): Être battu à plate couture (Argot du peuple). =PILE= (Une): Cent francs (Argot des voleurs). =PILER DU POIVRE=: Individu qui a des chaussures neuves qui lui font mal; il marche sur la pointe des pieds. Il _pile du poivre_. On dit également: —Il est dans la _prison de Saint-Crépin_. Quand une personne est absente et que l’on médit d’elle, on _pile du poivre_ sur son compte. On connaît cette anecdote de Tortoni: Il y avait une vingtaine de journalistes réunis. Chaque fois que l’un s’en allait, aussitôt il était arrangé de belle façon, et ainsi de suite jusqu’au dernier. Celui-là, en partant, se dit: au moins on ne _pilera pas de poivre_ sur mon compte; je reste seul. Le garçon l’accompagna et dit en fermant la porte:—Quel crétin que ce coco-là, il se croit l’égal de Victor Hugo et il est plus bête que trente-six cochons. Le garçon _pilait du poivre_. _Faire piler du poivre à quelqu’un_: lui casser la tête sur le pavé (Argot du peuple). _N._ =PILIER DE CABARET=: Soulard qui ne quitte pas le _mastroquet_. C’est, en effet, une des _colonnes_ de la boutique. Les ménagères emploient souvent cette expression quand leur mari rentre par trop _imbibé_ (Argot du peuple). =PILIER DE COUR D’ASSISES=: Récidiviste qui a subi plusieurs condamnations. Cheval de retour (Argot du peuple). =PINCEAU=: Balai. —Quel riche coup de pinceau (Argot du peuple). =PINCE-CUL=: Bal de bas étage où l’on pelote la marchandise avant de l’emmener _bacher_ (Argot des souteneurs). =PINCÉ=: Être _pincé_, être pris. Être pincé: être amoureux. —Je suis _pincé_ pour Nana. Je n’en dors plus. En _pincer_ pour quelqu’un, c’est avoir un ardent désir (Argot du peuple). _N._ =PINCER DE LA GUITARE=: Toutes les fenêtres des cellules des prisonniers sont garnies de barreaux de fer. Ils _pincent de la guitare_ avec les barreaux. Allusion aux cordes de la _guitare_ (Argot des voleurs). =PINCE-LOQUES=: Aiguille. L’aiguille, en effet, sert à repriser les _loques_, à les raccommoder. Elle rapproche les trous, elle les _pince_ (Argot des voleurs). =PINCER DES FRÉTILLANTES=: Danser. L’image est jolie, les jambes _frétillent_. Quand la _Goulue pince_ des _frétillantes_ dans un cavalier seul distingué, elle _pince le pas du hareng saur en détresse_ (Argot du peuple). =PINCETTES=: Jambes, quand elles sont minces. —Tu fais sécher les bas sur des _pincettes_ (Argot du peuple). =PINGAUD= (Il est): Il est joli, bien élevé. —Ah! Madame, le joli enfant que vous avez là. —Fais voir à Madame que tu es _pingaud_; souhaite-lui le bonjour. —Est-ce que je la connais, c’te vache-là. —Oh! c’est y Dieu possible, un enfant que j’ai porté neuf mois dans mon sein... —Fous-moi le cul dans ta hotte, tu me porteras trois mois de plus; ça fera un an (Argot du peuple). =PINGRE=: Avare qui rapine sur tout. Le roi des _pingres_ était un nommé Crétin, un des plus riches propriétaires de Lyon; il déchirait les marges blanches des affiches apposées sur les murs, pour en faire des quittances pour toucher ses loyers. Quand il pleuvait, il lâchait ses poules dans les champs; elles lui rapportaient à leurs pattes la terre du voisin! (Argot du peuple). =PIOCHER=: Travailler dur et ferme. —Je _pioche_ mon examen. _Piocher_ est synonyme de fouiller. Allusion à l’ouvrier qui _fouille_ la terre en la _piochant_ (Argot du peuple). =PIONCER=: Dormir à poings fermés (Argot du peuple). =PIPE= (Tête de): La tête. Allusion à ce que la plupart de nos grands hommes ont eu l’honneur d’être moulés en terre de pipe et fumés par le peuple, culottés quelquefois. Il existe une chanson sur ce sujet: Ils dis’nt en le voyant picter Sa pipe enfin commence à s’culotter. On dit d’un individu grotesque qu’il a une _tête de pipe_ (Argot du peuple). =PIPÉ=: Château. Il est presque impossible de trouver le pourquoi des principales expressions employées par les voleurs pour désigner des choses spéciales, telles que _bergerie_, _grange_, _ferme_, etc., etc. J’en ai questionné un certain nombre, tous m’ont répondu: —Ça s’appelle comme ça, voilà tout (Argot des voleurs). =PIQUE-PRUNE=: Ouvrier tailleur. Allusion à la marche de l’aiguille. On dit aussi: _Pique-puce_ et _pique-poux_. C’est un terme de métier (Argot du peuple). =PIQUER UNE ROMANCE=: Dormir. Allusion au ronflement du dormeur qui est une sorte de chanson en faux-bourdon (Argot du peuple). =PIQUER LE NEZ= (Se): Se payer une belle soulographie (Argot du peuple). =PIQUER SON MOULIN=: Salade trop épicée. Elle vous _pique le moulin_ (la bouche) (Argot du peuple). _N._ =PIQUER SON FARD=: Rougir en entendant un propos grossier (Argot du peuple). =PIQUE-VERT=: Petite scie fabriquée avec un ressort de montre (Argot des voleurs). =PIQUETTE=: Fourchette. L’allusion est claire (Argot des voleurs). _N._ =PISSER DE L’ŒIL=: Pleurer. —Depuis que mon homme a foutu le camp, je _pisse de l’œil_ comme une fontaine Wallace (Argot du peuple). _N._ =PISSE-FROID=: Homme guindé, raide, froid, dont l’aspect vous glace. Homme qui, en parlant, laisse tomber ses mots avec une lenteur monotone. Se dit de tout homme à l’aspect peu sympathique (Argot du peuple). =PISSER COMME LES POULES=: Aller au cabinet. Pour qualifier un individu très niais, on dit: —Il a une gueule à mener _les poules pisser_ (Argot du peuple). =PISSER DES LAMES DE RASOIR EN TRAVERS=: Celui qui est dans ce cas-là n’est pas heureux. L’image est juste pour indiquer les douleurs cuisantes qu’éprouvent les pauvres diables qui ont reçu _un coup de pied de Vénus_. Pour témoigner à une personne qu’elle vous impatiente, on lui dit: _Vous me faites pisser des lames de rasoir en travers_ (Argot du peuple). =PISSER UNE CÔTELETTE=: Accoucher. On dit aussi: —Elle _pisse des os_. _Pisser une côtelette_ est une allusion à la légende biblique d’Adam et Ève (Argot du peuple). =PISSER À L’ANGLAISE=: S’en aller subrepticement sans payer son écot. _Pisser à l’anglaise_: quitter un salon sans saluer les maîtres de la maison pour ne pas jeter le trouble dans la réunion... ou parce que l’on s’embête à quarante francs par tête (Argot du peuple). =PISTOLE=: Pièce de dix francs dans l’argot des maquignons et des bouchers. La _pistole_, dans les prisons, est une chambre à part où les détenus, par faveur et moyennant une redevance quotidienne, jouissent de quelques douceurs. Sous la Révolution, pour être à la _pistole_, à la Conciergerie, les prisonniers payaient pour un lit 27 livres 12 sous le premier mois, et 22 livres 10 sous les mois suivants. Sous la Terreur, les prisonniers payaient 15 livres par nuit. Chaque lit rapportait 22,000 livres par mois. Alboize et A. Maquet qui me donnent ces chiffres dans leur _Histoire des prisons de l’Europe_, ajoutent que la Conciergerie était le premier hôtel garni de Paris. Les détenus qui sont à la _pistole_ s’appellent des _pistoliers_ (Argot des voleurs). =PITON=: Nez extraordinaire qui se rapproche de la trompe de l’éléphant. —Monsieur, ôtez votre nez de là, dit Gavroche à un homme affligé d’un _piton_ phénoménal, pour que je voie l’heure à Notre-Dame (Argot du peuple). =PIVE=: Vin (Argot des voleurs). =V.= _Pivois_. =PIVOIS=: Vin rouge. Je ne vois guère qu’une raison à cette expression: c’est une allusion de couleur. _Pivois_ vient certainement de _pivoine_ (Argot du peuple). =PIVOIS DE BLANCHIMONT=: Vin blanc (Argot des voleurs). =PLACARDE=: La place. Non pas seulement comme le dit A. Delvau _la place_ où se font les exécutions, mais bien n’importe laquelle. La _placarde du fourmillon_: la place du marché (Argot des voleurs). =PLACE D’ARMES=: La poitrine (Argot du peuple). =PLAN DE COUILLÉ=: Faire de la prison pour un autre. Faire de la prison sans avoir joui du produit de son vol. _Couillé_ est le diminutif de _couillon_. Dialogue au _Dépôt_: —Pourquoi que t’es ici? —J’ai pas de _piaule_ pour _pagnoter_. —Je _file_ la _comète_; j’ai été _fabriqué_ par un sale _sergot_. —Et ton _nière_? —Mon _orgue_? J’étais _méquard_ de la bande à Bibi. —Alors tu vas aller _au carré des petites gerbes_. —Veux-tu me _désenflaquer_ et m’aider à _casser la ficelle_? —Pour aller à la _boîte aux cailloux_, où y a pas _mèche_ de faire _chibis_; où on ne _boulotte_ que des _bourres-coquins_ et où on ne _lampe_ que du _sirop de macchabée_? y a pas de _pet_. —Je te donne la _paire de sigues_, mais tu ne _bonniras que peau_. —Tes _sigues_, c’est du _carme à l’estorgue_. —Non, c’est du _bath_. —C’est pas assez, car si les _palpeurs_ me foutent _deux berges de Centrousse_, ça serait du _plan de couillé_. Mot à mot: de la prison pour rien (Argot des voleurs). =PLAN=: Le Mont-de-Piété. Allusion à la _planche_ sur laquelle on emmagasine les effets engagés (Argot du peuple). =PLAN=: Prison. —Je tire dix _berges_ de _plan_. _Tomber en plan_: se faire arrêter. _Être en plan_: rester en gage pour un écot. Laisser sa femme en _plan_ c’est synonyme de la _lâcher_ (Argot du peuple). =PLANTEUSE DE BOIS=: Femme qui fait son mari cocu. Mot à mot: elle _lui plante du bois_ sur la tête (Argot du peuple). _N._ =PLANCHE À PAIN=: Cour d’assises. Se dit aussi d’une femme maigre (Argot des voleurs). _N._ =PLANCHE À LAVEMENT=: Le confessionnal. On y lave sa conscience; pour certains, il faudrait une rude lessive (Argot des voleurs). =PLANQUE= (En faire une): Agent qui se _planque_ pour surveiller des individus. Être en _planque_, être _filé_. Mot à mot: _planque_, attendre. La chanson des _mecs_ dit: Jadis pour une fille, la plus chouette des catins Tous les _mecs_ se mettaient en _planque_ C’qui lui valait le _flac_ dont _casquaient_ les _rupins_ Sans les _grinchir_ ni d’_truc_ ni d’_banque_. (Argot des voleurs). =PLANQUE À LARBIN=: Bureau de placement spécial pour les domestiques (Argot des voleurs). =V.= _Suce-larbin_. =PLANQUER=: Cacher. —Pour dépister la rousse, je vais me _planquer_ un _marqué_ chez un _garnaffier_ de mes _aminches_ (Argot des voleurs). =PLANTER UN DRAPEAU=: Autrefois on disait faire un _puff_. Les ouvriers et les petits employés ont l’habitude de manger à la semaine ou au mois chez leur restaurateur; fréquemment quand ils quittent leur place, ils ne payent pas le gargotier. —Pourquoi ne passes-tu pas par-là? —J’ai _planté un drapeau_. Allusion au _drapeau_ planté par les cantonniers sur la voie publique qu’ils réparent pour avertir qu’il ne faut pas passer là (Argot du peuple). _N._ =PLÂTRE= (En avoir): Posséder beaucoup d’argent. Allusion au propriétaire qui fait construire une maison: il a du _plâtre_ (Argot du peuple). =PLAT-CUL=: Tomber sur le côté pile. Les typographes disent sur le _côté de deux_. Allusion à l’envers de la page (Argot du peuple). =PLATS À BARBE=: Oreilles démesurées, se détachant du visage. —Faudrait un balai pour nettoyer tes _plats à barbe_ (Argot du peuple). =PLAT DU JOUR=: Femme nouvelle servie aux habitués des maisons de rendez-vous avant qu’elle ne serve au public (Argot des filles). _N._ =PLAT DE CHAT=: Il ne s’agit pas de la _gibelotte de gouttière_ servie chez les Borgias à vingt-trois sous (Argot des filles). =V.= _Accouplées_. =PLAT-GUEUX=: Homme lâche (Argot du peuple). =V.= _Plat-ventre_. =PLAT-VENTRE= (Se mettre à): Se dit de quelqu’un qui _rampe_ devant un supérieur. Se mettre à _plat ventre_, c’est le comble de l’humiliation et de l’abaissement (Argot du peuple). =PLEIN COMME UN BOUDIN= (Être): Être repu de nourriture et de boisson. Mot à mot: avoir mangé comme un cochon (Argot du peuple). =PLOMB= (Avoir une carotte dans le): Puer de la bouche. _Plomb_ est une expression déjà ancienne. Théophile Gautier faisant goûter à Alexandre Dumas père de la fine Champagne excessivement rare, celui-ci avala son petit verre d’un seul coup. —Ah! dit Théophile Gautier, tu jettes ça dans le _plomb_ (Argot du peuple). _N._ =PLOMBÉ=: Ivre: l’homme ivre est lourd comme du plomb. _L. L._ _Plombé_ veut dire atteint d’une maladie qui a fait la fortune de Charles Albert. —Elle m’a _plombé_ jusqu’à la moelle (Argot du peuple). _N._ =PLOMBES=: Heures. —Voilà dix _plombes_ qui se _décrochent_ au _tintamarre_ de l’_antonne_; le _ratichon_ va _grimper_ à son _zinc_ pour _débagouler_ sa _jasante_ au _père la Tuile_. _Plombes_, allusion au marteau qui tombe _d’aplomb_ sur la cloche (Argot des voleurs). =PLOMBER DE LA CARGUE=: Sentir mauvais de la bouche. Tuer les mouches au vol (Argot du peuple). =PLUMARD=: Lit de plumes. C’est un simple changement de finale, comme pour _épicemar_ et _frimard_ (Argot du peuple). =PLUMES=: Cheveux. —Tu veux toujours paraître jeune, mais tu te _déplumes_. —Tu as rudement, grandi; ta tête dépasse tes cheveux (Argot du peuple). =PLUMES DE BEAUCE=: Bottes de paille. On sait que les plaines de la Beauce sont fertiles en graminées; le blé, le seigle et l’avoine y sont cultivés avec soin. Dans les prisons, où les détenus n’ont pour literie qu’une simple paillasse, ils disent, par ironie, qu’ils couchent sur de la _plume de Beauce_ (Argot des prisons). =PLUMER=: Dépouiller. Allusion à l’oiseau que la cuisinière _plume_ pour le faire rôtir. Ruiner un individu, lui prendre jusqu’à sa dernière _plume_. —Il faut à tout prix que vous sortiez de cette affaire, vous y laisseriez vos _plumes_ (Argot du peuple). =POCHETTES=: Les joues. Comme les poches, elles se gonflent (Argot du peuple). =POCHETÉE= (Avoir une): Avoir une forte dose de bêtise. —Il en a une rude _pochetée_. Synonyme de _gourde_ (Argot du peuple). =POÊLE A MARRONS=: Homme grêlé. Allusion à la poêle percée de trous (Argot du peuple). _N._ =POGNON=: Argent, monnaie. Allusion à l’argent mis à même la poche et que l’on prend à _poignée_. Une _poignée_ d’argent; de là, _pognon_ (Argot des souteneurs). =POIGNE= (Avoir de la): Raide, dur comme une barre de fer. Diriger une affaire avec énergie, commander avec rudesse. Cette expression date de l’Empire, qui inventa les _préfets à poigne_ (Argot du peuple). =POIL DE BRIQUE=: Femme ou homme à cheveux rouges, _rouquin_. On dit dans le peuple, par allusion à la couleur: —Trois jours de plus dans le ventre de sa mère, elle était rôtie (Argot du peuple). _N._ =POIL= (En avoir quelque part): Homme courageux qui ne redoute rien. Dans le peuple, on dit le mot carrément (Argot du peuple). =POIL= (En recevoir un): Être fortement grondé. On dit aussi recevoir un _galop_ ou un _gras_. Ce mot remplace _suif_ (Argot du peuple). =POILS= (Être à): Être dans un costume primitif, comme Geneviève de Brabant, avoir ses cheveux pour vêtement, ou, comme au bal des _Quatr’z’Arts_, avoir laissé sa chemise au vestiaire (Argot du peuple). =POIL DANS LA MAIN= (En avoir un): Paresseux qui ne veut pas travailler, qui fête tous les jours la Sainte-Flemme. —Il faudrait une rude paire de ciseaux pour lui couper le _poil_ qu’il a dans la main (Argot du peuple). =POILEUSE=: Absinthe. Dans les assommoirs où l’on débite de l’absinthe commune à la mesure, on emploie cette expression. Elle vient de ce que l’homme, abruti par cette boisson, ne peut plus travailler; il est _poileux_. Mol à mot: il a un _poil_ (Argot du peuple). _N._ =POINCELETS=: Clés fabriquées d’une certaine manière. Au lieu d’avoir un anneau à son extrémité comme les clés ordinaires, le _poincelet_ se termine en _pointe_ et peut servir à deux usages: à _caroubler_ les portes ou à pratiquer une pesée pour faire sauter les gâches des serrures (Argot des voleurs). =POINT DE COTÉ=: Créancier. Maître-chanteur exploitant les hommes qui ont un certain vice. Allusion à la gêne causée par le mal de ce nom. _L. L._ _Point de côté_: tiers gêneur. Celui qui, par exemple, vous empêche, par sa présence, de _lever_ une femme et de l’emmener après l’avoir _levée_. _A. D._ _Point de côté_, mari gênant, ombrageux, jaloux, qui surveille sa femme comme Bartholo sa nièce: —Je ne peux pas sortir, mon _point de côté_ est à la maison, il ne me lâche pas d’une semelle (Argot du peuple). _N._ =POIRE=: Tête. On dit d’un homme naïf et simple: —Il a une bonne _poire_, il est facile à _acheter_. —Vous n’allez pas longtemps vous moquer de ma _poire_, je suppose? Se _payer la tête_ de quelqu’un est synonyme de se _payer sa poire_ (Argot du peuple). =POIROTER=: =V.= _Faire le poireau_. =POISSE=: Voleur. _A. D._ C’est absolument, tout le contraire; un _poisse_ est un agent de la sûreté. La _poix_ du cordonnier s’attache aux mains en _poissant_ le fil; l’agent s’attache au voleur, il le _poisse_. Il le fait bon pour _Poissy_. Nous sommes _poissés_: nous sommes pris (Argot des voleurs). _N._ =POISSÉ SUR LE TAS=: Être pris en flagrant délit de vol. _Poissé_ de _poisse_, agent; tas, terrain (Argot des voleurs). _N._ =POISSER DES PHILIPPES=: _Poisser_, voler; _philippes_, pièces de cinq francs. Mot à mot: voler des pièces de cinq francs (Argot du peuple). =POISSON SOUFFLEUR=: Rendre par les narines, comme le font certains fumeurs de cigarettes, ce qui est aspiré par la bouche. Se prend dans deux sens (Argot du peuple). =POITOU=: Non. _A. D._ _Poitou_: Public. _A. D._ _Poitou_: Nulle chose. _L. L._ C’est assez difficile à accorder. Qui a raison des deux auteurs? Moi, je crois que _poitou_ veut dire _silence_, prenez garde, car ce mot est employé dans les prisons à l’arrivée d’un surveillant (Argot des voleurs). _N._ =POIVRE ET SEL=: Cheveux qui commencent à grisonner. L’allusion est claire (Argot du peuple). =POIVRER=: Quand la cuisinière _poivre_ trop ses mots, elle met le _feu_ au palais des convives. Quand une femme _poivre_ un homme, le _poivré_ maudit Christophe Colomb comme François I^er la belle Ferronnière (Argot du peuple). =POIVRIER=: Voleur qui dévalise les ivrognes qui s’endorment sur les bancs ou sur l’herbe des fortifications. Ce vol est connu sous le nom de _vol au poivrier_ (Argot des voleurs). =POIVROT=: Ivrogne qui se colle des _bitures_ à tout casser. _Poivrot_ vient sûrement de ce que dans les _assommoirs_, on débite de l’eau-de-vie qui ressemble à une décoction de _poivre long_. Il est saoûl, il est _poivré_, de là _poivrot_ (Argot du peuple). =POLOCHON=: Le traversin qui complète la fourniture du troupier à la caserne. Quand on a bu un coup de trop, on a reçu un _coup de polochon_. Allusion à la farce qui se fait dans les chambrées aux jeunes conscrits: on les _étourdit à coups de polochon_ (Argot des troupiers). =POMMADEUR=: Réparateur de vieux meubles à qui il donne l’apparence du neuf en les _truquant_ avec de la cire et de la gomme laque (Argot du peuple). =POMMADEUR=: Flatteur. Passer de la _pommade_ à quelqu’un, lui trouver toutes les qualités possibles. Dire à un bossu, par exemple, qu’il est droit comme un cierge. On en a fait ce calembour: la louange comme le tonnerre _fout droit_ (Argot du peuple). _N._ =POMMADIN=: Individu infatué de lui-même, qui ne songe qu’à soigner sa tête. Mot à mot: qui ressemble à une poupée de coiffeur (Argot du peuple). =POMPER=: Boire comme un trou. Dialogue devant le comptoir d’un marchand de vins: —Voulez-vous, en buvant, ressembler à deux empereurs romains? —Comment? —Soyez César et _pompez_ (Argot des bourgeois facétieux). _N._ =POMPER=: Travailler ferme. Quand le travail se ralentit, le metteur en pages dit: —Allons, les amis, encore un petit _coup de pompe_ (Argot des typographes). =POMPEZ, SEIGNEUR, POUR LES BIENS DE LA TERRE ET LE REPOS DU PAUVRE MILITAIRE.= _Pomper_ signifie _pleuvoir_; alors le soldat _coupe_ à la corvée ou à la revue (Argot des troupiers). =POMPON= (Vieux): Se dit d’un vieux soldat: Le soldat est comme son pompon Plus il devient vieux, plus il devient... melon. (Argot des troupiers). =POMPON= (En avoir un): Être abominablement gris. Avoir la face rouge comme une pivoine. Allusion à la couleur rouge du _pompon_ des grenadiers (Argot du peuple). =PONTES POUR L’AFF=: _Ponte_ doit être pris dans le sens de _bailleur de fonds_ assemblés pour lancer une _affaire_ plus ou moins véreuse. On sait que le _ponte_ (joueur) est généralement peu scrupuleux (Argot des boursiers). =PONANTE=: Fille publique. On dit également _ponette_ quand elle est jeune (Argot des voleurs). _N._ =PONIFLE=: Raccrocheuse de bas étage. _Ponifle_ est le diminutif de _ponifler_, aimer (Argot des souteneurs). =PORC-ÉPIC=: L’ostensoir. Allusion aux rayons qui l’entourent (Argot des voleurs). =PORTE-BONHEUR=: Le cabriolet que les agents passent aux poignets des prisonniers. Allusion de forme (Argot des voleurs). _N._ =PORTE-EFFETS=, =PORTE-TURBIN=: _Porte-turbin_ est une expression heureuse; elle désigne à merveille les _épaules_ du coltineur (Argot des voleurs). =V.= _Bascules_. _N._ =PORTEFEUILLE=: Le lit. —Je vais me fourrer dans mon portefeuille. Allusion de forme (Argot du peuple). =PORTER LE BÉGUIN=: Pâlir, perdre sa fraîcheur. Celui des deux jeunes mariés qui est le moins robuste ou le plus gourmand, _porte le béguin_ le premier (Argot du peuple). =PORTER LES CULOTTES=: Virago qui traite son mari comme un petit garçon (Argot du peuple). =V.= _Déculotté_. =PORTE-MORNIFLE=: Porte-monnaie (Argot des voleurs). =V.= _Morlingue_. =PORTION=: Fille publique. Allusion à l’heure de la soupe. Quand le soldat a faim, il tombe sur la _bidoche_ (Argot des troupiers). =POSE TA CHIQUE ET FAIS LE MORT=: Reste tranquille et ne parle pas (Argot du peuple). =POSER UN GLUAU=: Ce ne sont pas les oiseaux qui se prennent dans ce _gluau_-là, mais le plus souvent les pieds (Argot du peuple). =POSTICHE=: Quand, dans un atelier de composition, un compagnon raconte une histoire à dormir debout, on lui crie: —À Chaillot le _posticheur_. _Postiche_: faire un boniment sur la voie publique pour amasser le _trèpe_ (la foule). Les saltimbanques qui font des tours de cartes ou jonglent avec des poids sur les places publiques, font une _postiche_. _Postiche_: travail (Argots divers). _N._ =POSTILLON=: Baver en parlant, c’est lancer des _postillons_ (Argot du peuple). =POSTILLON=: Boulette de mie de pain dans laquelle est un billet laconique. Cette boulette est lancée dans la cour où se trouve le prisonnier que l’on veut prévenir qu’un de ses complices s’est _mis à table_. La _postillon_ est aussitôt ramassé, et ouvert; le billet est collé sur la muraille; quand les gardiens s’aperçoivent du coup, il est trop tard (Argot des voleurs). =POSTILLON D’EAU CHAUDE=: Infirmier (Argot du peuple). =V.= _Canonnier de la pièce humide_. =POT À COLLE=: Ouvrier menuisier (Argot du peuple). =POT À TABAC=: Homme énormément gros et court, par analogie avec le cochon gras. On dit aussi dans le peuple: bon à tuer (Argot du peuple). =POT DE VIN=: Argent donné pour obtenir un privilège, un monopole, une adjudication en dehors des voies légales. Un maître maçon donne un _pot de vin_ à un architecte pour obtenir des travaux (Argot du peuple). =POT DE VINARD=: Qui accepte le _pot devin_. Nous en avons eu un triste exemple dans l’affaire du Panama (Argot du peuple). =POTEAU=: Ami. La figure en juste; un _poteau_ soutient. _Poteau_ veut dire aussi complice (Argot des voleurs). =POTEAUX=: Jambes énormes, comme disent les voyous: grosses du bas et énormes du haut (Argot du peuple). =POUBELLE= (La): Boîte à ordures qui tire son nom du préfet de la Seine qui en a ordonné l’usage. Avant, les ordures étaient jetées en tas dans la rue (Argot du peuple). _N._ =POUFFIACE=: Fille publique avariée. On dit aussi: _chameau_, _chiasse_, _camelotte_ (Argot des souteneurs). =POULE D’EAU=: Blanchisseuse. Elle est bien nommée, puisqu’elle passe sa vie à l’eau (Argot du peuple). =POULET DE CARÊME=: Hareng saur. C’est un triste poulet qui pourtant fait le bonheur d’un tas de pauvres gens. Le _hareng_ se nomme aussi un _gendarme_ (Argot du peuple). =POUSSAH=: Homme gros, ventripotent, qui a peine à traîner son corps difforme sur ses jambes courtes (Argot du peuple). =POUSSE-MOULIN=: Eau. Allusion à ce que l’eau sert de moteur pour faire tourner la roue du moulin (Argot du peuple). =POUSSE-FAUTEUIL=: Valet (Argot du peuple). =POUSSE-MOU=: Homme mou qui travaille avec mollesse, sans courage (Argot du peuple). =POUSSER SA MOULURE=: Faire ses besoins. Allusion à la _moulure ronde_ qu’il faut _pousser_ avec effort sous le fer du rabot (Argot du peuple). =POUSSER À LA PEAU=: Femme de feu, amoureuse, chaude comme braise dont l’ensemble parle aux sens. _Elle pousse à la peau_ (Argot du peuple). =POUSSIER=: Lit malpropre. _Poussier_, chambre pauvre, en désordre. —Comment peux-tu vivre dans un pareil _poussier_? Synonyme de _taudis_ (Argot du peuple). =PRÉ AU DAB COURT TOUJOURS=: Prison de Mazas (Argot des voleurs). =PRÉFECTANCE=: La Préfecture. Quelques-uns écrivent: _Préfectanche_ (Argot du peuple). =PRENDRE LE COLLIER DE MISÈRE=: Aller travailler. L’établi est bien un _collier de misère_, c’est même un _collier de force_, car l’ouvrier ne peut le lâcher, il subit ce _carcan_ jusqu’à la tombe. Ce qui fait dire quand l’un d’eux meurt: —Il a quitté le _collier de misère_ (Argot du peuple). =PRENDRE LA VACHE PAR LES .....= (ce que porte le taureau entier): Prendre les choses au rebours, commencer quelque chose par la fin (Argot du peuple). =PRENDRE UN PLAT=: =V.= _Rouscailler_. =PRÊTER LOCHE=: Prête moi ton oreille. Écoute bien ce que je vais te dire (Argot des voleurs). =PRINCESSE=: Vivre pour rien. Vivre aux frais de la _princesse_ (Argot du peuple). =PROBLOQUE=: Propriétaire (Argot du peuple). _N._ =PROCUREUSE=: Ancienne fille publique qui fait métier de _procurer_ sur commande des jeunes filles aux vieux cochons. Elle alimente les maisons clandestines. Souvent, c’est une marchande à la toilette qui masque sa honteuse profession sous les apparences de son commerce (Argot du peuple). =PRODUISANTE=: La terre. L’allusion est juste: la terre _produit_ (Argot des voleurs). =PROFONDES=: Poches. Elles sont, hélas! parfois si _profondes_; que l’on ne peut parvenir à y trouver le moindre maravédis (Argot du peuple). =PROLO=: Abréviation de _prolétaire_. Travailleur de n’importe quel métier qui n’a d’autres ressources que ses dix doigts pour vivre (Argot du peuple). _N._ =PROPRIO=: Abréviation de propriétaire (Argot du peuple). =PROUTER=: Marronner, ne pas être content (Argot du peuple). =V.= _À cran_. =PROXÉNÈTE=: Ou maquerelle; c’est la même chose. La _proxénète_ est à l’affût de toutes les misères pour livrer les malheureuses à la prostitution. Celle-là ne connaît pas la grève des _mineures_. Elle revêt toutes les formes, depuis la grande dame qui a «eu des malheurs», qui tient une _agence dramatique_, jusqu’à l’ancienne cuisinière qui tient un _bureau de placement_ (Argot du peuple). =PRUNEAU=: Tabac en carotte qui se nomme grosse ou petite ficelle; il se chique. Comme le morceau, une fois mâché, est noir et juteux, on le nomme un _pruneau_ (Argot du peuple). =PRUSSIEN=: Le derrière. —Je vais te fourrer un coup de pied dans le _prussien_ (Argot du peuple). =PUCE DE MEUNIER=: =V.= _Pégoce_. =PUCE TRAVAILLEUSE=: C’est l’ancienne expression pour désigner les femmes pour femmes. C’est dans les maisons de rendez-vous, où il y a des _voyeurs_ (voyez ce mot), que ce travail s’accomplit, à la grande satisfaction des vieux érotomanes qui viennent là, chercher par les yeux un spectacle écœurant pour émoustiller ce qui leur reste de sens. Les femmes qui opèrent dans ces maisons sont payées à la séance (Argot du peuple). =PUCELAGE=: Petit oiseau qui s’envole quand il lui pousse une queue. On sait que les petits sortent du nid quand cet appendice caudal arrive à point (Argot du peuple). _N._ =PUNAISE=: Cette expression date de 1862; elle est due à un voyou. Sur le boulevard Montmartre, une fille hèle un cocher. —Au Bois, lui dit-elle. —Au _bois de lit_, _punaise_, fait le gamin. Le mot est resté (Argot du peuple). =PURÉE= (Être dans la): =V.= _Mélasse_. =PURÉE=: Absinthe. Quand elle est forte, la liqueur épaisse ressemble, en effet, à une _purée_ de pois cassés (Argot du peuple). =PURGATION=: Quand un avocat plaide en cour d’assises ou en police correctionnelle, les voleurs de profession appellent sa plaidoirie une _purgation_. —As-tu entendu mon _blanchisseur_; ce qu’il a _assis l’avocat bêcheur_ et les _nonneurs_. Quelle _purgation_! (Argot des voleurs). =PUROTAIN=: Qui est dans la purée (Argot du peuple) =V.= _Mélasse_. =PUTAIN=: Femme qui va à tous, soit à l’œil, soit par métier. La _putain_ est vieille comme le monde; depuis le _lupanar_ antique elle existe. Malgré la brutalité de cette expression, on la retrouve chez tous les poètes anciens. Le _Dict des rues de Paris_, par Guillot (1270), publié en 1754 par l’abbé Fleury. ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ Y entrai dans la maison Luce Qui maint en la rue Tyron. Des Dames hymnes vous diron, Une femme vi destrecié Pour toi pignier qui me donna Au bon vin ma voix a donné Où l’on trouve bien por denier Femmes, par son cors solacier Où il a maintes tencheresses Qui ont maint homme pris au brai. (Argot du peuple). Q =QUANTÈS?=: Bienvenue que paie un ouvrier nouvellement embauché dans un atelier. Tant qu’il n’a pas satisfait à cette vieille coutume, qui date du compagnonnage, les camarades lui crient: _quantès?_ (Argot du peuple). _N._ =QUART D’ŒIL=: Commissaire de police (Argot du peuple). =V.= _Moissonneur_. =QUART DE MARQUÉ=: Semaine. Le _quart_ du mois (_marqué_) (Argot des voleurs). =QUATRE-VINGT-DIX=: Truc, secret de métier. _Vendre le quatre-vingt-dix_: révéler le secret. _A. D._ Le _quatre-vingt-dix_ est une loterie composée de _quatre-vingt-dix billets_ qui sont, contenus dans un sac; le 90 gagne le gros lot. Les 90 numéros sont divisés par 30 cartons qui sont placés dans le public, deux compères (engayeurs) prennent deux cartons; le tenancier du jeu s’arrange de façon à les faire gagner par un truc ingénieux; le public volé n’y voit que du feu (Argot des saltimbanques). _N._ =QUATRE-COINS=: Mouchoir. La figure coule de source. Il y a aussi un jeu qui se nomme les _quatre-coins_, il faut être cinq pour le jouer. Chaque joueur se place à l’angle du carré, le cinquième au milieu fait le pot de chambre, et essaye de prendre un des coins; s’il y arrive, celui qui a perdu sa place prend la sienne (Argot du peuple). =QUELPOIQUE=: Rien (Argot des voleurs). =QUEUE=: Faire une _queue_ à sa femme: la tromper avec une autre et réciproquement. On fait également une _queue_ à un fournisseur, en achetant chez son concurrent. Laisser une _queue_: ne donner qu’un acompte sur une dette. Se tirer la _queue_, se... battre (Argot du peuple). =QUEUE DE CERVELAS= (Faire la): Promenade dans les promenoirs des prisons (Argot des voleurs). =V.= _Dévidage_. =QUI A DU ONZE CORPS-BEAU?=: Quand un curé entre dans un atelier de composition, cette question salue son apparition. On répond en chœur: —_Ache_ (Argot d’imprimerie). =QUIMPER=: Tomber (Argot des voleurs). =QUINTE ET QUATORZE ET LE POINT=: =V.= _Plombé_. =QUI-QUI=: Rognures de viandes ramassées par les chiffonniers dans les ordures. Ils les revendent aux Borgias à 1 fr. 15 qui en font des potages (Argot du peuple). =QUI-QUI=: Le col. —Si tu _rebiffes_, je vais te serrer le _qui-qui_ (Argot du peuple). =QUINQUET=: Les yeux. La _marmotte allume le pante_ du _quinquet_ (Argot des souteneurs). =V.= _Chasses_. =QUOQUANTE=: Armoire à glace (Argot des voleurs). _N._ =QUOQUARD=: Arbre. —J’ai _planqué_ la _gallouze_ sous le premier _quoquard_ à gauche de la _garnaffe_ (Argot des voleurs). _N._ =QUOQUERET=: Rideau (Argot des voleurs). =V.= _Gueusard_. R =RABATTEURS=: Individus qui font le métier de _rabattre_ les filles pour les hommes et les hommes pour les filles. On peut lire la monographie curieuse de cette catégorie d’individus dans _Trottoirs et Lupanars_ (Argot des souteneurs). _N._ =RABATTEURS À LA SORGUE=: Voleurs qui opèrent la nuit. C’est un redoublement de syllabe; ils ne _rabattent_ pas, ils s’_abattent_ sur les maisons à dévaliser. Les _rabatteurs_ sont les complices qui _nourrissent le poupard_ (Argot des voleurs). =RABIAGE=: En avoir, c’est posséder des rentes (Argot des voleurs). =RABIBOCHER=: Quand un ménage est en désaccord et qu’un raccomodage a lieu, il est _rabiboché_. Le _rabibochage_ n’est le plus souvent qu’un _replâtrage_. Quand les enfants jouent aux billes, ceux qui ont perdu disent au gagnant: —Veux-tu nous _rabibocher_? C’est-à-dire nous rendre quelques billes (Argot du peuple). =RABIOT=: Faire plus de temps qu’il n’a été convenu. Au régiment, un homme puni fait autant de jours de présence en plus qu’il a eu de jours de punition. =Avoir du rabiot=: avoir du bon, toucher un reliquat sur lequel on ne comptait pas (Argot du peuple). =RABOTÉ=: Synonyme de _nettoyé_, plus rien. On dit aussi d’une femme mince: —Elle a été _rabotée_ (Argot du peuple). =RABOTER LE SIFFLET= (Se): Boire un verre d’eau-de-vie qui gratte si fort le _gosier_ qu’il semble en emporter des lambeaux. L’eau-de-vie, qui joue le rôle du fer du _rabot_, enlève des copeaux dans le _sifflet_ du buveur (Argot du peuple). _N._ =RABOUIN=: Le diable (Argot des voleurs). =RACINE DE BUIS=: Dents. Ainsi nommées lorsqu’elles sont sales et noires. Vesinier, membre de la Commune en 1871, fut surnommé par Henri Rochefort: _racine de buis_, par allusion à la _racine_ de cet arbuste qui est noueuse avec des protubérances qui ressemblent à des verrues difformes. _Racine de buis_ caractérise la _tête_ des individus qui ressemblent à cette racine (Argot du peuple). _N._ =RACAILLE=: Moins que rien. Terme suprême de mépris plus fort que _crapule_; résidu de tout ce qu’il y a de plus abject. —Tu n’es qu’une sale _racaille_ (Argot du peuple). =RACOLER=: Fille qui _racole_ les passants (Argot des souteneurs). =RACCROCHER À LA FLAN=: Fille qui n’a pas de poste fixe; elle part de chez elle à l’aventure. Elle _raccroche à la flan_, au hasard (Argot des souteneurs). =RACCOURCIR=: Se dit d’un condamné à mort à qui on coupe la tête. Il est en effet _raccourci_ d’autant. Le mot est vieux; il date de Martinville. Il était devant le tribunal révolutionnaire. Fouquier-Tinville lui dit: —Citoyen _de_ Martinville, qu’as-tu à répondre? —Je ne suis pas ici pour qu’on m’_allonge_, mais pour qu’on me _raccourcisse_ (Argot des voleurs). =RACLETTE=: Agent de police de la Sûreté ou sergent de ville. Allusion à la _raclette_ du ramoneur qui enlève la suie des cheminées. Les agents _raclent_ les malfaiteurs qui sont la suie de la société (Argot des voleurs). _N._ =RADE= ou =RADEAU=: Tiroir de comptoir où sont les _radis_. Signifie aussi boutique. _A. D._ Ce n’est ni _rade_ ni _radeau_, c’est _radin_. Le vol au _radin_ est célèbre; ceux qui le pratiquent se nomment le _radineur_ et le _raton_ (Argot des voleurs). _N._ =RADICAILLE=: Ceux qui professent des opinions _radicales_ (Argot du peuple). =RADIS=: =V.= _Fricadier_. =RADIS NOIR=: Prêtre. Allusion à la robe noire. Cette expression date du temps où l’on jouait à l’Ambigu la pièce des _Mystères de Paris_. _Rodin_, célèbre type de canaille, mangeait pour son dîner un plat de _radis noir_ (Argot du peuple). _N._ =RADINER=: Revenir. —Je _radine_ à la _piaule_. _Radiner_: faire le _radin_, voler le tiroir-caisse d’un comptoir. Ce tiroir est nommé _radin_ parce qu’il renferme des _radis_ (sous) (Argot des voleurs). =RADURER=: Repasser son couteau sur une meule. —Je _radure_ mon _lingre_ afin que le _pante_ soit _fait_ d’un coup et qu’il n’ait pas le temps de _cribler à la grive_ (Argot des voleurs). =RAFFALE= (Je suis dans la): Être au plus mal, près de mourir (Argot des voleurs). =RAFFALÉS=: Être dans la misère, emporté par la _raffale_ de la _dèche_ (Argot des voleurs). =RAFLE=, =RAFLER=: Prendre. Quand un crime est commis et que les auteurs sont introuvables, la police organise des _rafles_ dans les lieux suspects et dans les endroits où se réunissent les vagabonds. On nomme ces _rafles_ un _coup d’épervier_, parce que l’on y prend généralement beaucoup de _poissons_. Quand les filles publiques deviennent par trop encombrantes, on les _rafle_ en masse. Le croupier _rafle_ l’argent des joueurs. Le voleur _rafle_ l’argent des passants (Argot des souteneurs). =RAFFURER=: Regagner. C’est le redoublement d’_affure_ (gagner). —J’ai _raffuré_ du terrain sur les _pescailles_ qui voulaient me _paumer_ (Argot des voleurs). =RAGOÛT=: Soupçon. —J’ai du _ragoût_ sur _sézières_, il s’est _mis à table_ sur _mon orgue_. —Fais attention de ne pas _faire de ragoût_, le _quart_ nous a au _chasse_ (Argot des voleurs). =RAGOUT DE POITRINE=: Femme _ragoûtante_ qui a sur la _poitrine_ des tétons volumineux (Argot du peuple). =V.= _Capitonnée_. =RAIDIR=: Mourir (Argot des voleurs). =RAILLE=: Cette expression est ancienne, elle se trouve dans les _Mystères de Paris_ (Argot des voleurs). =V.= _Arnaque_. =RAIGUISÉ=: Avoir tout perdu. Mot à mot: il est _réguisé_, il va mourir (Argot du peuple). RAISINÉ: Sang. —J’ai _lingré_ le _gonce_, il a répandu son _raisiné_ sur le _trimard_ (Argot des voleurs). =RAMASSER=: Se faire _ramasser_, c’est se faire arrêter. Quand un individu tient un langage imprudent ou qu’il dit des bêtises, il se fait _ramasser_ (rappeler à l’ordre). Dans le peuple, on dit: —Nous l’avons _relevé du péché de paresse_. On dit également à une femme qui vous embête: —Allons, _ramasse_ tes _cliques_ et tes _claques_ et fous le camp (Argot du peuple). _N._ =RAMASSEUR DE MÉGOTS=: Ramasseur de bouts de cigares et de débris de cigarettes. Ces _mégots_ sont séchés, triés, hachés, puis vendus par paquets aux ouvriers. La bourse aux _mégots_ se tient place Maubert, au pied de la statue d’Étienne Dolet (Argot du peuple). =RAMASSER UNE PELLE=: Être certain de réussir une affaire et la rater. Faire la cour six mois à une femme au bout desquels elle vous envoie promener. _Ramasser une pelle_, se dit de tout ce qui manque (Argot du peuple). _N._ =RAMASTIQUEUR=: Désigne le genre de vol qui consiste à _ramasser_ à terre un bijou faux qu’un compère a préalablement laissé tomber (Argot des voleurs). =V.= _Trouveurs_. =RAMENEUR=: Homme qui n’a que quelques cheveux et les ramène en avant sur son front pour faire croire à une chevelure abondante (Argot du peuple). =RAMENEUSE=: Fille publique qui _ramène_ les hommes qu’elle raccroche à son garni. —J’ai une _chouette gosse_, hier elle a _ramené_ dix fois (Argot des souteneurs). =RAMOLLOT=: Homme _ramolli_, sans consistance, qui _rabâche_ vingt fois la même chose. Le capitaine _Ramollot_ a fait rire tout Paris. L’expression est récente (Argot du peuple). _N._ =RANCARD= ou =RANCART=. Mettre quelque chose ou quelqu’un dont on ne veut plus au _rancart_ de côté. Un coup de _rancart_ est aussi une chose imprévue, comme le fait par exemple de raccrocher une femme dans un lieu public (Argot des souteneurs). =RANCARD=: Renseignements. —J’ai besoin d’un _rancard_ sur un tel. —Le _rancard_ du _probloque_ est tout ce qu’il y a de plus _mouche_. Le _rancard_ est un terme convenu pour la correspondance des tenanciers de _claquedents_ avec les placiers qui les alimentent de _camelottes_ (Argot des souteneurs). =RAPAPILLOTER=: Un ménage désuni se _rapapillotte_. Mot à mot: se _raccommode_. La chanson populaire dit: Je me _rapapillote_ Avec Charlotte. (Argot du peuple). _N._ =RAPE=: Le dos. _Rape_, avare. —Il est dur comme la _rape_ du menuisier. C’est de _rape_ qu’on a fait _rapiat_, pour désigner les auvergnats, qui, comme on le sait, n’attachent pas leur chien avec des saucisses (Argot des voleurs et du peuple). _N._ =RAPER=: Chanter. Vieille expression de goguette pour qualifier un chanteur qui écorchait les oreilles de ses auditeurs. Mot à mot: il _rapait_ sa chanson (Argot du peuple). _N._ =RAPPLIQUER=: Revenir. —Depuis huit _jornes_ que je suis en _bordée_, je _rapplique_ à la _piaule_, _mince_ de _suif_ à la clé (Argot du peuple). =RAPIOTER=: Fouiller dans les poches de quelqu’un. Ce devrait être _dépioter_ puisque l’on le fouille dans l’intention de le _dévaliser_. Cette expression est néanmoins employée par les voleurs. Les ouvriers tailleurs sont plus logiques. Pour _rapiécer_ (mettre une pièce), ils disent _rapioter_ (Argot des voleurs et des tailleurs). =RAPPOINTIS=: Morceau du fer pointu, forgé par un apprenti. On appelle ainsi les _chétifs_ (Argot du peuple). =V.= _Avorton_. _N._ =RASEUR=: Être ennuyeux, qui vous raconte des riens pendant des heures entières (Argot du boulevard) =V.= _Crampon_. =RAT= (Courir le): Voler la nuit. Allusion au _chat_ qui ne sort que la nuit pour _chasser_ le _rat_, excepté qu’ici il faut retourner le fait, c’est le _rat_ qui chasse le _chat_—le passant (Argot des voleurs). _N._ =RAT DE PRISON=: Avocat. Allusion à ce que ces messieurs _grignottent_ à belles dents l’argent des prisonniers qui ont besoin de leurs services. _Sangsue_ serait plus juste que _rat_ (Argot des voleurs). =RAT DE PALAIS=: Clerc d’huissier qui attend les malheureux avant l’audience des référés pour accrocher une pièce de cent sous. Hommes d’affaires véreux qui passent leur existence dans la salle des Pas-Perdus à la recherche d’un imbécile. _Rat de palais_, en un mot tous les _rongeurs_ qui _rongent_ les plaideurs (Argot du peuple). _N._ =RATATOUILLE= (En recevoir une): Être battu. —Je vais te foutre une _ratatouille_, numéro un. On dit également: —Je vais te _tremper une soupe_ (Argot du peuple). _N._ =RATÉ=: Manquer une affaire, _rater_ un coup... de fusil, un examen. D’un homme petit, on dit: il est _raté_. En littérature, en musique, en peinture, une œuvre est _ratée_ lorsqu’elle est incomplète. Un homme qui donnait de belles espérances et qui n’arrive à rien est un _raté_. En un mot, _raté_ se dit de tout ce qui n’est pas bien (Argot du peuple). =RATEAU=: Agents de police. Ils _ratissent_ les voleurs (Argot des voleurs). =RATIBOISÉ=: Plus le sou. —Je n’ai plus le sou, je n’ai plus de crédit et pas envie de bien faire, je suis _ratiboisé_ (Argot du peuple). =RATIBOISEUR DE CABOT=: Voleur de chiens. C’est une industrie toute spéciale, elle est florissante au printemps quand les chiennes sont amoureuses. Les chiens une fois volés, sont tondus, maquillés pour les rendre méconnaissables, puis expédiés en Angleterre à une association affiliée aux voleurs parisiens. Ce vol est des plus simples, il faut être deux pour l’accomplir. Pendant que l’un fait la cour à la bonne qui promène Tom ou Mirza, le complice profite de son inattention, il enlève le _cabot_ (Argot des voleurs). _N._ =RATIBOISEUR DE LANDAU À BALEINES=: Voleur de parapluies. On les nomme aussi des _ratiboiseurs à l’échange_. Le voleur entre dans un grand café, il a un mauvais parapluie à la main, il le place au porte-parapluie, au milieu des autres. Il s’assied a côté pour guigner de l’œil le plus beau, il paye sa consommation, se lève sans affectation en emportant le parapluie sur qui il a jeté son dévolu. Si l’on s’aperçoit, de l’échange, il s’excuse de s’être trompé, puis s’en va tranquillement. Il est rare que ce vol ne réussisse pas (Argot du peuple). _N._ =RATICHON=: Curé. _Ratichon_ est un mot ancien. On le trouve dans Olivier Chéreau à propos des _Arche-Suppots_ chargés de réformer le langage, mais là, il n’est pas pris dans le sens de prêtre (Argot des voleurs). =RATISSER=: Voler, retourner la poche d’un individu, le _ratisser_ avec autant de soin que le jardinier en met à _ratisser_ ses allées (Argot du peuple). =RATISSER LE BAS DES= =REINS AVEC UNE BRIQUE=: Ce n’est guère récréatif, c’est pourtant ce que l’on dit aux personnes qui s’ennuient. —Ah! comme je m’ennuie. —_Ratissez-vous le bas des reins avec une brique._ Ou bien encore: —_Raclez-vous les os des jambes avec un tesson de bouteille_ (Argot du peuple). =RATON=: Apprenti voleur qui s’introduit par l’imposte dans une boutique et se cache dans un coin. Quand tout bruit a cessé, il ouvre la porte à son complice (Argot des voleurs). =RAVAGEUR=: Individu qui, aux bords de la Seine, recherche les débris de ferrailles et d’os. Autrefois les _ravageurs_ formaient une puissante corporation; ils opéraient dans les ruisseaux qui coulaient au milieu des rues de Paris (Argot du peuple). =RAVIGNOLE=: Récidiviste. Ce doit être une corruption de _revignole_. _Gnole_ veut dire imbécile, de _revient_ on a fait _revi_ on y a soudé _gnole_, de là l’expression. Mot à mot: —Tu _reviens imbécile_ (Argot des voleurs). =RAVIGNOLET= (Se payer un): =V.= _Bataille des jésuites_. =REBIFFE= (Il y a de la): Revenir à la charge, retomber sur un adversaire plus fort que soi. Se _rebiffer_ contre une autorité quelconque (Argot du peuple). =REBONNETER=: Amadouer un individu pour le fourrer dans une affaire. Cacher ses griffes sous un gant de velours, faire le _patelin_ pour mieux tromper. —As-tu _rebonneté_ le _pante_ pour _l’aff_? —Oui, il est _bon_! _Rebonneter_ dans le peuple veut dire _raccommoder_ (Argot du peuple). _N._ =REBONNETEUR=: Le confesseur. Il _rebonnète_ le pécheur avec Dieu. Mot à mot: il le _réconcilie_ dans la _planche à lavement_ (Argot des voleurs). =REBOUISER DU CORRIDOR=: Sentir affreusement mauvais de la bouche. —Ce cochon-là pue tellement qu’il fait tourner le bouillon (Argot du peuple). _N._ =REBROUSSE-POIL (À)=: Prendre les choses de travers, à l’envers, du côté où ça n’est pas vrai. Ne pas savoir prendre les gens par leur côté faible. Mot à mot: _les prendre à rebrousse-poil_ (Argot du peuple). =REBUTTER=: Ne plus vouloir. Synonyme de _refouler_ et de _renifler_. On _rebutte_ sur un ouvrage qui déplaît ou qui dure trop longtemps (Argot du peuple). =RÉCALCITRANT=: Coffre-fort. Les voleurs éprouvent souvent de la _résistance_ à l’ouvrir; de là l’expression (Argot des voleurs). _N._ =RECEVOIR UN SAVON OU EN DONNER UN=: Gronder quelqu’un, être grondé. —Quand un ouvrage est mal fait, on reçoit un _savon_. —Attends un peu mon neveu, je vais te _savonner_ la tête (Argot du peuple). =RECHASSER=: Regarder quelqu’un ou quelque chose. —As-tu vu ce coup de _chasse_? Les filles _rechassent_ les passants pour les _allumer_. Cela se nomme: _distribuer son prospectus_ (Argot des filles). =RÉCHAUFFANTE=: Perruque. Elle tient chaud à la tête et ceux qui en portent ne craignent pas de se prendre aux _cheveux_. Un coiffeur de la rue de Bondy avait pris cette enseigne: D’Absalon pendu par la nuque, Passants, contemplez la douleur! S’il avait porté perruque. Il eût évité ce malheur. (Argot du peuple). =RÉCHAUFFÉ= (C’est du): Quand un individu fait un discours émaillé de lieux communs, ou raconte une histoire à dormir debout, c’est du _réchauffé_. Allusion aux mets _réchauffés_ qui ne valent plus rien. On dit également: —_Lâche_-nous avec tes _boniments_; c’est de la vingtième _resucée_ (Argot du peuple). =RÈCHE=: Sou —Pas un _rèche_ dans mes _profondes_; je ne suis pas _réchard_. _Rèche_ veut aussi dire: femme qui a un caractère cassant. —Elle est tellement mauvaise que l’on ne peut pas la toucher avec des pincettes (Argot du peuple). =RECONOBRER=: Reconnaître. Quelques-uns écrivent _conobrer_. Ce n’est pas exact. _Conobrer_ veut dire _connaître_ et non _reconnaître_ (Argot des voleurs). =RECORDER=: Réconcilier. _L. L._ _Recorder_ veut dire prévenir, remonter le moral à un désespéré; lui apprendre ce qu’il doit faire (Argot du peuple). _N._ =RECOURIR À L’ÉMÉTIQUE=: Escompter de faux billets (Argot du peuple). =RÉDAM=: Grâce. Comme le dit A. Delvau, _redam_ ne peut venir de _rédemption_. C’est une corruption de _retam_. Allusion à la casserole qui est _neuve_ lorsqu’elle est _étamée_. Dans le peuple on dit _rétamé_ pour _étamé_: le voleur _gracié_ est _rétamé_, il est remis à _neuf_ (Argot des voleurs). _N._ =REDINGUE=: Abréviation de _redingote_ (Argot du peuple). =REDOUBLEMENT DE FIÈVRE=: _Fièvre_, révélation. Quand un voleur a été dénoncé, il a la _fièvre_. Une nouvelle révélation à sa charge lui occasionne un _redoublement de fièvre_ (Argot des voleurs). =REDRESSE= (Être à la). —Il est à la _redresse le mec_, pas moyen de lui _monter le verre en fleur_; il la connaît, c’est lui qui a inventé les queues de billard cintrées pour faire les effets dans les coins. _Être à la redresse_, rusé, malin. On dit aussi: _être à la hauteur_ (Argot du peuple). =REFILER=: Veut dire: donne-moi. Le souteneur dit à sa _marmite_: —_Refile_-moi le _pognon_. _Refiler_ quelqu’un: c’est le suivre ou le rechercher. —J’ai eu beau le _refiler_, c’est comme si j’avais cherché une aiguille dans une botte de foin (Argot des voleurs). _N._ =REFROIDIR=: Tuer un individu. _Refroidi_: Allusion au cadavre qui, aussitôt la mort, devient _froid_ comme le marbre (Argot des voleurs). =REFUGES=: Les croyants disent au pécheur: _réfugiez_-vous dans le sein de Dieu. C’est un _refuge_ qui est bougrement haut. Les _giverneurs_ préfèrent de beaucoup les _refuges_ municipaux et d’autres, inconnus de la masse des Parisiens: rue Galande, rue Julien-le-Pauvre, rue St-Denis et rue St-Séverin, où l’on couche pour quatre sous, sur un banc, avec une soupe par dessus le marché. Ces _refuges_ ont pour enseigne: _Crémerie_. Je ne conseille pas aux lecteurs de s’y aventurer, s’ils ne veulent pas être _saignés_ (Argot du peuple). _N._ =RÉGLER SON TRIMESTRE=: Battre quelqu’un. Synonyme de _régler son compte_. Quand une _marmite_ ne rend pas, le souteneur dit: —Je vais lui _régler son trimestre_. Pour certaines de ces malheureuses, le _trimestre_ est tous les jours (Argot des souteneurs). _N._ =REGON=: Dette. _Regon_ est une corruption de _regout_ (rancune). Quand un voleur a été _donné_ par un _nonneur_, il a du _regout_, de la rancune, il a contracté une _dette_ de haine qu’il lui paiera tôt ou tard (Argot des voleurs). _N._ =REGOUT=: Rancune. Avoir du _regout_ contre quelqu’un, lui vouloir du mal. Les voleurs ont du _regout_ contre un complice qui les a dénoncés. —Je _renquille_ dans _Pantin_ sans _regout_ ni _morace_. Mot à mot: Je rentre à Paris sans colère, sans rancune et sans cri (Argot des voleurs). _N._ =RÉJOUISSANCE=: Qui ne réjouit pas du tout la ménagère, lorsque le boucher lui donne plus d’os que de viande (Argot des bouchers). =RELEVEUR DE CHANDELIER=: Quand un _miché_ monte avec une fille, il ne lui donne pas toujours l’argent de la main à la main; discrètement, avant de se mettre en chantier, il fait sa _mise_ sous le _chandelier_; aussitôt partis, le souteneur arrive et _relève_ la monnaie qui est sous le _chandelier_ (Argot des souteneurs). =RELEVEUR DE PESOCHE=: Garçon de banque qui la relève les 1^er, 15 et 30 de chaque mois. La _pesoche_ est le _sac_ où il enferme la monnaie (Argot des voleurs). =RELUQUER=: Regarder. —Qu’avez-vous donc à me _reluquer_ comme ça, est-ce que je vous ai vendu des pois qui n’ont pas voulu cuire? —_Reluque_-moi un peu ce _canard_, en a-t-il une _trompette_ (Argot du peuple). =RELICHER SON MORVIAU=: Voilà une image qui n’est pas propre. Dans le peuple on dit à un enfant qui ne se mouche pas et qui de son nez laisse pendre deux chandelles: —_Reliche ton morviau_ (Argot du peuple). _N._ =RELUIT=: L’œil (Argot des voleurs). =V.= _Abat-reluit_. =REMBINER=: Quand on a bien _débiné_ un individu, on le _rembine_. _Rembiner_ est synonyme de _rebonneter_ (Argot du peuple). =REMBROCABLE= (Elle est): Beau visage que l’on peut regarder. —Tu n’en perdras pas la vue ni le poil de dessus, la _môme_ est _rembrocable_. Mot à mot: tu peux la _regarder_, elle vaut la _secousse_ (Argot des voleurs). =REMBROQUAGE DE PARRAIN=: Confrontation avec le _parrain fargueur_ (témoin à charge). Le _parrain rembroque_ (regarde) le détenu pour voir s’il le reconnaît (Argot du peuple). =REMBROQUER=: Regarder. Ses deux beaux chasses vous _rembroquaient_, Puis à la piaule tous les gonces la _refilaient_, Elle fit mince _casquer_ les marlous, dit la chanson du _mac_ de Grenelle (Argot des souteneurs). =REMÈDE À L’AMOUR=: Femme laide à faire reculer même le plus intrépide. —Quelle _bouillotte_, mon vieux, s’il n’y avait qu’elle et moi sur terre nous ne ferions pas de petits. Elle _guérirait de l’amour_ pour la vie (Argot du peuple). =REMONTER SA PENDULE=: Battre sa femme, mot à mot: la faire marcher. _L. L._ _Remonter sa pendule_ se dit d’une personne qui renifle pour _remonter_ sa morve et éviter de se moucher. _Remonter le moral_ d’une personne désespérée (Argot du peuple). _N._ =REMOUCHER=: Regarder. —_Remouche_ moi cette petite gueule-là, elle ferait relever un mort. On dit aussi: —Je vais te _remoucher_ pour: te battre (Argot du peuple). =REMPARDEUSE=: Fille qui _fait_ les soldats autour des casernes, sur les glacis ou dans les fossés des fortifications (Argot des troupiers). =RENACHÉ=: Fromage (Argot des voleurs). =RENARD= (Le lâcher): Dégueuler. Expression ancienne; dans les ateliers, quand un ouvrier a trop bu, il _lâche son renard_; un camarade charitable dit alors quand il est copieux: il en a une de queue. Une vieille chanson de compagnon dit: Quand je sens que ça me gargouille, Je lâche le _renard_. (Argot du peuple). =RENAUD=: Faire des reproches à quelqu’un, c’est lui pousser un _renaud_. —Y m’en a foutu un de _renaud_ à l’instruction, y m’a dit que je _crapserai_ d’une _fièvre cérébrale_ soignée par _Charlot_ (Argot des voleurs). =RENAUDER=: Ne pas être content. Ce mot vient du verbe _arnauder_. Avoir du _renaud_ contre quelqu’un veut également dire: avoir de la rancune. Synonyme de l’expression _être à feu_ (Argot du peuple). =RENDEZ-MOI= (Le vol au): C’est très simple. L’un des complices jette un louis sur le comptoir; pendant que le marchand rend la monnaie, l’autre ramasse pièce et monnaie et se sauve. Cette manière de procéder se nomme par abréviation: _le rendem_ (Argot des voleurs). =RENDOUBLÉE=: Signifie plusieurs choses. Dans le peuple on dit: _Rendoublée_ de putain, pour exprimer qu’il est impossible de l’être davantage. On dit d’une femme enceinte: —Elle est _rendoublée_ pour _doublée_ (Argot du peuple). =RENDRE L’ÂME=: Mourir. _Rendre_ son _âme_ à Dieu ou au diable. On dit aussi d’un pochard qui a le _renard_ facile: —Il a _rendu_ tripes et boyaux jusqu’à son _âme_. Là, il n’en meurt pas, il recommence le lendemain (Argot du peuple). =RENCARD=: À l’écart. On met un objet au _rencard_ quand on en a assez. _La faire au rencard_: _lever_ une femme qui est seule sur un banc, dans un square, ou sur une promenade publique. Les courtiers qui _lèvent_ les bonnes pour les placer dans les maisons de tolérance disent: —_J’ai fait la môme au rencard_ (Argot des souteneurs). _N._ =RENCŒUR=: En avoir gros sur le cœur contre quelqu’un. Ne pouvoir avaler ou digérer une affaire. Synonyme de la locution très populaire: —Je travaille à _contre-cœur_. —Je n’y vais pas de _bon cœur_, je n’y vais pas avec courage. Épouser un homme malgré soi, c’est avoir un _rencœur_ (Argot du peuple). =RENFONCEMENT=: Vigoureux coup de poing appliqué sur un chapeau haut de forme. Quand les voyous se battent, le _coup du renfoncement_, c’est un coup de tête donné en pleine poitrine (Argot du peuple). =RENGAINER SON COMPLIMENT=: Faire du _plat_ à une femme, elle vous envoie à l’_ours_, il faut _rengainer son compliment_. Être en tête-à-tête avec une femme mariée pour la première-fois; au moment psychologique, le mari arrive... il faut _rengainer_ son compliment (Argot du peuple). _N._ =RENIFLANTES=: Des bottes. L’image est heureuse: quand un pauvre diable a des bottes éculées et percées, elles _reniflent_ l’eau des ruisseaux (Argot du peuple). =RENIFLER=: Ne rien vouloir faire. —Tu _renifles_ sur le _truc_. Mot à mot: _rebuter_ (Argot des voleurs). =RENIFLEURS=: Agents de la sûreté. Il faut avoir un certain nez, un certain flair, pour faire ce métier. Quand les agents arrêtent un voleur, ils le _reniflent_ (Argot des voleurs). =RENIFLEUR DE CAMELOTTE À LA FLANC=: Voleur qui _flâne_ au hasard pour dévaliser le premier étalage qui se présente à lui (Argot des voleurs). =RENQUILLER=: Rentrer. —Je _renquille_ à la _piaule_. _Renquiller_ veut dire aussi _retourner_. —Je _renquille_ au _patelin_ (Argot du peuple). =RENQUILLER=: Faire fortune, devenir gros et gras (Argot d’imprimerie). =RENVERSER SA CHAUFFERETTE=: Mourir. Synonyme d’_éteindre sa braise_ (Argot du peuple). =RENVERSER SA MARMITE=: Mourir. _Renverser la marmite_: ne plus tenir table ouverte, évincer les parasites. _Renverser la marmite_: refuser le service. Allusion aux Janissaires qui _renversaient la marmite_ pour indiquer qu’ils se mettaient en état d’insurrection. Nous avons, c’est le progrès, la _marmite à renversement_ des anarchistes (Argot du peuple). _N._ =REPASSÉ=: N’avoir plus rien. Quand un créancier tenace importune son débiteur, ce dernier par ironie lui dit: —Vous _repasserez_. C’est le créancier qui est _repassé_ quand on ne le paye pas (Argot du peuple). =REPÉSIGNÉ=: Arrêté de nouveau. _A. D._ _Pesigner_ veut dire _ouvrir_. Il faut donc prendre le mot _repésigner_ dans le sens de voir _ouvrir_, à nouveau la porte de la prison et non dans celui _d’arrêter_ (Argot des voleurs). =REPIGER=: Je vais te _repiger_ au demi-cercle. On dit de quelqu’un qui a été _pigé_—pris une première fois: —Je vais te _repiger_ une seconde (Argot du peuple). =REPIQUER=: Deux joueurs font une partie; l’un joue _pique_, l’autre répond: _repique_. _Repiquer de riffe_: rappliquer d’autorité (Argot du peuple). =REPIQUER AU TRUC=: Revenir à la charge. Avoir été chassé par la porte et rentrer par la fenêtre. Demander à crédit et se le voir refuser, le redemander à nouveau, c’est _repiquer au truc_ (Argot du peuple). _N._ =REPORTER SON OUVRAGE=: Dans le peuple, quand un médecin suit le convoi d’un malade qu’il a soigné, les voyous disent: —Tiens, le docteur qui _reporte son ouvrage_ (Argot du peuple). =REPOUSSER DU GOULOT=: Puer de la bouche. L’image est typique; ceux qui sont affligés de cette infirmité _repoussent_ en effet tous ceux qui les approchent (Argot du peuple). =REPOUSSER LES URINES=: Il est, je pense, inutile d’expliquer cette expression; sa brutalité la rend très compréhensible. Allusion au _piston_ qui _repousse_ la vapeur dans le _cylindre_ (Argot des voyous). _N._ =REPOUSSER DU PARLEMENT=: =V.= _Trouilloter de la hurlette_. =REQUIN DE TERRE=: Huissier. Voilà un nom qui n’est pas volé. En effet, comme le _requin_ dont on trouva dans le ventre une paire de bottes, une armoire à glace et un poêle de faïence, l’_huissier_ dévore tout (Argot du peuple). _N._ =RESSAUT= (Avoir du): Être surpris à en _ressauter_. Une proposition saugrenue fait _ressauter_ d’étonnement, celui à qui elle est faite. On _ressaute_ à la pensée de faire une chose qui ne plaît pas (Argot des souteneurs). _N._ =RESTANT DE SOUPER=: Terme de mépris employé dans le peuple à l’égard d’une fille qui a _roulé_ pendant vingt ans les restaurants de nuit. _Restant de souper_, mot à mot: tout le monde a mangé sur son _cuir_. On dit également pour exprimer une idée plus basse: _rognures d’abattoir_; c’est le suprême dégoût (Argot du peuple). _N._ =RÉSURRECTION= (La): Prison de Saint-Lazare. Allusion biblique à Lazare le ressuscité. _L. L._ En quoi cette prison d’où les femmes sortent plus pourries moralement qu’à leur entrée peut-elle être une _résurrection_? Ce n’est une _résurrection_ que pour celles qui sortent guéries de l’infirmerie, parce qu’elles peuvent recommencer leur commerce (Argot du peuple). =RETAPE=: On _retape_ un vieux chapeau pour lui donner l’aspect d’un neuf. On _retape_ une seconde fois un ami déjà _tapé_ une première. Les filles du trottoir _retapent_ les hommes, mais pas pour les rendre neufs, car quelquefois elles laissent des souvenirs qui ne sont pas _tapés_. Mot à mot: _retaper_, _raccrocher_ (Argot des souteneurs). =RETIRATION= (Être en): Ouvrier typographe qui commence à vieillir et qui trouve difficilement de l’ouvrage. Le progrès n’a pas encore inventé la machine à tuer ceux qui ne peuvent plus travailler après avoir fait la fortune des patrons (Argot d’imprimerie). =RETOURNER LA MOULE=: =V.= _Avaler le pépin_. =RETOURNER SA VESTE=: Changer d’opinion. Reproche fait souvent à la plupart de nos hommes politiques par le peuple qui ne connaît pas le mot de Thiers: —Il n’y a que l’homme absurde qui ne change jamais (Argot du peuple). _N._ =RETOURNER= (Savoir se): Se tirer d’embarras. _L. L._ S’en _retourner_, c’est vieillir. Dans le peuple, cette expression n’est pas prise dans ce sens; ceux qui font métier de se _retourner_, ont pour atelier les Champs-Élysées. On les appelle plus communément des _ramasseurs de marrons_ (Argot du peuple). =REVENDRE=: Révéler un secret confié. Commerson disait à ce sujet que les _secrets_ c’est le contraire des _fruits_, que ce n’est pas ceux qu’on veut garder qu’on _confie_. _Revendre_: commettre une indiscrétion qui amène l’arrestation de quelqu’un. —Il est _revendu_ à la police (Argot des voleurs). _N._ =REVIDAGE=: _Revision_ des marchandises achetées par les brocanteurs dans les ventes publiques. La _revision_ consiste en ceci: —Pour ne pas faire monter les enchères et acheter bon marché, un ou deux de la _bande noire_ pousse les enchères. Les objets en vente sont, par ce système, généralement adjugés à vil prix. La vente terminée, ils se réunissent dans le cabinet d’un marchand de vin voisin et ils procèdent au _revidage_, c’est-à-dire à de nouvelles enchères. Chacun prend alors le lot de marchandises qu’il peut écouler dans sa boutique, et la différence entre le total de la vente publique et l’opération du _revidage_ est partagée également. Cette opération illicite est défendue, c’est pourquoi elle se pratique au grand jour (Argot des brocanteurs). =REVISER=: =V.= _Revidage_. =REVOLVER=: Femme légitime. Les voleurs qui emploient cette expression estiment qu’elle _suicide_ son mari quand, elle est par trop acariâtre (Argot des voleurs). _N._ =RIBOUIS=: Souliers. Au carreau du Temple, c’est une spécialité. Les _ribouiseurs_ achètent toutes les vieilles chaussures: ils ont des ouvriers qu’on nomme des _passifleurs_, ils les _ribouisent_ si bien que souvent on les prend pour du neuf, pas les jours de pluie par exemple, car les malheureux qui les chaussent rentrent chez eux sans semelles (Argot du peuple). =RIC-À-RAC=: Avoir du _ressaut_ pour payer. Payer _ric-à-rac_: par acomptes, prolonger la dette le plus longtemps possible (Argot du peuple). =RICHONNER=: Rire. —Tu _richonnes_ à te mordre l’œil, ce n’est pourtant pas _richonnant_ (Argot des voleurs). =RIFFAUDER=: Brûler. _Riffaudante_: flamme. Une vieille chanson qui date au moins de cinquante ans, bien connue des voleurs, dit: L’autre jour, fumant ma _bayadaise_, Je _rifflaudais_, la fumant dans un coin. _Rifflauder_ voudrait donc dire sommeiller (Argot des voleurs). =RIF= ou =RIFLE=: Feu. —Passe-moi un peu de _rif_ que j’allume _Joséphine_ (Argot du peuple). =RIFFE=: Prendre de force, d’autorité. —Il a pris une fille de _riffe_. Synonyme de _violer_ (Argot des voleurs). =RIFFLARD=: Parapluie. Le mot date de Picard et de la _Petite Ville_, comédie dans laquelle il y a un personnage nommé _Rifflard_, qui ne marche qu’escorté d’un parapluie. _A. D._ Au quinzième siècle, on trouve déjà ce mot employé dans des comédies ou mystères avec un sens satirique et bouffon. _Rifflard_, _bouffard_, _narinard_, _dentard_ étaient des épithètes burlesques que les acteurs se renvoyaient constamment—même quand elles n’étaient pas dans leur rôle. Le personnage le plus important de _la Passion_, mystère d’Arnould Gresban, bachelier en théologie, qui fut joué avec un immense succès au quinzième siècle, est un berger nommé _Rifflard_, qui se plaint amèrement et impudemment des impôts excessifs dont le peuple était accablé. Il faudrait pouvoir citer la scène où _Rifflard_ est amené devant un magistrat qu’il appelle Machefoin: Comment te nomme-t-on? _Rifflard_, Tout norry de pois et de lard. Plus tard, le mot _rifflard_ fut appliqué aux sergents, ainsi que nous le voyons par une charte citée par Ducange. Picard, en appelant, dans sa comédie de la _Petite Ville_, un de ses personnages _François Rifflard_, n’a fait qu’emprunter, ce qu’ignorait sans doute Delvau, ce nom au _mystère_ d’Arnould Gresban (Argot du peuple). =RIFLER=: Brûler (Argot du peuple). =RIFFLER=: Veut également dire _brûler_. _Riffler_ est aussi le synonyme de _souffler_: prendre. En ce cas, c’est une corruption de _rafler_ (Argot du peuple). =RIGODON= (En pincer un): Vieux mot qui veut dire danser (Argot du peuple). =RIGODONS=: Souliers. Dans le peuple, on dit d’un homme qui a ses souliers percés et éculés: —Ses _rigodons_ engueulent le pavé. On dit également des _rigadins_ (Argot du peuple). =RIGOLARD=: Chose très amusante (Argot du peuple). =RIGOLBOCHE=: Quelque chose de supérieurement amusant, beaucoup plus fort que _rigolo_. _Rigolboche_ était connue à Bullier sous le nom de _Marie la Huguenote_; ce nom lui venait de ce qu’elle _protestait_ sans cesse quand le municipal la rappelait à l’ordre ou plutôt à la décence. Elle débuta aux Délassements-Comiques en 1860 sous le nom de _Rigolboche_. On la nommait aussi _Boboche_. Ce n’est pas elle l’inventeur de ce mot; il était connu dans les ateliers depuis 1840. On dit également, pour affirmer que l’on s’est bien amusé: —Nous avons rudement _rigolboché_ (Argot du peuple). =RIGOLOTTE=: Nom donné par Eugène Suë à un des personnages des _Mystères de Paris_. Ce nom est resté pour désigner une jeune fille joyeuse. —Elle est _rigolotte_ (Argot du peuple). _N._ =RIGOLO=: Attaque nocturne. _L. L._ _Rigolo_: terme employé dans les ateliers pour qualifier un camarade qui _rigole_ sans cesse, qui amuse les autres. Il y eut, en 1866, un mulet qui portait ce nom au Cirque-Napoléon; il fit courir tout Paris, tant il était amusant, _rigolo_ (Argot du peuple). _N._ =RIGOLO=: Sinapisme de farine de moutarde. _Rigolo_, c’est le nom de l’inventeur. Autrement, cette appellation serait une amère ironie, car un sinapisme n’est pas plus _rigolo_ que d’avoir un clou planté dans les fesses (Argot du peuple). _N._ =RIGOLO=: Pince. Si elle fait _rigoler_ quelqu’un, ce n’est certainement pas la victime du vol avec effraction. Elle est _rigolo_ pour le voleur, car avec l’argent volé il peut se payer de la _rigolade_ (Argot des voleurs). =V.= _Monseigneur_. =RIGOUILLARD=: Chose drôle, c’est plus fort que _rigolo_. C’est tellement _rigouillard_ qu’il y a de quoi s’en _tamponner le coquillard_, c’est à se tordre, c’est crevant (Argot du peuple). _N._ =RINCÉ=: Être _rincé_ comme un verre à bière, n’avoir plus rien. Recevoir une _rincée_: être battu comme des œufs à la neige. _Rincer_ quelqu’un: le voler jusqu’à son dernier sou (Argot du peuple). =V.= _Raboté_. =RINCER LA DALLE= (Se faire): Se faire régaler par un camarade. —Je lui ai tellement _rincé la dalle_ qu’il n’a pas une dent dans la gueule qui ne me coûte au moins vingt francs (Argot du peuple). =RIOLE=: Ruisseau ou rivière dans l’argot des voleurs. _Riole_ se dit aussi dans le peuple de quelqu’un qui est pochard: —Il est en _riole_. Ce n’est pourtant pas dans la rivière que le vin a été puisé (Argot du peuple). =RIPATINS=: Brodequins (Argot des voleurs). =RIPATONS=: Souliers (Argot du peuple). =RIPATONNER=: Le _passifleur_ qui racommode les vieux souliers, _ripatonne_ (Argot du peuple). =RIPER=: Embrasser tendrement. _A. D._ C’est une singulière façon d’embrasser tendrement les gens que de les voler car _riper_ dans le peuple signifie: _prendre_. —Je lui ai _ripé_ sa _galette_ (Argot du peuple). _N._ =RIPOPÉE=: Quelque chose qui ne vaut rien. Synonyme de _ratatouille_. On dit aussi: —Ton _Borgia_ à 23 sous ne nous fait _boulotter_ que de la _ragougnace_ (Argot du peuple). _N._ =RIQUET=: Tout petit. Sobriquet donné dans les ateliers aux apprentis mal formés. —Viens ici, mon petit _riquet_. C’est un pléonasme d’accoupler ces deux mots identiques, mais dans le peuple, on n’y regarde pas de si près (Argot du peuple). _N._ =RIQUIQUI=: Mauvaise eau-de-vie. _Riquiqui_ est généralement employé pour peindre quelque chose de mesquin, de petit, d’étroit. —Son esprit est comme sa taille, c’est _riquiqui_. —Ah! regardez-moi cette toilette, est-elle assez _riquiqui_? Il existait jadis une liqueur appelée _riquiqui_; on ne la connaît plus (Argot du peuple). =RIRE COMME UN CUL=: Rire sans desserrer les dents. Veut dire aussi rire comme un imbécile, sans savoir pourquoi. Être _cul_, dit M. Lorédan Larchey, c’est être bête et grossier. Ce pauvre _cul_ n’a vraiment pas de chance, car, non content d’en faire le synonyme de tout ce qui est sale, on en fait le synonyme de tout ce qui est bête et ridicule. S’il pouvait répondre autrement qu’en pétant! (Argot du peuple). _N._ =RIRE JAUNE=: N’être pas content et être forcé de rire quand même; avoir les larmes dans les yeux et le cœur gros et être forcé de paraître joyeux. On dit aussi: —Son _rire est jonquille_. Allusion au cocu qui rit _jaune_ quand la sage-femme lui présente son dernier en lui disant: C’est tout le portrait, d’son père, Quel cochon d’enfant! (Argot du peuple). =RISETTE=: Surnom donné à une jeune fille rieuse et aimable qui a toujours le sourire sur les lèvres. C’est un vieux boniment employé dans les foires: —Entrez, mesdames et messieurs, vous verrez la femme colosse; cent kilos sur l’estomac et le sourire sur les lèvres. Quand une _amie_ est fâchée, qu’elle boude, on l’embrasse et on lui dit: —Allons, fais une petite _risette_ à papa, il revient d’Afrique. Quand une femme vous fait des _risettes_, on peut y aller carrément (Argot du peuple). _N._ =RISQUER LE PAQUET=: Synonyme de tout _risquer_, c’est-à-dire de tenter l’aventure. —Tu n’oses pas! _risque donc le paquet_ (Argot du peuple). =RIVANCHER=: Aimer (Argot des voleurs). =RIVER SON CLOU=: Quand un bavard intarissable ennuie quelqu’un par un discours filandreux, on lui _rive son clou_ en lui disant carrément: —Tais ta gueule ou je chie dedans. Mot à mot: _river le clou_, c’est empêcher d’aller plus loin (Argot du peuple). _N._ =RIVETTE=: Prostituée, du verbe _rivancher_, se livrer à l’amour. _L. L._ Cette expression ne s’applique pas aux femmes (Argot des pédérastes). =V.= _Passif_. =ROBE DE CHAMBRE=: Cercueil. Ce n’est pas un vêtement bien ouaté; surtout quand c’est la bière des pauvres (Argot du peuple). =ROBIGNOLE=: Mot employé comme superlatif d’admiration pour une chose extraordinaire «qui dépasse l’imagination.» —Une évasion audacieuse, c’est _robignol_. —La _môme_ est _robignol_, elle _gouale_ sans cesse. _Robignol_, en ce cas, est pour joyeux, et joyeuse (Argot des voleurs). =ROCAMBOLE=: Moins que rien. —Finis-donc avec tes _rocamboles_, nous ne coupons pas dans le pont. _Rocambole_, synonyme de _blague_, en souvenir de Ponson du Terrail et de son célèbre roman qui porte ce titre (Argot du peuple). =ROCHET=: Évêque. Allusion au _rochet_ que porte ce dignitaire de l’église (Argot des voleurs). =RODEUSE=: Fille publique qui n’a pas de poste fixe, qui fait son _persil_ dans les terrains _vagues_. On l’appelle ainsi pour cette raison (Argot des souteneurs). =ROGNOLER=: Marronner. Ne jamais trouver rien de bien (Argot du peuple). =V.= _Ronchonner_. =ROGNURE DE SOUFFRICE=: Terme employé dans le peuple, pour qualifier une vieille fille publique. L’usine Souffrice a le monopole de faire des graisses avec les rognures pourries des animaux noyés qui viennent s’échouer sur les bords de la Seine (Argot du peuple). _N._ =ROGUE=: Se dit de quelqu’un qui a des allures hautaines, cassantes: il a l’air _rogue_. On trouve cette expression en Normandie. Les marchandes de harengs vous disent: il est, _rogué_ pour _œuvé_ (Argot du peuple). _N._ =ROMAGNOL= ou =ROMAGNON=: Trésor caché (Argot des voleurs). =ROMAINS=: Individus qui moyennant un faible salaire, applaudissent les acteurs (Argot des coulisses). =ROMPEZ=: Allez-vous en, foutez-moi le camp. Allusion au commandement de _rompez_ les rangs (Argot du peuple). =RONCHONNER=: Père _ronchon_ qui trouve à redire à tout. Le colonel _Ronchonot_, est célèbre depuis quelques années (Argot du peuple). =ROND-DE-CUIR=: Employé de bureau. Allusion au _rond de cuir_ ou de caoutchouc que les employés mettent sur leurs chaises pour économiser leur fond de culotte (Argot du peuple). =ROND COMME UNE BOULE=: Être pochard à _rouler_ par terre (Argot du peuple). _N._ =RONDINS=: Les seins... quand ils sont _ronds_ (Argot du peuple) =V.= _Capitonnée_. =RONDIN JAUNE=: Pièce de vingt francs. Allusion à la forme ronde (Argot des voleurs). =RONDOUILLARD=: Plus que beau. Dans le peuple on dit d’une femme qui possède des qualités surprenantes: —Elle est _rondouillarde_. Quand elle est _boulotte_, _ronde_, on dit également par allusion à la forme: —Elle est _rondouillarde_ (Argot du peuple). _N._ =RONFLAN=: C’est _ronflan_, beau, bien, chouette, tapé (Argot du peuple). _N._ =RONFLER DU BOURRELET=: Péter longuement. Le _Pétomane_ célèbre _chantait du bourrelet_ (Argot du peuple). =ROSSARD=: De _rosse_, dur, cruel (Argot du troupier). =ROSSIGNANTE=: Flûte (Argot des voleurs). =ROSSIGNOL=: Marchandises défraîchies ou hors de saison. Dans les magasins, les commis qui écoulent les _rossignols_ touchent une prime qui se nomme _la guelte_ (Argot des bourgeois). =ROSSIGNOL=: Fausse clef (Argot des voleurs). =ROSSIGNOL À GLAND=: Un cochon. Quand un individu a la manie, dans une société, de vouloir toujours chanter, et qu’il le fait comme une crécelle, on lui dit: —Ah! ferme ta _boîte_, tu chantes comme un _rossignol à gland_ (Argot du peuple). _N._ =ROTIN=: Sou. —Je suis à fond de cale, pas un _rotin_ (Argot du peuple). =ROUBIGNOLE=: Petite boule de liège dont les _roubignoleurs_ se servent pour le jeu de _cocange_, jeu qui vole les paysans dans les foires (Argot des voleurs). =ROUBIGNOLLES=: =V.= _Sœurs_. =ROUBION=: Fille publique laide comme les sept péchés capitaux (Argot des souteneurs). =ROUBLARD=: Les voleurs disent d’un homme affreusement laid qu’il est un _roublard_. _A. D._ Ce n’est pas le vrai sens aujourd’hui. _Roublard_ veut dire matin, fin comme un renard. Un homme qui sait habilement se tirer d’un mauvais pas est un _roublard_. _Roublard_: homme qui cache soigneusement sa pensée, qui est pétri de _roublardise_ (Argot du peuple). _N._ =ROUCHI=: Homme sans conscience, pour qui le Code est un bréviaire. Terme méprisant très en usage (Argot du peuple). =ROUCHIE=: Femme avachie, usée. Vient de mauvais cheval: _rouchi_. Quand une fille est trop vieille, qu’elle a rendu trop de services à l’humanité souffrante, qu’elle ne rue plus dans les brancards, c’est une _rouchie_ (Argot des souteneurs). =ROUE DE DERRIÈRE=: Pièce de cinq francs en argent. Quand on n’en possède qu’une, la voiture va cahin-caha, mais, quand il y en a plusieurs, on _roule_ vivement (Argot du peuple). =ROUE= (Être à la): Malin, roublard (Argot du peuple). _N._ =ROUFFLÉ=: Battre un individu à coups de pieds et à coups de poings. —Je vais te foutre une _bath roufflé_ (Argot des voleurs). =ROUGET=: Cuivre (Argot des voleurs). =ROULANCE=: Quand une équipe de compositeurs typographes est mécontente, ses membres le manifestent en frappant tous à la fois la casse avec un outil quelconque; le bruit produit une sorte de _roulement_, de là, _roulance_ (Argot d’imprimerie). =ROUILLARDE=: Blouse. On sait que la _blouse_ est le vêtement favori des _rouliers_, de là l’expression _rouillarde_. Les voleurs disent _souillaude_ (Argot des voleurs). _N._ =ROULER SA BOSSE=: Ouvrier _trimardeur_, qui n’a pas de domicile fixe, qui _route sa bosse_ de ville en ville. C’est un mendiant déguisé qui cherche de l’ouvrage et prie le bon Dieu de n’en pas trouver (Argot du peuple). =ROULER SA VIANDE DANS LE TORCHON=: Se coucher. On dit plus communément: —Je vais _remiser ma viande_ (Argot du peuple). =ROULEUSE=: Fille publique. Elle _roule_ partout pour trouver pratique. Elle _roule_ ses clients de hasard, car elle promet mais ne tient jamais (Argot du peuple). =ROULOTTE=: Voiture. Les voleurs qui pratiquent le vol à la roulotte disent: —_Grinchir une roulotte en salade_ (Argot des voleurs). =ROULOTTIERS=: Vol à la _roulotte_. Quand un camionneur décharge une livraison, le _roulottier_, vêtu comme un employé des messageries, prend un ballot; un complice est à quelques pas plus loin, avec une voiture à bras, toujours au détour d’une rue; il charge le ballot sur sa voiture, et en route (Argot des voleurs). =V.= _Fusilleurs_. =ROUPIE DE SINGE=: Mauvais café qui a la couleur de la _roupie_ qui pend au nez du priseur (Argot du peuple). =ROUPILLER=: Dormir. Quand on ne dort que quelques instants, on fait un petit _roupillon_. —Il est tellement _gouapeur_ qu’il _roupille_ sur son ouvrage (Argot du peuple). =ROUSCAILLER=: Voulait dire autrefois _parler_. Les voleurs en ont fait le synonyme d’_aimer_, mais pas dans le sens platonique (Argot des voleurs). =ROUSSELETTE=: Moins que rien (Argot des souteneurs). =V.= _Camelotte_. =ROUSSIN=: Tous ceux qui appartiennent, de près ou de loin, à la police, sont des _roussins_. Autrefois, les agents en bourgeois étaient vêtus de la redingote sombre, d’un ton _roussâtre_. De là est née l’expression: —Voilà les _rousses_! (Argot des voleurs). =ROUSSINER=: Faire arrêter par la police. _L. L._ _Roussiner_ veut dire _péter_ mollement et puer fortement. —Il _roussine_ à faire roter un vidangeur (Argot du peuple). _N._ =ROUSPANT=: Homme qui fournit des sujets aux _tantes_. C’est le _procureur_ des pédérastes (Argot des souteneurs). =ROUSTENPANNE=: Moins que rien (Argot du peuple). _N._ =ROUSTIR=: Prendre, s’approprier le bien d’autrui. Être _rousti_: être pris (Argot des voleurs). =ROUSTISSURE=: Mauvaise plaisanterie. _A. D._ _Roustissure_, dont par corruption on a fait _roustenpanne_, veut dire moins que rien (Argot du peuple). =V.= _Rousselette_. =ROUSPÉTANCE= (Faire de la). =V.= _Rouspéter_. =ROUSPÉTER=: Récriminer, faire du _pet_, du bruit (Argot des voleurs). =ROYAUME DES TAUPES=. =V.= _Les pissenlits pousser par la racine_. =RUBIS SUR L’ONGLE=: Être régulier, payer _recta_ ses dettes à l’échéance. Boire son verre jusqu’à la dernière goutte. —Il a _séché_ son _glacis rubis sur l’ongle_ (Argot du peuple). _N._ =RUER DANS LES BRANCARDS=: Femme amoureuse qui, au moment psychologique, se démène furieusement, comme le cheval emballé. La figure peut se passer de commentaires (Argot du peuple). _N._ =RUE AU PAIN= (La): Le gosier. Le pain y passe. Mauvaise affaire quand la rue est barrée (Argot du peuple). =RUE DU BEC DÉPAVÉ=: La bouche, quand elle n’a plus de dents. Elle ne peut guère alimenter sa voisine, la _rue au pain_ (Argot du peuple). =RUPIN=: Homme riche, calé, cossu. Au superlatif _rupinskoff_, alors c’est un homme _pourri de chic_. Les souteneurs disent à leur _marmite_: —_Lève_ donc le _gonce_, il est _rupin_, il doit être au _sac_ (Argot des souteneurs). =RUTIÈRE=: Voleuse ou fille publique, souvent les deux à la fois (Argot des voleurs). =RUTILANT=, =RUTILANTE=: Il est _rutilant_ (joyeux). Elle est _rutilante_, resplendissante de fraîcheur et de beauté. Une chose est _rutilante_ (éclatante). Ce mot est très français, mais il est employé par le peuple dans un tout autre sens que celui indiqué par les dictionnaires classiques (Argot du peuple). _N._ S =SABIR=: Bois, forêt. Quelques-uns écrivent: _sabri_. C’est la finale retournée (Argot des voleurs). =SABLER=: Il est des voleurs qui se servent d’un _os de mouton_, arme dangereuse, pour _estourbir le pante_. Cela laisse des traces très faciles à constater. Un autre moyen a été imaginé. On remplit de sable fin, ou de grès pulvérisé, un sac en peau, et on _assomme_ le client avec. Quand on le relève, on le déclare mort d’une congestion ou d’une attaque d’apoplexie (Argot des voleurs). _N._ =SABOT=: Barque. —Nous allons embarquer dans le _sabot_ pour _la Nouvelle_, disent les voleurs. Dans le peuple on dit d’un homme qu’un coup de canon ne réveillerait pas: —Il dort comme un _sabot_. Allusion à la toupie que les enfants nomment _sabot_, laquelle ronfle comme un tuyau d’orgue (Argot des voleurs et du peuple). =SABOTER=: Ouvrage mal fait, gâché. Allusion au _sabotier_, qui travaille son bois à grands coups de sabre pour l’équarrir. Un ouvrage _saboté_ est bien près d’être un _loup_ (Argot du peuple). =SABOULER=: Décrotter. _A. D._ _Sabouler_ veut dire chasser. —Je l’ai _saboulé_ de la _piaule_ avec perte et fracas. On _saboule_ un ouvrier qui ne fait pas l’affaire (ne sait pas travailler) (Argot du peuple). _N._ =SABOULETTE=: Table de toilette. Elle supporte le savon et les brosses qui _saboulent_ la crasse. C’est ainsi que les voleurs nomment les _lavabos_ communs qui leur servent dans les prisons (Argot des voleurs). _N._ =SABRE=: Bâton. _Sabre_: être gris. _A. D._ C’est _sas_ qu’il faudrait dire. Être _sas_, être _blindé_, saoûl, est un vieux mot normand très fréquemment employé dans le peuple. —_Quitte_-nous le _coude_, t’es _sas_ comme une bourrique (Argot du peuple). =SAC=: L’affaire est dans le _sac_, elle est conclue. Être pris en flagrant délit de vol, c’est avoir son affaire dans le _sac_. Être laide ou jolie, c’est être ou n’être pas dans le _sac_. Il y a une vieille chanson là-dessus: Ell’ n’est pas mal Pour foutre dans l’canal. Elle est encore mieux Pour foutr’ dans les lieux. (Argot du peuple). =SAC= (Avoir le): Posséder beaucoup d’argent. —Il a un fort _sac_. —Il est au _sac_. Avoir un _sac_ dans lequel il y a une mauvaise pierre, c’est être condamné par les médecins (Argot du peuple). =SAC À OS=: Femme maigre. On dit dans le peuple: —On peut lire son journal au travers. Il y eut longtemps, il y a une trentaine d’années, une femme _diaphane_ qui se faisait voir dans une baraque à la foire aux pains d’épices. Le pitre pour exciter la foule à entrer, disait: —Avec une chandelle, on peut lui compter les côtes (Argot du peuple). =SAC À MERDE=: Le ventre. L’image n’est pas propre, mais elle exprime bien le fait. On se souvient de ce général du premier Empire à qui Napoléon avait recommandé le plus grand silence à un grand dîner. Le général se tint coi, comme il l’avait promis, mais au dessert il ne put résister, il frappa sur le ventre de son voisin, un archiduc, en lui disant: —Eh bien! mon vieux, maintenant que t’as bien mangé, y en a beaucoup là-dedans? (Argot du peuple). =SAC PLEIN= (Avoir le): Être ivre. _A. D._ _Avoir le sac plein_ se dit d’une femme sur le point d’accoucher (Argot du peuple). _N._ =SAC À VIN=: Ivrogne pour qui toutes les boissons sont bonnes. Mot à mot: il engloutit tous les liquides dans son _sac_ (Argot du peuple). =SACRISTAIN=: Maître d’une maison de tolérance. Mot à mot: il est le _sacristain_ de l’_abbaye_ dont sa femme est l’abbesse, puisque c’est elle qui, d’après le règlement, est la propriétaire du _livre_ (Argot des souteneurs). =SAFRAN=: Mari trompé, voue au _jonquille_ comme on voue les enfants _au bleu_. On dit aussi d’un mari dans ce cas: —Il a la _jaunisse_ toute l’année (Argot du peuple). =SAIGNER=: Synonyme de _buter_. Cette expression est généralement employée par les bouchers qui conservent dans la vie les habitudes de l’abattoir (Argot des bouchers). =SAIGNER=: Emprunter de l’argent à quelqu’un. Mot à mot: faire une _saignée_ à son porte-monnaie ou à son coffre-fort. _Faire une saignée blanche_: ce n’est pas un médecin qui est chargé de faire cette opération à moins que ce ne soit une _doctoresse_ (Argot du peuple). _N._ =SAINT-DOMINGUE=: Tabac. Dans les prisons, par abréviation, on dit: _Saint-Dome_. _Saint-Domingue_, allusion au pays où prospèrent les plantations de tabac (Argot des voleurs). _N._ =SAINT-FRUSQUIN=: Lot d’objets ou de mobilier (Argot du peuple). =SAINT-LAGO=: Abréviation de Saint-Lazare; les filles disent également _Saint-Laz_. Quand elles sont dans cette prison, elles disent qu’elles sont à la _campagne_. —Tiens, voilà six mois que l’on ne te voit plus? —J’étais en villégiature, je sors de ma _campagne_. On sait ce que cela veut dire (Argot des filles). =SAINT-PÈRE=: Tabac à fumer (Argot des voleurs). =SAINT-VINCENT-DE-PAUL=: Les _ramasseurs de mégots_. Ils sont les _Saint-Vincent-de-Paul_ des _orphelins_ qui traînent devant les terrasses des cafés (Argot du peuple). =SAINTE-TOUCHE= (Le jour de la): La paye de chaque semaine ou de fin du mois. La _Sainte Espérance_ est la veille de la _Sainte-Touche_. C’est une sainte bien fêtée par les ouvriers (Argot du peuple). =SAINT-JEAN=: Signal convenu entre les voleurs pour avertir un complice. Ce signal consiste à lever l’index et le médium. On dit aussi d’un individu qui n’est pas à la _hauteur_ pour faire quelque chose: —Il est de la _Saint-Jean_ (Argot du peuple). _N._ =SAISISSEMENT=: Terme employé par les voleurs pour désigner les liens qui servent pour ligoter le condamné à mort au moment de la toilette. Il y a de quoi en effet être _saisi_ (Argot des voleurs). =SALÉE= (La): La mer (Argot des voleurs). =SALÉ À LA BANQUE= (En demander): Demander au metteur en pages ou au prote une avance sur la semaine. _Salé_: travail payé d’avance. _Saler_ une note: additionner le numéro du cabinet avec la carte (Argot d’imprimerie). =SALIÈRES=: Une femme qui a la poitrine creuse, a des _salières_, c’est-à-dire des trous en guise de seins. On dit également qu’elle a les tétons dans le dos (Argot du peuple). =SALIVERNE=: Gamelle ou écuelle qui sert dans les hôpitaux aux malades pour cracher. Ils _salivent_ dedans (Argot des voleurs). =SALLE À MANGER=: La bouche. Pour indiquer qu’un individu n’a pas de dents, on dit dans le peuple: —Il n’a plus de tabourets dans la _salle à manger_ (Argot du peuple). =SALSIFITS=: Doigts. Les voyous disent: —Je vais te coller une poignée de _salsifits_ sur la hure (Argot du peuple). =SANG DE NAVET=: Homme sans courage, qui n’a pas de sang dans les veines. On dit également: —Il a les foies blancs (Argot du peuple). _N._ =SANS BLAGUE=: C’est vrai, je ne mens pas (Argot du peuple). =SANS-FEUILLE=: La potence (Argot des voleurs). =SANS-GÊNE=: Indiscret, mal élevé. Cracher par terre dans un salon, ôter ses bottes dans un wagon, se moucher avec ses doigts (Argot du peuple). =SAPÉ=: Condamné. Allusion au bûcheron qui, de sa cognée, _sape_ un arbre (Argot des voleurs). =SAPEMENT=: Jugement (Argot des voleurs). =V.= _Sapé_. =SAPEUR=. =V.= _As de pique_. =SAPIN=: Sentir le _sapin_. Étre sur le point de mourir. _Sapin_: cercueil. _Sapin_: plancher (Argot du peuple et argot des voleurs). =SAQUÉ=: On m’a dit de passer au bureau pour y régler mon compte. L’expression vient des corporations où les ouvriers fournissent leurs outils; ils les mettent généralement dans un _sac_; quand ils quittent l’atelier, ils les remportent; ils reprennent leur _sac_; de là, _saqué_ (Argot du peuple). =SARRAZIN=: Les ouvriers typographes qui travaillent au-dessous du tarif réglé par la Société et qui sont souvent la proie du syndicat, lequel les considère misérablement (Argot d’imprimerie). =SARRAZINEUR=: Ouvrier qui va d’un atelier à un autre, suivant sa fantaisie ou les exigences du travail (Argot d’imprimerie). =SATOU=: Bâton (Argot des voleurs). =SAUMON=: Homme riche. —Emballons le _saumon_ avec précaution; il y a du _pèze_ (Argot des croque-morts). =SAUT DE COU=: Foulard (Argot des voleurs). =SAUTE-AU-KRACK=: Surnom donné aux filles publiques audacieuses (Argot des souteneurs). =SAUTE-MOUTON= (Le coup du): Ce sont les _remisiers pour dames_ (les _tripoteuses du marché des pieds humides_) qui le pratiquent. La joueuse vend mille francs de rente. Le _remisier pour dames_ exécute cet ordre; il vend immédiatement, mais il attend la fermeture de la Bourse pour en informer sa cliente. S’il y a baisse, comme il a vendu ferme, il encaisse tranquillement la différence; si la rente reste au même taux, il lui raconte qu’il y a écart de deux ou trois centimes; dans tous les cas elle est volée (Argot des boursiers). _N._ =SAUTE-RONDELLES=: =V.= _Fafioteur_. =SAUTE-RUISSEAU=: Petit clerc d’huissier ou de notaire qui porte à domicile les pièces de l’étude (Argot du peuple). =SAUTER À LA CAPAHUT=: Tuer un complice pour ne pas lui donner sa part de vol. C’est un fait assez rare, car chez les voleurs il existe une sorte de probité que l’on ne trouve pas chez certains qui se disent honnêtes gens (Argot des voleurs). =SAUTER LA CERVELLE= (Se faire): =V.= _Bataille des jésuites_. =SAUTER À LA PERCHE=: Avoir très faim. En ce cas on est plus léger que de coutume et on peut _sauter_ facilement. Synonyme de: _je m’enlève_ (Argot du peuple). _N._ =SAUTEUSE=: Puce. Elle saute, en effet, sans cesse (Argot du peuple). =SAUVAGE= (S’habiller en): Être dans un costume primitif, n’avoir pas même la feuille de vigne si chère à M. Bérenger, le Caton moderne (Argot du peuple). =SAVOIR LIRE=: Être au courant de toutes les ruses du métier. Connaître tous les trucs pour voler (Argot des voleurs). =SAVOYARDE=: Malle. Allusion aux commissionnaires, tous _savoyards_ pour la plupart, qui transportent les _malles_ sur leur dos (Argot des voleurs). =SCHNOC=: Quand on ne veut pas dire à un individu _c-o-n_ pantoufle, on emploie cette expression qui est un terme de mépris: _vieux schnoc_ (Argot du peuple). _N._ =SCHNOFFE= (Deux ronds de): Deux sous de tabac à priser (Argot du peuple). _N._ =SCHPROMME=: Faire du tapage dans un endroit public (Argot du peuple). =SCHTIGNER=: Puer (Argot du peuple). _N._ =SCIE=: Femme légitime. Quand un ouvrier menuisier porte sa scie, les voyous lui disent: —Tu trimballes ta _légitime_. _Scier_ quelqu’un: l’ennuyer, le raser (Argot du peuple). =SCION=: =V.= _Lingre_. =SCIONNER=: Tuer quelqu’un avec un couteau (Argot des voleurs). =SÉCHÉ=: Au lendemain d’une forte soulographie, l’ivrogne est _séché_ (Argot du peuple). =SECOUER LES PUCES=: Stimuler un endormi, le _secouer_ du péché de paresse (Argot du peuple). =SECOUER SON PANIER À CROTTES=: Se dit dans le peuple d’une danseuse déhanchée qui fait le contraire de la danse du ventre, et remue les fesses agréablement (Argot du peuple). =SECOUSSE=: Dans le peuple, on dit d’une jolie fille pour indiquer qu’on coucherait volontiers avec elle: elle vaut la _secousse_. C’est suffisamment clair (Argot du peuple). _N._ =SEIGNEUR À MUSIQUE=: Assassin (Argot des voleurs). =SE METTRE À TABLE=: Dénoncer, _manger_ sur le dos d’un complice (Argot des voleurs). =V.= _Mouton_. =SE METTRE LA CORDE AU COU=: Se marier. Le peuple se souvient de la vieille chanson: Pan, pan, mariez-vous, Mettez-vous dans la misère; Pan, pan, mariez-vous, Mettez-vous _la corde_ au cou. (Argot du peuple). =S’EMBROCHINER=: Se coller avec une femme. Synonyme de _s’acoquiner_ (Argot du peuple). =SENTIR MAUVAIS=: Quand un voleur est sur le point d’être pris, quand on éveille un condamné à mort pour _sauter le pas_, quand on est embarqué dans une sale affaire, cela _sent mauvais_ (Argot du peuple). _N._ =SENTIR LE LAPIN=: Après avoir dansé toute une nuit, une femme sue des aisselles et d’ailleurs; elle _sent le lapin_. On sait que lorsqu’on ouvre le ventre de cet animal, une odeur chaude et nauséabonde vous prend au nez et à la gorge (Argot du peuple). =S’EN FOUTRE COMME UN POISSON D’UNE POMME=: Se moquer de tout et de tous. Mettre l’opinion et le quand dira-t-on sous ses pieds (Argot du peuple). =S’EN FOUTRE COMME D’UNE GUIGNE=: Se moquer de tout. On dit également: _Je m’en moque comme de ma première chemise._ C’est une nouvelle secte créée par les indifférents: les _j’men foutistes_ (Argot du peuple). _N._ =SENTINELLES=: Étrons déposés le long des murs par des passants pressés (Argot du peuple). =SENTIR LE ROUSSI=: Synonyme de _sentir mauvais_ (Argot du peuple). _N._ =SERINGUE=: Machine à vapeur qui fonctionne mal; allusion au bruit du piston (Argot des ouvriers). =SERINER=: Divulguer. _L. L._ _Seriner_: Apprendre quelque chose à quelqu’un qui a la tête dure, en lui _serinant_ sans cesse. Vient d’un petit instrument qui n’a qu’un air: _la serinette_. On _serine_ un merle, un geai, un chanteur ignorant la musique, une leçon, un discours; en un mot _seriner_ veut dire apprendre (Argot du peuple). _N._ =SERINETTE=: Jouer un air de _serinette_ à quelqu’un (Argot des voleurs). =V.= _Maîtres chanteurs_. =SERRÉ=: =V.= _Gerbé_. =SERRER SA CEINTURE D’UN CRAN=: Compression du ventre, afin d’empêcher les intestins de crier famine (Argot du peuple). =SERRER LA CUILLÈRE= (Se): Poignée de main. Par abréviation, on dit: je te la _serre_, ou bien encore: _serre_-moi la _pince_ (Argot du peuple). _SERRER LA VIS_: Étrangler quelqu’un (Argot du peuple). =SERGOT=: =V.= _Bec de gaz_. =SERPILLÈRE=: Soutane du curé (Argot des voleurs). =SERPILLIÈRE=: Tablier des carabins (Argot des voleurs). =SERVIR DE BELLE=: Dénoncer un complice faussement (Argot des voleurs). =SERVIR= (Faire): Faire arrêter quelqu’un (Argot des voleurs). =SEZIÈRES=: Lui (Argot des voleurs). =SIFFLER AU DISQUE=: Demander de l’argent à quelqu’un; le solliciter d’ouvrir son porte-monnaie. Allusion au mécanicien qui _siffle au disque_ pour demander l’ouverture de la voie (Argot du peuple). =SIFFLET D’ÉBÈNE=: =V.= _Habit à queue de morue_. =SIGNER DES ORTEILS=: Le pendu, dans ses derniers tressaillements, agite les pieds (Argot du peuple). =SIGUE=: Pièce de vingt francs (Argot des voleurs). =SIGUE= (Un demi): Pièce de dix francs (Argot des voleurs). =SIME=: Patrouille. J’ai cherché en vain la raison de cette expression, elle n’a pu m’être expliquée, même par des récédivistes; comme elle est usuelle, je la donne (Argot des voleurs). =SIMONE= (La): Vol à la tire-lire. Ce vol est pratiqué par de faux vidangeurs. On nomme ces voleurs des _simonneurs_ parce que ce truc fut inventé par un nommé Simon (Argot des voleurs). =SINGE=: Patron. Presque tous les corps de métiers, à l’exception des chapeliers, nomment leur patron un _singe_. _Singe_, ouvrier compositeur. Ce n’est pourtant pas dans un atelier de typographie qu’il faut chercher des _grimaces_ (Argot du peuple). =SINGLEURS=: Les doigts (Argot du peuple). =V.= _Salsifits_. =SINVE=: Bonne tête, bon à _fabriquer_. Synonyme de _pante argoté_. _Affranchir un sinve_: rendre un imbécile, canaille et voleur. Il n’y a souvent pas grande besogne à faire (Argot des voleurs). =SIROP DE MACCHABÉE=: Allusion aux gens qui se noient. Ils _sirotent_ bien malgré eux l’_eau_ de la rivière (Argot des voleurs). =SKATING À MOUCHE=: La tête. Les mouches, quand l’homme est chauve, y patinent à leur aise (Argot du peuple). _N._ =SOIFFARD=: Homme qui a toujours _soif_. Dans le peuple, comme superlatif, on dit: Il boirait la mer et les poissons (Argot du peuple). =SOIFFER=: Boire comme une éponge (Argot du peuple). =SOISSONNAIS=: Des haricots (Argot des voleurs). =SOLDE=: Quand un négociant veut liquider, il _solde_ le restant de ses marchandises. Elles sont généralement achetées par des juifs qui, à leur tour les _soldent_, partout, où ils peuvent en y joignant souvent des marchandises volées (Argot du peuple). =SOLIR=: Vendre. Ce mot a donné naissance à une expression des plus pittoresques. Pour dire que l’on achète sur _parole_, on emploie cette phrase: _Solir sur le verbe_ (Argot des voleurs). =SOLLICEUR DE ZIF=: Commis-voyageur marron qui vend sur faux échantillons. C’est une variété du _goureur_. _Zif_ veut dire marchandise imaginaire. Le _solliceur à la pogne_ est le frère du _solliceur de zif_ (Argot des voleurs). =SONDEUR=: Avocat. _L. L._ _Sondeur_, _sonder_ quelqu’un pour savoir ce qu’il a dans le ventre. Allusion au _sondage_ d’un terrain pour en reconnaître la nature (Argot du peuple). _N._ =SONNER=: Quand un client fait du tapage dans une maison de tolérance, le garçon le jette à la porte, et s’il se rebiffe, il lui casse la tête sur l’angle du trottoir; la tête a _sonné_ (Argot des souteneurs). _N._ =SONNETTES=: Pièce de cent sous. Allusion au tintement que produisent en se heurtant les pièces, dans la poche du pantalon (Argot du peuple). =SONNETTES=: Grignenaudes de boue qui pendent aux poils des chiens. _A. D._ _Sonnette_ s’applique à toutes les _grignenaudes_ qu’elles soient de boue ou d’autres matières. Inutile d’insister (Argot du peuple). SORBONNE: Tête. Vieille expression; on lit en effet, dans la chanson du _Canstel_: Des réflexions m’trottaient dans la _Sorbonne_. (Argot des voleurs). =SORGUE=: La nuit (Argot des voleurs). =SORGUER=: Dormir. C’est une très vieille expression. D’autres écrivent _sorgne_; c’est une erreur (Argot des voleurs). =SORGUER À LA PAIRE=: Coucher à deux (Argot des voleurs). =SORGUEUR=: Voleur de nuit (Argot des voleurs). =SORTE=: Quand un camarade quitte son _rang_ pour aller raconter à un copain une histoire de brigand inventée de toutes pièces, l’autre lui répond: —Laisse-moi avec ta _sorte_. Pour une mauvaise plaisanterie faite à un camarade, la réponse est la même. L’expression _sorte_ vient de ce que, lorsqu’il manque des caractères dans une _casse_, la _sorte_ est absente. _Sortier_, celui qui fait des _sortes_ (Argot d’imprimerie). =SORLOTS=: Souliers (Argot du peuple). =V.= _Ripatons_. =STRAPONTIN=: Femme qui a l’estomac bien garni. Elle possède un _strapontin_ supérieurement rembourré—ce n’est pourtant pas une place pour s’asseoir. On appelle aussi _strapontin_ la tournure que les femmes mettent sous leurs jupons, pour paraître avoir un postérieur engageant (Argot du peuple). _N._ =SOUBASSEMENT=: Les pieds. Ils supportent le corps comme le _soubassement_ d’un piédestal supporte la statue (Argot du peuple). =SOUFFLET= (Le vol au): Ce genre de vol est très original, il est à la portée de tous et ne demande ni instrument ni apprentissage. Il s’agit simplement d’entrer dans un magasin au moment où une femme tire son porte-monnaie de sa poche pour solder une emplète, de se précipiter en lui flanquant un _soufflet_ à en voir trente-six chandelles, en lui disant à voix haute: —Ah! coquine, voilà où passe l’argent du ménage. Pendant que la femme revient de sa surprise, le faux mari est loin (Argot des voleurs). =SOUFFLET=: Le derrière. Il ne fait guère bon être sous le vent qu’il produit (Argot du peuple). =SOUFFLEUR DE BOUDIN=: Individu à visage boursouflé, joufflu. Allusion au compagnon charcutier dont les joues gonflent quand il _souffle_ dans le boyau. Cette expression est également employée d’une autre manière, sous forme de proposition (Argot du peuple). _N._ =SOUFFRANTES PERLÉES=: Allumettes (Argot des voleurs). =SOULOGRAPHE=: Pochard qui prend trop souvent la _barbe_. _Soulographie_ (en avoir une belle): être pochard (Argot d’imprimerie). =SOULOIR=: Un verre. L’allusion est claire; plus le pochard boit de _verres_, plus il est _saoul_ (Argot du peuple). _N._ =SOULOIR DES RATICHONS=: Autel sur lequel le prêtre dit la messe. La figure est fausse; c’est le _ciboire_ qui contient le vin qui est le _souloir_ (Argot des voleurs). =SOUPAPE=: Casquette (Argot des souteneurs). =SOUPE À L’HERBE= (En manger une): Aller gouaper dans les champs sans avoir le sou et s’allonger sur l’herbe pour dormir: —Qui dort dîne (Argot du peuple). _N._ =SOUPE ET LE BŒUF=: La femme dit cela du mari et, naturellement, le mari de sa femme. Synonyme de _pot-au-feu_. Cette expression a donné naissance à un dicton qui est très ancien: —Toujours du _bouilli_, jamais de _rôti_ (Argot du peuple). _N._ =SOUPÉ DE TA FIOLE=: J’ai assez de ta figure (Argot du peuple). _N._ =SOUS PRESSE=: Femme très occupée sur sa chaise longue à écouter le récit d’un explorateur (Argot des filles). _N._ =SOURICIÈRE= (La): Est une annexe du Dépôt de la Préfecture de Police; les prévenus passent là avant de comparaître devant les chambres correctionnelles; ils y repassent après jugement pour monter en panier à salade et être dirigés sur les prisons où ils doivent subir leur peine. La _souricière_ est aussi appelée _les trente-six carreaux_, parce que chaque fenêtre a ce nombre de vitres. Ou dit aussi: _établir une souricière_ pour pincer les complices qui viennent au gîte (Argot des voleurs). =SOURICIÈRE=: Cabaret connu de la police, tenu par un patron qui _nonne_ sur _l’orgue_ de ses clients dont la plupart sont des voleurs. La pêche se fait là sans hameçon (Argot des voleurs). =SOURDOCHE=: Lanterne sourde (Argot des voleurs). =SOUTENEUR=: Individu qui vit des filles qui se livrent à la prostitution, fainéant, voleur et assassin si l’occasion se présente; on le trouve en haut comme en bas de l’échelle sociale (Argot du peuple). =SOUS-VENTRIÈRE=: Écharpe. —As-tu vu le _quart-d’œil_ avec sa _sous-ventrière_, y la _dégotte_ mal? Allusion à la _sous-ventrière_ du cheval (Argot du peuple). =STORES=: Paupières qui s’abaissent et se relèvent à volonté (Argot des voleurs). =STUC=: Part de vol. Synonyme de _fade_, comme _stuquer_ (partager) l’est de _fader_. _Stuquer_ est encore pris dans le sens d’_étrenner_: recevoir des coups. —La _gosse_ a _stuqué_ (Argot du peuple). _N._ =SUBLIMER=: Travailler alors que les autres dorment. Il faut, en effet, être _sublime_ de courage. Cela ne se voit guère de nos jours, où huit heures de travail c’est encore de trop, ce qui n’empêche pas les poètes de chanter le _sublime_ ouvrier (Argot du peuple). =SUCE-CANELLE=: Ivrogne invétéré qui _suce_ jusqu’à la dernière goutte. Une vieille chanson que le pitre de Moreau, le tireur de cartes, récitait sur la place de la Bastille, vers 1848-1849, dit: Si je meurs que l’on m’enterre Dans la cave où est le vin, Le nez contre la muraille Et la tête sous le robin. S’il en reste une goutte encore, Ce sera pour me rafraîchir, Et si le tonneau défonce, J’en boirai à mon loisir. (Argot du peuple). =SUCE-LARBIN=: Bureau de placement (Argot des voleurs). =SUCER LA PRALINE=: Il est absolument impossible d’expliquer cette expression (Argot des filles). =V.= _Accouplées_. =SUCER LA POMME= (Se): S’embrasser. Allusion au moutard qui _suce une pomme_ avant de la manger (Argot du peuple). _N._ =SUCER UNE PÈCHE=: Boire un coup (Argot du peuple). =SUÇON=: Faire une consommation fantastique de sucres d’orge. _L. L._ _Suçon_: en faire un sur l’épaule ou sur la gorge d’une jolie femme, ce n’est pas précisément _sucer_ du sucre d’orge, c’est lui faire venir le sang à la peau. Ce qui a donné naissance à cette expression: ce n’est pas de l’amour, c’est de la rage, pour ceux qui embrassent de cette manière (Argot du peuple). _N._ =SUCRE DE POMME=: Pince qui sert à fracturer les portes. —Avant de _cavaler_ assure-toi que ton _sucre de pomme_ pourra _pessigner_ la _lourde_ (Argot des voleurs). _N._ =SUCRÉ=: Se dit d’une femme mijaurée: elle fait sa _sucrée_. Se croire plus _sucré_ qu’un autre: s’imaginer lui être supérieur. Il a été _sucré_ pour _salé_. Les joueurs ont adopté cette expression pour marquer les points avec des jetons: il faut _sucrer_ monsieur (Argot du peuple). _N._ =SUIFFART=: Grec habile à corriger le hasard, voleur cosmopolite qu’on rencontre dans tous les endroits où l’on joue. Il est connu sous différents noms: _graisseur_, _bédouin_, _philosophe_ (Argot des joueurs). =SUIVEUR=: Homme tenace qui _suit_ les femmes dans la rue; quand il tombe sur une vierge il la _suit_ jusqu’à temps qu’il _la perde_ (Argot du peuple). _N._ =SURBINE=: Surveillance. Être en _surbine_: être surveillé. Rompre sa _surbine_: quitter la ville où l’on était en surveillance pour aller dans une autre ville. Autrefois on disait: _rompre son banc_; c’est vieux jeu (Argot des voleurs). =SURFINE=: Sœur de charité (Argot des voleurs). _N._ =SURGERBER=: Être condamné en appel (Argot des voleurs). =SURIN=: Couteau. _Surin muet_: canne plombée; elle _surine_ sans bruit. =SURINER=: Assassiner à coups de couteau. Cette expression remplace celle de _chouriner_ (Argot des voleurs). =SŒURS= (Les deux): Nattes de cheveux que les femmes portent tressées sur leurs épaules. Mes _deux sœurs_, pour: testicules (Argot des voyous). =SYDONIE=: La tête de carton, ou le mannequin sur lesquels la modiste et la couturière essayent leurs chapeaux et leurs robes (Argot du peuple). _N._ =SYSTÈME=: Portion servie aux prisonniers dans les maisons centrales (Argot des voleurs). =V.= _Bonde_. T =TABAC=: Misère. —Je suis dans le _tabac mistoufle_ (Argot du peuple). =TABAR=: Manteau. Cette expression est connue depuis le XV^er siècle (Argot des voleurs). =TABLE RASE=: Faire un nettoyage complet dans une maison, liquider un arriéré, renouveler un personnel après avoir fait _table rase_ (Argot du peuple). =TAF=: Individu qui a peur de son ombre. Qui a le _trac_, qui serre les fesses à la moindre alerte (Argot du peuple). =TAFFEUR=: Poltron. —Il est tellement _taffeur_ que l’on ne lui fourrerait pas une feuille de papier à cigarette entre les fesses (Argot du peuple). _N._ =TAILLER UNE PLUME=: Il est des employés qui se servent encore de plumes d’oie; à la fin du mois, ils vont s’en faire _tailler_ chez des spécialistes (Argot du peuple). _N._ =TALBIN=: Billet. _Talbin d’altèque_, billet de banque. Un billet de faveur pour un théâtre quelconque, se nomme un _talbin d’encarade_. Mot à mot: billet d’entrée. Les voleurs disent aussi de l’ordre du Parquet, de l’ordre de les écrouer à Mazas ou au Dépôt: —_Mince_ de _biffeton d’encarade_ (Argot des voleurs). _N._ =TALBIN=: Huissier. Allusion ce à qu’il _talbine_ un prévenu ou un témoin pour l’assigner en police correctionnelle. _Talbiner_, synonyme d’assigner (Argot des voleurs) _N._ =TALONS COURTS= (Avoir les): Fille ou femme qui succombe sans résistance. L’image n’est pas exacte; ce fait ne se produit généralement que lorsqu’une femme porte des _talons hauts_; elle perd alors l’équilibre facilement (Argot du peuple). =TAMBOUILLE=: Ragoût, _fricot_. _Faire la tambouille_, faire sa cuisine. _A. D._ _Tambouille_: battre. —Je vais te foutre une _tambouille_ que le tonnerre de Dieu en prendra les armes (Argot du peuple). _N._ =TAMPONNER=: Donner ou recevoir un coup de _tampon_—un coup de poing. Allusion au choc de deux trains qui se _tamponnent_ (Argot du peuple). _N._ =TANNANT=: Assommant, ennuyeux. À Corbeil, on devait un dimanche jouer les _Mousquetaires_; la troupe y donnait des représentations depuis environ un mois. L’actrice chargée des grands premiers rôles, était mauvaise à faire ronfler un bec de gaz. Au moment du lever du rideau, le régisseur dut faire une annonce. L’actrice avait dû partir précipitamment pour enterrer son père. Il annonça son départ ainsi: Madame X..., ne pourra jouer ce soir, elle _est à Nantes_ pour les obsèques de son père. Un loustic du parterre s’écria: —Il y a longtemps qu’elle _est tannante_. Ouf! (Argot du peuple). _N._ =TANNER LE CUIR=: Battre quelqu’un. Allusion au _tanneur_ qui bat la peau pour la rendre souple (Argot du peuple). =TANTE=: Pédéraste, homme à double face qui retourne volontiers la tête du côté du mur (Argot du peuple). _N._ =TANTE=: Le Mont-de-Piété. —Je porte ma _toquante_ chez ma _tante_, mon oncle en aura soin (Argot du peuple). =TAP=: Se disait autrefois des condamnés à être exposés publiquement et marqués au fer rouge. Travaux forcés à temps, _T. F. T._ Travaux forcés à perpétuité _T. F. P._ _Faire le tapin_ c’était être exposé (Argot des voleurs). _N._ =TAPANCE=: Maîtresse ou femme légitime. Les typographes nomment ainsi la femme parce qu’elle _tape_ souvent à la poche ou... autrement. _La tapance du mec_, c’est la femme du patron. —Elle est _rien râleuse la tapance_ du _mec_, elle _boufferait des cadratins_ à la sauce blanche (Argot d’imprimerie). _N._ =TAPE= (En recevoir une): Recevoir un coup ou le donner. Voir ses espérances s’effondrer. Recevoir une _tape_ moralement (Argot du peuple). =TAPE À L’ŒIL=: =V.= _Œil au beurre noir_. =TAPÉE=: Foule, grande réunion de personnes. _A. D._ _Tapée_ veut dire beaucoup, il est vrai, mais ce n’est pas le sens que lui donne le peuple. _Tapée_ se dit d’une jolie femme: —Elle est _tapée_. Une phrase bien écrite ou bien dite: —C’est _tapé_ (Argot du peuple). _N._ =TAPER=: _Taper_ quelqu’un, lui emprunter de l’argent. On lui refuse en lui disant également: —Tu peux te _taper_. Synonyme de: Tu peux te _fouiller_ (Argot du peuple). =TAPER À TOUR DE BRAS=: Cogner vigoureusement. —J’ai beau _taper_ ma femme _à tour de bras_, quand elle me fait un _impair_, elle me _gobe_ tout de même (Argot du peuple). =TAPER DANS LE TAS=: Prendre une femme au hasard. _Taper dans le tas_: attaquer un ouvrage avec vigueur. _Taper dans le tas_: frapper dans le _tas_ d’une bande de rôdeurs qui vous attaquent (Argot du peuple). =TAPETTE=: Pédéraste _passif_, il se fait taper dans le tas (Argot du peuple). _N._ =TAPETTE=: Homme qui parle sans cesse. —Il en a une rude _tapette_. On dit aussi: forte _platine_ (Argot du peuple). =TAPIQUER=: Habiter (Argot dos voleurs). =TAPIS DE MALADES=: Cantines des prisons (Argot des voleurs). =V.= _Cargots_. =TAQUINER LE GOUJON=: Le pêcheur à la ligne _taquine le goujon_. Il est en effet _taquiné_ d’être pris à l’hameçon (Argot du peuple). =TAQUINER LE CARTON=: Jouer aux cartes. Je ne sais pas si les cartes sont _taquinées_ d’être _battues_, mais le joueur l’est rudement quand il perd (Argot du peuple). _N._ =TARAUDÉE=: En mécanique, _tarauder_ un écrou ou un boulon, c’est faire un pas de vis. On a appliqué cette expression pour dire que l’on bat quelqu’un. —Je lui ai foutu une rude _taraudée_. —Je vais te _tarauder_ les côtes (Argot du peuple). _N._ =TAROQUAGE=: Piquer les cartes d’un signe imperceptible. Ce _truc_ fut employé pour la première fois, par le fameux grec Garcia (Argot des grecs). =TAROQUE=: La marque du linge. Quand les voleurs ont dévalisé la voiture d’un _papillon_, ils _détaroquent_ le linge pour le revendre aux _meuniers_ (Argot des voleurs). _N._ =TARTINES=: Souliers avachis et éculés. —Ah! mon vieux, quelles sales _tartines_ (Argot du peuple). =TARTIR=: Vider ses intestins. Quand la marchandise est molle, elle s’aplatit en rond, comme une _tarte_, dont, d’ailleurs, elle a la couleur. Dans le peuple, on dit: —Je viens de faire une _tarte bourbonnaise_. Encore un emprunt à Rabelais (Argot des voleurs). =TAS= (Être sur le): Être à l’ouvrage. —Nous avons un tas de besogne pour _beaucoup_. —J’ai un _tas_ de choses à vous écrire, pour quantité. —Ma _marmite_ est sur le _tas_. Pour indiquer qu’elle est couchée avec un _miché_ (Argot du peuple et des souteneurs). _N._ =TASSO=: Nez. —Je vais te _bouffer_ le _tasso_ (Argot du peuple). =V.= _Blaire_. =TATA=: Les enfants, les petites filles disent de l’une d’elles qui fait des manières: —Elle fait sa _tata_. Dans le monde des _équivoques_ une _tata_, c’est le _passif_. Il existe un chanson sur ce sujet: C’est nous qui sommes les _tatas_ (Argot du peuple). =TÂTE-MINETTE=: Sage-femme (Argot du peuple). =TÂTEUSE=: Fausse clé. Ce nom indique bien l’action; avec une fausse clé, si bien faite soit elle, il faut que le voleur _tâte_ la serrure avant de l’ouvrir (Argot des voleurs). =TAUDION=: Chambre malpropre, infecte. —N’entrez pas dans mon _taudion_, un chat n’y trouverait pas ses petits. —Sa chambre est un _taudis_. On dit aussi un _chenil_ (Argot du peuple). =TAULE= ou =TÔLE=: La maison. Les maîtres de maisons de tolérance sont appelés des _tôliers_. C’est une allusion à la _tôle_ qui barde les portes de ces maisons dans quelques villes de province, pour les défendre contre les tapageurs. C’est _tôle_ qui est le vrai mot (Argot des souteneurs). _N._ =TAUPER=: Travailler. _L. L._ _Tauper_ veut dire _accoster_. Quand les compagnons faisaient le tour de France, et que deux marchaient en sens inverse sur la grande route, ils s’interpellaient: —_Tope_, pays, quelle vocation? —Serrurier. —Passe au large. S’ils étaient du même métier, ou de la même société, ils fraternisaient, autrement ils se battaient. Cela s’écrit _toper_ et non _tauper_. _Toper_ veut aussi dire: conclure. —Affaire faite, _tope_-là (Argot du peuple). =TENDEUR=: Homme qui est toujours prêt à satisfaire une femme gourmande et passionnée (Argot du peuple). =TERRER=: Tuer. Mot à mot: préparer les gens pour la terre. C’est cette expression qui a donné naissance au mot _enfouissage_ pour les libre-penseurs qui ne passent pas par l’église (Argot des voleurs et du peuple). _N._ =TERREUR=: Nom donné aux maquereaux dans les anciennes banlieues de Paris; il y a généralement une _terreur_ par quartier (Argot des souteneurs). =TERRIÈRE=: Raccrocheuse qui pousse son _persil_ dans les terrains vagues (Argot des souteneurs). =TESIÈRE=: Toi. Il y a plusieurs variantes de ce mot: _tesigue_, _tesigo_ et _tésingard_. _Tesière_ est l’expression la plus usitée. —La _Môme-Livarot_ a un _béguin carabiné_ pour _tesière_ (Argot des souteneurs). =TÉTASSES=: Seins qui pendent jusque dans les bas de celles qui les possèdent (Argot du peuple). =V.= _Calebasse_. =TÊTE CARRÉE=: =V.= _Alboche_. =TÊTE DE BOIS=: Visage peu expressif. Dans le peuple, on dit aussi: il a été sculpté dans un marron d’Inde, quand l’individu à qui cette expression s’adresse est laid à faire peur (Argot du peuple). =TÊTE DE CARTON=: Visage sans expression. Allusion à la poupée (Joséphine) des modistes (Argot du peuple). =TÊTE DE CHOUCROUTE=: =V.= _Alboche_. =TÊTE DE PIOCHE=: Individu à la tête dure qui ne veut rien apprendre. Allusion à la dureté de l’acier trempé de la _pioche_ (Argot du peuple). _N._ =TÉTER UNE GOUTTE=: Faire _téter une goutte_, à quelqu’un: le battre. _Boire une goutte_: se noyer. Au régiment quand un soldat est atteint de la nostalgie, les camarades lui disent: —Tu voudrais bien aller _téter une goutte_. _Téter une goutte_, boire un verre sur le _zinc_ (Argot du peuple). _N._ =TÊTES DE CLOUS=: Caractères usés, qui n’en peuvent plus. —Il est rien _dégueulbif_, le canard que nous composons avec des _têtes de clous_ (Argot d’imprimerie). =TICHE=: Bénéfices. Synonyme de _guelte_. Prime que les directeurs de magasins de nouveautés donnent aux commis qui parviennent à vendre de la marchandise avariée ou des rossignols. _Tiche_, en ce cas, est de la même famille qu’_affure_ (part de vol) (Argot des calicots). =TIERCE= (La): Association de faux monnayeurs; comme ils sont généralement trois: le _fabricateur_, l’_émetteur_ et un complice de réserve, de ce nombre, _la tierce_ (Argot des voleurs). =TIFFES=: Les cheveux. _Tiffe_ est une corruption de _tignasse_ (Argot des voleurs). _N._ =TIGNER D’ESBROUFFE=: =V.= _Riffe_. =TIMBRÉ=: À moitié fou. Avoir reçu un coup de marteau (Argot du peuple). =V.= _Mailloché_. =TINE=: La foule. Réunion de souteneurs et de voleurs. Delvau dit dédaigneusement que cette expression est due à «quelques Vaugelas de la Roquette», que le vrai mot est _tigne_. Pas le moins du monde; dans le peuple on dit: _Tigne_-le, pour: le prendre par les cheveux. _Tigner_ est également synonyme de _rechigner_ (Argot des voleurs). _N._ =TIOLÉE= (En avoir une): Se dit dans le peuple d’une famille qui a de nombreux enfants: Ils sont toute une _tiolée_. C’est une corruption du mot _tôle_ qui veut dire maison. Il y en a plein la _tôle_ (Argot du peuple). _N._ =TIRANTES=: Jarretières. _A. D._ Le mot est impropre; c’est _serrantes_. En effet, la jarretière _serre_ la jambe ou la cuisse suivant la façon dont elle est placée. Il est vrai qu’elle _tire_ le bas, mais c’est en le _serrant_ (Argot des voleurs). =TIRANTS=: Bas. _Tirants radoucis_: bas de soie. _Tirants de tremilet_: bas de fil. _Tirants de filsangue_: bas de filoselle. _Tirants à la manque_: bas déchirés. Allusion aux mailles qui _manquent_ (Argot des voleurs). TIRE-JUS: Mouchoir. Le mot n’est pas ragoûtant, mais il exprime bien le fait de _tirer le jus_ des narines (Argot du peuple). _N._ =TIRELIRE=: La tête. Allusion à la bouche qui représente exactement l’ouverture par laquelle on introduit les pièces de monnaies dans une _tirelire_. _Tirelire_ veut aussi dire le contraire de la tête, mais celle-là ne contient que de la monnaie pour la compagnie Richer (Argot du peuple). _N._ =TIRELIRE=: Toutes les filles publiques mettent l’argent que les _michés_ leur donnent pour leurs _gants_, dans leurs bas. Leurs bas sont des _tirelires_ (Argot des souteneurs) _N._ =TIRE-MONDE= (Madame). =V.= _Guette au trou_. =TIRER LE DIABLE PAR LA QUEUE=: Il y en a (la moitié de Paris) qui passent leur temps à cette besogne, sans être jamais avancés un jour plus que l’autre. La misère ne les lâche pas. Ce pauvre _diable_, depuis le temps que l’on la lui _tire_, n’en devrait plus avoir (Argot du peuple). =TIRER UN BOUCHON=: Voleur qui fait dix ans de prison (Argot des voleurs). =TIRER LA LANGUE=: Courir à en perdre haleine. Faire _tirer la langue_ à un débiteur en lui promettant de l’argent. _Tirer la langue_: avoir faim, attendre après quelque chose qui ne vient jamais (Argot du peuple). _N._ =TOC=: Bijoux de mauvais aloi. Personnage contrefait; se dit de tout ce qui n’est ni bien ni correct (Argot du peuple). =TOCASSE=: Méchant. On dit également _tocasserie_ pour méchanceté. _Tocasserie_ est assurément une corruption de _tracasserie_ (Argot des voleurs). =TOCASSON=: Fille qui depuis des années est dans la circulation, qui veut conserver des airs de jeunesse et se refuse à _dételer_ son vieux fiacre. —Crois-tu que c’est pas dégoûtant, la mère _Tocasson_ qui _trime_ encore à 72 _berges_ (Argot des filles). =TOILETTE= (La): Avant le règne de M. Deibler, la _toilette_ des condamnés à mort durait une grande demi-heure, une éternité; aujourd’hui, le mot est resté, mais pour la forme seulement, car on ne la leur fait plus. Chaque semaine, les condamnés sont rasés et ont les cheveux coupés: on leur épargne ainsi une torture inutile. Heindrich, l’avant-dernier bourreau, recommandait toujours à ses aides de se dépêcher pour ne pas laisser le condamné _vieillir_ (Argot des voleurs). =TOLLARD=: Bureau. _A. D._ C’est une grave erreur. _Tollard_, dans les prisons centrales, veut dire: _bourreau_. _Bureau_, c’est _burlingue_ (Argot des voleurs). _N._ =TOMBER MALADE=: Être arrêté, alors qu’on se croyait en sûreté. Si l’arrestation a lieu à la rencontre, c’est-à-dire si on rencontre fortuitement l’agent qui vous recherchait, on dit: tomber le nez dessus (Argot du peuple). _N._ =TOMBER À PIC=: On va se mettre à table, vous _tombez à pic_. Mot à mot: Vous arrivez bien. —J’étais dans la _purée_, ma tante vient de _claquer à pic_ (Argot du peuple). =TOMBER PILE=: Tomber sur le cul. Les ouvriers typographes disent: —Il est tombé sur le _côté de deux_ (Argot du peuple). =TOMBER SUR LE DOS ET SE FAIRE UNE BOSSE AU VENTRE=: Cela paraît être un fait extraordinaire; pourtant rien n’est plus commun. C’est la _secousse_ qui est cause de ce phénomène qui dure neuf mois (Argot du peuple). =TOMBEUR=: Homme fort. Lutteur qui _tombe_ tous ses adversaires. _Tomber_ une femme: la séduire, la faire céder. Dans les cercles, le croupier dit: cinq louis qui _tombent_ (Argot du peuple). =TOQUANTE=: Montre de peu de valeur. Double sens: elle fait _tic-toc_ et elle est en _toc_ (Argot des voleurs). =TOQUARD=: A. Delvau et M. Loredan Larchey écrivent _tocard_. Ces écrivains, pas plus que moi, n’ont inventé l’expression; pour trouver la véritable orthographe, il était donc inutile de remonter à la source. Je trouve dans une vieille chanson ceci: Maint’nant tu t’_toquardes_ de la frime, Tes deux oranges tombent dans tes bas. T’es des mois sans changer de lime, Y’a même des mois qu’tu n’en a pas. C’est donc _toquard_ qui est le vrai mot (Argot du peuple). =TORCHER LE CUL DE MERDE= (Se): Ce n’est pas le comble de la propreté, mais cette expression caractéristique dit bien le peu de cas que l’on fait de quelqu’un et combien on le méprise (Argot du peuple). =TORD BOYAUX=: Mauvaise eau-de-vie. Elle corrode l’estomac et _tord_ littéralement les _boyaux_ des malheureux abrutis qui recherchent cet horrible breuvage (Argot du peuple). =TORPILLE D’OCCASION=: Fille publique. Ainsi nommée parce qu’elle fait _sauter_ la bourse des _pantes_ (Argot des souteneurs). =TORTILLANTE=: Le cep de vigne qui pousse en espalier devant les maisons dans les campagnes. Allusion au bois qui se _tortille_ de mille façons. Claude Tilliera écrit dans un de ses pamphlets: —Nos pères étaient faits de ce bois noueux et _tortillé_ dont on fait les forts (Argot du peuple). =TORTILLARD=: Fil de fer (Argot des voleurs). =TORTILLER=: Manger. —Il te tortille un morceau de _lartif_ en une _broquille_. _Se tortiller_ pour ne pas vouloir dire la vérité: chercher des faux-fuyants. —As-tu vu comme elle _tortille_ des fesses en marchant? —Il n’y a pas à _tortiller du cul_, il faut que tu avoues. —Il ne faut pas _tortiller_, faut y passer (Argot du peuple). =TORTU=: Le vin. —Allons, mastroquet, sers-nous deux _cholettes de tortu_. _Cholette_: chopine, _tortu_; le vin, en souvenir du _bois tortu_ qui produit le raisin (Argot du peuple). =TORTORER=: Manger (Argot des souteneurs). =TORTORENT=: Gargote où l’on mange (Argot des souteneurs). =TOUILLER=: Remuer. —_Touille_ ton café pour faire fondre le sucre (Argot du peuple). _N._ =TOUPET= (Avoir du): Avoir un aplomb formidable. Se payer de _toupet_ pour affronter quelqu’un. On dit dans le peuple: —Il a plus de _toupet_ que de cheveux (Argot du peuple). =TOUR (LA)=: La Conciergerie et le Palais de justice. Allusion à la tour de l’horloge. À ce propos, une légende populaire veut que cette horloge ait sonné l’heure du signal pour le massacre de la Saint-Barthélémy (Argot du peuple). =TOUR POINTUE= (La): Préfecture de police (Argot des voyous). =TOURBE= (Être dans la). =V.= _Purée_. =TOURBE=: La lie du peuple. Populace, le plus bas qu’il soit possible de l’imaginer (Argot du peuple). =TOURLADE=: Les forçats, autrefois, quand le bagne était à _Toulon_, appelaient cette ville _Tourlade_. Changement de finale (Argot des voleurs). =TOURNANTE=: Clé. Elle fait en effet _tourner_ le pène dans la serrure (Argot des voleurs). =TOURNANTE=: =V.= _Anguille_. =TOURNE-VIS=: =V.= _Hirondelle de potence_. =TOURNE-VIS=: Chapeau à cornes que portent les gendarmes. Ce terme s’est généralisé, il est employé pour tous les chapeaux quelles que soient leurs formes (Argot du peuple). =TOURNER DE L’ŒIL=: Mourir (Argot du peuple). =TOURNIGUE=: =V.= _Blaire_. =TOURTOUSE=: La corde. _Tourtouser_: lier. _Tourtousier_: le cordier (Argot des voleurs). =TOURTOUSINE=: La ficelle. Allusion à la torsion du chanvre par le cordier (Argot du peuple). =TRAC=: Peur. _Tracquer_: avoir peur. —J’ai un _trac_ à tout casser (Argot du peuple). =V.= _Taf_. =TRAIN 11= (Le): Les jambes. Celui qui ne peut pas se payer de voiture, fiacre ou omnibus, prend le _train 11_. Quand on joue au loto, celui qui appelle les numéros, quand il tire le numéro 11, crie: —11, les deux jambes à ma tante (Argot du peuple). =TRAÎNÉE=: Fille publique qui _traîne_ partout à la recherche de clients. _Traînée_ est un gros terme de mépris employé par le peuple vis-à-vis d’une femme. _Traînée_: synonyme de _rouleuse_ (Argot du peuple). =TRAÎNEUSE=: =V.= _Rôdeuse_. =TRAÎNEUSE=: Robe. Allusion à la _traîne_ de la robe qui balaye les trottoirs. Ou dit également: une _balayeuse_ (Argot du peuple). =TRANCHE-LARD=: Couteau. Allusion au couteau du charcutier. On dit aussi: un _vingt-deux_ (Argot du peuple). =TRANCHE=: Le visage. _Tranche_ est aussi un terme d’amitié et de familiarité: —Tiens, comment vas-tu, ma vieille _tranche_? (Argot du peuple). _N._ =TRAVAILLER DANS LE BÂTIMENT=: Voler avec effraction dans les maisons. L’expression est pittoresque (Argot des voleurs). =TRAVIOLES=: Avoir des inquiétudes. _L. L._ _Travioles_: aller de travers, pochard qui _festonne_. Celui-là est loin d’avoir des inquiétudes, car il ne pense guère au lendemain. Une jeune fille qui _déraille_ et devient rosière de la Maternité, va de _travioles_, de travers dans la vie (Argot du peuple). _N._ =TRÈFLE=: Tabac (Argot du peuple). =TRÉFOIN=: Tabac. Ce mot est très vieux; il est employé par Eugène Suë dans les _Mystères de Paris_. —Pas de _tréfoin_ à mettre dans ma _chiffarde_ (Argot des voleurs). =TREMBLOTTE=: La fièvre. Allusion au _tremblement_ qu’elle produit. On dit d’un homme qui a peur de la moindre des choses: il a la _tremblotte_. C’est aussi un truc employé par les mendiants pour exciter la charité publique; ils font semblant de _trembler_. Mot à mot: de _grelotter_ (Argot du peuple). _N._ =TRÈPE=: Ne veut pas dire la foule, comme le disent les dictionnaires d’argot; ce mot veut dire _clientèle_, d’après Loyssel. Faut pas blaguer, le _trèpe_ est _bath_ Dans ce _taudion_, i s’trouve des _rupins_ Si queuq’s _gonciers_ traînent la savate J’en ai r’bourré qu’ont d’scarpins. (Argot des voleurs). =TRESSER DES CHAUSSONS DE LISIÈRES=: Occupation des prisonniers dans les maisons centrales. —À _tresser des chaussons de lisières_ pendant _dix berges_, j’ai _affuré_ quatre _sigues_! (Argot des voleurs). =TRICHARD=: Tricheur. Voler au jeu (Argot du peuple). =TRICHER=: =V.= _Gêné_. =TRIFOUILLÉE=: Remuer, chercher en bousculant tout. _A. D._ _Trifouillée_, c’est trois fois fouiller, mais le peuple ne donne pas ce sens à cette expression. _Trifouillée_ veut dire battre. —Je vais te coller une _trifouillée_ en cinq sec (Argot du peuple). _N._ =TRIMARD=: Chemin. _Grand trimard_: grande route (Argot des voleurs). =TRIMARDER=: Voyager. Quand un apprenti a appris son état, pour se former, il fait son tour de France. Il _trimarde_, mais en travaillant. Mot à mot: parcourir les grandes routes. Ceux qui _trimardent_ ne sont autre chose que des vagabonds; ils ont une profession, mais ne travaillent jamais. Cette profession leur sert pour mendier. Le truc est des plus simples: Le _trimardeur_, supposons le compositeur typographe, entre dans un atelier avec la quasi-certitude qu’il ne sera pas embauché, c’est ce qu’il souhaite. Il demande _mèche_; on lui répond qu’il n’y a pas de place vacante, alors il lâche son boniment: —Il vient de loin, de Paris; il a été malade en chemin, il est dans la plus affreuse misère, il sollicite la permission de faire la quête. Le patron donne, les compagnons donnent aussi; il savent bien que c’est un fainéant, mais les typos ont bon cœur, ils préfèrent être volés dix fois que d’en refuser une à une misère véritable. Avec ce métier, les _trimardeurs_ sont les gens les plus heureux du monde (Argot d’imprimerie). _N._ =TRIMARDEUSE=: Fille publique qui fait le trottoir. L’asphalte n’est pas la grande route, on l’appelle néanmoins le _trimard_ parce que la fille y _trime_ (Argot des souteneurs). =TRIMANCHER=: Marcher. Même signification que _trimarder_ (Argot du peuple). =TRIMBALLEUR DE REFROIDIS=: Le cocher qui conduit les corbillards. —Ce qui m’emmerde, quand je serai _refroidi_, c’est d’être _trimballé_ par l’_omnibus à coni_ (Argot des voleurs). =TRIMER=: Aller et venir inutilement, se morfondre. _A. D._ De _trimer_ on a fait _trimard_, raccrocher, c’est-à-dire travailler, c’est le vrai sens du mot. —Je _trime_ d’un bout de l’année à l’autre pour élever mes gosses, et je n’en suis pas plus avancé. _Trimer_ veut dire _travailler_ péniblement (Argot du peuple). _N._ =TRINQUER=: Boire en choquant son verre. _Trinquer_: recevoir une volée (Argot du peuple). =TRIPAILLE=: Enfant (Argot des voleurs). =V.= _Loupiau_. _N._ =TRIPATROUILLAGE=: Tripoter dans les poches de quelqu’un. _Tripoter_ dans une caisse ou un tiroir. —Vous n’allez pas bientôt finir de me _tripatouiller_, vous allez me chiffonner, (Argot du peuple). _N._ =TRIPES=: Tétons déformés, élastiques comme un morceau de caoutchouc. Allusion au morceau de tripe que les tripiers nomment le _bonnet_: c’est la panse (Argot du peuple). =TRIPOTÉE=: (En donner ou en recevoir une). —Il a reçu une rude _tripotée_. On dit aussi _tripotée_ pour beaucoup. —J’ai une _tripotée_ d’enfants qui me font perdre la tête (Argot du peuple). =TRIPOTEURS=: Individu qui _tripote_ une femme. Boursier qui _tripote_, à la Bourse, des affaires malpropres et louches. On dit aussi _patricoter_ (Argot du peuple). _N._ =TRIQUE=: Surveillance. _Casser sa trique_, rompre sa surveillance. _Triquer_ (Être): être condamné à la surveillance. Allusion ancienne, quand autrefois les condamnés étaient pendant cinq ou dix ans sous la _trique_ des argousins (Argot des voleurs). =TROGNE=: Le visage. Quand un individu a la _trogne_ couperosée, dans le peuple, on lui lance cette plaisanterie: —C’est ta femme qui boit, et c’est toi qui a le _nez rouge_. Avoir une _trogne_ de vin de Bourgogne, c’est une _trogne_ d’ivrogne (Argot du peuple). =TROGNON=: Expression de tendresse, comme mon petit chat, mon petit lapin bleu. Qu’il est joli, qu’il est mignon, Qu’il est gentil mon p’tit _trognon_. (Argot du peuple). =TROLLER=: Porter. _A. D._ _Troller_ veut dire marcher. —On te voit _troller_ partout, tu ne travailles donc pas? Il existe au faubourg Antoine des ouvriers ébénistes en chambre qui confectionnent des meubles pour leur compte. Ils _trollent_ pour les vendre depuis la rue de la Muette jusqu’à la Bastille, généralement le samedi; ce jour-là, le trottoir se nomme la _trolle_ (Argot des ébénistes). _N._ =TROMBILLE=: Bête, quelle que soit sa race (Argot des voleurs). =TROMBOLLER=: Aimer autrement que platoniquement. —Je vais _tromboller_ ma _gonzesse_ (Argot des souteneurs). =TROMPE-LA-MORT=: Individu condamné par les médecins, qui n’en meurt pas plus vite pour cela. —Il _trompe la mort_ qui le guette. On dit également: —Il a repris du poil de la bête. Cette expression: _trompe la mort_, date de 1848. Un ouvrier forgeron, arrêté sur une barricade, lors de l’insurrection de Juin, fut conduit, avec un groupe de combattants, à la tombée de la nuit, au Champ de Mars, où se faisaient en masse les exécutions sommaires. On fusillait les malheureux rang par rang. Il était au second rang; par une présence d’esprit incroyable, à ce moment suprême, il tomba en même temps que le premier rang; on n’y fit pas attention. Vers onze heures du soir, l’exécution terminée, des tombereaux vinrent enlever les cadavres pour les transporter au cimetière Montmartre et les jeter dans la fosse commune. On ne les recouvrait pas de terre, afin que les familles puissent les reconnaître le lendemain. L’ouvrier avait eu la malchance d’être jeté au fond du tombereau; il était inondé du sang qui coulait sur lui. Pendant le trajet, après des efforts inouïs, il parvint à se hisser au-dessus des cadavres; il sauta à bas de la lugubre voiture sans être aperçu, et alla se cacher chez un ami. Le calme revenu, il rentra à l’atelier. Stupéfaction générale. Les camarades, qui connaissaient l’aventure, lui crièrent: —Tiens! voilà _Trompe la mort_. Il l’avait rudement trompée, car il ne mourut qu’en 1888, à l’âge de quatre-vingts ans. _Trompe la mort_ (Argot du peuple). =TRONCHE=: Tête (Argot des voleurs). =TRONCHE DE REFROIDI=: Fromage de Hollande, connu plus généralement sous le nom de _tête de mort_ (Argot des voleurs). =TRONCHER=: Le vocable s’explique suffisamment par ceci: —Bibi a _tronché_ la môme, elle a _avalé le pépin_ (Argot du peuple). =TRÔNE= (Être sur le): Être assis sur la lunette des _chiottes_. Quand ça va bien, sûrement, on est plus heureux qu’un roi assis sur le trône (Argot du peuple). =TROP CUIT=: Femme ayant des cheveux rouges. —Elle a été trop longtemps enfournée, elle est _trop cuite_ (Argot du peuple). _N._ =TROP TÔT VELÉ=: Enfant venu avant terme. Allusion au veau mort-né. Avorton chétif et malingre (Argot du peuple). =TROTTEUSE=: Montre qui marque les minutes. _Trotteuse_: fille publique infatigable qui _trotte_ du soir au matin pour raccrocher (Argot des souteneurs). =TROTTIN=: Apprenti modiste que l’on rencontre arpentant les rues de Paris, portant une petite boîte qui contient un chapeau. C’est le _gavroche_ femelle des ateliers de modistes. Le mot n’est pas nouveau. Scarron dit quelque part: Ensuite il appelle un _trottin_. (Argot du peuple). =TROTTINETTES=: Bottines (Argot des voleurs). =TROTTOIR=: S’entend de deux façons. _Faire le trottoir_, raccrocher. Il n’est pas nécessaire pour faire le _trottoir_ d’être sur le _trottoir_. Le _trottoir_ est partout où la femme _lève_ l’homme. Pendant l’Exposition de 1889, le _trottoir_ de ces dames était le pont de l’Alma. À ce sujet, on avait fait ce calembourg: —Les putains préfèrent le pont pour voir _le velum_ (Argot des filles). _N._ =TROU DE BALLE=: Le derrière. On dit aussi: _la lumière_ (Argot du peuple). =TROUFFION=: Petit troupier (Argot du peuple). _N._ =TROUILLE=: Domestique malpropre, femme du peuple rougeaude et avachie. _A. D._ _Trouille_ ne se prend pas en ce sens; cela veut dire: tu n’as pas _peur_. _Trouille_ est synonyme de hardiesse. —Tu n’as pas la _trouille_ d’entreprendre une tâche aussi difficile (Argot du peuple). _N._ =TROUILLOTER DE LA HURLETTE=: Puer de la bouche (Argot du peuple). _N._ =TROUVER MAUVAISE= (La): Quand, par un verglas abominable, on se casse la figure, elle est _mauvaise_. Quand votre femme vous pond un gosse tous les ans, elle est _mauvaise_. Quand on a acheté cent mille francs de Panama, elle est _mauvaise_. En un mot on _trouve mauvais_ tout ce qui vous arrive de désagréable dans la vie (Argot du peuple). _N._ =TROUVEUR OU PART À DEUX.= =V.= _Ramastiqueur_. =TROUVEURS-FAUX VENDEURS=: Genre de vol pratiqué aux environs des gares de chemins de fer. Il consiste à feindre de _trouver_ une bague en cuivre placée à l’avance par un complice dans un endroit désigné, et à la vendre comme de l’or à un naïf qui débarque (Argot des voleurs). =V.= _Ramastiqueurs_. _N._ =TRUC=: Connaître le _truc_, être malin. Avoir du _truc_, avoir les moyens de réussir. _Truc_: machine de théâtre employée dans les féeries pour un changement de décors à vue. _Truc_: moyen secret que possède un individu de faire quelque chose (Argot des camelots et des saltimbanques). =TRUCHE=: Est une manière spéciale de voler. Le voleur qui la pratique est un _trucheur_ (Argot des voleurs). =TRUFFE=: Nez, lorsqu’il est gros en forme de groin. Allusion au cochon qui s’en sert pour chercher des _truffes_. Le peuple dit aussi: _piton_ (Argot du peuple). =TRUFFÉ=: Crétin, niais, imbécile. Synonyme d’andouille. On dit dans le peuple: —Il est _truffé_ de bêtise, il arrive de son _patelin_, il n’est pas _dessalé_ (il n’est pas dégrossi). On dit également: —Il est _truffé_ d’argent. _Truffé_, pour: beaucoup (Argot du peuple). =TRUFFE DE SAVETIER=: Des marrons. Le marron remplace la _truffe_ chez le savetier, comme la pomme de terre remplace _l’orange_ pour le Limousin (Argot du peuple). =TRUMEAU=: Comédie ou vaudeville Louis XV. _A. D._ _Trumeau_ signifie vieille femme. On dit dans le peuple: —Sale _trumeau_, ta gueule est bonne à foutre dans les lieux pour faire chier les gens de peur (Argot du peuple). _N._ =TRUQUAGE=: Se dit d’un meuble, d’un tableau ou d’un objet d’art qui a subi un _truquage_ pour lui donner l’apparence de la vétusté ou le style d’une époque. Il y a des _truquages_ célèbres qui ont trompé les plus grands amateurs. Un des plus souvent mystifiés est M. de Rosthschild. Tout le monde a présent à la mémoire le fameux bouclier acheté 100,000 fr., comme datant du XV^e siècle, lequel avait été déniché à Rome chez un brocanteur. Ce bouclier avait été fabriqué de toutes pièces dans une cave de la rue Bourg-Labbé et ne valait pas cent sous (Argot des artistes peintres). _N._ =TRUQUEUR=: Le _truqueur_ est un filou qui va de village en village et de foire en foire, avec un petit jeu de hasard qu’il exploite habilement. Ce jeu est généralement un _chandelier_ fait avec les débris d’un vieux chapeau; il met un sou sur le _chandelier_ qui est placé dans une assiette. Il s’agit, au moyen d’une longue baguette d’osier, de faire tomber le _chandelier_ et que le sou reste dans l’assiette. Cela n’arrive jamais, à moins de connaître le _truc_. Il y a une masse de _truqueurs_, surtout en cette _fin-de-siècle_ où tout est _truc_ pour gagner sa vie (Argot du peuple). _N._ =TUBE=: Chapeau haut de forme. On dit aussi: _tuyau de poêle_ (Argot du peuple). =TUBE=: Le gosier. Dans le peuple, on dit de celui qui a le ventre creux: —Il n’a rien à se mettre dans le _tube_. Boire un bon coup, c’est se _rincer_ le _tube_. —Il est quatre heures, je vais me _coller un peu de fripe dans le tube_. Mot à mot: je vais manger (Argot du peuple). =TUER LE VER=: boire la goutte, le matin, ou un verre de vin blanc. Quand on suppose que le _ver_ est solitaire (dur à tuer), les ouvriers boivent plusieurs tournées, alors ce n’est pas le ver qui est tué, mais bien le buveur. Les voleurs disent également qu’ils ont _tué le ver_ lorsqu’ils ont des remords. Ils ne le _tuent_ pas souvent (Argot du peuple et des voleurs). =TUILE=: Malheur qui arrive à quelqu’un. —J’ai perdu mon porte-monnaie, quelle _tuile_! Quand il arrive inopinément une douzaine de personnes à dîner, lorsqu’il n’y en a que pour deux, la ménagère dit: —Quelle _tuile_ nous tombe sur la tête (Argot du peuple). =TUNE=: Pièce de 5 francs en argent (Argot du peuple). =V.= _Brème de fonds_. =TUNE=: Bicêtre, l’ancien refuge naturel des sujets du roi de _Thunes_. _A. D._ Ce n’est pas le mot _tune_ qui est vrai. C’est _tunobe_. La prison de la Force, démolie en 1850, était ainsi appelée par les prisonniers. Dans les autres dictionnaires d’argot, on ne trouve que _tuneçon_, expression qui ne veut rien dire (Argot des voleurs). _N._ =TUNER=: Mendier. _Tuneur_: mendiant. Il est pourtant rare qu’on donne une _tune_ à un mendiant. _Tuner_, c’est l’apocope du mot _importuner_ (Argot des voleurs). _N._ =TURBIN=: Tout travail, quel qu’il soit. _Turbiner_, c’est durement travailler. _Aller au turbin_, c’est aller à l’atelier. _Turbineur_: celui qui travaille. _Turbineur_: qui met en mouvement la _turbine_, de là, _turbin_, _turbiner_ (Argot du peuple). =TURNE=: _Poussier_, _taudis_, logement malpropre et insalubre, sans air ni lumière. —Si tu restes éternellement dans ta _turne_, tu ne trouveras jamais rien à _briffer_. —Comment peux-tu rester dans une pareille _turne_! (Argot du peuple). =TU-TU=: Petit paquet de mousseline chargé de cacher ce que le maillot collant indique trop—pour le père la Pudeur—_alias_ M. Bérenger-Caton. La vieille chanson dit: ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ Son maillot en s’déchirant A laissé voir son... événement Ça d’vait la gêner su’ l’moment. Ça ne gêne pas la _Môme Fromage_ ni _Grille d’Egout_, moi non plus (Argot du peuple). =TU T’EN FERAIS MOURIR=: Réponse ironique à une question saugrenue. —Payes-tu à déjeuner? prêtez-moi cent francs; avance-moi mon mois; viens coucher avec moi? —_Tu t’en ferais mourir._ Mot à mot: Tu ne voudrais pas (Argot du peuple). _N._ =TUYAU=: Le gosier. Le _tuyau est bouché_, pas _mèche_ de _boulotter_ (Argot du peuple). =TUYAUX=: Renseignements confidentiels. Cette expression est en usage dans le monde qui fréquente les champs de courses. Un bookmaker qui a un cheval chargé de paris fait donner par un émissaire un faux _tuyau_ sur une rosse; les imbéciles s’empressent de prendre ce cheval, qui n’arrive jamais (Argot des bookmakers). _N._ =TUYAU DE POÊLE=: Chapeau haut de forme. Allusion juste, car il a la forme et la couleur d’un _tuyau_ (Argot du peuple). =TYPE=: Individu quelconque. —J’ai un _type_ qui me cramponne. _Avoir un bon type_,avoir un bon enfant qui se laisse faire (Argot des filles). _N._ =TYPOTE=: Femme employée depuis peu d’années dans les ateliers de composition. C’est un compagnon au même titre que les ouvriers typographes; néanmoins, quand les _typotes_ sont nombreuses, on se croirait plus volontiers dans une volière du Jardin d’Acclimatation que dans un atelier de composition. Généralement, la _typote_ est plus habile à soigner un pot-au-feu et à raccommoder ses bas qu’à _lever_ la lettre. Enfin, il est dit qu’il faut que la femme _lève_ quelque chose (Argot d’imprimerie). _N._ U =UN DE PLUS=: Homme qui a des malheurs conjugaux. Encore un de plus dans la grande confrérie. —Mon vieux, tu en fais _un de plus_. —Il vaut mieux être _cocu_ qu’aveugle; on peut voir ses confrères (Argot du peuple). =URFE=: Homme chic. —J’ai _levé_ un _miché_ qui est rien _urfe_. Une chose _urfe_ est une belle chose, supérieure (Argot des filles). _N._ =URGE=: Expression de convention entre les filles qui fréquentent les restaurants de nuit et certains bals, publics pour _coter_ un homme. Un homme qui ne donne que _trois urges_ est un _miché de carton_, celui qui donne _six urges_ est pour le moins un prince russe (Argot des filles). =URLE=: Parloir de prison. _L. L._ Ce n’est pas _urle_ qui est en usage, c’est _urloir_. En effet, les visiteurs sont forcés, à cause des grilles qui les séparent des détenus, de _hurler_ pour se faire entendre et converser (Argot des voleurs). =V.= _Parloir des singes_. _N._ =URSULE=: Vieille fille qui a doublé le cap de la cinquantaine et a par conséquent coiffé deux fois Ste-Catherine. Comme sa patronne _Ursule_, martyr à Cologne, elle est martyr d’une virginité rentrée et martyrise les autres par son caractère acariâtre (Argot du peuple). _N._ =UT=: Quand les compagnons typographes portent la santé d’un des leurs, ils disent: _ut_. _Ut tibi prosit_: que cela te profite (Argot d’imprimerie). V =VACHE=: Expression fréquemment employée dans le peuple pour qualifier une femme qui se livre au premier venu. Dans le peuple, quand on a dit d’une femme: c’est une _vache_, il est impossible de rien dire de plus. Quand un homme épouse une femme enceinte, on lui dit: —Tu prends la _vache et le veau_ (Argot du peuple). =VACHE=: Homme mou, bon à rien. _Vache_, quand il dénonce ses camarades ou travaille au rabais. —Tu n’es qu’un cochon, tu passes ta vie à faire des _vacheries_ (Argot du peuple). =VACHE=: Sergent de ville ou agent de la sûreté. Dans les prisons, malgré les règlements et la surveillance active pour les faire observer, les détenus écrivent leurs pensées sur les murs. Les plus communes sont celles-ci: —Mort aux _vaches_. —Quand je serai _désenflaqué_, gare à la _vache_ qui m’a fait _chouette_ et qui m’a fait tirer un _bouchon_ (Argot des voleurs). _N._ =VACHE À LAIT=: Homme riche, qui a le louis facile et que les _tapeurs_ trayent jusqu’à extinction. _Vache à lait_: gogo qui souscrit à toutes les émissions véreuses sans se lasser jamais. Pour le souteneur, la _marmite_ est une bonne _vache à lait_. Une affaire qui rend bien, qui rapporte beaucoup, sans risques et sans efforts, est une _vache à lait_. Allusion à la _vache laitière_ qui est une fortune inépuisable (Argot du peuple). =VACHER=: Individu grossier en paroles ou en gestes. —Il est grossier comme du pain d’orge, on dirait qu’il a été élevé derrière le cul des _vaches_. Allusion aux _vachers_ qui jurent toute la journée (Argot du peuple). =VACHERIES=: Saletés, cochonneries faites à quelqu’un. Prendre la femme d’un camarade et surtout la lui rendre, c’est une _vacherie_. Emprunter les effets d’un ami, les _coller_ chez ma _tante_ et ensuite _laver_ la reconnaissance, c’est lui faire une _vacherie_ (Argot du peuple). _N._ =VACHERIES=: On nomme ainsi les brasseries où les consommateurs sont servis par des femmes. Le mot est juste, car elles sont de véritables _vaches_, pas à _lait_, par exemple (Argot du peuple). _N._ =VADE=: Foule, rassemblement. Synonyme de _trépe_. Le camelot fait un _vade_ pendant que des complices _fabriquent_ les _profondes_ des badauds (Argot des voleurs). =VA CHERCHER UN DÉMÊLOIR=: Se dit de quelqu’un qui parle d’une façon embrouillée; on ne peut _démêler_ ce qu’il veut dire (Argot du peuple). =VA T’ASSEOIR SUR LE BOUCHON=: Quand un individu vous rase, on lui dit _d’aller s’asseoir_; s’il insiste, on l’envoie _s’asseoir sur le bouchon_ (Argot du peuple). =VA-TE-LAVER= (Un): Soufflet. On emploie aussi cette expression pour envoyer promener un gêneur (Argot du peuple). =VADROUILLE=: Cette expression dans la marine signifie: _brosse à plancher_. Elle s’applique aux filles qui traînent dans les ports de mer (Argot des souteneurs). =VADROUILLE=: Faire une _vadrouille_, en pousser une. _Vadrouiller_: se déranger de ses habitudes, rôder dans des milieux auxquels on n’est pas habitué (Argot du peuple). =VAGUE= (En pousser une): Synonyme d’_arracheur de chiendent_, aller au hasard, _vaguement_, avec l’intention de voler n’importe qui ou n’importe quoi (Argot des voleurs). =VAGUE=: Les filles qui raccrochent donnent un _coup de vague_, elles font leurs affaires. _Vaguer_, promener au hasard, est une corruption du mot français _vaquer_ (Argot des souteneurs). =VAISSELLE DE POCHE=: C’est une _vaisselle_ que les ouvriers aiment bien à _casser_, surtout les jours de _Sainte-Flemme_ (Argot du peuple). =VALADE=: La poche. —J’avais _caré_ deux _sigues_ dans une _valade_ de mon _falzar_, ma _scie_ les a dénichés, je vais _crapser_ de la pépie pendant tout le _marqué_ (Argot des voleurs). =VALANT=: Pince à usage des cambrioleurs (Argot des voleurs). =V.= _Monseigneur_. _N._ =VALSER=: Battre quelqu’un. —Je vais te faire _valser_ sans musique. Ce qui arrive souvent le samedi de paye, quand le mari rentre au logis plus qu’_éméché_: il fait faire un _tour de valse_ à sa ménagère si elle _ronchonne_ (Argot du peuple). =VALTREUSE=: Valise. C’est un simple changement de finale (Argot du peuple). =VALTREUSIER=: Voleur de valise. Ce vol est pratiqué sur une grande échelle dans les salles d’attente des gares de chemins de fer. Il est des plus simples: Le _valtreusier_ a une valise à la main qui paraît gonflée; pour compléter son apparence de voyageur, il porte une couverture de voyage. Il se promène ayant l’air indifférent, mais en réalité il guigne un voyageur assis à côté d’une valise respectable. Sans affectation, il s’assied à ses côtés et engage la conversation. Au moment de prendre un billet, le voyageur se dirige vers le guichet et laisse sa valise à la garde de son compagnon; aussitôt celui-ci se lève, change de valise et s’en va tranquillement. Neuf fois sur dix, le volé ne s’aperçoit de la substitution qu’à son arrivée à destination: la valise ne contient en fait de linge que des cailloux (Argot des voleurs). =VANNAGE=: Tendre un piège, _amorcer_ un individu par des promesses alléchantes pour le duper plus facilement. M. Loredan Larchey dit que c’est une comparaison de l’escroc au meunier qui lâche un peu d’eau de sa _vanne_ pour faire tourner le moulin (Argot des voleurs). =VANNE=: Mot cher aux camelots. Ils disent faire un _vanne_ lorsqu’ils vendent un journal qui annonce une fausse nouvelle à sensation (Argot des camelots). _N._ =VANNÉ=: Avoir trop fait la noce et l’amour. _Vanné_: n’avoir plus rien dans le ventre, synonyme de _vidé_. _Vanné_ par excès de travail (Argot du peuple). _N._ =VANTERNE=: Lanterne. _Vanterne sans loches._ _A. D._ M. Lorédan Larchey, d’après H. Monnier, dit que le _vanternier_, au lieu d’entrer par la _lourde_, préfère s’introduire par la _fenêtre_. _Vanterne_ n’a jamais été une _lanterne_, pas plus que _vanterne_ n’est une _fenêtre_. =V.= _Venterne_. =VASEUX=: Paysan. Il est _vaseux_ parce qu’il vit dans la _vase_ quand il pleut (Argot du peuple). _N._ =VEAU=: Toute jeune fille qui n’a pas grand chemin à faire pour devenir _vache_. Il existe à ce sujet une vieille chanson qu’il serait impossible de citer en entier: Un jour, à la barrière, Un veau, Un veau, Tortillant du derrière. Fort beau, Fort beau. Je la .... sur parole. Neuf jours plus tard, le camarade était au Midi (Argot du peuple). =VEAU=: Femme de barrière, rôdeuse de caserne (Argot des voyous). =VEINARD=: Homme qui a de la chance. Il a de la _veine_, tout lui réussi. Il a trouvé une bonne _veine_, tout lui réussira. Il existe un vieux proverbe à ce sujet: —Qui voit ses _veines_, voit ses _peines_ (Argot du peuple). _N._ =VEINARDE=: Fille qui a la main heureuse et tombe sur des _michés_ qui se _fendent_ généreusement (Argot des filles). =VÉLO=: Postillon. Vient de _véloce_, poste aux chevaux. Nos _vélocipédistes_ modernes qui portent une cravache et des éperons pour ressembler à quelqu’un, ignorent certainement ce vocable ancien (Argot des voleurs). =VÉLOCIPÉDISTE=: Imbécile à deux roues (Argot du peuple). =VENTERNE=: La fenêtre (Argot des voleurs). =VENTERNIER= (Le): Le _venternier_ est une variété du _cambrioleur_, avec cette différence toutefois qu’au lieu d’entrer par la _lourde_, il entre par la _venterne_. Le _venternier_ opère généralement dans les chambres situées aux étages supérieurs; il grimpe sur les toits et entre dans les chambres par les _fenêtres_ à tabatières. Ces voleurs sont nombreux (Argot des voleurs). =VENTOUSE=: =V.= _Venterne_. =VERGNE=: Pays ou ville. Vidocq dit: —J’ai roulé de _vergne_ en _vergne_ pour apprendre à _goupiner_. A. Delvau dit: —_Deux plombes crossent à la vergne_ (deux heures sonnent à la ville) (Argot des voleurs). =VER-RONGEUR=: Un fiacre. Lorsqu’on le fait attendre longtemps à la porte d’une maison, l’heure s’écoule; au moment de le payer, il _ronge_ le porte-monnaie (Argot du peuple). =VERMINE=: Avocat. Les voleurs ont raison, les avocats sont des _vermines_ qui rongent encore plus que les huissiers (Argot des voleurs). =VERTE= (La): L’absinthe. Quatre heures, c’est l’heure de la _verte_. Allusion de couleur (Argot du peuple). =VERVER=: Pleurer (Argot des voleurs). =VESSE=: Peur. Lâcher une _vesse_: péter sournoisement. _Vesser_: un pet mou (Argot du peuple). =VESSIE=: Femme avariée, grasse à lard. Allusion aux vessies de graisse que l’on vend à la foire au jambon. Il existe une chanson à ce sujet, elle n’est pas des plus propres. La voici comme document: Catau, catau, catau, _Vessie_, pourriture et charogne, Catau, catau, catau, _Vessie_, pourriture et chameau. (Argot du peuple). =VESTE=: Remporter une _veste_. Avoir compté sur un succès et faire un _four_ complet. Se dit d’une pièce mal accueillie au théâtre, d’une opération ratée, en un mot de tout insuccès (Argot du peuple). =VESTIGES=: Légumes que mangent les prisonniers. Dans le peuple, on dit d’un _passif_ qui pratique depuis longtemps: —Tu perds tes _légumes_. Dans les prisons: —Tu perds tes _vestiges_. Cette explication suffit (Argot des voleurs). =VEUVE= (La): La guillotine (Argot des voleurs). =VEUVE POIGNET= (En soirée chez la): =V.= _Bataille des Jésuites_. =VI=: Voici ce que dit _Mathurin Régnier_: Le _violet_ tant estimé Entre vos couleurs singulières. Vous ne l’avez jamais aimé Que pour les deux lettres premières. À la prison de St-Lazare, une fille atteinte d’une maladie épouvantable, était incarcérée à l’Infirmerie. La sœur l’exhortait à changer de vie; elle lui citait des exemples de conversions absolument édifiantes. La malade, impatientée, lui répondit: —Ma sœur, il est trop tard pour changer de vie, il fallait me dire cela quinze jours plutôt; je ne serais pas ici (Argot du peuple). _N._ =VIANDE=: Chair. A. Delvau trouve que cette expression est froissante pour l’orgueil humain. Pourquoi donc? Est-ce que la chair humaine n’est pas de la _viande_ au même titre que celle de n’importe quel animal? Quand une femme a une belle carnation, rose, fraîche, c’est un hommage que lui rend le langage populaire eu disant: —Ah! la _belle viande_, on en mangerait. C’est assez rare en cette _fin-de-siècle_, pour que ce mot soit accepté comme une louange et non comme une grossièreté (Argot du peuple). =VIAUPER=: Oublier fréquemment le chemin de l’atelier pour _viauper_ chez les marchands de vins. —Que fait ta fille? —Ah! ne m’en parle pas; elle _viaupe_ avec Pierre et Paul. Mot à mot: _viauper_ faire la vie. Faire la _vie_ à quelqu’un, c’est lui faire une scène désagréable. Lui rendre la _vie dure_, c’est le tourmenter, lui refuser à manger, être cruel (Argot du peuple). =VIDANGE=: Accouchement. —Ma femme est en _vidange_. Mot à mot: elle se _vide_. Elle est en _vidange_, car il faut qu’il se passe quelques semaines avant de la remplir à nouveau (Argot du peuple). _N._ =VICE= (En avoir): Roué qui la connaît dans les coins. —On ne me la fera pas, j’ai trop de _vice_. Cela est la cause d’un mauvais calembourg par à peu près: —Les serruriers sont les ouvriers les plus malins du monde, parce qu’ils ne manquent jamais de _vis_ (Argot du peuple). =VICELOT=: Gavroche qui a tous les _vices_ en germe; il est trop jeune pour qu’ils soient développés. Dans les ateliers, on dit du _gosse_: —Il est si _vicelot_ qu’il en remontrerait à père et mère (Argot du peuple). =VICTOIRE=: Chemise. Ce mot n’est pas employé, comme le dit A. Delvau, pour consacrer le souvenir d’une marchande qui fournissait les chiffonniers. —_Victoire!_ J’ai enfin pu gagner de quoi m’acheter une _limace_ pour _balancer_ celle que je porte depuis six mois (Argot des chiffonniers). =VIDER SA POCHE À FIEL=: Soulager son cœur, dire tout ce que l’on pense sans ménager ses expressions (Argot du peuple). _N._ =VIDER SON PANIER À CROTTES=: Satisfaire un besoin. Il est aussi agréable de vider son panier que de l’emplir (Argot du peuple). =VIDER SON PETIT PORTEUR D’EAU=: Expression employée dans les couvents par les jeunes filles, pour dire qu’elles ont un petit besoin à satisfaire (Argot du peuple). _N._ =VIDER UN HOMME=: Il y a plusieurs manières de le _vider_. On lui _vide_ son porte-monnaie. Ou le _vide_ en le surmenant. Une maîtresse amoureuse le _vide_, et quand il rentre au domicile conjugal, sa femme peut le fouiller... et elle aussi (Argot du peuple). _N._ =VIDOURSER=: Terme employé dans les ateliers pour qualifier un peintre qui ne se préoccupe, en peignant son tableau, ni du ton ni de la perspective. Il le _vidourse_, il le _lime_, il le _lèche_. Allusion à la fameuse expression: Il est _poli_ comme un _vi d’ours_. De là: _vidourser_ (Argot des artistes). _N._ =VIE DE PATACHON=: Mettre les petits plats dans les grands. —Mener la vie à grandes guides. Faire une _vie de bâtons de chaises_. Mot à mot: faire _une vie de chien_, comme si la vie n’avait pas de lendemain (Argot du peuple). _N._ =VIE DE POLICHINELLE= (Faire une): Avoir une conduite déréglée, se saouler, courir la gueuse, se battre; en un mot, mener une vie désordonnée. On sait que le _polichinelle_ du guignol lyonnais est le type parfait du _bambocheur_ (Argot du peuple). _N._ =VIEILLE PEAU=: Expression méprisante employée dans le peuple, même vis-à-vis d’une personne jeune. On dit d’un vieillard qui se donne des allures juvéniles: —C’est un jeune homme dans une _vieille peau_. _Vieille peau_ signifie aussi: _vieille putain_ (Argot du peuple). =VIGNES= (Être dans les _vignes_ du Seigneur): Être pochard. Dans le peuple, on dit d’un homme qui est toujours entre deux vins: —Il ne peut plus boire; il est saoul avec un pet de vigneron. L’expression: être dans les _vignes_, est très vieille et usitée en Bourgogne (Argot du peuple). =VILAIN MERLE=: Homme laid. —Tu vas te marier avec ce _vilain merle-là_; tu pourras chanter au roi des oiseaux: tu auras un beau _merle au cul_. _Vilain merle_: méchant homme, _bilieux_, _fielleux_, qui veut du mal à tout le monde (Argot du peuple). =VINASSE=: Mauvais vin fabriqué avec du bois de campêche. Se dit communément quand le marchand de vin a eu la main trop lourde pour mouiller le vin (Argot du peuple). =VINGT-DEUX=: Couteau. _Jouer la vingt-deux_, donner des coups de couteau. _Vingt-deux_: les deux cocottes. _Vingt-deux_: quand le compagnon placé le plus près de la porte voit entrer le prote dans l’atelier de composition, il crie: —_Vingt-deux!_ Synonyme d’attention. Quand c’est le patron, il crie: —_Quarante-quatre!_ En raison de l’importance du _singe_, le chiffre est doublé (Argot d’imprimerie). _N._ =VIOCH=: Vieillard. Vieux galantin qui se croit toujours jeune, qui se maquille comme une vieille roue de carrosse pour faire croire que le bon Dieu l’a oublié et qu’il n’a pas neigé sur sa chevelure... quand il a des cheveux (Argot des filles). _N._ =VIOCHARD=: Fauteuil. Allusion au _fauteuil_ dans lequel s’accroupissent les vieillards devant un bon feu, en attendant que la _carline_ vienne frapper à la porte (Argot des voleurs). _N._ =VIOLON=: Cellule du poste de police. Vieux jeu de mots qui date du temps où c’était l’_archer_ qui vous conduisait au _violon_ (Argot du peuple). =VIOLON= (Le sentir): Un individu sans le sou, sans domicile, vagabond, _sent le violon_ (Argot du peuple). =VIRGULE=: Béranger explique ce mot: Ah! prions Dieu pour ceux qui n’en ont _guère_, Ah! prions Dieu pour ceux qui n’en ont _pas_. _Virgule_: allusion à la forme; ce n’est ni _guère_, ni _pas_, c’est un _peu_, comme on dit dans le peuple: —Pas de quoi faire déjeuner le chat. (Argot du peuple). _N._ =VIRGULE=: Dans presque tous les lieux d’aisances des maisons populeuses et des ateliers, il y a au mur des _virgules_ qui sont autant de signatures des cochons qui y passent. Ce qui a inspiré à un rimeur d’occasion: Vous qui venez ici soulager vos entrailles, Léchez plutôt vos doigts que de salir les murailles. (Argot du peuple). _N._ =VIS=: Serrer la vis à quelqu’un, c’est l’étrangler. Opération qui n’a rien d’agréable à subir au point de vue physique. Au point de vue moral non plus, car serrer la _vis_ à un individu, c’est l’étrangler au point de vue de l’existence. Être dur, injuste, ne rien jamais trouver de bien de ce que fait un individu, c’est lui serrer la _vis_ (Argot du peuple). =VISAGE SANS NEZ=: Le derrière. C’est un visage qui n’est pas désagréable à voir, surtout lorsqu’il est blanc, jeune, dodu et ferme. Voiture était de cet avis: . . . . Ce visage gracieux Qui peut faire pâlir le nôtre, Contre moi n’ayant point d’appas, Vous m’en avez fait voir un autre Duquel je ne me gardois pas. Ce visage a l’avantage sur l’autre de ne pas faire de grimaces (Argot du peuple). =VISAGE DE BOIS=: Se casser le nez contre une porte fermée. Éprouver une déception à laquelle on ne s’attendait pas. Aller dîner on ville et ne trouver personne: _visage de bois_. On dit également: _rester en figure_ (Argot du peuple). =VISCOPE=: Casquette à longue visière, comme en portent les gens faibles de la vue. Un képi de troupier se nomme également une _viscope_. On dit aussi un _abat-jour_ (Argot du peuple). =VISE AU TRÈFLE=: Infirmier. L’allusion est amusante (Argot du peuple). =VITELOTTE=: Nez. Quand un individu a bu beaucoup dans sa vie, son nez devient rouge et tuberculeux. Allusion à la pomme de terre que l’on nomme _vitelotte_, ou plutôt que l’on nommait, car elle a disparu entièrement, au grand désespoir des amateurs de gibelotte. Elle était la sauce du lapin (Argot du peuple). _N._ =VITRES=: Les yeux. _Vitre_: le lorgnon; il aide à voir (Argot du peuple). =VITRIERS=: Les chasseurs de Vincennes.—Ils portèrent d’abord des sacs en cuir verni reluisant au soleil comme la pièce de verre que les _vitriers_ portent sur leur dos. _L. L._ Ce n’est pas cette cause qui a donné à ces soldats le nom de _vitriers_. En 1848, aux journées de Juin, les gardes mobiles et les chasseurs de Vincennes furent lancés aux endroits les plus périlleux dans les faubourgs, notamment faubourg du Temple. Ils prirent toutes les barricades avec un entrain extraordinaire, mais sans cruauté inutile, la plupart de ces soldats étant des enfants de Paris. Au lieu de tirer sur les insurgés, ils s’amusèrent à casser les carreaux sur tout leur passage. Depuis le boulevard du Temple jusqu’à la Courtille, il ne resta pas une seule vitre aux fenêtres. On fit une chanson à ce sujet; elle est restée très populaire: Encore un carreau d’ cassé, V’là l’vitrier qui passe. Encore un carreau d’ cassé, V’là vitrier passé. (Argot du peuple). _N._ =VOILÀ LE MARCHAND DE SABLE=: Dans le peuple, quand un enfant s’endort à table, on dit: —Voilà le _marchand de sable qui passe_ (Argot du peuple). =VOIR LA LUNE=: Quand une femme a vu cet astre, sa fleur d’oranger n’existe plus. On dit, et c’est plus juste: —Elle a vu la _comète_. Inutile d’insister (Argot du peuple). =VOIR LES PISSENLITS POUSSER PAR LA RACINE=: Être sous terre. Dans le peuple, on dit également: Aller dans le _royaume des taupes_ (Argot du peuple). =VOIR LA FEUILLE À L’ENVERS=: Pour la voir, il ne faut certes pas être sur le ventre. Il existe plusieurs chansons qui célèbrent les joies de _voir la feuille à l’envers_: Sitôt, par un doux badinage, Il la jeta sur le gazon. —Ne fais pas, dit-il, la sauvage, Jouis de la belle saison. Pour toi, le tendre amour m’engage, Et pour toi je porte ses fers. Ne faut-il pas, dans le jeune âge, Voir un peu _la feuille à l’envers_? (Restif de la Bretonne, _Les Jolies Crieuses_.) Un autre auteur a écrit sur le même sujet: ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ Oh! la drôle de chanson Que chantaient Blaise et Toinon. (Argot du peuple). =VOIR SOPHIE=: Cette très désagréable _Sophie_ ne rend visite aux femmes qu’à chaque fin de mois. Elle vient sans être annoncée (Argot des filles). =VOLANT=: Manteau. Allusion à ce qu’il _vole_ à tous les vents (Argot des voleurs). =VOLÉ=: Trompé dans ses espérances. —Je comptais toucher un grosse somme, rien, je suis _volé_. —Je rencontre une femme qui me paraissait dodue, avoir de l’œil, de la dent, des seins et des mollets. Quand le soir, pour nous coucher elle se déshabille, elle met un œil de verre et son ratelier sur la table de nuit, elle retire sa _réchauffante_, des tétons en caoutchouc garnissaient son corset, elle portait dix gilets de flanelle et six paires de bas. Ce n’était plus qu’une planche, j’étais _volé_ (Argot du peuple). _N._ =VOLÉE= (En recevoir ou en donner une): Battre ou être battu. Recevoir une _volée de bois verts_: être fortement grondé. Être éreinté par un article de journal (Argot du peuple). =VOLEUR AU CROQUANT=: Voleur qui dévalise les paysans. Ce sont les _grinchisseurs de cambrousse_ (Argot des voleurs). =VOLIGE=: Femme d’une maigreur telle qu’il est impossible de la toucher sans se couper. Allusion à la planche nommée _volige_ qui est la plus mince connue en menuiserie (Argot du peuple). =VOUS N’AVEZ RIEN?= Dans le peuple on nomme ainsi les employés d’octroi qui inspectent les passants aux barrières, parce que leur phrase consacrée est celle-ci: —_Vous n’avez rien à déclarer?_ —Si, leur répond quelquefois un passant facétieux, je déclare que j’ai bien déjeuné (Argot du peuple). =VOUSAILLE=: Vous (Argot des voleurs). =VOYAGE= (Le): Les saltimbanques qui font le tour de France dans leur _roulotte voyagent_ constamment. On dit de ceux qui connaissent parfaitement leur topographie: —Ils se _connaissent en voyage_ (Argot des saltimbanques). =VOYAGEUR=: l’_engayeur_ qui _bat comtois_, qui fait le compère à la porte des baraques de lutteurs se nomme _le voyageur_ (Argot des saltimbanques). =VOYAGEURS=: Pou, puce, punaise ou morpion. Ces insectes désagréables _voyagent_ sur le corps du pauvre bougre qui en est affligé (Argot du peuple). =VOYEURS=: Il existe des _voyeurs_ pour hommes et pour femmes. Ce sont des trous imperceptibles pratiqués dans une tapisserie, qui permettent aux spectateurs de _voir_ sans être _vus_. Il y a des maisons de rendez-vous célèbres, où les blasés payent cinq louis pour repaître leurs yeux d’un spectacle ignoble, où toutes les lubricités les plus ordurières s’étalent (Argot des filles). _N._ =VOYOU=: Le _voyou_ n’est pas à comparer à l’ancien _titi_, au _gamin_, au _gavroche_. C’est une petite crapule qui a en lui les germes de toutes les passions, de tous les vices et de tous les crimes imaginables. Le _gamin de Paris_ est gouailleur, spirituel, courageux, susceptible de dévouement, il est flâneur, c’est vrai, mais sa flânerie est innocente. Le _voyou_ a un langage à part; comme le moineau franc, il a les instincts pillards, il est sans cœur, n’aime rien et convoite tout (Argot du peuple). =VOYOUTE=: La femelle du _voyou_; seulement, en plus, elle est putain à l’âge où l’on va encore à l’école. À douze ans, la _voyoute_ est déjà une _petite marmite_ qui gagne du _pognon_ à son _voyou-souteneur_ (Argot du peuple). =VRILLE=: Femme pour femme. Pourquoi _vrille_? Elle ne _perce_ rien (Argot des souteneurs). =VRILLEURS=: Les _vrilleurs_ sont des voleurs de nuit qui dévalisent les boutiques des bijoutiers. Ce vol nécessite une audace extraordinaire. Avec l’_avant-courrier_ (mèche), ils percent la devanture en tôle de plusieurs trous en carré; avec une scie fine introduite dans l’un des trous, ils scient la tôle et pratiquent une ouverture assez large pour y passer le bras. À l’aide d’un diamant, ils coupent la glace en carré également, pour que les débris ne fassent pas de bruit en tombant; préalablement, ils appliquent sur la partie coupée un fort tampon de mastic, après quoi, à l’aide d’une tringle d’acier, ils attirent à eux tous les bijoux qu’ils peuvent. Ils en est qui raflent tout un étalage en quelques minutes (Argot des voleurs). _N._ W =WAGON=: Chez certains marchands de vin, il y a des buveurs attitrés qui ont des verres qui contiennent une chopine et même un litre de vin. Celui qui ne l’avale pas d’un coup—pas le verre, le vin—perd la tournée. On nomme également ce verre un _omnibus_ (Argot du peuple). _N._ =WAGON=: Vieille femme, usée, avachie. Vieille raccrocheuse de bas étage. _Wagon_ de troisième classe, parce qu’il n’y en a pas de quatrième. On dit aussi _vieux compartiment_ (il y a dix places). On peut entrer chez elle avec une voiture à bras (Argot du peuple). =WATERLOO=: Quand une affaire ne réussit pas, qu’elle rate en un mot, celui qui l’a entreprise ou conçue éprouve une défaite. Allusion à la fameuse bataille du 18 juin 1815. Il en est qui se consolent facilement et s’écrient comme Cambronne, —Merde! (Argot du peuple). X =X=: Inconnu, secret; sert à désigner un polytechnicien, ou une personne qui a des dispositions pour les mathématiques: ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ Sur l’affreux chevalet des _x_ et des _y_ a dit Victor Hugo (Argot des gens de lettres). =X=: Ce mystérieux _X_ a fait parler de lui pendant six mois à propos de l’affaire du Panama. _X_, l’inconnu, c’est tout le monde et ce n’est personne (Argot du peuple). Y =Y ALLER DE SON VOYAGE=: Quand quelqu’un vous raconte une histoire à dormir debout et que l’on l’écoute attentivement, on _y va de son voyage_. _Y aller de son voyage_ est pris, dans le peuple, dans un sens tout différend: —...Ma femme _y va encore de son voyage_ (Argot du peuple). _N._ =Y TOMBERA DU BOUDIN GRILLÉ.= Vieille formule qui veut dire c’est impossible. Elle est due à Achille, un acteur du petit Lazzari. Un acteur du théâtre des Folies-Dramatiques se vantait d’avoir un talent énorme. —Quand il _dégottera_ Frédérick Lemaître, dit Achille, _y tombera du boudin grillé_. C’est-à-dire jamais (Argot du peuple). _N._ =YEUX SUR LE PLAT=: Quand un individu fait des _yeux blancs_, que la prunelle remonte dans l’orbite, on dit: il fait _des yeux sur le plat_. C’est un jeu de mots fort juste (Argot du peuple). =YOUPIN=: Juif. Cette expression depuis peu remplace dans le peuple celle de _youtre_. C’est le superlatif du mépris: —Tu n’es qu’un sale _youpin_ (Argot du peuple). =YOUTRE=: Juif. Dans le peuple on ne dit pas _youtre_, mais _youte_. Vient du mot allemand _jude_ (Argot du peuple). =V.= _Baptisé au sécateur_. _N._ =YOUTRERIE= (La): La Synagogue quand tous les juifs y sont réunis. _Youtrerie_ est synonyme de ladrerie, d’avarice, d’apreté. Ce mot peint bien les estimables rogneurs de pièces de six liards (Argot du peuple). Z =ZÉPHIR=: Quand un troupier indiscipliné est envoyé en Afrique, aux compagnies de discipline, pour casser des cailloux sur les routes, il devient, de par son incorporation, un _zéphir_. Quand il fait un vent doux, on dit: —Quel doux _zéphir_. Quand un malpropre lâche une _tubéreuse_, c’est un sale _zéphir_ pour celui qui est sous le vent (Argot du peuple). =ZEZETTE=: Une petite absinthe. Dans les cantines de lavoir, les blanchisseuses qui ne crachent pas dessus s’offrent à quatre heures une petite _zezette_ de trois sous (Argot des blanchisseuses). _N._ =ZIF=: Marchandises imaginaires qu’un commerçant fait figurer sur son catalogue pour avoir l’air d’être bien assorti (Argot des bourgeois). =ZIG= ou =ZIGUE=: Un homme est un bon ou un mauvais camarade. C’est un bon _zig_ ou un mauvais _zig_ (Argot du peuple). =ZIG À LA REBIFFE=: Voleur bon enfant qui revient au bout de quelques jours à la prison. Il _rebiffe_, il récidive (Argot des voleurs). =ZINC=: Argent monnayé. —J’ai du _zinc_ dans ma _profonde_, nous pouvons aller de l’avant (Argot du peuple). =ZINC=: Le comptoir du _mastroquet_. Allusion au plomb qui couvre le comptoir. Boire sur le _zinc_, c’est boire debout. —Viens-tu _licher_ un _glacis_ sur le _zinc_, j’ai dix _ronds d’affure_ (Argot du peuple). =ZINC= (Avoir du): On ne dit plus _chic_, à ce qu’il paraît. C’est rococo. C’est bourgeois. Et quand une femme a du genre et de l’élégance, on dit qu’elle a du _zinc_. _A. D._ Avoir du _zinc_ ne vient pas du tout de là. Les fonctionnaires, officiers de paix, commissaires de police et préfets portent des habits brodés d’argent; les préfets surtout en ont sur toutes les coutures; les jours de cérémonie, ils sortent leur _zinc_. —As-tu vu le _dabe des renifleurs_, _mince_ de _zinc_ sur le _rable_ (Argot du peuple). _N._ =ZINC DES RATICHONS=: L’autel du prêtre. En effet, pour célébrer la messe, il boit un coup de _pive_ (Argot des voleurs). =ZIOTER=: Regarder. —Qu’a-t-il donc, le _mec_? Il ne fait que me _zioter_ (Argot du peuple). _N._ =ZOZOTTE=: Argent. —Pas moyen de trimballer ma bidoche, j’ai pas de _zozotte_. _Zozotte_ a aussi une autre signification dans le même argot: —As-tu bien passé la première nuit de tes noces? —Mon cochon était tellement _poivre_ qu’il a _pioncé_ comme une marmotte toute la nuit. —Alors, pas de _zozotte_? (Argot des blanchisseuses). _N._ =ZUT=: C’est fini, je prends congé. J’en ai assez. Que mes lecteurs ne prennent pas ce mot dans un mauvais sens. Je voudrais qu’ils le traduisent de cette manière: —Au revoir! PETIT SUPPLÉMENT Au fur et à mesure de la composition du dictionnaire, de nouvelles expressions m’ont été adressées par d’aimables correspondants, il a été impossible de les placer à leur lettre respective; pour être aussi complet que possible, on les trouvera par lettre alphabétique dans ce _Petit Supplément_, où le lecteur pourra facilement se reconnaître. A =ACŒURER=: Y aller de _bon cœur_. Assommer un individu, l’accommoder à la _sauce pavé_, le frapper avec entrain (Argot des voleurs). =ACHETOIRES=: Monnaie. Cette expression est très usitée dans le peuple. Le père ne travaille pas, tout est au mont-de-piété, pas de feu dans le poêle, l’enfant pleure: —Maman, maman, j’ai froid, j’ai faim. —Mon pauvre petit, je n’ai pas d’_achetoires_ (Argot du peuple). =ACCESSOIRES=: Objets de théâtre. Dans le peuple, on donne à ce mot un tout autre sens: _accessoires_, les testicules (Argot du peuple). _N._ =AFFAIRE=: Pour les voleurs, tous genres de vols sont des _affaires_ (Argot des voleurs). =AFFE=: La vie. Les voleurs _vivant_ dans des transes continuelles, comme le mourant, ils ont des _affres_. _Affres_ en français signifie _angoisses_ (Argot des voleurs). =V.= _Affe_ (_Dict._). =AGACER UN POLICHINELLE SUR LE ZINC=: On nomme _polichinelle_ un verre d’eau-de-vie, environ un cinquième de litre, que certains pochards abrutis boivent sur le _zinc_. Il en est qui _agacent_ jusqu’à cinq _polichinelles_ dans une matinée (Argot du peuple). _N._ =APPUYER=: Abaisser un décor, le faire descendre des frises sur la scène. _A. D._ _Appuyer_ est pris dans un autre sens: —Je vais m’_appuyer_ six heures de chemin. —Je vais m’_appuyer_ ce vieux _birbe_ sur l’estomac, quelle corvée! —Je vais m’_appuyer_ une chopine (Argot du peuple). _N._ =ARTONNER=: Tromper la police. C’est l’insaisissable _Arton_ à qui revient l’honneur de ce mot. —Depuis six _marqués, j’artonne l’arnaque_ (Argot des voleurs). _N._ =AVOIR LE FIL=: Un couteau qui coupe bien a le _fil_. Un individu malin, rusé, possède le _fil_. —Y a pas moyen de lui mettre à ce _gonce_ là, il a le _fil_. _Avoir le fil_, être au courant de toutes choses et être constamment en éveil (Argot du peuple). _N._ =AVOIR L’ÉTRENNE=: S’offrir une chose neuve. Elle me dit: Mon vieux, Pâme-toi si tu veux, Tu n’en auras pas l’_étrenne_. _Faire étrenner_ un camarade: lui flanquer une bonne volée (Argot du peuple). _N._ =AVOIR MANGÉ SES PIEDS=: Puer de la bouche (Argot du peuple). B =BAISSER UNE ESPACE QUI LÈVE=: Dans les ateliers de typographie, quand un camarade envoie chercher un litre par l’apprenti, il le met sous son _rang_—le prote n’aime pas que l’on boive pendant le travail;—il verse une rasade, et fait dire au copain qu’il veut régaler: —Viens donc _baisser une espace qui lève_. Synonyme de _lever le coude_ (Argot d’imprimerie). _N._ =BALAYÉ=: On _balaye_ une foule à coups de canon. On _balaye_ des ouvriers qui ne font pas l’affaire du patron. On _balaye_ la femme quand elle devient par trop gênante. _Balayé_: synonyme de _nettoyage_ (Argot du peuple). _N._ =BARBE À POUX=: _Barbe_ de capucin, _barbe_ en broussaille, longue, sale et crasseuse, dans laquelle jamais le peigne ne pénètre; les _poux_ peuvent y nicher à l’aise sans crainte d’être dérangés (Argot du peuple). _N._ =BAROMÈTRE=: La médaille des députés. Pour le coiffeur ou l’ouvrier chapelier qui quitte son rasoir ou balance son tablier par un caprice du suffrage universel, la _médaille_ qu’il a dans sa poche marque le beau fixe pendant quatre ans. Elle est pour lui le _baromètre_ du bonheur (Argot du peuple). _N._ =BATTRE LA BRELOQUE=: Les _tapins_, au régiment, _battent la breloque_ pour annoncer l’heure de la soupe. Une pendule détraquée qui marche comme les montres marseillaises, lesquelles abattent l’heure en quarante-cinq minutes, _bat la breloque_. Avoir le _coco fêlé_, ne plus savoir ce que l’on fait, avoir des moments d’absence, c’est _battre la breloque_. On dit également: _battre la campagne_ (Argot du peuple). =BÉRENGÉRISME=: En être atteint, c’est une maladie bien désagréable. Le _Père la Pudeur_ qui fonctionne au bal de l’Élysée-Montmartre _bérengérise_ les danseuses qui lèvent la jambe à hauteur de l’œil, sans pantalon: —Veux-tu cacher ton prospectus? dit le vieil empêcheur de danser en rond. —Ça m’est recommandé par mon médecin de lui faire prendre l’air, répond la _Môme Cervelas_ (Argot du peuple). N. =BÉQUET=: Le _passiffleur_ met des _béquets_, des pièces, aux vieux souliers; il en existe qui arrivent à une perfection si grande qu’il est impossible de découvrir la pièce (Argot du peuple). =BÉQUET=: Terme d’imprimerie. Petits paquets de composition pour _ajouter_ ou _compléter_ un grand paquet. En corrigeant un article, on ajoute des _petits béquets_ à droite et à gauche pour le corser (Argot d’imprimerie). =BIBARDER=: Vieillir. —C’est extraordinaire comme les chagrins te font _bibarder_. _Bibarder_ veut aussi dire boire. —_Bibardons_-nous une tasse? (Argot du peuple). =BIEN DE LA MAISON= (Es-tu): Expression employée au jeu de _manille_. Dans la partie à quatre, les joueurs sont deux à deux; ils se questionnent à voix haute pour savoir comment diriger leur jeu: —_Es-tu bien de la maison?_ As-tu beaucoup d’atout? (Argot du peuple). _N._ =BINAISE=: Abréviation du mot _combinaison_. _Binaise_: tirer un plan pour faire quelque chose. —Faisons une _binaise_ pour nous offrir un _kilo_ (Argot d’imprimerie). _N._ =BŒUF= (Avoir un mâle): Être fort en colère. Superlatif de _bouffer son bœuf_ (Argot d’imprimerie). =BOUCHON=: Bourse. Allusion à l’argent qu’elle contient, qui sert à _boucher_ des trous. Pour payer une dette, on dit: _boucher un trou_ (Argot du peuple). =BOUIF=: Mauvais ouvrier. On disait cela primitivement des ouvriers cordonniers, mais depuis, cette expression s’est étendue à tous les corps de métiers. Un mauvais écrivain ou un mauvais acteur, c’est un _bouif_ (Argot du peuple). =BOULANGER= (Le): Le diable (Argot des voleurs). =BOULANGER QUI MET LES ÂMES AU FOUR= (Le): Le diable qui fait cuire les gens en enfer (Argot des voleurs). =BOULE DE SUIF=: Homme ou femme gras à lard (Argot des voleurs). =BOULOTTER DE LA CALIJATTE=: Cette expression très pittoresque a une saveur toute particulière; elle est connue depuis peu. _Boulotter_: manger; _calijatte_: secret. Mot à mot: _manger du secret_. On sait que la cellule est la terreur du plus grand nombre des détenus, mais elle est un paradis relatif quand il n’est pas au _secret_. Être au _secret_ est un supplice épouvantable. On comprend que les plus endurcis voleurs redoutent cette torture; cela explique qu’ils sont parfois empêchés de commettre un acte criminel ou qu’ils avouent tout ce qu’on leur demande pour éviter de _boulotter de la calijatte_ pendant de longues semaines (Argot des voleurs). _N._ =BOUQUET=: Quand un _nourrisseur de poupard_ a bien préparé une affaire, et que le vol a été fructueux, il reçoit une prime de ses complices, quelquefois quarante pour cent; cela se nomme recevoir un _bouquet_ (Argot des voleurs). =BOURDON=: Quand le metteur en page ne s’aperçoit pas qu’un mot a été oublié en composant un article, ce dernier devient incompréhensible. S’il s’en aperçoit et qu’il faille remanier le paquet, c’est enlever le _bourdon_ (Argot d’imprimerie). =BRANCARD=: Un vieil adage dit que les femmes c’est comme les souliers: quand c’est vieux, ça boit. Toutes ne boivent pas; il en est qui, trop vieilles pour continuer leur profession, instruisent les jeunes et leur apprennent les secrets du métier. Mot à mot: _brancard_, aller _traîner_ les apprenties putains sur le _trimard_ (Argot des filles). =BRICOLE À CHEVEUX=: Le peigne ou l’épingle qui fixe le chignon d’une femme (Argot des voleurs). _N._ =BRISER=: S’en aller. —Mon vieux, il est l’heure de la _mouise_, je me la _brise_ au galop. Quand une commandite d’ouvriers compositeurs a achevé son travail, le metteur en page frappe sur sa casse avec un _taquoir_. Ce signal veut dire: c’est fini, _brisez_ (Argot d’imprimerie). =BRODEUSE=: Homme et femme à la fois. De la famille des pédérastes (Argot du peuple). =BRÛLER LA CHANDELLE PAR LES DEUX BOUTS=: Individu qui dépense sans compter, qui jette son argent par les fenêtres. —Tu _brûles la chandelle par les deux bouts_ (Argot du peuple). _N._ =BUSTINGUE=: Garni. Il en existe un célèbre dans la rue de Flandre, à la Villette. C’est là que descendent les saltimbanques et les phénomènes qui viennent se faire engager. On nomme _bustingue_ tous les garnis où logent les _ambulants_ (Argot des voleurs). C =ÇA NE VA QUE D’UNE FESSE=: Chose qui va mal. Besogne accomplie avec répugnance. Être très malade (Argot du peuple). _N._ =CABARET DES SIX-FESSES=: Auberge tenue par trois femmes (Argot du peuple). _N._ =CACHET DE LA RÉPUBLIQUE=: C’est un coup de pied canaille. Quand deux hommes se battent, le plus fort, d’un coup de talon, écrase la figure de son adversaire. Il lui _pose le cachet_ (Argot du peuple). =CAILLÉ=: Poisson quelle que soit sa nature. Il est _caillé_, il a des _écailles_ (Argot des voleurs). =CALLOT=: Teigneux. Vient de _calabre_, teigne (Argot des voleurs). =CAMBROU=: Domestique mâle. Il garde la _cambrouse_ (Argot des voleurs). =CAMELOTTE EN POGNE=: Voler un objet quelconque dans la main de quelqu’un (Argot des voleurs). =CANULE=: Petit instrument placé au bout d’une seringue, d’un irrigateur. _Canule_: Être ennuyeux. —Ah! lâche-nous, voilà une heure que tu nous _canules_ (Argot du peuple). =CANELLE=: La ville de Caen. —Il y a un _bath chopin_ à faire à _Canelle_, en es-tu? (Argot des voleurs). =CAPOU=: Écrivain public (Argot des voleurs). =CARCAN À STRAPONTIN=: Vieille fille publique. De _carcan_: vieux cheval (Argot des filles). =CARIBENER=: Vol à la care. Le voleur qui a cette spécialité se nomme un _caribeneur_ (Argot des voleurs). =CARLINE= (La): La mort. Ce mot est usité dans les bagnes pour désigner cette vilaine personne. Allusion au personnage de _Carlin_ dont le visage est couvert d’un masque noir (Argot des voleurs). =CARRELEUR DE SOULIERS=: Ouvrier lorrain qui vient tous les étés parcourir nos campagnes avec sa hotte sur le dos. Il raccommode les souliers. Ce nom lui vient de ce qu’il crie: _carreleur de souliers_. Ce à quoi les gamins répondent: —_Gare l’aut’ soulier!_ (Argot du peuple). =CAROTTE FILANDREUSE=: Carotte tirée de longueur, mais peu claire comme explications. Allusion à une vieille _carotte_ pleine de _filaments_, qui ne se digère pas facilement. —Ça ne prend pas, ta _carotte_ est _filandreuse_ (Argot du peuple). _N._ =CAZIN=: Partie de billard qui se joue avec une quille au milieu du tapis (Argot du peuple). _N._ =CAZINER=: Jouer au _cazin_, faire toucher par la bande les billes, en jouant avec la rouge (Argot du peuple). =CHAT= (Mon petit): Terme d’amitié employé souvent vis-à-vis d’une jeune fille. _Chat..._ (Argot du peuple). =V.= _Tâte-minette_. _N._ =CHATOUILLE= (Une): Une chansonnette. Vieux terme de goguette: —Allons, _dégoise_-nous ta petite _chatouille_ (Argot du peuple). _N._ =CHENAILLER=: Faire des reproches à quelqu’un. C’est une façon polie pour ne pas dire engueuler. —Je ne t’ai pourtant rien fait pour que tu soies toujours à me _chenailler_ (Argot du peuple). _N._ =CHÉQUARDS=: Les députés, ou, du moins, les Cent-Quatre à qui on reprocha si vivement d’avoir reçu des _chèques_ du baron de Reinach et du fameux Arton (Argot du peuple). _N._ =CHEVALIER DE LA ROSETTE=: Homme qui aime son sexe (Argot du peuple). _N._ =CHIFFARDE=: La pipe. —Pas _mèche_ de fumer ma _chiffarde_, pas de _saint-père_ (Argot du peuple). =CIBOULOT=: La tête. Perdre le _ciboulot_: perdre la tête. Se faire sauter le _ciboulot_: se brûler la cervelle. —Son _ciboulot_ est vidé (Argot du peuple). _N._ =CLAIR COMME DE L’EAU DE BOUDIN=: Affaire obscure, embrouillée. Mot à mot: affaire ténébreuse. Allusion à la noirceur de l’_eau_ qui sert aux charcutiers pour faire cuire le boudin (Argot du peuple). _N._ =COUP DOUBLE=: Deux jumeaux. Ce mot peut se passer d’explications (Argot du peuple). _N._ D =DARONNE DU DARDANT=: La déesse Vénus. _Daronne_, Mère; _dardant_, amour. Mot à mot: la _mère des amours_ (Argot des voleurs). =DARONNE DU GRAND AURE=: La Sainte Vierge. Je n’ai pu trouver nulle part la signification du mot _aure_ (Argot des voleurs). =DÉBRICABRAQUÉ=: Un _bric-à-brac_ monte sa boutique de _bric_ et de _broque_, _ric-à-rac_ (petit à petit). On construit une pièce avec différents morceaux, un _béquet_ par-ci, un _béquet_ par-là. Si elle ne plaît pas au directeur, il faut que l’auteur la _retape_, qu’il la _débricabraque_. Mot à mot: qu’il la démolisse pour la _rebricabraquer_ (Argot du peuple). _N._ =DÉCADENER=: Quand le gendarme ôte le _cabriolet_ d’un prisonnier, il le _décadène_. Mot à mot: il le _déchaîne_. On dit également _dédurailler_ (Argot des voleurs). =DÉFILER SON CHAPELET=: Quand deux commères se disputent, c’est un déluge de paroles et d’épithètes interminable. —As-tu vu comme je lui ai _défilé mon chapelet_? Allusion au _chapelet_ qu’une dévote fait tourner toute sa vie dans ses mains sans en trouver la fin (Argot du peuple). _N._ =DÉGUI=: Abréviation de _déguisement_ (Argot des voleurs). F =FAGOT AFFRANCHI=: Forçat libéré. Mot à mot: il est _affranchi_ de ses fers (Argot des voleurs). =FAGOT À PERTE DE VUE=: Condamné aux travaux forcés à perpétuité. Par abréviation on dit: _gerbé à perpète_ (Argot des voleurs). =FAIRE=: Les bouchers _font_ un animal à l’abattoir. _Faire_: tuer, voler. _Faire_ quelqu’un: le _lever_. _Faire_: synonyme de _fabriquer_ (Argot du peuple et des voleurs). =FAIRE LA TORTUE=: Ne rien manger. _Jeuner_ volontairement ou par la force des choses (Argot des voleurs). _N._ =FEMME DE CARÊME=: Femme outrageusement maigre. Un hareng saur en jupons (Argot du peuple). _N._ =FERME TA GUEULE OU JE SAUTE DEDANS=: On dit cela à un individu qui baille à se démantibuler la mâchoire, ou qui braille à vous assourdir (Argot du peuple). _N._ =FIN-DE-SIÈCLE=: Cette expression nouvelle veut dire bien des choses. Un chapeau excentrique est _fin-de-siècle_. Une chanteuse comme Yvette, une danseuse comme la _Goulue_, un livre ou une pièce où les expressions sont ce qu’il y a de plus réaliste, tout cela est _fin-de-siècle_ (Argots divers). _N._ =FLAMSIK=: Flamand. C’est une corruption du mot _flahut_ (Argot des voleurs). =FLANCHE=: Affaire. —Si tu veux, mon vieil _aminche_, nous avons un rude _flanche_ en vue? —Je le connais ton _flanche_ à la _manque_ (Argot des voleurs). =FLAQUET=: Le gousset du pantalon, ou la poche du gilet. C’est là généralement où on met son argent. _Flac_, _sac_ ou _argent_, de là _flaquet_ (Argot des voleurs). =FLEUR DE CONNERIE=: Suprême imbécile, crème de crétin. Mot à mot: le roi des _gaffeurs_ (Argot du peuple). _N._ =FLOUE=: La foule. Quand la foule est nombreuse, les voleurs peuvent travailler à leur aise (Argot des voleurs). =FONCÉE=: Une mariée est en _blanc_ le matin, le soir elle change de costume, les loustics disent qu’elle est en _foncée_ (Argot du peuple). _N._ =FONDANTS=: Des bonbons pustuleux qui suintent sans cesse. On dit: il a des _bonbons fondants_ (Argot du peuple). _N._ =FOUINARD=: Individu qui _fouine_ partout, qui fourre son nez dans les affaires des autres. _Fouinard_ date de la pièce de _Lesurques_; c’était l’acteur Alexandre qui jouait le rôle de ce personnage (Argot du peuple). =FOURLINE=: Vient de _fourloureur_. Ce mot signifie à la fois voleur et assassin (Argot des voleurs). =FRICOTEUR=: Agent d’affaires, synonyme de tripoteur. Au régiment, les troupiers qui _coupent_ aux exercices, aux corvées, en un mot au service, sont des _fricoteurs_ (Argot du peuple). H =HUILE DANS LA LAMPE= (N’avoir plus d’): Mourir. Allusion à la lampe qui s’_éteint_ faute d’huile (Argot du peuple). _N._ =HÔTEL-DIDEROT=: La prison de Mazas. On dit également _Mazas-les-Bains_ (Argot du peuple). _N._ M =MALHEUREUX= (Être): C’est l’état de pauvreté, en français. En typographie, cette expression a une autre signification. Dans une équipe, chacun, à tour de rôle, a son _tour de malheureux_, la liste en est affichée dans l’atelier de composition. Les _malheureux_ restent après les autres pour corriger, faire les _morasses_ et serrer les formes (Argot d’imprimerie). _N._ =MANCHE= (Avoir son): Être formidablement en colère. Un compositeur typographe qui a de la mauvaise copie (la mienne par exemple) qu’il ne peut lire, a _son manche_ contre l’auteur. Heureusement que ce n’est pas celui du balai. Synonyme d’avoir _sa chèvre_ (Argot d’imprimerie). _N._ =MESSIÈRES=: Victimes. Ce mot est très vieux; il a été employé par Eugène Suë, à propos du personnage du _Maître d’école_, à qui la _Chouette_ dit: —Ma vieille _fourline_, attention, v’là les _messières_ (Argot des voleurs). =MON LINGE EST LAVÉ=: Quand deux individus se battent, celui qui est vaincu dit qu’il _a son linge lavé_. Être arrêté a la même signification (Argot des voleurs). =MOULIN À CAFÉ=: Le tribunal correctionnel. Allusion à la vitesse avec laquelle les juges expédient les affaires. Les prévenus sont condamnés à la vapeur (Argot du palais). _N._ =MOUILLER SES BIBELOTS=: Pisser dans son pantalon (Argot du peuple). =MOTS À QUEUE=: C’est une plaisanterie d’atelier fort amusante. C’est un _homme de l’artichaud Colas_. On en a fait des à-peu-près tout aussi drôles sur les heures. Il est une heure, (_teneur_) de livres. Deux heures, (_deux sœurs_) de charité. Trois heures (_toiseur_) vérificateur. Quatre heures, (_cardeur_) de matelas. Cinq heures, (_zingueur_) plombier. Six heures, (_ciseleur_) sur métaux. Sept heures (_cette heure_) est la mienne. Huit heures, (_huîtres_) d’Ostende. Neuf heures, (_neveu_) de son oncle. Dix heures, (_diseur_) de bonne aventure. Onze heures, (_on se_) réunira à la maison mortuaire pour midi (Argot des ateliers). N =N’EN JETEZ PLUS, LA COUR EST PLEINE=: De 1848 à 1860, il exista un homme mystérieux qui chantait dans les cours; son élégance et sa distinction l’avait fait surnommer le _marquis_. Avec une voix très agréable, il chantait le répertoire de Désaugiers. Aussitôt qu’il arrivait, les sous commençaient à pleuvoir drus comme grêle, il s’arrêtait avant d’entamer une nouvelle chanson et criait: —_N’en jetez plus, la cour est pleine._ L’expression est restée comme synonyme de: _j’en ai assez_ (Argot du peuple). _N._ =NOIRE COMME LE CUL DU DIABLE=: Se dit d’une femme brune, presque moricaude. On dit également de quelqu’un qui a la conscience chargée de nombreux méfaits; —_Son âme est noire comme le cul du diable._ Se dit aussi d’une affaire embrouillée, dans laquelle personne ne voit goutte (Argot du peuple). P =PATTE DE VELOURS= (Faire): Avoir envie de dire des injures à quelqu’un et au contraire lui faire _risette_. Avoir envie d’_égratigner_ et au contraire _caresser_. Allusion au chat qui rentre ses griffes quand il est content: —Il fait _patte de velours_ (Argot du peuple). _N._ =PHILOSOPHES=: Des souliers. Ils sont bien forcés d’accepter le temps comme il est, boue ou neige, et le pied qui les chausse. On appelle également _philosophes_ des grecs qui opèrent seuls dans les cercles et dans les tripots. Le _philosophe d’allumage_ est celui qui prépare les _pontes_, qui en ce cas deviennent des _pantes_ (Argot du peuple). _N._ =PLUS DE GAZ DANS SON COMPTEUR=: Mourir. Le robinet de la vie est fermé, les yeux sont _éteints_ (Argot du peuple). _N._ =PUTAINS DES PAUVRES=: Les députés. Cette expression nouvelle n’est pas très polie pour les _Bidards_ du suffrage universel, si on s’en rapporte à la légende de Sainte-Thérèse. Seulement cela ne doit pas être pris dans le même sens, car si les députés sont putains ce n’est pas par charité (Argot au peuple). _N._ Q =QUENOTTES=: Les dents. —Fais voir, mon petit ami, les jolies _quenottes_ (Argot du peuple). S =SANGLIER=: Le prêtre. Pourquoi? Le prêtre n’a pourtant rien du _sanglier_, ni les allures, ni la rudesse, car il ne tient pas tête à ceux qui le combattent (Argot des voleurs). =SCIER SON ARMOIRE=: Quand le contrebassiste, dans un orchestre, fait sa partie, les voyous disent: —Il _scie son armoire_. Allusion de forme (Argot du peuple). _N._ =SE PAYER UN COUP DE VEUVE=: S’offrir une satisfaction personnelle solitairement. La _veuve_, c’est madame Poignet. Quand un assassin _lingre_ un _pante_, il s’offre un _coup de veuve_, seulement c’est _Charlot_ qui opère à sa place, et la satisfaction n’est pas synonyme de jouissance (Argot du peuple). _N._ =SI MA TANTE ÉTAIT UN HOMME.= Cette expression est employée communément dans le peuple pour exprimer l’absence de la virilité de la femme: —_Si ma tante en avait_ elle serait colonel dans la garde nationale (Argot du peuple). _N._ =STOPPER=: _Stopper_, arrêter. Le mécanicien arrête la machine, il _stoppe_. On dit à un orateur qui fait un discours maladroit: _stoppez_, dans le sens de taisez-vous. La science du tailleur a créé le _stoppeur_, celui qui reprise les accrocs aux vêtements. Il est regrettable que son aiguille habile ne puisse repriser les consciences, il aurait eu un rude ouvrage au Palais-Bourbon (Argot du peuple). =SUIF= (En recevoir un): Être fortement réprimandé par le patron. On dit également recevoir un _gras_: —J’ai perdu un tiers, ce que le _contre-coup_ m’a _graissé_, c’est un vrai _beurre_. Deux mots pour exprimer le même objet (Argot du peuple). =SURETTE=: Pomme. Allusion à l’acidité de ce fruit que l’on rencontre en Normandie sur les grandes routes (Argot des voleurs). =SYMBOLE= (Avoir un): Avoir un compte ouvert chez le mastroquet (Argot d’imprimerie). T =TABLEAU-RADIS=: Toile que le marchand n’a pu vendre. Quand il _revient_ à l’atelier, on dit: mon _tableau-radis_. On en dit autant d’un livre: un _livre-radis_. Allusion au _radis_ rose ou noir qui occasionne des _renvois_ (Argot d’atelier). =TAMBOUR=: Chien. Quand un étranger pénètre dans une maison, les aboiements réitérés du chien imitent le _roulement du tambour_. L’expression _alarmiste_, citée plus haut, est plus juste (Argot des voleurs). =TARTE=: Chose de mauvaise qualité. Les faux-monnayeurs sont des _mornifleurs-tarte_. Ils écoulent de _mauvais_ argent. Allusion aux _tartes_ faites avec de la vieille graisse et de la farine avariée que l’on vend dans les fêtes foraines (Argot des voleurs). _N._ =TENIR LA CHANDELLE=: Mari complaisant qui sait que sa femme le trompe et qui accepte ça très tranquillement. L’amant de cœur d’une fille entretenue. Ils _tiennent la chandelle_ (Argot du peuple). =TIRE-BOGUE=: Voleur à la tire qui a la spécialité de _faire les montres_ (Argot des voleurs). =TOILE D’EMBALLAGE=: Linceul. Cette expression est toujours en usage, malgré que dans les hôpitaux on n’ensevelisse plus les morts dans des _serpillières_ (Argot du peuple). =TROU AUX POMMES DE TERRE=: La bouche (Argot du peuple). V =VERTU NAUFRAGÉE=: Jeune fille qui ne pourrait plus être couronnée rosière, même laïque; sa _vertu a fait naufrage_ sur le gazon ou ailleurs (Argot du peuple). _N._ =VIDER LE PLANCHER=: S’en aller. —Mon p’tit, ça ne marche plus, tu vas _vider le plancher_ (Argot du peuple). =VIOLON=: Les serruriers, pour percer des petits trous, se servent d’un foret emmanché dans une bobine pour l’activer; ils ont une tige d’acier flexible, garnie d’un fil d’archal, ils appuient le pivot du foret sur une plaque de fer assujétie sur l’estomac; cette plaque se nomme _conscience_, la tige d’acier se nomme un _archet_. Par le va et vient du foret, l’ouvrier joue un air de _violon_ (Argot du peuple). _N._ =VOITURE À BRAS=: Vieille femme. Cette expression est employée pour dire qu’elle est une _vieille charrette_ qui a traîné la moitié du Paris masculin (Argot du peuple). =VOLE-AU-VENT=: Plume (Argot des voleurs). FIN _Au moment d’imprimer cette dernière feuille, il m’arrive une série d’expressions nouvelles qui seront, pour compléter ce volume, publiées en supplément, à part._ Imp. Lambert, Épinette et Cie, 231, rue Championnet.—Paris. _Du MÊME AUTEUR_ PARIS-DOCUMENTAIRE VOLUMES PARUS I. Paris-oublié. II. Paris-qui-s’efface. III. Paris-Canard. IV. Paris-Palette. V. Paris-Impur. VI. Paris-Cocu. VII. Paris-Police. VIII. Paris-Escarpé. IX. Paris-Boursicotier. X. Paris-Galant. XI. Paris-Médaillé. XII. Paris-Croque-Mort. VOLUMES À PARAÎTRE. Paris-la-Nuit. Paris-Ambulant. Paris-Dompteur. Paris-Mastroquet. Paris-Brasserie. Paris-Bastringue. Paris-Cabotin. Paris-Palais. Paris-Brocanteur. Paris-Gargantua. Paris-Canotier. Paris-Tripot. Paris-à-Table. Paris-Mendigo. Paris-Prison. Paris-Escrime. Paris-qui-s’éveille. Paris-Toqué. Paris-Musicien. Paris-Huissier. Paris-Étudiant. Paris-Domestique. Paris-Gavroche. Paris-Borgia. Paris-Badaud. Paris-Cafard. Paris-Portière. Paris-Bourgeois. VOLUMES DIVERS ÉPUISÉS La Commune de Paris. 1870-1871 Les Maisons comiques. Mémoires secrets de Troppmann. Les Virtuoses du Trottoir. Les Curiosités de Paris. Les Sauterelles rouges. Ces Dames du grand monde. Les Jeux et les Joueurs. =EN VENTE= TROTTOIRS & LUPANARS PARIS-IMPUR ┌────────────────────────────────────────────────────────────────────┐ │ Note de transcription: │ │ │ │ Les erreurs clairement introduites par le typographe ont été │ │ corrigées. │ │ │ │ L'orthographe et la ponctuation d'origine ont été conservées et │ │ n'ont pas été harmonisées. │ │ │ │ Les mots en italiques sont _soulignés_, ceux en caractères gras │ │ sont entourés =comme ceci=. │ │ │ │ L’accent circonflexe (^) dénote des caractères en exposant. │ │ │ │ Autres corrections: │ │ p. 46: Les chiffres 69 sont verticaux dans l’original. │ │ p. 60: elle se sauvent → elles se sauvent. │ │ p. 101: 50 010 → 50% │ │ p. 106: au point vue moral → au point de vue moral. │ │ p. 255: bach lier → bachelier. │ └────────────────────────────────────────────────────────────────────┘ *** END OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK DICTIONNAIRE D'ARGOT FIN-DE-SIÈCLE *** Updated editions will replace the previous one—the old editions will be renamed. Creating the works from print editions not protected by U.S. copyright law means that no one owns a United States copyright in these works, so the Foundation (and you!) can copy and distribute it in the United States without permission and without paying copyright royalties. Special rules, set forth in the General Terms of Use part of this license, apply to copying and distributing Project Gutenberg™ electronic works to protect the PROJECT GUTENBERG™ concept and trademark. Project Gutenberg is a registered trademark, and may not be used if you charge for an eBook, except by following the terms of the trademark license, including paying royalties for use of the Project Gutenberg trademark. If you do not charge anything for copies of this eBook, complying with the trademark license is very easy. You may use this eBook for nearly any purpose such as creation of derivative works, reports, performances and research. 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Except for the limited right of replacement or refund set forth in paragraph 1.F.3, this work is provided to you ‘AS-IS’, WITH NO OTHER WARRANTIES OF ANY KIND, EXPRESS OR IMPLIED, INCLUDING BUT NOT LIMITED TO WARRANTIES OF MERCHANTABILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE. 1.F.5. Some states do not allow disclaimers of certain implied warranties or the exclusion or limitation of certain types of damages. If any disclaimer or limitation set forth in this agreement violates the law of the state applicable to this agreement, the agreement shall be interpreted to make the maximum disclaimer or limitation permitted by the applicable state law. The invalidity or unenforceability of any provision of this agreement shall not void the remaining provisions. 1.F.6. 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It exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from people in all walks of life. Volunteers and financial support to provide volunteers with the assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg™’s goals and ensuring that the Project Gutenberg™ collection will remain freely available for generations to come. In 2001, the Project Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure and permanent future for Project Gutenberg™ and future generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4 and the Foundation information page at www.gutenberg.org. Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non-profit 501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal Revenue Service. The Foundation’s EIN or federal tax identification number is 64-6221541. Contributions to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by U.S. federal laws and your state’s laws. The Foundation’s business office is located at 809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact links and up to date contact information can be found at the Foundation’s website and official page at www.gutenberg.org/contact Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation Project Gutenberg™ depends upon and cannot survive without widespread public support and donations to carry out its mission of increasing the number of public domain and licensed works that can be freely distributed in machine-readable form accessible by the widest array of equipment including outdated equipment. Many small donations ($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt status with the IRS. The Foundation is committed to complying with the laws regulating charities and charitable donations in all 50 states of the United States. Compliance requirements are not uniform and it takes a considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up with these requirements. We do not solicit donations in locations where we have not received written confirmation of compliance. To SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any particular state visit www.gutenberg.org/donate. While we cannot and do not solicit contributions from states where we have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition against accepting unsolicited donations from donors in such states who approach us with offers to donate. 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